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26/01/2023 | FRANCE | N°21/04246

France | France, Cour d'appel de Douai, Troisieme chambre, 26 janvier 2023, 21/04246


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



TROISIEME CHAMBRE



ARRÊT DU 26/01/2023



****





N° de MINUTE : 23/30

N° RG 21/04246 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TYXT



Jugement (N° 19/06701) rendu le 17 Juin 2021 par le tribunal judiciaire de Lille







APPELANTS



Monsieur [C] [P]

(intimé dans le RG 21/4960)

[Adresse 10]

[Localité 6]



Compagnie d'assurance GMF

(intimée dan

s le RG 21/4960)

[Adresse 2]

[Localité 9]



Représentés par Me Pierre Vandenbussche, avocat au barreau de Lille, avocat constitué



INTIMÉS



Madame [B] [D]

(appelante dans le RG 21/4960)

[Adresse 8]

[Localité 11]



M...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 26/01/2023

****

N° de MINUTE : 23/30

N° RG 21/04246 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TYXT

Jugement (N° 19/06701) rendu le 17 Juin 2021 par le tribunal judiciaire de Lille

APPELANTS

Monsieur [C] [P]

(intimé dans le RG 21/4960)

[Adresse 10]

[Localité 6]

Compagnie d'assurance GMF

(intimée dans le RG 21/4960)

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentés par Me Pierre Vandenbussche, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

INTIMÉS

Madame [B] [D]

(appelante dans le RG 21/4960)

[Adresse 8]

[Localité 11]

Monsieur [H] [R]

(appelant dans le RG 21/4960)

[Adresse 1]

[Localité 11]

Monsieur [I] [R]

(appelant dans le RG 21/4960)

[Adresse 8]

[Localité 11]

Madame [K] [R]

(appelante dans le RG 21/4960)

[Adresse 8]

[Localité 11]

Représentés par Me Marie hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistés de Me Danièle Bernard-Puech, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant

[Adresse 12] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Catherine Camus-Demailly, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assisté de Me Laurence Bondois, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant

Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 6] [Localité 13] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 6]

Défaillante, à qui la signification d'appel a été signifiée le 1er octobre 2021 à personne habilitée

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Guillaume Salomon, président de Chambre

Claire Bertin, conseiller

Yasmina Belkaid, conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Fabienne Dufossé

DÉBATS à l'audience publique du 17 novembre 2022 après rapport oral de l'affaire par

Claire Bertin

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 26 janvier 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé Par Guillaume Salomon, président, et Fabienne Dufossé, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 17 octobre 2022

****

EXPOSE DU LITIGE

1. Les faits et la procédure antérieure :

Mme [B] [D], née le [Date naissance 4] 1976, a été renversée le 3 juin 2008 à [Localité 11] par un véhicule automobile conduit par M.'[C] [P], assuré auprès de la société GMF (la GMF), alors qu'elle traversait un passage piéton.

Emmenée au service des urgences du centre hospitalier de [Localité 6], le diagnostic initial a mis en évidence un traumatisme crânien avec hématome frontal droit, des douleurs aux coudes, un traumatisme du bassin et des douleurs au niveau des chevilles.

Des douleurs telles que des céphalées et des douleurs faciales droites ont également persisté.

Sur la saisine préalable de Mme [D], le juge des référés a ordonné, le 29 juin 2010, une expertise médicale et a condamné in solidum M.'[P] et la GMF à verser à la victime une provision de 9'000 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel.

L'expert [J] a déposé son rapport le 17 juin 2011.

Par jugement du 18 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Lille, saisi préalablement par Mme [D], a notamment fait droit à sa demande de nouvelle mesure d'expertise médicale, condamné la GMF au paiement d'une indemnité provisionnelle complémentaire de 8'500 euros à Mme [D], et accordé des dommages et intérêts aux victimes indirectes en réparation de leur préjudice.

L'expert [Z] a rendu son rapport définitif le 20 septembre 2017.

Mme [D], M.'[H] [R], ainsi que leurs enfants, [I] et [K] [R], ont fait assigner la GMF, M.'[P], la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de [Localité 6]-[Localité 13] et le centre [F] [E], employeur de Mme [D], devant le tribunal de grande instance de Lille respectivement par actes du 1er, 6 et 28 août 2019 aux fins de liquidation de leurs préjudices.

2. Le jugement dont appel :

Par jugement rendu le 17 juin 2021, le tribunal judiciaire de Lille a :

1. condamné in solidum M.'[P] et la GMF à payer à Mme [D] les sommes suivantes en réparation de son préjudice corporel':

1.1 1'510,66 euros au titre des dépenses de santé actuelles ;

1.2 9'396,57 euros au titre des frais divers ;

1.3 10'853,21 euros au titre de l'assistance par tierce personne temporaire';

1.4 6'322,01 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels';

1.5 8'120 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire ;

1.6 8'000 euros au titre des souffrances endurées';

1.7 500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire';

1.8 286,20 euros au titre des dépenses de santé futures ;

1.9 109'118,38 euros au titre de l'assistance par tierce personne permanente ;

1.10 427'382,72 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs ;

1.11 50'000 euros au titre de l'incidence professionnelle ;

1.12 52'000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;

1.13 3'000 euros au titre du préjudice esthétique permanent ;

1.14 10'000 euros au titre du préjudice sexuel ;

2. dit que ces sommes seront versées sous déduction des provisions amiablement versées et judiciairement ordonnées, à hauteur de 38'500 euros';

3. condamné in solidum M.'[P] et la GMF à payer à M.'[H] [R] la somme de 6'000 euros en réparation de son préjudice d'affection';

4. condamné in solidum M.'[P] et la GMF à payer à [I] [R] et [K] [R], représentés par leurs parents M.'[R] et Mme [D], la somme de 9'000 euros chacun en réparation de leur préjudice d'affection';

5. ordonné la capitalisation des intérêts versés à Mme [D], M.'[H] [R], [I] et [K] [R] par année entière';

6. débouté Mme [D] de ses demandes au titre des frais de logement adapté, du préjudice d'agrément et du doublement de l'intérêt légal';

7. condamné in so1idum M.'[P] et la GMF à payer au centre [F] [E] la somme de 8'234,33 euros au titre des salaires et charges exposés pour la période de décembre 2009 à août 2010 après déduction des indemnités journalières ;

8. condamné la GMF à payer au centre [F] [E] la somme de 1'611,97 euros au titre des indemnités de précarité versées aux salariés employés pour le remplacement de Mme [D]';

9. débouté le centre [F] [E] de sa demande dirigée contre M.'[P] au titre des indemnités de précarité versées aux salariés employés pour le remplacement de Mme [D] ;

10. dit sans objet la demande du centre [F] [E] tendant à déclarer la présente décision commune à la CPAM de [Localité 6]-[Localité 13] ;

11. condamné in solidum M.'[P] et la GMF à payer à Mme [D] la somme de 12'800 euros au titre de ses frais irrépétibles ;

12. condamné in solidum M.'[P] et la GMF à payer au centre [F] [E] la somme de 1'500 euros au titre de ses frais irrépétibles';

13. condamné in solidum M.'[P] et la GMF aux dépens de l'instance incluant ceux de référé et les frais d'expertises judiciaires ;

14. ordonné l'exécution provisoire de la présente décision, dans la limite de la moitié des condamnations prononcées, provisions non déduites.

3. Les déclarations d'appel :

Par déclaration du 30 juillet 2021, M. [P] et la GMF ont formé appel, dans des conditions de forme et de délai non contestées, du jugement du 17 juin 2021 en toutes ses dispositions.

Par déclaration du 22 septembre 2021, Mme [D], M. [R], [I] et [K] [R], représentés par leurs représentants légaux, ont formé appel, dans des conditions de forme et de délai non contestées, dudit jugement en limitant leur contestation aux seuls chefs du dispositif numérotés 1.6, 1.11, et 6 ci-dessus, lesquels concernent l'évaluation de l'incidence professionnelle, des souffrances endurées, du préjudice d'agrément, et du doublement de l'intérêt au taux légal.

Par ordonnance du 23 juin 2022, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la jonction des procédures RG n°21-04960 et RG n°21-04246 sous le seul numéro RG n°21-04246.

4. Les prétentions et moyens des parties :

4.1 Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 14 septembre 2022, Mme [D], M.'[H] [R], M.'[I] [R], et [K] [R], représentée par ses représentants légaux, appelants à titre principal et incident, demandent à la cour, au visa de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985, des articles L.'124-3, L.'211-9, L.'211-9 du code des assurances, de :

'confirmer le jugement du 17 juin 2021 en ce qu'il a :

- condamné in solidum M.'[P] et la GMF à payer à Mme [D] les sommes suivantes :

'9'396,57 euros au titre des frais divers, sauf en ce qu'il n'a pas fait droit aux demandes relatives aux frais d'expertise et aux frais de cantine de M.'[I] [R] ;

'10'853,21 euros au titre de l'assistance par tierce personne temporaire ;

'8'120 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire ;

'427'382,72 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs ;

'3'000 euros au titre du préjudice esthétique permanent ;

'10'000 euros au titre du préjudice sexuel ;

- condamné in solidum M.'[P] et la GMF à payer :

'à M.'[H] [R] la somme de 6'000 euros en réparation de son préjudice d' affection ;

'à M.'[I] [R] la somme de 9 000 euros en réparation de son préjudice d'affection ;

'à [K] [R], représentée par ses parents, M.'[H] [R] et Mme [D], la somme de 9'000 euros en réparation de son préjudice d'affection ;

- ordonné la capitalisation des intérêts de Mme [D], M.'[H] [R], M.'[I] [R], et [K] [R] par année entière ;

- condamné in solidum M.'[P] et la GMF à payer à Mme [D] la somme de 12'800 euros au titre de ses frais irrépétibles ;

- condamné in solidum M.'[P] et la GMF aux dépens de l'instance, incluant ceux de référé et les frais d'expertises judiciaires ;

faire droit à leur appel principal et réformer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- accordé à Mme [D] les sommes suivantes :

'50'000 euros au titre de l'incidence professionnelle ;

'8'000 euros au titre des souffrances endurées ;

- débouté Mme [D] de sa demande au titre du préjudice d'agrément ;

- débouté Mme [D], M. [H] [R], M. [I] [R], [K] [R] représentée par ses représentants légaux de leurs demandes de condamnation de la GMF au titre du doublement des intérêts à compter du 3 février 2009 jusqu'au jour où la décision à intervenir deviendra définitive sur l'ensemble des indemnités allouées avant déduction des provisions versées et imputation de la créance des organismes sociaux ;

en conséquence, allouer à Mme [D] les sommes suivantes :

'150'000 euros au titre de l'incidence professionnelle ;

'30'000 euros au titre des souffrances endurées ;

'10'000 euros au titre du préjudice d'agrément ;

faire droit à leur appel incident formalisé dans le cadre de l'appel principal de la GMF et de M. [P] et réformer le jugement querellé en ce qu'il a':

- accordé à Mme [D] les sommes suivantes :

'1 510,66 euros au titre des dépenses de santé actuelles ;

'2'125,59 euros au titre des frais de médecin conseil ;

'6'322,01 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels ;

'286,20 euros au titre des dépenses de santé futures ;

'109'118,38 euros au titre de l'assistance permanente par une tierce personne ;

'500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ;

'52'000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;

- débouté Mme [D] de sa demande au titre des frais de cantine de [I] [R] ;

- débouté Mme [D] de sa demande au titre des frais de logement adapté ;

' en conséquence, allouer à Mme [D] les sommes suivantes :

'1'771,43 euros au titre des dépenses de santé actuelles ;

'4'881,86 euros au titre des frais de médecin conseil ;

'146,26 euros au titre des frais de cantine de M. [I] [R] ;

'8'259,21 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels ;

'3'895,36 euros au titre des dépenses de santé futures ;

'121'088,60 euros au titre de l'assistance permanente par une tierce personne ;

'2'591,35 euros au titre des frais de logement adapté ;

'2'000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ;

'60'000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;

- à titre subsidiaire, si la cour réforme le jugement en ce qu'il a accordé une tierce personne permanente à hauteur de 2 heures par semaine, ce poste de préjudice sera fixé à la somme de 60'547,48 euros ;

' statuant à nouveau, fixer le préjudice de Mme [D] comme suit :

Poste de préjudice

Montant en euros

Quote-part à la charge du responsable à hauteur de 100%

Part revenant à la victime

Solde revenant à la CPAM

Solde revenant à l'employeur

Préjudices patrimoniaux

Préjudices patrimoniaux avant consolidation

Dépenses de santé actuelles

4'354,21 €

4'354,21 €

1'771,43 €

2'582,78 €

Frais divers

22'040,17 €

22'040,17 €

22'040,17 €

0,00 €

Pertes de gains professionnels actuels

27'547,52 €

27'547,52 €

8259,21

9'442,01 €

9'846,30 €

Total

53'941,90 €

53'941,90 €

32 070,81 €

12'024,79 €

9'846,30 €

Préjudices patrimoniaux après consolidation

Dépenses de santé futures

8'791,50 €

8'791,50 €

3 895,36 €

4'896,14 €

Pertes de gains professionnels futurs

543'221,20 €

543'221,20€

427'382,72€

115'838,48 €

Incidence professionnelle

150'000,00 €

150'000,00 €

150'000,00 €

0,00 €

Frais de logement adapté

2'591,35 €

2'591,35 €

2'591,3,5 €

0,00 €

Assistance temporaire par une tierce personne

121088,6 €

121088,6 €

121088,6 €

0,00 €

Total

825'692,65 €

825692,65

704'958,03 €

120734,62

0,00 €

Total des préjudices patrimoniaux

879'634,55 €

879'634,55 €

737'028,84 €

132'759,41 €

9'846,30 €

Préjudices extra-patrimoniaux

Préjudices extra-patrimoniaux avant consolidation

Déficit fonctionnel temporaire

8'120,00

8'120,00 €

8'120,00 €

0,00 €

Souffrances endurées

30'000,00

30'000,00 €

30'000,00 €

0,00 €

Préjudice esthétique temporaire

2'000,00 €

2'000,00

2'000,00 €

0,00 €

Total

40'120,00 €

40'120,00 €

40'120,00 €

0,00 €

Préjudices extra-patrimoniaux après consolidation

Déficit fonctionnel permanent

60'000,00 €

60'000,00 €

60'000,00 €

0,00 €

Préjudice d'agrément

10'000,00 €

10'000,00 €

10'000,00 €

0,00 €

Préjudice esthétique permanent

3'000,00 €

3'000,00 €

3'000,00 €

0,00 €

Préjudice sexuel

10'000,00 €

10'000,00 €

10'000,00 €

0,00 €

Total

83'000,00 €

83'000,00 €

83'000,00 €

0,00 €

Total préjudices extra-patrimoniaux

123'120,00 €

123'120,00 €

123'120,00 €

0,00 €

Total

1'002'754,55 €

1'002'754,55€

860'148,84 €

132'759,41 €

9'846,30 €

- condamner in solidum M.'[P] et la GMF au paiement de la somme de 860'148,84 euros à Mme [D] en réparation de ses préjudices ;

- à titre subsidiaire, si la cour considère que l'aide à la parentalité ne doit pas être sollicitée par Mme [D], l'aide à la parentalité sera accordée à M. [I] [R] et à [K] [R], représentée par ses représentants légaux, pour la somme de 2'268 euros majorée de 10% pour les congés payés et les jours fériés, soit la somme de 2'494,80 euros, et la GMF condamnée à ce titre ;

' en tout état de cause,

- condamner la GMF au doublement des intérêts à compter du 3 février 2009 jusqu'au jour où la décision à intervenir deviendra définitive sur l'ensemble des indemnités allouées à Mme [D], M.'[H] [R], M.'[I] [R], et [K] [R], représentée par ses parents, avant déduction des provisions versées et imputation de la créance des organismes sociaux ;

- déclarer l'arrêt opposable à la CPAM et au centre [F] [E] ;

- condamner la GMF et M. [P] in solidum à payer la somme de 6'000 euros à Mme [D] au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

- les condamner en tous les frais et dépens d'appel.

A l'appui de leurs prétentions, Mme [D] et les consorts [R] font valoir que :

- leur préjudice s'apprécie dans sa consistance au jour de sa manifestation mais s'évalue au jour où le juge statue, de sorte que les dépenses et pertes de gains doivent être actualisées au jour de la décision en fonction de la dépréciation monétaire ;

- il y a lieu de retenir le barème de capitalisation publié dans la Gazette du palais du 15 septembre 2020 avec un taux d'intérêt de 0%, lequel est le plus adapté et le plus juste pour capitaliser les préjudices futurs.

4.2 Aux termes de leurs conclusions notifiées le 30 mai 2022, M. [P] et la GMF, appelants principaux, demandent à la cour, au visa de la loi n°85-577 du 5 juillet 1985, de :

- prononcer la jonction entre les instances enregistrées sous les numéros RG n°21-04960 et RG n°21-04246 ;

- réformer le jugement critiqué ;

- statuant à nouveau, liquider comme suit le préjudice corporel de Mme [D] :

Poste de préjudice

Part revenant à Mme [D]

Préjudices patrimoniaux temporaires

Dépenses de santé actuelles

227,20 €

Frais divers

12'524,98 €

Pertes de gains professionnels actuels

0,00 €

Préjudices extra-patrimoniaux temporaires

Déficit fonctionnel temporaire

8'120,00 €

Souffrances endurées

8'000,00 €

Préjudice esthétique temporaire

0,00 €

Préjudices patrimoniaux permanents

Dépenses de santé futures

0,00 €

Assistance permanente par une tierce personne

37'446,24 €

Frais divers

0,00 €

Pertes de gains professionnels futurs

0,00 €

Incidence professionnelle

50'000,00 €

Frais de logement adapté

0,00 €

Préjudices extra-patrimoniaux permanents

Déficit fonctionnel permanent

44'000,00 €

Préjudice esthétique permanent

2'000,00 €

Préjudice d'agrément

0,00 €

Préjudice sexuel

0,00 €

Préjudice d'établissement

0,00 €

- déduire des sommes ainsi allouées l'ensemble des provisions à hauteur de 20'000 euros déjà versées à Mme [D] ;

- débouter Mme [D] et les consorts [R] du surplus de leurs demandes ;

- statuer comme de droit sur les dépens.

A l'appui de leurs prétentions, M.'[P] et la GMF font valoir que :

- Mme [D] n'a cessé de critiquer les rapports d'expertise judiciaire du docteur [J], puis du docteur [Z].

- ils s'opposent au remboursement des honoraires du docteur [M] qui a réalisé une expertise unilatérale et non contradictoire à la seule initiative de Mme [D] ;

- l'indemnisation de la victime ne doit reposer que sur les rapports d'expertise judiciaire qui présentent des garanties suffisantes pour être retenus comme impartiaux et techniquement adaptés à la liquidation d'un préjudice corporel, alors que leur analyse ne révèle ni erreur ni omission dans l'appréciation des postes à indemniser ;

- faute de produire une attestation de son employeur récapitulant toutes les périodes de travail et les pertes de salaires subies en net, Mme [D], qui se trouvait en congé parental au moment de l'accident, ne justifie pas subir des pertes de gains professionnels actuels ;

- le choix du barème de capitalisation des pertes futures relève de l'appréciation souveraine du juge du fond ;

- ils proposent de retenir le barème de capitalisation de référence pour l'indemnisation des victimes (BCRIV) publié en 2018, lequel reflète les paramètres les plus récents et les plus objectifs propres à assurer la réparation intégrale des préjudices futurs des assurés.

4.3 Aux termes de ses conclusions notifiées le 27 décembre 2021 dans le dossier RG n°21-04246 et le 22 mars 2022 dans le dossier RG n°21-04960, le centre [F] [E], intimé, demande à la cour, au visa des articles 31, 542, 546, 558 du code de procédure civile, de :

- confirmer le jugement critiqué en ce qu'il a :

'condamné in solidum M.'[P] et la GMF à lui payer la somme de 8'234,33 euros au titre des salaires et charges exposés pour la période de décembre 2009 à août 2010 après déduction des indemnités journalières ;

'condamné la GMF à lui payer la somme de 1'611,97 euros au titre des indemnités de précarité versées aux salariés employés pour le remplacement de Mme [D]';

'condamné in solidum M.'[P] et la GMF à lui payer la somme de 1'500 euros au titre de ses frais irrépétibles'sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- y ajoutant, condamner conjointement et solidairement M.'[P] et la GMF à lui payer une somme de 2'000 euros en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens d'instance et d'appel.

A l'appui de ses prétentions, le centre [F] [E] fait valoir que :

- Mme [D] a repris auprès de lui son activité professionnelle d'assistante médicale dans le cadre d'un congé parental à temps partiel (50%) du 30 janvier au 31 octobre 2009, puis a été placée en arrêt de travail du 1er novembre 2009 au 4 août 2010 faute de pouvoir reprendre son travail à temps complet, et a retravaillé en temps partiel thérapeutique à compter du 5 août 2010 ;

- il a maintenu sa rémunération pendant son arrêt maladie, puis a dû procéder à son remplacement total pendant l'arrêt maladie, puis partiel pendant le temps partiel thérapeutique ;

- il a sollicité le remboursement de son préjudice à hauteur de 8 234,33 euros au titre des salaires et charges versés pour la période de décembre 2009 à août 2010 sous déduction des indemnités journalières, et à hauteur de 1'611,97 euros au titre de l'indemnité de précarité versée aux salariés employés en contrat à durée déterminée pour le remplacement total puis partiel de Mme [D] ;

- ni l'assureur ni M. [P] n'ont contesté en cause d'appel les condamnations prononcées à son bénéfice ;

- la GMF a réglé l'intégralité des condamnations prononcées à son profit, alors qu'elles n'étaient assorties que pour moitié de l'exécution provisoire, ce qui constitue un acte d'acquiescement postérieur à l'appel interjeté conformément aux dispositions de l'article 558 du code de procédure civile ;

- la GMF et M.'[P] ont dirigé abusivement leur appel contre lui, le contraignant ainsi à constituer avocat et à se défendre devant la cour.

4.4 La CPAM de [Localité 6]-[Localité 13], régulièrement intimée, n'a pas constitué avocat en cause d'appel.

Pour un plus ample exposé des moyens de chacune des parties, il y a lieu de se référer aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'instruction du dossier a été clôturée par ordonnance du 17 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, la cour observe, en premier lieu, que la demande de M. [P] et de la GMF tendant à voir ordonner la jonction de la procédure RG n°21-04960 à la procédure RG n°21-04246 est devenue sans objet, le magistrat chargé de la mise en état ayant précédemment ordonné cette jonction par ordonnance du 23 juin 2022.

En deuxième lieu, M. [P] et son assureur, la GMF, ne contestent pas sur le fondement de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 l'entière responsabilité de l'assuré dans la survenance de l'accident corporel de la circulation routière subi le 3 juin 2008 par Mme [D].

En troisième lieu, il est rappelé que dans le rapport d'expertise judiciaire déposé le 20 septembre 2017, M.'[Z] neurologue, avec l'aide du sapiteur psychiatre, M.'[N], retient une date de consolidation au 10 juin 2011 pour Mme [D] (née le [Date naissance 4] 1976), et fixe à 20% le taux de son déficit fonctionnel permanent, en ce compris un taux de 5% pour les séquelles psychiques.

En quatrième lieu, il résulte de l'article 9 du code de procédure civile, aux termes duquel «'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention'», et de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'un mode de preuve n'est admissible que s'il est licite et obtenu dans des circonstances loyales.

Le juge n'est pas lié par les avis des experts, qui demeurent soumis à son appréciation et peuvent être critiqués et discutés par les parties. Celles-ci disposent de la faculté de rapporter la preuve des faits soutenant leur prétention. Dès lors, les parties demeurent libres de contester ou de corroborer au fond les conclusions de chacune des expertises judiciaires, réalisées par M.'[J] puis M.'[Z].

En outre, si la cour ne peut écarter des débats et juger inopposable à M.'[P] et à son assureur l'expertise amiable établie par M.'[M], régulièrement versée aux débats et soumise à la libre discussion des parties, au seul motif qu'elle n'aurait pas été établie contradictoirement, elle ne peut toutefois se fonder exclusivement sur cette expertise non judiciaire réalisée à la demande de Mme [D], pour indemniser les chefs de préjudices supplémentaires qu'elle invoque.

Il s'ensuit que la cour pourra librement apprécier l'avis de chacun des experts, qu'il soit amiable ou judiciaire, à la lumière de l'ensemble des éléments de preuve qui lui sont soumis.

En cinquième et dernier lieu, étant ici rappelé que le choix du barème de capitalisation, support de l'évaluation des préjudices futurs, relève du pouvoir souverain du juge du fond, la cour retiendra, pour procéder à l'évaluation des préjudices susceptibles de capitalisation, la table de capitalisation éditée en 2020 par la Gazette du palais qui repose sur une table de mortalité définitive publiée par l'INSEE 2014-2016 France entière, et un taux d'intérêt fixé à 0%, cette table étant établie à partir de données démographiques récemment publiées par l'INSEE et prenant en compte des données économiques actualisées et objectives concernant le rendement des placements et l'inflation qui affecte ce rendement.

I - Sur l'indemnisation de la victime directe

A - Sur l'évaluation des préjudices

1 - Sur l'évaluation des préjudices patrimoniaux

a - Sur les préjudices patrimoniaux temporaires avant consolidation

1° - Sur les dépenses de santés actuelles

Le premier juge a fixé la créance de Mme [D] à la somme de 1'510,66 euros à ce titre.

Mme [D] sollicite devant la cour, au titre des dépenses de santé actuelles restées à sa charge, une somme de 1'771,43 euros se décomposant comme suit :

-432 euros pour neuf séances d'ostéopathie en 2008 ;

-55,20 euros pour l'achat d'une bouée de siège le 4 juin 2008 ;

-1,54 euros pour l'achat d'une attelle en 2008 ;

-300 euros pour six séances d'ostéopathie en 2009 ;

-364 euros pour sept séances d'ostéopathie en 2010 ;

-212 euros pour quatre séances d'ostéopathie en 2011 ;

-226 euros au titre de participations et franchise.

Elle réclame en outre l'actualisation de ces dépenses de santé actuelles restées à sa charge suivant le barème des coefficients d'érosion monétaire de 2022.

La CPAM de [Localité 6]-[Localité 13] n'entend pas intervenir à l'instance.

Dans un premier relevé du 30 mars 2012, la caisse chiffre ses débours définitifs, avant consolidation fixée au 10 juin 2011, aux sommes suivantes':

-2'402,15 euros au titre des frais médicaux et pharmaceutiques du 4 juin 2008 au 28 mai 2010 ;

-237,25 euros au titre des frais de transport du 3 juin 2008 ;

-851,95 euros au titre des soins externes hospitaliers du 3 juin 2008 au 24 novembre 2009 ;

-17,84 euros au titre des frais d'appareillage le 4 juin 2008 ;

-255,03 euros au titre des actes d'imagerie du 9 juin 2008 au 11 février 2009 ;

-2'068,37 euros au titre des massages du 19 septembre 2008 au 31 mai 2010 ;

soit un total de 5'832,59 euros.

Dans un second relevé du 9 août 2019, la CPAM de [Localité 6]-[Localité 13] chiffre ses débours définitifs aux sommes suivantes :

-1'713,80 euros au titre des frais médicaux du 7 juin 2010 au 24 mai 2011 ;

-868,98 euros au titre des frais pharmaceutiques du 4 juin 2010 au 11 décembre 2011 ;

soit un total de 2'582,78 euros.

M. [P] et la GMF offrent une indemnisation limitée à 227,20 euros, correspondant aux frais d'ostéopathie justifiés à hauteur de 172 euros, et à l'achat d'une bouée pour 55,20 euros ; ils concluent au débouté du surplus des demandes, la victime ne justifiant pas des dépenses prétendument engagées.

Sur ce, les dépenses de santé actuelles correspondent à l'ensemble des frais médicaux, hospitaliers, pharmaceutiques, et paramédicaux exposés par la victime ou pris en charge par les organismes sociaux durant la phase temporaire d'évolution de la pathologie traumatique jusqu'à la date de la consolidation.

Les deux créances de 5'832,59 et de 2'582,78 euros, lesquelles sont présentées par la caisse dans deux relevés de débours différents et correspondent à des périodes distinctes, sont imputables à l'accident corporel pour un montant total de 8'415,37 euros.

Suivant attestation du 15 février 2016, M.'[A], ostéopathe, indique avoir traité régulièrement Mme [D] du 8 juillet 2009 au 21 août 2012 pour les séquelles de l'accident de la voie publique du 3 juin 2008, lesquelles se traduisaient par des migraines et des rachialgies.

Mme [D] produit neuf factures de soins d'ostéopathie en 2008 pour un montant de 432 euros (soit 48 x 9), six factures de soins en 2009 pour un montant de 300 euros (soit 50 x 6), sept factures de soins en 2010 pour un montant de 364 euros (soit 52 x 7), et quatre séances en 2011 pour un montant de 212 euros (soit 53 x 4).

Elle produit également la facture de la bouée pour un montant de 55,20 euros, laquelle n'est pas contestée par M. [P] et son assureur.

Tenu de statuer à la date la plus proche de l'arrêt, le juge du fond doit faire application du coefficient d'érosion monétaire lorsque la victime le demande.

Il convient d'appliquer les coefficients d'érosion monétaire applicables aux cessions intervenant en 2022 publiés au bulletin officiel des finances publiques - impôts (BOI) du 16 mars 2022 sous la référence BOI-ANNX-000097, lesquels s'élèvent à 1,143 en 2008, 1,143 en 2009, 1,126 en 2010, et 1,104 en 2011.

Mme [D] est fondée à recevoir, après application du coefficient d'érosion monétaire, les sommes suivantes en remboursement des dépenses de santé actuelles qu'elle a exposées et qui sont restées à sa charge :

'en 2008 : (432 + 55,20) x 1,143 = 556,87 euros ;

'en 2009 : 300 x 1,143 = 342,90 euros ;

'en 2010 : 364 x 1,126 = 409,86 euros ;

'en 2011 : 212 x 1,104 = 234,05 euros ;

soit un total de 1'543,68 euros.

En revanche, Mme [D] ne justifie pas de l'achat d'une attelle, ni des sommes restées à sa charge au titre des participations et franchises ; elle sera déboutée de ces chefs.

Il y a lieu de fixer le poste des dépenses de santé actuelles en lien avec le fait dommageable à la somme de 9'959,05 euros (soit 1'543,68 euros + 8'415,37 euros).

En conséquence, il convient de condamner in solidum M. [P] et la GMF à payer à Mme [D] la somme de 1'543,68 euros au titre des dépenses de santé actuelles restées à charge, et de fixer la créance de la CPAM de [Localité 6]-[Localité 13] à la somme de 8'415,37 euros au titre des dépenses de santé actuelles.

2° - Sur les pertes de gains professionnels actuels

Le premier juge a fixé la créance de Mme [D] au titre des pertes de gains professionnels actuels à la somme de 6'322,01 euros, celle du centre [F] [E], employeur de Mme [D], à la somme de 8'234,33 euros au titre des salaires et charges exposés pour la période de décembre 2009 à août 2010 après déduction des indemnités journalières.

Mme [D] réclame une indemnisation de 8'259,21 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels ; elle expose que :

- assistante médicale à temps plein au centre hospitalier [F] [E] moyennant une rémunération mensuelle nette moyenne de 1'593 euros (suivant sa déclaration de revenus 2006), elle était, à la date de l'accident le 3 juin 2008, en congé parental depuis février 2007, et devait reprendre son travail à temps complet en novembre 2009 ;

- à la suite de l'accident, elle a écourté son congé parental pour raisons financières, et repris son activité professionnelle en mi-temps thérapeutique à compter du 1er février 2009 ;

- ne pouvant, en raison de ses migraines, reprendre son activité professionnelle à temps complet comme elle l'avait initialement prévu, elle a été placée en arrêt-maladie du 2 novembre 2009 au jusqu'au 1er août 2010 ;

- elle a ensuite retravaillé à mi-temps thérapeutique du 2 août 2010 au jusqu'au 31 janvier 2011 ;

- reconnue en invalidité de 1ère catégorie le 1er février 2011, elle n'a pu reprendre son activité professionnelle qu'à temps partiel en raison de la survenance au fait dommageable ;

- elle a subi une perte de revenus durant l'arrêt-maladie du 2 novembre 2009 au 1er août 2010, puis lors du mi-thérapeutique du 2 août 2010 au 31 janvier 2011, et enfin depuis sa mise en invalidité du 1er février au 10 juin 2011.

M. [P] et la GMF concluent au débouté de la demande au titre des pertes de gains professionnels actuels ; ils estiment que Mme [D] a insuffisamment documenté sa situation professionnelle et les revenus perçus période par période, et que ses informations déclaratives ne concordent pas avec la créance de l'organisme de sécurité sociale.

=$gt; Sur la période d'arrêt-maladie du 1er novembre 2009 au 1er août 2010 :

Mme [D] expose qu'elle aurait dû percevoir une rémunération de 14'688 euros du 1er novembre 2009 au 1er août 2010 sur la base d'un revenu mensuel net moyen de 1'620 euros selon l'estimation de son employeur, qu'elle n'a perçu selon ses fiches de salaire que la somme de 9'869,74 euros durant cette période, les indemnités journalières ayant été directement versées à l'employeur, et qu'il s'ensuit une perte de salaire de 4'818,26 euros.

M.'[P] et la GMF estiment que le contrat de travail était suspendu et que Mme [D] était en congé parental avant le 6 octobre 2009, date à laquelle a repris le versement des indemnités journalières, de sorte qu'aucune somme ne lui revient avant le 6 octobre 2009. Pendant son arrêt-maladie du 2 novembre 2009 au 1er août 2010, Mme [D] a perçu des indemnités journalières de 17,27 euros, alors que son revenu annuel net de référence moyen pour les années 2006 et 2007 s'élève à 10'354 euros, de sorte qu'il n'en résulte aucune perte de gains professionnels actuels.

Sur ce, comme l'a exactement apprécié le premier juge, l'attestation émanant de l'employeur ne permet pas d'établir qu'elle aurait été la rémunération mensuelle nette moyenne de Mme [D] si elle avait repris le travail à temps complet le 1er novembre 2009.

Il convient de retenir comme revenu de référence celui de l'année 2006 s'agissant de la dernière année au cours de laquelle la victime a exercé son travail d'assistante médicale à temps complet, soit un revenu mensuel net moyen de référence de 1'593 euros.

Pendant cette période de 9 mois, Mme [D] aurait dû percevoir des revenus nets de 14'337 euros (soit 1'593 x 9).

Elle a effectivement perçu de son employeur des revenus nets de : 1'491,23 euros en novembre 2009 ; 1'433,58 euros en décembre 2009 ; 1'421,13 euros en janvier 2010 ; 1'465,24 euros en février 2010 ; 689,98 euros en mars 2010 ; 800,63 euros en avril 2010 ; 778,22 euros en mai 2010 ; 989,67 euros juin 2010 ; 799,66 euros en juillet 2010 ; soit un cumul de revenus nets de 9'869,34 euros incluant les indemnités journalières versées directement par la CPAM à l'employeur.

Mme [D] établit par conséquent avoir subi une perte de revenus nets de 4 467,66 euros du 1er novembre 2009 au 1er août 2010 (soit 14'337 - 9'869,34).

La CPAM a versé à l'employeur pour la période du 1er novembre 2009 au 1er août 2010 des indemnités journalières à hauteur de 5'094,65 euros suivant les deux relevés définitifs de débours du 30 mars 2012 et 9 août 2019.

Le centre [F] [E] a maintenu la rémunération de Mme [D] pendant son arrêt-maladie du 1er novembre 2009 au 1er août 2010, et a dû procéder à son remplacement total pendant l'arrêt-maladie, puis partiel pendant le temps partiel thérapeutique ; il a ainsi versé la somme totale de 8'234,33 euros au titre des salaires et charges pour la période de décembre 2009 à août 2010, et une indemnité de précarité de 1'611,97 euros aux salariés embauchés en contrat à durée déterminée pour assurer le remplacement total puis partiel de Mme [D] durant cette même période.

Il s'observe, d'une part, que la GMF a procédé au règlement intégral des sommes revenant à l'employeur, alors même que le jugement querellé n'avait ordonné l'exécution provisoire des condamnations prononcées qu'à hauteur de la moitié et, d'autre part, qu'aucun des appelants ne sollicite l'infirmation du jugement querellé s'agissant des condamnations prononcées au profit de l'employeur.

Par conséquent, les pertes de gains professionnels actuels du 1er novembre 2009 au 1er août 2010 s'établissent comme suit :

- créance revenant à Mme [D] : 4'447,66 euros ;

- créance revenant à la CPAM : 5'094,65 euros ;

- créances revenant à l'employeur : 8'234,33 euros et 1'611,97 euros.

=$gt; Sur la période de reprise du travail à mi-temps thérapeutique du 2 août 2010 au 10 juin 2011 :

Pendant cette période de 10 mois et 10 jours (soit 10,33 mois) sur la base du revenu de référence 2006 précédemment calculé, Mme [D] aurait dû percevoir des revenus nets de 16'455,69 euros (soit 1'593 x 10,33).

Elle a effectivement perçu de son employeur des revenus nets de :

'7'136,67 euros du 1er août au 31 décembre 2010 (comprenant 815,84 euros en août 2010 ; 1'523,57 euros en septembre 2010 ; 1'547,79 euros en octobre 2010 ; 1'681,71 euros en novembre 2010 ; 1'567,76 euros en décembre 2010) ;

'4'669,66 euros du 1er janvier au 10 juin 2011 (comprenant 1'474,4 euros en janvier 2011 ; 623,07 euros en février 2011 ; 877,41 euros en mars 2011 ; 715,26 euros en avril 2011 ; 699,25 euros en mai 2011 ; 840,81 euros'/'3 jusqu'au 10 juin 2011) ;

soit un cumul de revenus nets de 11'806,33 euros incluant les indemnités journalières versées directement par la CPAM à l'employeur jusqu'au 31 janvier 2011.

Mme [D] a également perçu de la CPAM du 1er janvier 2011 au 2 février 2018 des arrérages échus au titre de la pension d'invalidité à hauteur de 43'195,94 euros, ce qui correspond prorata temporis à une pension d'invalidité perçue du 1er janvier au 10 juin 2011 pour 2'668,47 euros.

Mme [D] établit par conséquent avoir subi une perte de revenus nets de 1'980,79 euros du 2 août 2010 au 10 juin 2011 (soit 16'455,69 - 11'806,33 - 2'668,47).

La CPAM a directement versé à l'employeur pour la période du 2 août au 31 décembre 2010 des indemnités journalières à hauteur de 2'196,93 euros suivant relevé définitif de débours du 9 août 2019.

Par conséquent, les pertes de gains professionnels actuels du 2 août 2010 au 10 juin 2011 s'établissent comme suit :

- créance revenant à Mme [D] : 1'980,79 euros ;

- créance revenant à la CPAM : 2'196,93 euros.

=$gt; Au total, le poste des pertes de gains professionnels actuels avant consolidation du 1er novembre 2009 au 10 juin 2011 sera évalué à la somme de 26'234,80 euros, les créances se répartissant comme suit :

- créance revenant à Mme [D] : 6'428,45 euros (soit 4'447,66 + 1'980,79)';

- créance revenant à la CPAM : 9'960,05 euros (soit 5'094,65 + 2'196,93 + 2'668,47) ;

- créances revenant à l'employeur : 9'846,30 euros (soit 8'234,33 euros + 1'611,97 euros).

3 ° - Sur les frais divers

- Les frais divers hors tierce personne temporaire

Le premier juge a accordé à Mme [D] une indemnisation de 9'396,57 euros au titre des frais divers proprement dits.

Mme [D] sollicite au titre des frais divers une indemnisation de 11'186,96 euros se décomposant comme suit :

- 171,90 euros au titre des frais vestimentaires ;

- 4'881,86 euros au titre des frais de médecin conseil, réactualisés suivant les coefficients d'érosion monétaire publiés en 2022 ;

- 5'955,28 euros au titre des frais kilométriques ;

- 31,66 euros au titre des frais postaux et de photocopies ;

- 97,80 euros au titre des autres frais, à savoir une leçon de conduite et une visite médicale pour la validation du permis de conduire, des frais de photographie, et des frais de location de télévision et de téléphone ;

- 48,46 euros au titre des frais de cantine réactualisés pour son fils, M. [I] [R].

M.'[P] et la GMF offrent une indemnisation de 6'224,98 à ce titre. De première part, ils acquiescent aux frais vestimentaires, frais postaux, frais kilométriques pour 5'923,62 euros, et autres frais réclamés. En revanche, ils contestent les honoraires des médecins-conseils, dès lors que Mme [D] a choisi de mandater elle-même les praticiens en dehors de toute procédure judiciaire. Ils rappellent qu'il appartient à tout le moins à Mme [D] de produire les factures de ceux-ci, et qu'elle ne peut se constituer de preuve à elle-même. Ils contestent également la prise en charge des frais de cantine de l'enfant [I].

Sur ce, il s'agit des frais divers exposés par la victime avant la date de consolidation de ses blessures, tels les honoraires du médecin assistant la victime aux opérations d'expertise, les frais de déplacement et transport survenus durant la maladie traumatique, dont le coût et le surcoût sont imputables à l'accident, les frais liés à l'hospitalisation, les frais de correspondance.

Les partie s'accordent pour voir fixer les préjudices à la somme de 171,90 euros en remboursement des frais vestimentaires, de 31,66 euros en remboursement des frais postaux, et de 97,80 euros en remboursement des autres frais.

Les frais kilométriques sont justifiés à hauteur de 5'923,62 euros (et non de 5'955,28 euros comme réclamés par Mme [D]), et acceptés comme tels par M.'[P] et la GMF.

Pour le surplus, les frais d'assistance par des médecins-conseils aux expertises médicales, qu'elles soient amiables ou judiciaires, doivent être intégralement remboursés à la victime dès lors qu'ils sont justifiés. En outre, seuls peuvent être indemnisés au titre des frais divers les examens médicaux, neuropsychologiques ou psychiatriques rendus indispensables à l'évaluation des préjudices de la victime, et par conséquent imputables à l'accident.

En l'espèce, la note d'honoraires du 2 juin 2009 du docteur [V] d'un montant de 150 euros pour «'rapport d'expertise'» est bien en lien de causalité avec le fait dommageable. Cette somme peut être réévaluée à 171,45 euros suivant coefficient d'érosion monétaire 2022 (soit 150 x 1,143).

Mme [D] ne produit pas la facture d'honoraires du docteur [M] d'un montant de 700 euros. Nul ne pouvant se constituer de preuve à soi-même, les tableaux récapitulatifs des dépenses établis par la victime ne sauraient avoir, à eux seuls, de valeur probante. En conséquence, Mme [D] doit être déboutée de sa demande faute de justificatifs.

La note d'honoraires du docteur [U], psychiatre, d'un montant de 650 euros pour «'analyse du dossier, examen médico-légal le 6 avril 2017, rédaction d'un rapport médico-légal'» est bien en lien de causalité avec le fait dommageable. Cette somme peut être réévaluée à 687,70 euros suivant coefficient d'érosion monétaire 2022 (soit 650 x 1,058).

La note d'honoraires de la neuropsychologue, Mme [Y], d'un montant de 1'000 euros pour «'bilan neuropsychologique complet dans le cadre d'une assistance à expertise le 3 et 5 mai 2016'» est bien en lien de causalité avec le fait dommageable. Cette somme peut être réévaluée à 1'069 euros suivant coefficient d'érosion monétaire 2022 (soit 1'000 x 1,069).

Les factures de M.'[X], chirurgien, du 11 février 2012 pour 600 euros, du 23 mai 2016 pour 690 euros, du 11 mai 2017 pour 750 euros, pour son assistance à expertise à la suite du sinistre du 3 juin 2008, sont en lien de causalité avec le fait dommageable. Ces sommes peuvent être réévaluées en fonction du coefficient d'érosion monétaire 2022 à 649,80 euros (soit 600 x 1,083), à 737,61 euros (soit 690 x 1,069), à 793,50 euros (soit 750 x 1,058).

De l'ensemble de ces pièces et considérations, il ressort que Mme [D] est fondée à obtenir une indemnisation de 4'109,06 euros en remboursement des frais de médecins-conseils après réactualisation (soit 171,45 + 687,70 + 1'069 + 649,80 + 737,61 + 793,50).

Enfin, s'agissant des frais de cantine de M. [I] [R] réactualisés à hauteur de 48,46 euros, rien ne vient démontrer qu'ils sont en lien de causalité direct et certain avec l'accident subi par sa mère le 3 juin 2008, ni qu'ils ont engendré un surcoût pour nourrir l'enfant par rapport aux frais d'alimentation à domicile. Mme [D] sera déboutée de sa demande sur ce point.

Au total, il revient à Mme [D] une indemnisation de 10 334,04 euros en remboursement des frais divers hors tierce personne temporaire (soit 171,90 + 4'109,06 + 5'923,62 + 31,66 + 97,80).

- L'assistance tierce personne temporaire et l'aide à la parentalité

Le premier juge a accordé à Mme [D] une indemnisation de 10'853,21 euros au titre de la tierce personne temporaire en ce compris l'aide à la parentalité.

Mme [D] sollicite la confirmation du jugement sur ce point, sur la base d'un taux horaire de 18 euros de l'heure avec majoration de 10% des sommes allouées pour tenir compte des jours fériés et congés payés.

M. [P] et la GMF offrent une indemnisation de 6'300 euros sur la base d'un taux horaire de 18 euros. Il est, selon eux, exclu de majorer artificiellement le besoin en tierce personne de la victime directe pour prendre en considération les besoins en accompagnement des enfants ; ils considèrent qu'il n'y a pas lieu d'indemniser une aide à la parentalité, qui n'a été retenue par aucun des experts judiciaires.

Sur ce, il s'agit d'indemniser les dépenses liées à la réduction d'autonomie, qui peuvent être temporaires entre le dommage et la consolidation ; l'évaluation doit se faire au regard de l'expertise médicale et de la justification des besoins, et non au regard de la justification de la dépense, afin d'indemniser la solidarité familiale.

L'expert [Z], dans son rapport du 20 septembre 2017, indique que le besoin en aide humaine est plus important pour Mme [D] avant sa consolidation, et ce jusqu'à la période où elle a repris le travail à mi-temps ; il l'évalue à trois heures par semaine jusqu'à la date de reprise du travail en juillet-août 2010, puis à deux heures par semaine jusqu'à la consolidation.

Si les experts [J] et [Z] n'évoquent pas dans leurs rapports le besoin d'une aide à la parentalité, il reste pour autant que Mme [D] a souffert dans les suites immédiates de l'accident d'importantes céphalées, ainsi que de douleurs cervicales et du rachis lombaire ayant nécessité la prise d'antalgiques et une infiltration radioguidée le 3 septembre 2008.

Pendant l'été 2008, Mme [D] en congé parental avait la charge de ses deux enfants en bas âge.

M. [M], neurologue, estime dans un rapport d'expertise amiable que dans les six semaines qui ont suivi l'accident, les déplacements de Mme [D] se sont avérés douloureux et laborieux, et qu'elle n'a pu s'acquitter de ses tâches domestiques et ménagères, ni s'occuper de ses enfants ; il précise qu'une aide humaine a été nécessaire à raison de trois heures par jour. Il ajoute que postérieurement à cette période, Mme [D] a gardé des difficultés lui interdisant de porter des charges lourdes lors de ses achats, de passer l'aspirateur, d'étendre le linge, de nettoyer l'escalier, et qu'elle a eu alors besoin d'une aide humaine à raison de trois heures par semaine, rejoignant ainsi l'avis de l'expert [Z].

Deux amies et la mère de Mme [D] témoignent de l'aide quotidienne qu'elle ont dû lui apporter à domicile pour assumer la prise en charge des enfants dans les semaines qui ont suivi l'accident.

La victime directe est fondée à obtenir l'indemnisation des frais relatifs à l'accompagnement et au soutien qui lui ont été rendus nécessaires pour lui permettre d'exercer son rôle parental lorsque, du fait de ses lésions, elle n'était plus temporairement en mesure de l'assurer de manière autonome sur le plan sanitaire, éducatif et moral.

Saisi d'une demande en ce sens, il appartient au juge du fond de se prononcer sur le besoin d'accompagnement et de soutien dans l'exercice de la fonction parentale du parent victime à l'égard des enfants, dont il ne peut plus s'occuper seul du fait de l'accident, en tenant compte du besoin en fonction de l'âge et de l'autonomie des enfants.

En conséquence, c'est par une exacte appréciation des faits et de la cause que le premier juge a retenu que le besoin d'assistance par tierce personne serait justement réparé par un taux horaire de 18 euros qu'il s'agisse de l'aide aux tâches ménagères et de l'aide à la parentalité, le produit de l'opération devant être majoré de 10% afin de prendre en compte les congés payés et jours fériés dont l'assistance familiale doit également bénéficier, et ce sans qu'il y ait lieu de prendre en considération les éventuels avantages fiscaux ou exonérations de charges patronales en cas de recours à un prestataire salarié.

Il s'ensuit que Mme [D] doit être indemnisée au titre de l'assistance par une tierce personne avec aide à la parentalité de la façon suivante :

'du 4 juin 2008 au 2 août 2010, date de reprise du travail à mi-temps, déduction faite des jours d'hospitalisation du 31 mai au 4 juin 2010 : (785 jours / 7) x 3 heures x 18 euros = 6'055,71 euros ;

'du 3 août au 10 juin 2011, date de consolidation, déduction faite des jours d'hospitalisation du 30 mai au 10 juin 2011 : (300 jours / 7) x 2 heures x 18 euros = 1'542,85 euros ;

'du 4 juin au 15 juillet 2008 pour l'aide à la parentalité : 42 jours x 3 heures x 18 euros = 2'268 euros ;

soit une somme de 9'866,56 euros à majorer de 986,65 euros (10%).

Mme [D] recevra une indemnisation de 10 853,21 euros au titre de l'assistance temporaire par une tierce personne comprenant l'aide à la parentalité.

b - Sur les préjudices patrimoniaux permanents après consolidation

1° - Sur dépenses de santé futures

Le premier juge a alloué à Mme [D] une indemnité de 286,20 euros au titre des dépenses de santé futures.

Mme [D] sollicite au titre des dépenses de santé futures restées à sa charge une indemnisation de 3'895,36 euros, qu'elle décompose ainsi :

- 582 euros pour les franchises et participations forfaitaires de 2011 à 2020 ;

- 2'768,17 euros pour les franchises et participations forfaitaires capitalisées à compter de 2021 ;

- 292,44 euros pour les frais d'ostéopathie après application des coefficients d'érosion monétaire ;

- 252,75 euros pour des frais dentaires.

La CPAM de [Localité 6]-[Localité 13] n'intervient pas devant la cour.

M. [P] et la GMF concluent au débouté pur et simple des demandes adverses.

Sur ce, les dépenses de santé futures correspondent aux frais médicaux et pharmaceutiques (non seulement les frais restés à la charge effective de la victime, mais également les frais payés par des tiers (sécurité sociale, mutuelle...), les frais d'hospitalisation, mais également les frais paramédicaux (infirmiers, kinésithérapie etc.), même occasionnels mais médicalement prévisibles, rendus nécessaires par l'état pathologique de la victime après la consolidation.

Toutefois, ce poste n'englobe pas les frais de reclassement professionnel, de formation ou de changement de poste, qui sont pris en considération dans l'incidence professionnelle.

S'agissant des franchises et participations forfaitaires, Mme [D] produit en cause d'appel l'état de participations forfaitaires et franchises restées à sa charge pour les années 2016 à 2020, sans que soit établi avec certitude le lien de causalité existant entre celles-ci et le fait dommageable ; sa demande de ce chef sera rejetée, tant pour les franchises et participations échues que pour celles à échoir.

S'agissant des frais d'ostéopathie, Mme [D] produit une facture de soins d'ostéopathie en novembre 2011 pour un montant de 53 euros, quatre factures de soins en 2012 pour un montant de 216 euros (soit 54 x 4). Suivant attestation du 15 février 2016, l'ostéopathe indique que ces séances ont traité les séquelles de l'accident de la voie publique du 3 juin 2008, lesquelles se traduisaient par des migraines et des rachialgies.

Conformément à la demande, il convient d'appliquer les coefficients d'érosion monétaire applicables aux cessions intervenant en 2022 publiés au bulletin officiel des finances publiques - impôts (BOI) du 16 mars 2022 sous la référence BOI-ANNX-000097, lesquels prévoient un coefficient de 1,104 en 2011 et de 1,083 en 2012.

Mme [D] est fondée à recevoir, après application des coefficients d'érosion monétaire, les sommes suivantes en remboursement des frais d'ostéopathie directement imputables à l'accident :

'en 2011 : 53 x 1,104 = 58,51 euros ;

'en 2012 : 216 x 1,083 = 233,93 euros ;

soit un total de 292,44 euros.

S'agissant des frais dentaires, si l'expert [Z] retient comme séquelles imputables à l'accident «'des lésions dentaires, qui cependant n'ont pas été signalé(e)s sur le certificat médical initial'», il s'abstient de les décrire. Dans ces conditions, Mme [D] échoue à démontrer que le devis de soins prothétiques dentaires du 11 juin 2019, lequel ne détaille pas davantage les soins proposés, soit en lien de causalité direct et certain avec l'accident subi le 3 juin 2008. Le premier juge a exactement débouté la victime de sa demande de ce chef.

Si la CPAM de [Localité 6]-[Localité 13] n'intervient pas en appel, il ressort d'un premier relevé définitif de ses débours arrêté au 30 mars 2012 qu'elle a évalué ses dépenses de santé futures viagères à la somme de 17'344,10 euros à compter de la date de consolidation. Puis dans un second relevé définitif de ses débours le 9 août 2019, elle a arrêté ses dépenses de santé futures échues du 1er juin 2011 au 27 mars 2018 à la somme de 4'896,14 euros, ces sommes échues étant nécessairement incluses dans le premier décompte définitif calculé en viager.

En conséquence, il y a lieu de fixer le poste des dépenses de santé futures en lien avec le fait dommageable à la somme de 17'636,54 euros (soit 292,44 + 17'344,10 euros).

Il convient de condamner in solidum M. [P] et la GMF à payer à Mme [D] la somme de 292,44 euros au titre des dépenses de santé futures restées à charge, et de fixer la créance de la CPAM de [Localité 6]-[Localité 13] à la somme de 17'344,10 euros au titre des dépenses de santé futures.

2° - Sur les pertes de gains professionnels futurs

Le premier juge a accordé la somme de 427'382,72 euros en réparation des pertes de gains professionnels futurs.

Mme [D] sollicite la confirmation du jugement critiqué sur ce point, considérant que la reprise de son activité professionnelle à mi-temps est totalement imputable à l'accident ; elle sollicite le calcul des pertes de gains professionnels futurs de façon viagère afin de tenir compte de sa perte des droits à la retraite.

M. [P] et la GMF concluent au débouté pur et simple de la demande adverse, arguant que l'expert [Z] avait conclu que la reprise du travail à mi-temps était justifié pour moitié par le congé parental ; que la baisse des revenus annuels de la victime en lien avec le fait dommageable ne s'élevait qu'à la somme de 1'476,25 euros ; et qu'en conséquence, le capital invalidité servi par la CPAM à hauteur de 79'517,21 euros couvrait la perte alléguée de gains professionnels futurs.

Sur ce, les moyens soutenus par les parties ne font que réitérer, sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation.

Il convient seulement de souligner et d'ajouter les points suivants :

Selon l'expert [Z], Mme [D] conserve les séquelles physiques suivantes imputables à l'accident du 3 juin 2008, lequel a entraîné un traumatisme crânien avec hématome frontal droit et fracture incomplète du massif pétreux droit, des douleurs aux coudes, chevilles et bassin sans lésion osseuse :

- des séquelles neurologiques à type de céphalées ;

- une asthénie ;

- une modification du caractère avec impulsivité et irritabilité ;

- des difficultés cognitives avec troubles de l'attention, de la concentration, de la mémoire ;

- des douleurs cervicales et lombaires, une limitation de la mobilité du rachis ;

- des séquelles psychiques avec troubles de l'humeur et anxiété.

L'expert retient un déficit fonctionnel permanent de 20% dont 5% pour les séquelles psychiques, et ajoute que les séquelles de l'accident ont amené Mme [D] à ne pas reprendre une activité professionnelle à temps plein du fait de sa fatigabilité et de ses céphalées, mais à mi-temps. Il précise que la décision de mi-temps thérapeutique doit être imputée au moins partiellement aux séquelles psychiques selon le sapiteur psychiatre du fait d'une fatigabilité et pénibilité accrues.

La cour relève que Mme [D] travaillait à temps complet avant l'accident, hormis la période de congé parental qui n'avait pas vocation à se prolonger au delà des trois ans de sa fille, qu'elle a été reconnue travailleur handicapé et en invalidité de catégorie 1 par suite de l'accident, et que le médecin du travail, dans un certificat du 4 octobre 2013, a également considéré qu'elle devait être reclassée sur un poste à temps partiel à la suite de l'accident.

Rien ne vient démontrer que Mme [D] aurait choisi, depuis sa consolidation, de travailler à temps partiel pour des motifs familiaux, et non pour des motifs médicaux, et ce d'autant moins que ses enfants, désormais âgés de 15 et 18 ans, sont devenus plus autonomes.

Il s'ensuit que le travail à temps partiel de Mme [D] est entièrement imputable au fait dommageable.

Mme [D] a perçu de la CPAM du 1er janvier 2011 au 2 février 2018 des arrérages échus au titre de la pension d'invalidité à hauteur de 43'195,94 euros, ce qui correspond prorata temporis à un reliquat de pension d'invalidité perçue du 10 juin 2011 au 2 février 2018 pour 40'527,47 euros (soit 43'195,94 - 2'668,47).

La créance de la CPAM en remboursement des arrérages échus et du capital à échoir au titre de la pension d'invalidité s'élève à la somme de 156'365,95 euros (soit 40'527,47 + 115'838,48).

Ce poste de préjudice s'élève à la somme de 583'748,67 euros se décomposant comme suit :

- la créance de 427'382,72 euros revenant à Mme [D] ;

- la créance de 156'365,95 euros revenant à la CPAM de [Localité 6]-[Localité 13].

Le jugement critiqué est confirmé en ce qu'il a accordé à titre viager à Mme [D] une indemnisation de 427'382,72 euros en réparation de ses pertes de gains professionnels futurs.

3° - Sur l'incidence professionnelle

Le premier juge a accordé à la victime une somme de 50'000 euros en réparation de l'incidence professionnelle.

Mme [D] sollicite une indemnisation de 150'000 euros de ce chef ; elle fait valoir que :

- elle a été contrainte d'abandonner son poste d'assistante médicale en radiothérapie, et d'accepter un poste administratif moins enrichissant en hôpital de jour, où elle se retrouve privée de contact direct avec la patientèle, et ne gère plus de ligne téléphonique directe ;

- ses séquelles neuro-psychologiques, physiques et psychiatriques ont nécessité un aménagement de poste, outre l'aide de ses collègues pour le port de charges lourdes ;

- la position assise est handicapante pour les travaux de secrétariat ;

- elle ne parvient plus à travailler qu'une semaine sur deux ;

- sa progression de carrière est désormais limitée par ses problèmes de santé, et elle se trouve dévalorisée sur le marché du travail en l'absence de perspectives sérieuses d'évolution de carrière.

M.'[P] et la GMF demandent la confirmation du jugement dont appel, exposant que Mme [D] a repris son travail à mi-temps sur un poste aménagé, l'employeur ayant pris toute précaution pour en améliorer les conditions et réduire sa pénibilité et fatigabilité au travail, et que rien ne vient démontrer ses perspectives d'évolution professionnelle.

Sur ce, les moyens soutenus par les parties ne font que réitérer, sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation.

Le premier juge a fait une exacte appréciation des faits et de la cause en tenant compte de l'accroissement de la fatigabilité et de la pénibilité de Mme [D] à son poste de travail désormais aménagé, de sa dévalorisation sur le marché du travail en raison de son classement en invalidité de 1ère catégorie, et de la limitation de ses perspectives professionnelles.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il lui a accordé une indemnisation de 50'000 euros en réparation de l'incidence professionnelle.

4° - Sur les frais d'aménagement du logement

Le premier juge a débouté Mme [D] de sa demande sur ce point.

Mme [D] réclame une somme de 2'591,35 euros arguant, compte-tenu de ses séquelles, qu'elle a besoin d'acquérir un lave-vaisselle pour lui faciliter au quotidien la réalisation des tâches ménagères, puis de renouveler cet équipement tous les six ans, ce qui correspond à des frais d'adaptation de son logement.

M. [P] et la GMF s'opposent à la demande, indiquant que l'expert [Z] n'a pas retenu de frais de logement adapté.

Sur ce, la cour rappelle que les frais de logement adapté concernent les frais que doit débourser la victime directe à la suite du dommage pour adapter son logement à son handicap et bénéficier ainsi d'un habitat en adéquation avec ce handicap ; l'indemnisation intervient sur la base de factures, de devis ou même des conclusions du rapport de l'expert sur la consistance et le montant des travaux nécessaires à la victime pour vivre dans son logement'; il s'ensuit que ce poste d'indemnisation concerne le remboursement des frais que doit exposer la victime à la suite de sa consolidation, de sorte qu'il y a lieu d'indemniser ce poste de préjudice en fonction des besoins de la victime même si elle ne produit pas de factures mais uniquement des devis.

En l'espèce, si le docteur [X], chirurgien orthopédiste, préconise dans un rapport d'expertise amiable l'installation d'un lave-vaisselle pour réduire la fatigue de la victime, il reste pour autant que l'expert judiciaire, M.'[Z], ne prévoit aucun frais de logement adapté, et n'évoque aucune nécessité pour Mme [D] de s'équiper d'appareils électroménagers spécifiques, étant ici observé que l'accident a eu lieu il y a plus de quatorze années, et que Mme [D] ne démontre pas avoir jamais fait l'acquisition d'un lave-vaisselle. Enfin, aucun élément du dossier ne vient corroborer l'avis divergent du docteur [X].

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande au titre des frais de logement adapté.

5° - Sur l'assistance par une tierce personne permanente

Le premier juge a fixé la créance de Mme [D] à la somme de 109'118,38 euros, retenant un taux horaire moyen de 18 euros majoré de 10%, et un besoin en aide humaine de deux heures par semaine.

M. [P] et la GMF demandent à la cour de fixer la créance au titre de l'assistance par une tierce personne permanente à la somme de 37 446,24 euros, proposant de retenir un besoin en aide humaine d'une heure par semaine ; ils écartent les avis des docteurs [M] et [X], et offrent un taux horaire de 18 euros.

S'appuyant sur les conclusions de l'expert judiciaire, mais également des docteurs [M] et [X], Mme [D] demande à la cour de retenir un coût horaire de 19,80 euros pour couvrir son besoin viager en assistance par un tiers qu'elle évalue au minimum à deux heures par semaine compte tenu de son impossibilité à porter des charges lourdes. Elle évalue sa créance actualisée à la somme de 121'088,60 euros.

Sur ce, il est rappelé que le poste assistance tierce personne comprend les dépenses liées à la réduction d'autonomie de la victime, laquelle rend nécessaire, de manière définitive, l'assistance d'une tierce personne pour aider la victime à effectuer les démarches et les actes de la vie quotidienne.

L'indemnisation au titre de l'assistance tierce personne doit se faire en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée, de sorte que l'indemnité allouée au titre de ce poste de préjudice ne doit pas être réduite en cas d'assistance bénévole par un proche de la victime.

L'expert judiciaire [Z], dans son rapport du 20 septembre 2017, retient que Mme [D] a besoin d'aide ponctuelle pour porter des charges lourdes, faire des tâches ménagères lourdes, mais est autonome pour conduire, se déplacer à l'extérieur, et faire tous les gestes de la vie quotidienne. Il évalue à une heure par semaine le besoin en aide humaine de Mme [D].

Cependant, M.'[M] avait pu évaluer le besoin en aide humaine permanente à trois heures par semaine, et M.'[X] à cinq heures hebdomadaires.

En outre dans une attestation rédigée le 8 juillet 2019, la mère de la victime explique qu'elle aide quasi-quotidiennement sa fille à effectuer les tâches ménagères pénibles et répétitives, tels le lavage des sols, des vitres, ou encore les courses.

C'est donc par une exacte appréciation des faits de la cause que le premier juge a retenu un besoin hebdomadaire en aide humaine de deux heures, compte tenu de la nature des travaux domestiques à accomplir, de leur fréquence, et de la composition de la famille, Mme [D] vivant seule avec deux enfants.

La cour retient également un coût horaire moyen de 18 euros qui sera majoré de 10% pour tenir compte des congés payés et jours fériés, normalement servis en cas de recours à une aide extérieure professionnelle ; il convient d'apprécier l'entier préjudice subi par la victime, sans qu'il n'en résulte pour elle ni perte ni profit, et alors qu'elle reste entièrement libre du choix de recourir ou non à une assistance salariée et qu'elle n'a pas à justifier de frais engagés en cas d'assistance par un proche.

- L'assistance tierce personne échue

L'indemnisation doit être calculée de la façon suivante du 10 juin 2011, date de consolidation, au 26 janvier 2023, date de l'arrêt, ce qui correspond à 4'250 jours :

2 heures x 19,80 euros x 4'250 / 7 jours = 24'042,86 euros.

Il convient d'évaluer le poste de préjudice assistance tierce personne permanente échue à la somme de 24'042,86 euros.

- L'assistance tierce personne à échoir

Étant ici rappelé que la cour a retenu le principe de versement de l'indemnisation des postes patrimoniaux permanents futurs sous forme de capital, les besoins annuels de Mme [D] en aide humaine s'élèvent à la somme de 2'059,20 euros, soit 2 heures x 52 semaines x 19,80 euros.

Il convient d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 82'011,76 euros correspondant à 2'059,20 x 39,827 (prix d'un euro de rente viagère pour une femme âgée de 46 ans à la date de l'arrêt selon le barème de capitalisation édité en 2020 par la Gazette du palais avec un taux d'intérêt fixé à 0%).

Le préjudice au titre de l'assistance par une tierce personne permanente échue et à échoir sera fixé à la somme de 106'054,62 euros (soit 24'042,86 + 82'011,76).

2 - Sur l'évaluation des préjudices extra-patrimoniaux

a - Sur les préjudices extra-patrimoniaux temporaires avant consolidation

1° - Sur le déficit fonctionnel temporaire

Les parties sollicitent la confirmation du jugement querellé en ce qu'il a évalué ce poste à la somme de 8'120 euros.

Le jugement dont appel sera confirmé sur ce point.

2° - Sur les souffrances endurées

Le premier juge a réparé les souffrances endurées à hauteur de 8'000 euros, somme dont M.'[P] et la GMF sollicitent confirmation.

Mme [D] réclame une somme de 30'000 euros en réparation des souffrances endurées, insistant sur ses quatre hospitalisation, la violence et la récurrence de ses céphalées invalidantes, ses souffrances psychologiques qui ont nécessité un traitement par antalgiques et antidépresseurs, la durée de la période de consolidation et de sa rééducation avec de nombreuses séances de kinésithérapie et d'ostéopathie.

Sur ce, ce poste a pour objet d'indemniser toutes les souffrances tant physiques que morales subies par la victime entre la naissance du dommage et la date de la consolidation, du fait des blessures subies et des traitements institués.

L'expert [Z] a évalué les souffrances endurées à une échelle de 3,5 sur 7 les qualifiant ainsi de modérées, et prenant en considération l'hospitalisation initiale, les soins et les investigations médicales, la rééducation, les céphalées, et le retentissement moral de l'accident.

C'est par une exacte appréciation des faits et de la cause que le premier juge a fixé ce poste à la somme de 8'000 euros.

3° - Sur le préjudice esthétique temporaire

Le premier juge a accordé à Mme [D] une indemnisation de 500 euros à ce titre.

Mme [D] réclame une somme de 2'000 euros en réparation du préjudice esthétique temporaire,

M. [P] et la GMF concluent au débouté de la demande de ce chef.

Sur ce, il s'agit d'indemniser pendant la maladie traumatique, et notamment pendant l'hospitalisation, une altération de l'apparence physique, même temporaire, justifiant une indemnisation.

Si l'expert [Z] ne prévoit pas de préjudice esthétique temporaire, il reste pour autant que la victime, photographies à l'appui, a incontestablement présenté une altération de son apparence physique dans les suites immédiates de l'accident, puisqu'elle a présenté un 'dème au visage et à l''il droit, une lésion au genou gauche, et qu'elle a nécessité le port d'une attelle à la cheville droite.

Considérant les constatations de l'expert qui a relevé un ratio de 1/7 pour le préjudice esthétique permanent et décrit une cicatrice au genou et au front, lesquelles existaient nécessairement durant la phase de consolidation, le montant du préjudice esthétique temporaire subi a été exactement évalué à la somme de 500 euros.

Le jugement attaqué sera confirmé de ce chef.

b - Sur les préjudices extra-patrimoniaux permanents après consolidation

1° - Sur le déficit fonctionnel permanent

Le premier juge a indemnisé le déficit fonctionnel permanent à la somme de 52'000 euros, retenant pour Mme [D], âgée de 34 ans à la date de la consolidation le 6 juin 2011, une indemnisation à hauteur de 2'600 euros le point.

Mme [D] sollicite une indemnisation de 60'000 euros pour le déficit fonctionnel permanent correspondant à 3'000 euros le point, considérant que l'expert a omis de tenir compte de l'impact de ses séquelles sur sa qualité de vie.

M. [P] et la GMF offrent une indemnisation de 44'000 euros pour une valeur du point égale à 2'200 euros.

Sur ce, il s'agit d'indemniser le préjudice non économique lié à la réduction du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel de la victime, alors que son état n'est plus susceptible d'amélioration par un traitement médical adapté.

L'expert judiciaire évalue le déficit fonctionnel permanent à un taux de 20% lequel prend en compte l'ensemble des séquelles précédemment décrites, et notamment 5% pour les séquelles psychiques définies par le sapiteur psychiatre.

Il en résulte que Mme [D], âgée de 46 ans pour être née le [Date naissance 4] 1976, atteinte d'un déficit fonctionnel de 20%, a été exactement indemnisée de son préjudice par l'allocation d'une somme de 52'000 euros, compte tenu du caractère définitif des douleurs ressenties et de l'impact sur sa qualité de vie.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

2° - Sur le préjudice esthétique permanent

La fixation de l'indemnisation du préjudice esthétique permanent, quantifié par l'expert à 1 sur une échelle de 7, à la somme de 3'000 euros par le premier juge n'est pas contestée par Mme [D].

M. [P] et la GMF sollicitent la réduction de ce poste à la somme de 2'000 euros.

Sur ce, il s'agit d'indemniser l'altération définitive de l'apparence physique de la victime.

Considérant les constatations de l'expert qui a relevé un ratio de 1/7 et l'âge de la victime (46 ans), qualifiant le préjudice esthétique de très léger, le montant de l'indemnisation qui répare une cicatrice au genou et au front a été exactement évalué à la somme de 3'000 euros.

Le jugement attaqué sera confirmé de ce chef.

3° - Sur le préjudice d'agrément

Le premier juge a débouté Mme [D] de sa demande de réparation d'un préjudice d'agrément.

La victime sollicite une somme de 10'000 euros à ce titre, faisant valoir qu'elle était inscrite dans un club de gymnastique, et qu'elle n'a pas pu reprendre une activité sportive en raison de ses sensations de déséquilibre, de ses douleurs et de ses crampes.

M. [P] et la GMF concluent au débouté de la demande, estimant que Mme [D] ne rapportait pas la preuve de la pratique antérieure d'un sport.

Sur ce, le préjudice d'agrément vise exclusivement à réparer le préjudice lié à l'impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisirs. Ce préjudice concerne les activités sportives, ludiques ou culturelles devenues impossibles ou limitées en raison des séquelles de l'accident.

Il appartient à la victime de justifier de la pratique de ces activités, notamment par la production de licences sportives, de bulletin d'adhésion à des associations, de photographies datées ou d'attestations, étant précisé que l'appréciation du préjudice s'effectue concrètement, en fonction de l'âge et du niveau d'activité antérieur.

En l'espèce, l'expert judiciaire ne retient pas de préjudice d'agrément ; s'il évoque «'des gênes du fait des céphalées et de la fatigabilité'», il n'y a, selon lui, pas d'incapacité physique à pratiquer des activités sportives ou de loisirs.

Pour démontrer sa pratique antérieure de la gymnastique, Mme [D] se contente de produire une attestation rédigée par elle-même, dans laquelle elle déclare éprouver une gêne lorsqu'elle pratique l'activité de renforcement musculaire à laquelle elle s'est inscrite en septembre 2016.

Ainsi Mme [D] ne justifie pas avant l'accident de sa pratique antérieure d'une activité sportive ou de loisirs spécifique par des attestations, photographies, copies de licences ou d'adhésions associatives.

Le jugement querellé est confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de ce chef.

4° - Sur le préjudice sexuel

Le premier juge a accordé à Mme [D] une indemnisation de 10'000 euros en réparation de son préjudice sexuel, dont celle-ci sollicite confirmation.

M. [P] et la GMF s'opposent à l'indemnisation d'un préjudice sexuel qui n'est pas médicalement démontré, considérant que l'expert judiciaire ne retient aucune altération de la fonction sexuelle de la victime, la diminution de sa libido étant imputable à sa problématique psychique.

Sur ce, ce préjudice s'apprécie, en fonction de l'âge et de la situation de la victime, eu égard à l'atteinte à la morphologie des organes sexuels, à la libido et à la fonction procréatrice.

S'il n'existe pour Mme [D] d'atteinte ni à la morphologie de ses organes sexuels ni à sa fonction reproductrice, il demeure qu'au regard de ses séquelles neuropsychologiques et de ses céphalées, elle subit des troubles associés de la libido, de sorte que l'impact de l'accident est réel chez une femme âgée de 46 ans perturbée sur le plan psychique et cognitif et limitée dans sa vie sexuelle.

Au regard de ces éléments, l'indemnisation intégrale de ce préjudice sexuel a été exactement fixée à 10'000 euros.

B - Sur la liquidation des préjudices

Des pièces versées au débat, il ressort que la GMF, assureur du véhicule conduit par M.'[P] responsable de l'accident, a versé à Mme [D], qui ne le conteste pas, quatre provisions d'un montant cumulé de 20'000 euros à déduire de l'indemnisation définitive de son préjudice corporel (soit 9'000 euros + 8'500 euros + 1'000 euros + 1'500 euros), et non une provision de 38'500 euros telle que retenue par erreur par le premier juge.

Au vu de l'ensemble des éléments énoncés, il revient à Mme [D], à la CPAM du Hainaut, et au centre [F] [E], avant déduction des provisions déjà reçues à hauteur de - 20'000 euros, les sommes suivantes':

- 9'959,05 euros au titre des dépenses de santé actuelles,

dont la somme de 1'543,68 euros revenant à la victime,

dont la somme de 8'415,37 euros revenant à la CPAM de [Localité 6]-[Localité 13] ;

- 26'234,80 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels,

dont la somme de 6'428,45 euros revenant à la victime,

dont la somme de 9'960,05 euros revenant à la CPAM de [Localité 6]-[Localité 13],

dont la somme de 9'846,30 euros revenant à l'employeur, le centre [F] [E] ;

- 10'334,04 euros au titre des frais divers proprement dits ;

- 10'853,21 euros au titre de l'assistance temporaire par une tierce personne, en ce compris l'aide à la parentalité ;

- 17'635,54 euros au titre des dépenses de santé futures,

dont la somme de 292,44 euros revenant à la victime,

dont la somme de 17'344,10 euros revenant à la CPAM de [Localité 6]-[Localité 13] ;

- 583'748,67 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs,

dont la somme de 427'382,72 euros revenant à la victime,

dont la somme de 156'365,95 euros revenant à la CPAM de [Localité 6]-[Localité 13] ;

- 50'000 euros au titre de l'incidence professionnelle ;

- 106'054,62 euros au titre de l'assistance permanente par une tierce personne ;

- 8'120 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire ;

- 8'000 euros au titre des souffrances endurées ;

- 500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ;

- 52'000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;

- 3'000 euros au titre du préjudice esthétique permanent ;

- 10'000 euros au titre du préjudice sexuel.

La créance de débours définitifs de la CPAM de [Localité 6]-[Localité 13] sera fixée à la somme de 192'085,47 euros (soit 8'415,37 + 9'960,05 + 17'344,10 + 156'365,95).

II - Sur l'indemnisation du préjudice d'affection des victimes indirectes

Le premier juge a accordé au titre du préjudice d'affection à M. [H] [R] une indemnisation de 6'000 euros, et aux enfants, M.'[I] [R] et [K] [R], une indemnisation de 9'000 euros chacun, dont ceux-ci sollicitent confirmation en appel.

Les consorts [R] exposent que M.'[H] [R] a vécu maritalement pendant de nombreuses années avec Mme [D] avec laquelle il a deux enfants ; ils ont été très choqués par l'accident de leur compagne et mère, et ont eu peur de ne plus la revoir. Mme [D] a changé de comportement envers sa famille à la suite du fait dommageable, devenant plus agressive et moins sociable. Les difficultés et disputes conjugales ont progressivement conduit à la séparation du couple en février 2019. Ils ajoutent que son handicap et son changement d'humeur l'ont empêchée de se rendre autant disponible pour eux.

Ils relèvent que la GMF n'a pas soulevé en première instance la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée s'attachant au jugement du 18 décembre 2015.

M [P] et la GMF concluent au débouté des demandes adverses, faisant valoir que par jugement du 18 décembre 2015, le tribunal judiciaire de Lille a déjà indemnisé ce poste de préjudice en allouant à M.'[H] [R] et aux enfants des dommages et intérêts de 5'000 euros chacun réparant ainsi leur préjudice d'affection, de sorte que ce jugement devenu définitif est revêtu de l'autorité de la chose jugée ; c'est donc par erreur que le tribunal judiciaire de Lille a de nouveau condamné la GMF à verser à M. [H] [R] la somme de 6'000 euros et à chacun de ses deux enfants la somme de 9'000 euros en réparation de leur préjudice d'affection.

Ils objectent également que ce préjudice n'est accordé par les juges que lorsque la victime subit de très lourdes séquelles ; que Mme [D] n'a pas été hospitalisée et ne subit pas de lourd handicap, de sorte que son concubin et ses enfants ne remplissent pas les conditions nécessaires pour pouvoir prétendre à une indemnisation spécifique en leur qualité de victimes par ricochet.

Sur ce, en vertu des articles 122 et 123 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande,sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel ['] la chose jugée. Les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il n'en soit disposé autrement, et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages et intérêts ceux qui se seraient abstenus dans une intention dilatoire de les soulever plus tôt.

Il résulte de ces dispositions que la fin de non-recevoir tirée de la chose jugée peut être opposée en tout état de cause et pour la première fois en appel.

En l'espèce, la lecture du jugement du 18 décembre 2015, lequel est devenu définitif pour n'avoir pas été frappé d'appel, enseigne que M.'[H] [R] et les enfants se sont vu accorder chacun une somme de 5'000 euros de dommages et intérêts réparant leur entier préjudice.

Alors que les consorts [R] n'établissent pas que le préjudice d'affection qu'ils invoquent soit distinct du préjudice déjà indemnisé par le jugement rendu le 18 décembre 2015, et qu'ils n'allèguent ni ne démontrent avoir subi un préjudice postérieur à celui déjà indemnisé, il convient de les déclarer irrecevables en leurs demandes de réparation du préjudice d'affection, le jugement du 18 décembre 2015 qui a définitivement liquidé leur préjudice à la suite du fait dommageable étant revêtu de l'autorité de la chose jugée.

Le jugement dont appel sera infirmé de ce chef.

III - Sur les autres demandes

A - Sur le doublement des intérêts au taux légal

Le premier juge a débouté Mme [D] de sa demande de doublement des intérêts au taux légal sur le fondement des articles L.'211-9 et L.'211-13 du code des assurances.

Mme [D] demande en cause d'appel la réformation du jugement critiqué, et l'application de la sanction du doublement des intérêts au taux légal. Elle fait valoir que :

- elle produit en pièce 146 l'offre d'indemnisation définitive complète de la GMF datée du 18 janvier 2018 ;

- les provisions de 1'000 et 1'500 euros, versées le 6 octobre et 25 décembre 2008, ne valent pas offre d'indemnisation ;

- aucune proposition d'indemnisation ne lui a été adressée par l'assureur après le dépôt du rapport d'expertise judiciaire [J] du 17 juin 2011 ;

- une demande de contre-expertise de la victime ne dispense pas l'assureur de formuler une offre d'indemnisation ;

- si la GMF a versé des provisions, elle n'a formulé aucune offre comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice dans le délai de huit mois après l'accident ;

- l'offre d'indemnisation du 18 janvier 2018 à hauteur de 99'376,10 euros est incomplète et équivaut à une absence d'offre ; elle ne comprend pas tous les postes indemnisables, et notamment pas le préjudice d'agrément, les pertes de gains professionnels actuels et futurs, ou encore le préjudice sexuel ;

- il convient de condamner l'assureur au doublement des intérêts à compter du 3 février 2009 jusqu'au jour de l'arrêt devenu définitif sur le montant des indemnités allouées, et ce avant déduction des créances des organismes sociaux et des provisions.

M. [P] et la GMF sollicitent la confirmation du jugement querellé en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande au titre du doublement de l'intérêt légal ; ils font valoir que':

- l'assureur a régulièrement versé des provisions à Mme [D] à valoir sur la liquidation de son préjudice corporel ;

- la victime a multiplié les opérations d'expertise avec différents praticiens sans même en informer l'assureur, et a formulé tardivement une demande de contre-expertise ;

- l'expert [Z] a déposé son rapport le 24 septembre 2017 ; la GMF a transmis une offre d'indemnisation complète au conseil de Mme [D] par lettre officielle du 18 janvier 2018 à hauteur de 99'376,10 euros, respectant ainsi le délai de cinq mois prévu par l'article L. 211-9 ;

- cette offre n'est pas dérisoire, mais bien conforme aux conclusions et aux postes retenus par l'expert [Z].

Sur ce, il résulte de l'article L.'211-9 du code des assurances :

- tout d'abord, que quelle que soit la nature du dommage, dans le cas où la responsabilité n'est pas contestée et où le dommage a été entièrement quantifié, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter à la victime une offre d'indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée ; lorsque la responsabilité est rejetée ou n'est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n'a pas été entièrement quantifié, l'assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande,

- ensuite, qu'une offre d'indemnité doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans le délai maximum de huit mois à compter de l'accident ; en cas de décès de la victime, l'offre est faite à ses héritiers et, s'il y a lieu, à son conjoint ; l'offre comprend alors tous les éléments indemnisables du préjudice, y compris les éléments relatifs aux dommages aux biens lorsqu'ils n'ont pas fait l'objet d'un règlement préalable,

- enfin, que cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime ; l'offre définitive d'indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.

Il résulte aussi de l'article L.'211-13 du code des assurances que lorsque l'offre n'a pas été faite dans les délais impartis à l'article L. 211-9, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif'; cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur.

Il ressort de la combinaison de ces textes que :

- la circonstance qu'une instance oppose la victime à la personne tenue à réparation et à son assureur n'exonère pas ce dernier de son obligation de présenter une offre d'indemnité dans le délai imparti par l'article L. 211-9 du code des assurances, sous la sanction prévue par l'article L. 211-13 du même code, de sorte que l'introduction d'une procédure à l'initiative de la victime ne dispense pas l'assureur de faire, dans le délai requis, l'offre imposée par l'article L. 211-9 ;

- le paiement d'une provision en exécution d'une décision de justice n'exonère pas l'assureur de son obligation de présenter une offre ;

- en cas de contestation de la responsabilité, l'assureur n'est pas dispensé de faire une offre dans les délais fixés par l'article L. 211-9 ;

- la sanction prévue par l'article L. 211-13 s'applique sans distinction, selon ce texte, en cas de non-respect des délais fixés par l'article L. 211-9.

En l'espèce, Mme [D] produit trois quittances d'indemnité provisionnelle de 1'000 euros le 6 octobre 2008, 1'500 euros portant une date illisible, et 9'000 euros le 30 septembre 2010. En outre, le jugement du 18 décembre 2015 devenu définitif a condamné la GMF à payer à Mme [D] une somme de 8'500 euros à titre d'indemnité provisionnelle complémentaire. Les parties, dans leurs dernières écritures, ne contestent pas que la victime a perçu de l'assureur en quatre versements une somme provisionnelle totale de 20'000 euros.

Si la GMF indique que Mme [D] n'est pas restée sans provision, cela ne dispensait pas l'assureur de son obligation de formuler une offre d'indemnisation provisionnelle dans le délai de huit mois à compter de l'accident, soit avant le 3 février 2009, puis une offre définitive d'indemnisation dans un délai de cinq mois à compter du rapport d'expertise médicale contradictoire, qui a été établi le 20 septembre 2017 et a fixé la date de consolidation, soit avant le 20 février 2018.

Les différentes sommes versées par la GMF à la victime de l'accident, correspondant à des provisions, ne peuvent pas être assimilées à des offres d'indemnisation provisionnelles, et ces paiements provisionnels ne dispensaient pas l'assureur de son obligation de formuler une véritable offre d'indemnisation provisionnelle, en dépit de l'absence de consolidation de l'état de la victime, dans les délais prévus par l'article L.'211-9 précité.

Dès lors, l'accident s'étant produit le 3 juin 2008, l'indemnité allouée produira intérêts au double du taux légal à compter du 3 février 2009.

S'agissant du point d'arrivée des intérêts au double du taux légal, il ressort de la combinaison des articles L.'211-9 et L.'211-13 que, d'une part, une offre d'indemnisation définitive doit être formulée dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de la consolidation de la victime, d'autre part qu'une offre manifestement insuffisante équivaut à une absence d'offre et, enfin, qu'une offre incomplète, qui ne comprend pas tous les éléments indemnisables du préjudice, équivaut à une absence d'offre.

Si les parties ne contestent pas l'existence d'une offre d'indemnisation d'un montant global de 99'376,10 euros, adressée le 18 janvier 2018 à Mme [D], il reste, d'une part, que l'assureur ne la verse pas au débat et, d'autre part, que la victime se contente d'en produire la première et la dernière page, de sorte que la cour n'est pas mise en mesure d'apprécier si elle comprend tous les éléments indemnisables du préjudice.

Il s'ensuit que la GMF ne saurait utilement se prévaloir de l'offre d'indemnisation à hauteur de 99'376,10 euros, proposée le 18 janvier 2018, alors qu'il n'est pas démontré qu'elle comporte le détail de l'ensemble de postes de préjudices indemnisables, de sorte qu'elle équivaut à une absence d'offre au sens des textes précités, et qu'elle n'apparaît pas de nature à interrompre le cours de la pénalité.

En outre, la cour retient que cette offre est manifestement insuffisante eu regard au montant des dommages et intérêts alloués à la victime directe par le présent arrêt, lequel s'élève à la somme de 896'439,93 euros, avant imputation de la créance des tiers payeurs que sont l'employeur et l'organisme de sécurité sociale.

Dès lors, la demande de doublement des intérêts au taux légal est déclarée recevable et bien fondée pour la période s'écoulant du 3 février 2009 au 26 janvier 2023, date de l'arrêt.

La sanction du doublement des intérêts au taux légal a pour assiette la totalité de l'indemnité allouée à la victime à titre de dommages-intérêts, avant imputation de la créance des tiers payeurs et sans déduction des provisions déjà versées.

En conséquence, le doublement des intérêts au taux légal s'appliquera sur la somme de 896'439,93 euros du 3 février 2009 au 26 janvier 2023.

Le jugement querellé sera donc infirmé en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande de doublement de l'intérêt légal.

B - Sur la capitalisation des intérêts

La capitalisation des intérêts étant de droit dès lors qu'elle est demandée, elle sera ordonnée dans les conditions de l'article 1154 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

Dès lors, la capitalisation annuelle des intérêts sera ordonnée pour les condamnations prononcées par le présent arrêt dans les conditions de l'article 1154 du code civil.

Le jugement critiqué est confirmé sur ce point.

C - Sur l'opposabilité de l'arrêt

La demande tendant à voir déclarer l'arrêt opposable au centre [F] [E] et à la CPAM de [Localité 6]-[Localité 13] est sans objet, dès lors qu'ils sont tous deux parties à l'instance d'appel.

Mme [D] et les consorts [R] seront déboutés de leur demande sur ce point.

D - Sur les dépens et les frais irrépétibles

La cour observe que le jugement querellé n'est pas contesté en ce qu'il a :

- condamné in solidum M.'[P] et la GMF à payer à Mme [D] la somme de 12'800 euros au titre de ses frais irrépétibles ;

- condamné in solidum M.'[P] et la GMF à payer au centre [F] [E] la somme de 1'500 euros au titre de ses frais irrépétibles'sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum M.'[P] et la GMF aux dépens de première instance, incluant ceux de référé et les frais d'expertises judiciaires.

M. [P] et la GMF, qui succombent, seront condamnés in solidum aux entiers dépens d'appel.

L'équité conduit à les condamner in solidum à payer une indemnité de procédure d'appel de 1'500 euros au centre [F] [E], et de 2'500 euros à Mme [D] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

E - Sur l'exécution provisoire

Les consorts [D]-[R] ne formulent pas en appel de demande au titre de l'exécution provisoire de la décision à intervenir, laquelle s'avérerait en tout état de cause dépourvue d'objet devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Dit que la demande tendant à voir ordonner la jonction de la procédure RG n°21-04960 à la procédure RG n°21-04246 est devenue sans objet ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 17 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Lille, sauf en ce qu'il a :

- condamné in solidum M. [C] [P] et la société GMF à payer à Mme [B] [D] les sommes suivantes en réparation de son préjudice corporel :

'1'510,66 euros au titre des dépenses de santé actuelles ;

'9'396,57 euros au titre des frais divers ;

'6'322,01 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels ;

'286,20 euros au titre des dépenses de santé futures ;

'109'118,38 euros au titre de l'assistance par une tierce personne permanente ;

- dit que ces sommes seraient versées sous déduction des provisions amiablement versées et judiciairement ordonnées à hauteur de 38'500 euros ;

- condamné in solidum M.'[C] [P] et la société GMF à payer à M.'[H] [R] la somme de 6'000 euros en réparation de son préjudice d'affection ;

- condamné in solidum M.'[C] [P] et la société GMF à payer à [I] [R] et [K] [R], représentés par leurs parents, M.'[H] [R] et Mme [B] [D], la somme de 9'000 euros chacun en réparation de leur préjudice d'affection ;

- débouté Mme [B] [D] de sa demande au titre du doublement de l'intérêt légal ;

L'infirme de ces seuls chefs ;

Prononçant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne in solidum M.'[C] [P] et la société GMF à payer à Mme [B] [D] les sommes suivantes en réparation de son préjudice corporel :

'1'543,68 euros au titre des dépenses de santé actuelles ;

'10'334,04 euros au titre des frais divers proprement dits ;

'6'428,45 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels ;

'292,44 euros au titre des dépenses de santé futures ;

'106'054,62 euros au titre de l'assistance par une tierce personne permanente ;

Dit que les sommes allouées seront payées sous déduction des provisions amiablement versées et judiciairement ordonnées à hauteur de 20'000 euros ;

Déclare irrecevables les demandes de M.'[H] [R], M.'[I] [R], et [K] [R], représentée par Mme [B] [D] et M.'[H] [R], tendant à obtenir réparation de leur préjudice d'affection ;

Fixe la créance de débours de la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 6]-[Localité 13] à la somme de 192'085,47 euros suivant les relevés de débours définitifs du 30 mars 2012 et 9 août 2019 ;

Condamne la société GMF à payer les intérêts au double du taux légal entre le 3 février 2009 et le 26 janvier 2023 sur la somme indemnitaire de 896'439,93 euros ;

Déclare sans objet la demande de Mme [B] [D] et des consorts [R] tendant à voir déclarer l'arrêt commun à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 6]-[Localité 13] et au centre [F] [E] ;

Rejette les plus amples prétentions des parties ;

Condamne in solidum M.'[C] [P] et la société GMF aux entiers dépens d'appel ;

Condamne in solidum M.'[C] [P] et la société GMF à payer à Mme [B] [D] la somme de 2'500 euros, et au centre [F] [E] la somme de 1'500 euros à titre d'indemnité de procédure d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier

Fabienne Dufossé

Le Président

Guillaume Salomon


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Troisieme chambre
Numéro d'arrêt : 21/04246
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;21.04246 ?
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