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27/01/2023 | FRANCE | N°21/00323

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale b salle 1, 27 janvier 2023, 21/00323


ARRÊT DU

27 janvier 2023







N° 48/23



N° RG 21/00323 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TO4Y





MLBR/AL*CK





























Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DUNKERQUE

en date du

26 Janvier 2021

(RG 18/00082 -section )



































GROSSE :



Aux avocats



le 27 janvier 2023



République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



Maître [K] [W]

en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL SODALIS

[Adresse 1]

[Localité 6]

représenté par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUA...

ARRÊT DU

27 janvier 2023

N° 48/23

N° RG 21/00323 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TO4Y

MLBR/AL*CK

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DUNKERQUE

en date du

26 Janvier 2021

(RG 18/00082 -section )

GROSSE :

Aux avocats

le 27 janvier 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

Maître [K] [W]

en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL SODALIS

[Adresse 1]

[Localité 6]

représenté par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI, assistée de Me Hugues SENLECQ, avocat au barreau de DUNKERQUE

INTIMÉS :

M. [X] [Z]

[Adresse 5]

[Localité 4]

représenté par Me MOUGEL, avocat au barreau de DUNKERQUE, substitué par Me David BROUWER, avocat au barreau de DUNKERQUE

UNEDIC DELEGATION AGS, CGEA DE [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Marie LE BRAS

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Alain MOUYSSET

: CONSEILLER

Patrick SENDRAL

: CONSEILLER

GREFFIER lors des débats : Valérie DOIZE

DÉBATS : à l'audience publique du 18 Octobre 2022

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 27 Janvier 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Marie LE BRAS, Président et par Annie LESIEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 27 septembre 2022

FAITS ET PROCÉDURE

La SARL SODALIS a pour activité l'accomplissement de travaux de tuyauterie industrielle, la maintenance et la réparation d'ouvrages métalliques dans le cadre de chantiers effectués en France ou à l'étranger.

Suivant contrat de travail à durée déterminée M. [X] [Z] a été embauché initialement par la SARL SODALIS le 13 octobre 2009 en qualité de monteur tuyauteur niveau 2, coefficient 190 de la convention collective de la métallurgie dunkerquoise, puis la relation de travail s'est poursuivie dans le cadre d'autres contrats à durée déterminée avant que le salarié ne bénéficie d'un contrat à durée indéterminée.

Le 17 juin 2014, la SARL SODALIS a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire et a bénéficié d'un plan de redressement par jugement du 18 novembre 2014.

Par jugement du 20 février 2018 rendu par le tribunal de commerce de Dunkerque, la liquidation judiciaire de la SARL Sodalis a été prononcée et la SELARL WRA prise en la personne de Me [W] a été désignée en qualité de liquidateur.

Le 5 mars 2018, les institutions représentatives du personnel ont été convoquées à une réunion extraordinaire et un plan de sauvegarde de l'emploi a été établi le même jour lequel a été homologué par la DIRECCTE le 8 mars 2018.

Le 21 février 2018, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Dunkerque, lequel par jugement contradictoire rendu le 26 janvier 2021 en sa formation de départage a':

-rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription soulevée par la société représentée par le mandataire liquidateur et par l'AGS,

-requalifié les relations contractuelles entre le salarié et la société en un contrat à durée indéterminée à compter du 13 octobre 2009,

-constaté l'absence de demande au titre d'une indemnité de requalification,

-fixé la créance de M. [X] [Z] dans la procédure collective ouverte à l'encontre de la SARL SODALIS à la somme de 9 000 euros à titre du rappel d'indemnités de grand déplacement

-déclaré le présent jugement opposable au CGEA de [Localité 3] qui sera tenu de garantir le paiement des sommes allouées à M . [Z] dans les limites légales et réglementaires de sa garantie résultant des dispositions des articles L 3253-17 et D 3253-5 du code du travail, à l'exclusion des sommes allouées sur le fondement des dépens et sous réserve de l'absence de fonds disponibles entre les mains du liquidateur,

-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

-rejeté toutes les autres demandes des parties plus amples ou contraires,

-condamné Me [W] ès-qualités aux entiers dépens.

Le 2 mars 2021, la SELARL WRA, représentée par Me [W] en sa qualité de liquidateur de la SARL Sodalis, a interjeté appel de ce jugement.

Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

Vu les conclusions déposées le 28 mai 2021 par Me [W] ès-qualités.

Vu les conclusions déposées le 6 juillet 2021 par M. [Z].

Vu les conclusions déposées le 23 août 2021 par l'Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 3].

Vu la clôture de la procédure au 27 septembre 2022.

SUR CE

De la prescription de la demande en requalification et d'une partie de la demande en rappel d'indemnités de grand déplacement

Le mandataire liquidateur de la société et l'AGS concluent à la réformation du jugement entrepris quant au rejet des fins de non-recevoir tirées de la prescription des deux demandes.

Après avoir rappelé que le point de départ du délai de prescription de l'action en requalification fondée sur le motif de recours au contrat à durée déterminée est le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats, le terme du dernier contrat, il convient de constater qu'en l'espèce le salarié se prévaut d'un terme du dernier contrat à durée déterminée erroné.

En effet il considère que tous les avenants concernent les contrats à durée déterminée, alors même qu'il a bénéficié par avenant du 24 juin 2011 d'une transformation du contrat de travail en un contrat à durée indéterminée, et que les avenants ayant suivi ne font pas, à la différence des précédents, référence à un contrat à durée déterminée.

Il apparaît ainsi que le dernier contrat à durée déterminée est arrivé à terme au mois de juin 2011, et qu'en saisissant le conseil de prud'hommes le 21 février 2018 le salarié n'a pas respecté le délai de deux ans impartis par l'article L.1471-1 du code du travail.

Si le salarié se prévaut d'une interruption de la prescription du fait de la saisine de la juridiction prud'homale le 11 août 2011, ayant été suivie d'une décision du retrait du rôle en date du 18 octobre 2011, pour autant le délai de prescription a recommencé à courir à la suite de cette interruption, de sorte que la prescription est à ce jour acquise.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que la demande en requalification est prescrite.

En ce qui concerne la prescription de la demande en rappel d'indemnités de grand déplacement, il apparaît que le conseil de prud'hommes s'est fondé pour apprécier le respect du délai imparti par l'article L. 3245-1 du code du travail sur une date de rupture du contrat de travail au 31 janvier 2018, alors même que licenciement du salarié est intervenu le 12 mars 2018.

Au regard de cette date du licenciement, de la date de saisine du conseil de prud'hommes et de la période de revendication du salarié en matière d'indemnité de grand déplacement qui débute au 31 janvier 2015, il apparaît qu'en application du délai imparti par l'article L. 3245-1 du code du travail, la demande du salarié est prescrite pour la période antérieure au 12 mars 2015.

Il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription, et de dire que la demande en requalification est prescrite et celle en demande de rappel d'indemnités de grand déplacement, l'est également pour la période antérieure au 12 mars 2015.

De la demande au titre des indemnités de grand déplacement

Le mandataire liquidateur conteste la décision du conseil de prud'hommes quant à l'octroi d'un rappel d'indemnités de grand déplacement en faisant valoir que l'accord du 26 février 1976 pris par avenant de la convention collective de la métallurgie de la région parisienne ne s'applique pas à la relation de travail, et qu'en toute hypothèse les indemnités de déplacement instaurées par le contrat de travail aboutissent à une indemnisation plus importante que celle à laquelle le salarié peut prétendre au regard des dispositions conventionnelles.

Il fait valoir à ce titre qu'il est tout à fait loisible aux parties dans le cadre d'un contrat de travail de stipuler en son sein des dispositions plus favorables que celles résultant d'une convention collective.

Toutefois les dispositions de l'accord du 26 février 1976 relatif aux conditions de déplacement dans le cadre de la convention collective de la métallurgie de la région parisienne s'appliquent à la relation de travail, dans la mesure où l'article 11 de l'avenant «'mensuels'» de la convention collective de la métallurgie de la région de [Localité 6] stipule que «'les conditions de déplacement des mensuels occupant des emplois non sédentaires sont réglées conformément aux dispositions prévues par l'accord national du 26 février 1976 relatif à ce sujet, qui leur sont applicables'».

Ce dernier accord en son article 1.5 précise que «'le grand déplacement est celui qui, en raison de l'éloignement et du temps de voyage, empêche le salarié de rejoindre chaque soir son point de départ. Est considéré comme tel le déplacement sur un lieu d'activité éloigné de plus de 50'km du point de départ et qui nécessite un temps normal de voyage aller-retour supérieur à 2h30 par moyen de transport en commun ou celui mis à sa disposition'».

L'article 3.5 de ce même accord prévoit que «'le salarié en grand déplacement perçoit une indemnité de séjour qui ne peut être confondue avec les salaires et appointements. Cette indemnité est versée pour tous les jours de la semaine, ouvrables ou non, d'exécution normale de la mission'».

Il en résulte que, selon cet accord, l'indemnité de grand déplacement a pour objet de compenser forfaitairement les frais supplémentaires engagés par le salarié en cas de grands déplacements et doit, par suite, être versée à celui-ci pour toute la durée du déplacement, samedis et dimanches inclus.

Si en vertu de l'article L. 2254-1 du code du travail la société peut se prévaloir de stipulations contractuelles plus favorables que celles d'une convention ou d'un accord, pour autant en l'espèce, la société, en excluant le paiement d'indemnités de grand déplacement pour une partie de la semaine, remet en cause le principe d'une indemnisation pour tous les jours de la semaine ouvrables ou non, tel qu'édicté par les dispositions conventionnelles.

Si les parties à un contrat de travail ont la faculté de procéder à une modification du montant des indemnités dues, voire de la répartition entre les différentes indemnités composant l'indemnité de séjour telle que ressortant de l'article 3.5 de la convention, en revanche elles ne peuvent pas instaurer une limitation de la période d'indemnisation, strictement définie par les dispositions conventionnelles.

Il apparaît ainsi que le salarié, indépendamment du montant des indemnités versées, a été, de par la mise en 'uvre des dispositions contractuelles, privé, en violation de celles de la convention collective, du versement des indemnités de grands déplacements auxquelles il pouvait prétendre les samedis et dimanches, de sorte que la société ne peut pas invoquer le principe de faveur.

Par ailleurs il convient de rappeler que la détermination du régime plus favorable doit s'apprécier globalement, avantage par avantage et pour l'ensemble du personnel.

En faisant référence à la somme globale versée au titre de l'indemnité de séjour, la société ne prend pas en compte, comme le relève le salarié, des indemnités pourtant en lien avec un grand déplacement, même si des conditions de durée peuvent être instaurées pour pouvoir en bénéficier.

Or la prise en compte de l'ensemble de ces indemnités mais aussi l'absence de versement d'indemnités certains jours de la semaine permet de constater que le système d'indemnités mis en place par le contrat de travail n'est pas plus favorable que celui ressortant des dispositions de la convention collective.

Il apparaît ainsi que même si l'on considérait que le défaut d'indemnisation les samedis et dimanches n'est pas exclusif d'une possibilité d'invocation du principe de faveur, il n'en demeurait pas moins que l'indemnisation contractuelle n'est pas plus favorable que celle prévue par la convention collective.

Il convient au regard de ces éléments de confirmer le jugement entrepris en ce qui concerne le principe de l'octroi d'un rappel d'indemnités mais de l'infirmer relativement à son montant, en limitant celui-ci à la somme de 8 625 euros.

De la demande en résiliation judiciaire

La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisferait point à son engagement.

Il appartient au salarié qui sollicite une telle résiliation de rapporter la preuve de manquements graves de l'employeur à ses obligations rendant impossible le maintien des relations contractuelles.

En l'espèce si l'employeur a manqué à ses obligations en matière de paiement des indemnités de grand déplacement, pour autant il avait mis en place un dispositif d'indemnisation au sujet duquel il n'est pas démontré que le salarié ait émis des réclamations et permis ainsi une régularisation de la situation, étant précisé qu'il a par le passé saisi la juridiction prud'homale pour d'autres chefs de demandes.

Par là même il n'apparaît pas que ce manquement ait rendu impossible la poursuite de la relation de travail, de sorte que la demande en résiliation judiciaire n'est pas fondée et que le jugement entrepris doit être confirmé de ce chef.

De l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure comme le sollicite ès-qualités le mandataire liquidateur.

Des dépens

Chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription des demandes, et quant au montant du rappel d'indemnités de grand déplacement,

Statuant à nouveau et ajoutant au jugement entrepris,

Déclare irrecevable la demande en requalification,

Déclare irrecevable la demande en rappel d'indemnités de grand déplacement pour la période antérieure au 12 mars 2015,

Fixe la créance de M. [X] [Z] dans la procédure collective de la société SODALIS à la somme de 8 625 euros qui sera inscrite sur l'état des créances déposées au greffe du commerce conformément aux dispositions de l'article L. 621-129 du code de commerce,

Précise que le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que tous intérêts de retard et majoration,

Dit la présente décision opposable à l'AGS et du CGEA de [Localité 3] dans les limites prévues aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,

Dit que l'obligation de l'AGS et du CGEA de [Localité 3] de faire l'avance les sommes ci-dessus énoncées ne pourra s'exécuter que sur présentation d' un relevé par le mandataire judiciaire,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

LE GREFFIER

Annie LESIEUR

LE PRESIDENT

Marie LE BRAS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale b salle 1
Numéro d'arrêt : 21/00323
Date de la décision : 27/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-27;21.00323 ?
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