COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre des Libertés Individuelles
N° RG 23/00070 - N° Portalis DBVT-V-B7H-UV7H
N° de Minute : 73
Ordonnance du vendredi 13 janvier 2023
République Française
Au nom du Peuple Français
APPELANT
M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS
dûment avisé, absent représenté par Me SAUDUBRAY, avocat
INTIMÉ
M. [K] [B]
né le 28 Août 2003 à [Localité 4]
de nationalité Tunisienne
[Adresse 1]
[Localité 2]
absent, non représenté
ayant eu devant le juge des libertés et de la détention Me DJURDJEVIC Svetlana
M. le procureur général : non comparant
MAGISTRAT(E) DELEGUE(E) : Bertrand DUEZ, conseiller à la cour d'appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché
assisté(e) de Aurélie DI DIO, Greffière
DÉBATS : à l'audience publique du vendredi 13 janvier 2023 à 13 h 30
ORDONNANCE : prononcée publiquement à Douai le vendredi 13 janvier 2023 à
Le premier président ou son délégué,
Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et spécialemnt L 743-21, L 743-23, R 743-10, R 743-11, R 743-18 et R 743-19 ;
Vu l'ordonnance rendue le 12 janvier 2023 par le Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER qui a mis fin à la rétention administrative de de M. [K] [B] ;
Vu l'appel motivé interjeté par M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 12 janvier 2023 ;
Vu l'audition des parties ;
FAITS et PROCÉDURE
A la suite d'un contrôle d'identité au visa de l'article 78-2 al 1er du code de procédure pénale le 09/01/2023 gare ferroviaire de [Localité 2] (62) monsieur [K] [B], de nationalité tunisienne, a fait l'objet d'une mesure de placement en rétention administrative ordonnée par monsieur le Préfet du Pas-de-Calais le 10 janvier 2023 à 12h20 en exécution d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire délivrée le 17 juin 2022 par monsieur le Préfet du Rhône.
Par ordonnance du 12 janvier 2023 (11h25) le juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Boulogne-sur-Mer, statuant tant sur le recours en annulation du placement en rétention administrative, formé par l'étranger au visa de l'article L 741-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sur la requête de monsieur le Préfet du Pas-de-Calais en prolongation du placement en rétention administrative a refusé la prolongation du placement en rétention administrative aux motifs ci après repris :
Attendu que, le premier moyen soulevé n'est pas pertinent dés lors qu'au vu de la rédaction du procès-verbal d'interpellation, le contrôle d'identité auquel il a été procédé est parfaitement justifié au vu des dispositions de l'article 78-2 alinéa 1 et 2 du CODE DE PROCÉDURE PÉNALE, dès lors que les services de police ne se sont pas contentés, comme le reproche leur en est fait à tort, d'invoquer l'attitude fuyante de l'intéressé mais ont exposé de manière précise et circonstanciés les éléments pouvant fonder une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner que l'intéressé avait commis ou tenté de commettre un crime ou un délit ou qu'il s'apprêtait a le faire;
Attendu que le second moyen fondé sur l'absence de prise en compte de la santé de l'intéressé n'est pas plus pertinent dès lors que la lecture de l'arrêté préfectoral révèle que cet élément a été pris en compte par l'autorité préfectorale en fonction des éléments dont elle disposait au moment où elle a pris sa décision;
Qu'en revanche, les dispositions de l'article L 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui font peser sur l'Administration "une obligation de diligence n'apparaissent pas avoir été respectées en l'espèce dès lors que l'intéressé a indiqué aux services de police que ses empreintes ont été prises en Italie à son arrivée en Europe, et qu'à aucun moment, contrairement à l'obligation qui lui en est faite par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative n'a pas estimé utile de vérifier par l'intermédiaire de la consultation du fichier Eurodac, la véracité des dires de l'intéressé à ce sujet se contentant de décider de prendre une obligation de quitter le territoire français
Par déclaration d'appel du 12 janvier 2023 à 13h40 monsieur le Préfet du Pas-de-Calais a sollicité l'infirmation de cette décision et la prolongation du placement en rétention administrative de monsieur [K] [B] pour 28 jours.
Au soutien de sa déclaration d'appel l'autorité préfectorale appelante expose :
Que la consultation de la borne EURODAC n'est pas une obligation dont le non-accomplissement entraînerait la main-levée du placement en rétention administrative.
Qu'en tout état de cause lors de son audition administrative lors de laquelle il était assisté d'un interprète, monsieur [B] a simplement déclaré que ses empreintes avaient été prises en Italie, avant d'affirmer qu'il n'avait jamais réalisé de démarche administrative ni effectué de demande d'asile dans un pays européen.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur le moyen retenu par le juge des libertés et de la détention tenant à la consultation de la borne EURODAC
Il ressort de l'article 17 du règlement UE n° 603/2013 du 26 juin 2013 que la consultation du fichier Eurodac par l'administration est une faculté et non une obligation.
L'omission de cette vérification ne peut être considérée comme un manque de diligence pour limiter au maximum la durée du placement en rétention administrative au sens de l'article L 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que lors qu'il existe des raisons sérieuses de considérer que l'étranger a introduit une demande de protection internationale dans un autre pays membre et qu'il est acquis que, si cette consultation avait été faite, le placement en rétention administrative aurait été écourté par l'effet d'une réadmission dans les termes et conditions de l'article 29 du règlement UE n° 604/2013 du 26 juin 2013.
Tel n'est pas le cas en l'espèce puisque monsieur [K] [B] a répondu par la négative à la question : 'avez vous effectué une demande d'asile dans un pays européen'
Il s'ensuit que le premier juge ne pouvait lever le placement en rétention administrative pour ce motif .
La décision déférée sera donc infirmée.
2) Sur les autres moyens soumis au premier juge
Au regard des articles 901-4, 933 et 562 al2 du code de procédure civile, indépendamment des moyens contenus dans l'acte d'appel, la dévolution s'applique de plein droit pour l'ensemble du jugement de première instance lorsqu'il a été invoqué devant le premier juge une exception de nullité qui a aboutit à la décision déférée.
L'analyse des éléments de fait et de droit faite par le premier juge sur les autres moyens soutenus devant lui et ci dessus rappelés sont exacts et pertinents. Ni le contrôle d'identité ni le placement en rétention administrative ne sont donc irréguliers.
PAR CES MOTIFS
DÉCLARE l'appel recevable ;
INFIRME l'ordonnance entreprise.
Statuant de nouveau
ORDONNE la prolongation du placement en rétention administrative de monsieur [K] [B] dans des locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée de 28 jours à compter du 12 janvier 2023 (12h20)
DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;
DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [K] [B], à son conseil le cas échéant et à l'autorité administrative.
Aurélie DI DIO, Greffière
Bertrand DUEZ, conseiller
N° RG 23/00070 - N° Portalis DBVT-V-B7H-UV7H
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE 73 DU 13 Janvier 2023 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l'intéressé au greffe de la cour d'appel de Douai par courriel - [Courriel 3]) :
Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Pour information :
L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
- décisision transmise par courriel pour notification à l'autorité administrative
- décision communiquée au tribunal administratif de Lille
- décision communiquée à M. le procureur général
- copie au Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER
Le greffier, le vendredi 13 janvier 2023
N° RG 23/00070 - N° Portalis DBVT-V-B7H-UV7H