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05/01/2023 | FRANCE | N°21/03419

France | France, Cour d'appel de Douai, Troisieme chambre, 05 janvier 2023, 21/03419


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



TROISIEME CHAMBRE



ARRÊT DU 05/01/2023



****





N° de MINUTE : 23/02

N° RG 21/03419 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TWN5



Jugement (N° 20/02166) rendu le 27 Mai 2021 par le tribunal judiciaire de Valenciennes





APPELANTS



Monsieur [Z] [Y]

né le [Date naissance 3] 1969 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 8]

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Madame [D] [P] [Y]

née le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 10] (Thailande)

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 8]



Madame [J] [X] [Y]

née le [Date naissance 2] 1945 à [Localité 8]

de nationalité ...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 05/01/2023

****

N° de MINUTE : 23/02

N° RG 21/03419 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TWN5

Jugement (N° 20/02166) rendu le 27 Mai 2021 par le tribunal judiciaire de Valenciennes

APPELANTS

Monsieur [Z] [Y]

né le [Date naissance 3] 1969 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 8]

Madame [D] [P] [Y]

née le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 10] (Thailande)

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 8]

Madame [J] [X] [Y]

née le [Date naissance 2] 1945 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 8]

Représentés par Me Pierre-Etienne Bodart, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

substitué par Me Chloé Guilbeau, avocat au barreau de Lille

INTIMÉS

Monsieur [F] [A]

né le [Date naissance 4] 1974 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 8]

Madame [H] [B] [A]

née le [Date naissance 5] 1978 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 8]

Représentée par Me Dimitri Deregnaucourt, avocat au barreau de Lille, avocat constitué, substitué par Me Leuliet, avocat au barreau de Douai

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Guillaume Salomon, président de Chambre

Claire Bertin, conseiller

Yasmina Belkaid, conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Fabienne Dufossé

DÉBATS à l'audience publique du 20 octobre 2022 après rapport oral de l'affaire par Yasmina Belkaid

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 05 janvier 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Guillaume Salomon, président, et Fabienne Dufossé, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 3 octobre 2022

****

Exposé du litige

M. [Z] [Y] et sa mère, et Mme [J] [X] veuve [Y], sont propriétaires de l'ensemble immobilier avec piscine situé [Adresse 7] à [Localité 8] dans lequel ils résident avec Mme [D] [P], épouse de M. [Z] [Y].

M. [F] [A] et son épouse, Mme [H] [B], sont propriétaires du fonds voisin situé [Adresse 6] à [Localité 8] sur lequel a été édifié leur maison d'habitation en 2011.

Au début de 2012, M. et Mme [A] ont fait construire un pigeonnier sur leur terrain après avoir obtenu un permis de construire le 22 août 2011.

Le 7 décembre 2012, les époux [A] ont obtenu un nouveau permis de construire portant sur un garage pigeonnier d'une surface de 84,24 m².

Saisi par M. [Y], le juge des référés du tribunal administratif de Lille a suspendu ce deuxième permis de construire qui a ensuite été annulé par un jugement rendu le 17 septembre 2015 par le tribunal administratif de Lille.

Par acte d'huissier de justice du 24 juillet 2015, les consorts [Y] ont assigné les époux [A] aux fins de faire cesser tout élevage de pigeons sur leur propriété et de procéder au démontage du pigeonnier.

Par un jugement rendu le 21 juin 2018, le tribunal judiciaire de Valenciennes a':

- Avant dire droit':

'Déclaré recevable la demande de saisine du tribunal administratif de la question préjudicielle de la légalité du permis de construire du 22 août 2011

'Invité les consorts [Y] à saisir le tribunal administratif de Lille de la question préjudicielle de la légalité du permis de construire obtenu par M. et Mme [A] en date du 22 août 2011

'Sursis à statuer sur les demandes des consorts [Y] jusqu'à la décision du tribunal administratif de Lille

'Sursis à statuer sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive formulée par les consorts [A]

- Au fond':

'Débouté les époux [A] de leur demande de dommages et intérêts et de pose d'un enduit sur le mur de parpaing

'Débouté les époux [A] de leur demande de dommages et intérêts en lien avec la taille de la haie et de leur demande de taille des arbres empiétant sur le chemin communal sous astreinte

'Débouté les époux [A] de leur demande de dommages et intérêts fondée sur le pollen du cèdre bleu

'Débouté les époux [A] de leur demande d'expertise et de leur demande de dommages et intérêts pour trouble de jouissance en raison de la perte d'ensoleillement de leur terrain

'Sursis à statuer sur les demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par un arrêt du 3 octobre 2019, la cour d'appel de Douai a confirmé le jugement avant dire droit en toutes ses dispositions et a ordonné la transmission au tribunal administratif par le greffe de la cour afin de statuer sur la question préjudicielle tirée de l'illégalité du permis de construire du 22 août 2011.

Par un jugement rendu le 27 juin 2019, le tribunal administratif de Lille a déclaré que l'arrêté du maire de la commune de [Localité 8]-Aremberg du 22 août 2011 n'était pas entaché d'illégalité au motif que le pigeonnier, dont la construction a été autorisée, était situé à plus de 25 mètres de l'habitation et que la piscine située à une distance d'environ 10 mètres de ce pigeonnier ne pouvait être considérée comme un bâtiment habité ou occupé habituellement par des tiers à l'élevage de pigeons.

Le tribunal judiciaire de Valenciennes, dans son jugement du 27 mai 2021 a':

1 Débouté les consorts [Y] de leurs demandes

2 Débouté les époux [A] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

3 Condamné solidairement les consorts [Y] à payer à chacun des époux [A] la somme de 2'000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens

4 Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire

Par déclaration du 24 juin 2021, les consorts [Y] ont interjeté appel de ce jugement en toutes ses dispositions excepté le chef du dispositif numéroté 2 ci-dessus.

Dans leurs dernières conclusions notifiées le 24 juin 2022, les consorts [Y] demandent à la cour, au visa des articles 544, 1240 et 2224 du code civil de réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Valenciennes le 27 mai 2021 et, statuant à nouveau'de':

- A titre principal

'Condamner les époux [A] à faire cesser le trouble anormal de voisinage subi et notamment à cette fin à procéder à la cessation de tout élevage de pigeons sur leur propriété et au démontage du bâtiment à usage de pigeonnier existant et ce dans les deux mois de la signification de l'arrêt à intervenir à l'expiration duquel sera due une astreinte provisionnelle de 50 euros par jour de retard

'Condamner les époux [A] à verser à chacun la somme de 5'000 euros à titre de dommages et intérêts à raison des nuisances subies du fait du trouble anormal de voisinage à ce jour

- A titre subsidiaire

'Condamner les époux [A] à payer à M. [Y] la somme de 20'000 euros, à Mme [D] celle de 10'000 euros et à Mme [J] [Y] celle de 20'000 euros à titre de dommages et intérêts en raison des nuisances subies du fait du trouble anormal de voisinage et de la perte de valeur vénale de leur propriété

- En toute hypothèse

'Débouter les époux [A] de leur appel incident et rejeter leurs demandes reconventionnelles

'Condamner les époux [A] à leur payer la somme de 8'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de l'instance

Au soutien de leurs demandes de démolition du pigeonnier et de réparation de leur préjudice, les consorts [Y] affirment que les nuisances sonores, visuelles et olfactives résultant de la présence dudit pigeonnier à proximité immédiate de leur propriété avec jardin et piscine, comme étant situé à moins de 10 mètres, dépassent les inconvénients normaux du voisinage. Ils précisent que la réalité du trouble de même que son intensité sont avérées par les différents témoignages produits aux débats et les constats d'huissier qui établissent par ailleurs qu'il s'agit bien des pigeons de M. [A], précisant que l'autre pigeonnier, invoqué par les époux [A], est situé à 400 mètres de leur propriété.

Sur l'appel incident, ils estiment que la demande indemnitaire pour procédure abusive n'est pas fondée en rappelant que le tribunal administratif de Lille a suspendu puis annulé le deuxième permis de construire, que les époux [A] ont eux-mêmes formé plusieurs demandes reconventionnelles et que leur action ne tend qu'à faire cesser les survols intempestifs de leur propriété par les pigeons de M. [A].

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 31 août 2022, les époux [A] demandent à la cour de'confirmer le jugement en toutes ses dispositions excepté le chef du dispositif numéroté 2 ci-dessus qui sera infirmé et en conséquence de'débouter les consorts [Y] de toutes leurs demandes et de condamner ces derniers à leur payer la somme de 5'000 euros chacun au titre du préjudice moral pour procédure abusive ainsi que celle de 6'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance en ceux compris les frais de constats d'huissier des 23 octobre 2013, 4 mai 2016 et 26 juillet 2022.

Les époux [A] soutiennent que la réalité des troubles en provenance de leur pigeonnier qui résulteraient selon les consorts [Y] des odeurs nauséabondes, du bruit et des traces de déjection, n'est nullement établie alors que leur pigeonnier se situe en milieu rural, à plus de 30 mètres de l'habitation des consorts [Y], qu'il existe deux autres colombophiles dans le même quartier ainsi qu'une ferme à l'abandon et une église à proximité abritant de nombreux pigeons et que leurs voisins immédiats ne font état d'aucune gêne.

Ils ajoutent que contrairement aux affirmations des consorts [Y], les heures de sortie des pigeons sont limitées et encadrées et que la preuve de l'imputabilité des troubles allégués à leurs propres pigeons n'est pas rapportée.

Enfin, ils estiment que la procédure engagée par les consorts [Y] est abusive en rappelant la multiplication des instances engagées par ceux-ci à leur encontre depuis plusieurs années dans la seule intention de nuire et alors que ces actions répétées et infondées ont une incidence sur l'état de santé de Mme [A], dont les problèmes cardiaques sont incompatibles avec un état de stress.

Il sera renvoyé aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties en application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 octobre 2022.

MOTIFS

Sur l'existence d'un trouble anormal de voisinage

Aux termes de l'article 544 du code civil, la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

Néanmoins, en application de l'article 651 du code civil, les propriétaires sont assujettis à différentes obligations l'un à l'égard de l'autre.

Ainsi, nul ne peut causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage et il appartient à celui qui invoque un trouble anormal de voisinage, en l'espèce les consorts [Y], de rapporter la preuve d'un trouble répétitif d'une certaine intensité et d'un préjudice en résultant.

S'agissant d'une responsabilité sans faute, il importe donc de rechercher si les nuisances, même en l'absence de toute infraction aux règlements, n'excèdent pas les inconvénients normaux du voisinage. Cette appréciation souveraine s'effectue in concreto, en fonction des circonstances de temps et de lieu.

A cet égard, la présence d'un pigeonnier à proximité de la propriété des consorts [Y] n'est pas, à elle seule, constitutive d'un trouble anormal de voisinage.

Les consorts [Y] se plaignent de nuisances sonores et visuelles résultant du survol fréquent et à un niveau très bas de leur propriété par les pigeons qui appartiendraient à M. [A] ainsi que de nuisances olfactives et de dégradations résultant des déjections provoquées par ces pigeons les empêchant ainsi de jouir de leurs espaces extérieurs et notamment de leur piscine.

Il résulte des pièces du dossier que le pigeonnier litigieux, dont la construction s'est achevée le 25 juillet 2013, est implanté en limite séparative nord en retrait du chemin communal derrière l'habitation principale des époux [A] et qu'il a une surface de 38,30 m².

Aux termes du procès-verbal de constat établi à la requête des consorts [Y] le 6 mai 2013, la propriété de ces derniers est bordée par un chemin communal formant limite séparative avec la propriété des époux [A]. Il ressort par ailleurs du plan de masse produit aux débats (pièce 7/12) que la piscine des consorts [Y] se situe à environ 10 mètres du pigeonnier.

Les consorts [Y] ont remis à l'huissier de justice plusieurs enregistrements vidéos réalisés courant 2015 qui rendent compte du bruit de battements d'ailes et du souffle produit par une trentaine de volatiles en vol puis le vol en rotation de volatiles au-dessus de leur propriété et ensuite le survol des lieux par 70 volatiles ainsi que cela ressort du procès-verbal de constat établi le 16 juin 2016 dont il convient de relever qu'il ne mentionne aucunement qu'il s'agit de pigeons.

L'huissier de justice s'est par ailleurs rendu sur les lieux le 26 avril 2019 et a constaté le survol de la propriété des consorts [Y] par un groupe de pigeons venant de la direction de la propriété voisine sans toutefois qu'il ne soit constaté qu'ils sortaient du pigeonnier de M. [A].

Tant les trois attestations de témoignages de deux amis et d'une voisine des consorts [Y] qui font état du survol bas et fréquent au-dessus de la propriété des consorts [Y] de pigeons prétendument attribués à M. [A] que les trois procès-verbaux de dépôt de séquences vidéos dressés par voie d'huissier les 6 avril 2020, 7 juin et 16 juin 2021 aux termes desquels il est également constaté le survol de la propriété des consorts [Y] par 10 à 50 pigeons ainsi que le battement d'ailes et le souffle produit par le vol ne permettent pas d'établir que ces pigeons appartiennent bien à M. [A] ou sont placés sous sa garde.

Celui-ci ne conteste pas être propriétaire d'une quarantaine de pigeons. A cet égard, la circonstance que M. [A] ait été propriétaire d'une centaine de bagues en 2016 n'est pas de nature à démontrer qu'il possède un nombre équivalent ou important de pigeons alors qu'il importe, en toute hypothèse, de démontrer que le préjudice résulte du survol de la propriété des consorts [Y] par les pigeons de M. [A] et par voie de conséquence l'anormalité des troubles allégués.

M. [A] affirme qu'il laisse ses pigeons voler le matin entre 6 heures et 9 heures et éventuellement le soir conformément aux règles de la fédération de colombophile de la région Nord Pas-de-Calais, le président de ladite fédération précisant dans son courrier du 23 juin 2016 que, de manière générale, le colombophile procède à des volées d'entraînement d'une heure environ chaque matin et chaque soir.

Il ressort des procès-verbaux de constat d'huissier de justice dressés les 23 octobre 2013 et 4 mai 2016 que le pigeonnier de M. [A] est fermé par une trappe ne permettant ainsi aucune sortie intempestive de ses pigeons.

Le constat d'huissier dressé le 30 mai 2022 à la demande des consorts [Y] confirme les heures de sortie des pigeons de M. [A] puisqu'il est observé l'envol de 12 à 15 pigeons depuis le pigeonnier de ce dernier entre 7h58 et 9h06.

Mme [U], voisine des consorts [Y], revenant sur sa précédente attestation, indique qu'elle assiste au vol des pigeons de M. [A] uniquement le matin.

Les voisins directs des époux [A] confirment la sortie des pigeons de ces derniers uniquement tôt le matin sans déplorer la moindre nuisance précisant par ailleurs que le champ situé à proximité abrite de nombreux volatiles, tourterelles, pigeons ramiers, pigeons sauvages provenant de fermes voisines et autres oiseaux.

Si, sur la base de séquences vidéos réalisées par les consorts [Y], l'huissier de justice a constaté le survol répété de la propriété des consorts [Y] par des pigeons en dehors du créneau horaire indiqué par M. [A], il ne ressort nullement de ses constatations que ces survols concernent les seuls pigeons de ce dernier alors qu'il n'est pas contesté que la commune de [Localité 8] abrite deux autres colombophiles et que l'un des pigeonniers est situé à 400 mètres de la propriété des consorts [Y].

D'ailleurs, M. [A] a fait constater, le 4 mai 2016, par voie d'huissier de justice le vol de nombreux pigeons alors que les siens étaient enfermés.

Par ailleurs, si l'huissier a constaté la présence de fientes sur la terrasse carrelée de l'espace piscine des consorts [Y], l'abri de piscine, le mur séparatif et le mobilier de jardin, aucun élément ne permet d'établir que ces déjections proviennent exclusivement des pigeons de M. [A] alors en outre que les souillures occasionnées par les déjections de ces pigeons lors de lâchers ne sont pas constitutives de nuisances excédant les inconvénients normaux de voisinage dans le contexte d'un environnement rural dans lequel coexistent différents oiseaux sauvages susceptibles de déposer des déjections tout autant que les pigeons.

Enfin, s'agissant des nuisances sonores alléguées, il n'est pas démontré que le bruit de battements d'ailes et du souffle produit par le vol dépassent les inconvénients normaux du voisinage alors en outre que la propriété des consorts [Y] est située en milieu rural.

En l'absence de démonstration de la réalité des nuisances subies par les consorts [Y], de leur caractère anormal et de leur imputabilité aux époux [A], le jugement sera confirmé en ce qu'il n'a pas retenu l'existence d'un trouble anormal de voisinage.

En conséquence, les consorts [Y] seront déboutés de l'ensemble de leurs demandes formées à ce titre.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Aux termes de l'article 1240 du code civil, l'exercice d'une action en justice peut dégénérer en un abus du droit d'ester en justice qui suppose la démonstration d'une faute.

Il est établi que les consorts [Y] ont engagé plusieurs procédures devant les juridictions administratives et devant les juridictions judiciaires aux fins d'obtenir la suppression du pigeonnier des époux [A].

Le jugement rendu le 21 juin 2018 par le tribunal judiciaire de Valenciennes met en évidence l'existence d'un conflit de voisinage persistant entre les parties, les consorts [Y] contestant la légalité du permis de construire du pigeonnier du 22 août 2011 et demandant la cessation de tout élevage de pigeons tandis que les consorts [A] se plaignent de l'état du mur séparatif, de la hauteur de la haie et des arbres des consorts [Y] comme empiétant sur le chemin communal, des conséquences de la chute de pollen d'un cèdre bleu et d'un trouble de jouissance résultant de la perte d'ensoleillement, la cour d'appel de Douai, dans son arrêt du 3 octobre 2019, les ayant déboutés de leurs demandes reconventionnelles.

Par ailleurs, il convient de relever que par un jugement devenu définitif du 17 septembre 2015, le tribunal administratif de Lille, saisi par les consorts [Y], a annulé le permis de construire du 7 décembre 2012 portant sur le projet de construction d'un deuxième pigeonnier de M. [A].

S'agissant de la contestation de la légalité du permis de construire du premier pigeonnier, si, dans son jugement du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Lille a considéré que l'arrêté du 22 août 2011 n'était entaché d'aucune illégalité, il n'en demeure pas moins que l'absence de toute violation aux règles de l'urbanisme ne fait pas obstacle à la mise en 'uvre de la responsabilité du propriétaire voisin en cas de troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage dès lors qu'ils sont avérés.

Ainsi, le caractère abusif de la présente procédure n'est nullement démontré alors au surplus qu'il n'est nullement établi que les problèmes cardiaques de Mme [A], décelés en 2005, sont en lien avec les procédures diligentées par les consorts [Y].

Par suite, les époux [A] seront déboutés de leur demande indemnitaire en réparation du préjudice moral pour procédure abusive, le jugement querellé étant confirmé sur ce point.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile dont il a fait une équitable application.

L'équité commande de faire droit aux prétentions de M. et Mme [A], au titre de leurs frais irrépétibles exposés à l'occasion de ce recours et de condamner les consorts [Y] au paiement de la somme totale de 1 500 euros à ce titre tenant compte de leurs frais de constats d'huissier qui ne relèvent pas des dépens.

Les consorts [Y], qui succombent, doivent supporter la charge des dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour'

Confirme dans toutes ses dispositions le jugement rendu le 27 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Valenciennes ;

Y ajoutant :

Condamne M. [Z] [Y], Mme [D] [P] et Mme [J] [X] à payer à M. et Mme [A] la somme totale de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne M. [Z] [Y], Mme [D] [P] et Mme [J] [X] aux dépens d'appel.

Le Greffier

Fabienne Dufossé

Le Président

Guillaume Salomon


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Troisieme chambre
Numéro d'arrêt : 21/03419
Date de la décision : 05/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-05;21.03419 ?
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