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16/12/2022 | FRANCE | N°22/01030

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale b salle 1, 16 décembre 2022, 22/01030


ARRÊT DU

16 Décembre 2022







N° 2077/22



N° RG 22/01030 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UMJE



MLBR/CL







DÉFÉRÉ

























Ordonnance du

Conseiller de la mise en état de la Cour d'appel de DOUAI n° F437/22

en date du

24 Juin 2021

(RG 21/1323 )





Jugement n° 21/282 du Conseil de Prud'hommes de Lille en date du 08 juillet 2021







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GROSSE :



aux avocats



le 16 Décembre 2022





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



ETABLISSEMENTS BOSSU CUVELIER, demanderesse au déféré

[Adresse 4]

[Loc...

ARRÊT DU

16 Décembre 2022

N° 2077/22

N° RG 22/01030 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UMJE

MLBR/CL

DÉFÉRÉ

Ordonnance du

Conseiller de la mise en état de la Cour d'appel de DOUAI n° F437/22

en date du

24 Juin 2021

(RG 21/1323 )

Jugement n° 21/282 du Conseil de Prud'hommes de Lille en date du 08 juillet 2021

GROSSE :

aux avocats

le 16 Décembre 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

ETABLISSEMENTS BOSSU CUVELIER, demanderesse au déféré

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Guy FOUTRY, avocat au barreau de DOUAI assisté de Me JULIE BEOT-RABIOT, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

M. [B] [J], défendeur au déféré

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Alexandre BAREGE, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS : à l'audience publique du 15 Novembre 2022

Tenue par Marie LE BRAS

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Gaetan DELETTREZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Marie LE BRAS

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Alain MOUYSSET

: CONSEILLER

Patrick SENDRAL

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 16 Décembre 2022,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Marie LE BRAS, Président et par Gaetan DELETTREZ, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Statuant en matière de déféré

EXPOSÉ DU LITIGE

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Lille en date du 8 juillet 2021 dans le litige opposant la société Bossu Cuvelier à M. [B] [J],

Vu la déclaration d'appel de la société Bossu Cuvelier reçue le 2 août 2021,

Vu les premières conclusions de l'appelante déposées le 2 novembre 2021,

Vu les premières conclusions de M. [J], en qualité d'intimé, déposées le 3 février 2022,

Vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état rendue le 24 juin 2022 déclarant lesdites conclusions recevables après avoir fait application de l'article 910-3 du code de procédure civile,

Vu la requête en déféré visant cette ordonnance déposée par la société Bossu Cuvelier le 8 juillet 2022,

Vu les conclusions sur déféré de M. [J] reçues le 5 août 2022,

Vu les conclusions en réponse sur déféré de la société Bossu Cuvelier reçues le 21 octobre 2022,

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La société Bossu Cuvelier conclut à l'infirmation de l'ordonnance déférée du conseiller de la mise en état, en faisant valoir que M. [J] ne peut se prévaloir d'un cas de force majeure pour écarter l'irrecevabilité de ses premières conclusions d'intimé sur le fondement de l'article 909 du code de procédure civile.

Elle soutient que contrairement à ce qu'a retenu le conseiller de la mise en état, la contamination le 2 février 2022 par le virus de la Covid 19 de Maître [V], avocat collaborateur au sein du cabinet Califano-Barège, ne présentait pas le caractère imprévisible et irrésistible d'un cas de force majeure au sens de l'article 910-3 du code de procédure civile, en raison d'une part de l'ampleur et de la durée de la crise sanitaire qui la rendait prévisible, et d'autre part, de l'absence d'élément de nature à démontrer que cette contamination l'avait empêché, de même que les autres membres du cabinet d'avocats, de finaliser les conclusions avant le terme du délai fixé au 2 février 2022.

En réponse au moyen adverse, elle fait enfin valoir qu'en l'absence de cas de force majeure, M. [J] ne peut se prévaloir de l'article 6§1 de la Convention européenne des droits de l'homme pour soutenir que l'irrecevabilité de ses conclusions le priverait de son droit d'accès au juge et à un procès équitable dès lors qu'il bénéficiait d'un délai de 3 mois pour déposer ses conclusions et que la tardiveté de leur dépôt n'est due qu'au dysfonctionnement interne du cabinet d'avocats qui le représente et non à un formalisme excessif de la procédure civile.

Pour sa part, M. [J] conclut à la confirmation de l'ordonnance déférée. Il explique que Maître [V], avocat collaborateur chargé de finaliser ses conclusions d'intimé, a été contraint d'effectuer dans la journée du 2 février 2022 un test PCR qui s'est avéré positif, ce qui a entraîné son isolement ainsi que celui des autres membres du cabinet, déclarés cas contact, dans l'attente du résultat de leur test respectif.

Il précise qu'à réception de son test négatif le 3 février 2022, Maître Barège a pu finaliser dans la matinée les conclusions pour les transmettre à la cour et à la partie adverse.

Selon lui, cet événement présente les caractères d'imprévisibilité et d'irrésistibilité de la force majeure, insistant sur le fait que tous les membres du cabinet, même les avocats non-salariés, potentiellement contaminés et source de contamination, n'avaient pas d'autre choix que de s'isoler dans l'attente d'un test négatif compte tenu de la gravité du virus sur notamment les personnes immunodéprimées.

M. [J] fait enfin valoir que dans un tel contexte, l'irrecevabilité de ses conclusions serait en tout état de cause contraire aux dispositions de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme qui garantit un droit concret et effectif d'accès au juge et à un procès équitable.

Sur ce,

Selon l'article 909 du code de procédure civile, l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.

Aux termesde l'article 910-3 du même code, l'application des sanctions prévues par les articles 908 à 910 dudit code peut toutefois être écartée en cas de force majeure que constitue une circonstance non imputable à une partie et qui revêt pour elle un caractère insurmontable.

Il est en l'espèce constant que le conseil de M. [J] a déposé ses premières conclusions d'intimé le 3 février 2022 alors que le délai de 3 mois imparti par l'article 909 précité expirait le 2 février 2022.

Pour justifier du caractère imprévisible et irrésistible des circonstances qui l'ont empêché de les transmettre avant le terme de ce délai, Maître Barège, avocat constitué pour M. [J], produit le test PCR positif d'un collaborateur de son cabinet, Maître [Z] [V], à la suite d'un prélèvement effectué le 2 février 2022 à 10h22.

Or, à supposer même que ce collaborateur ait été contraint de s'isoler toute la journée du 2 février 2022 à la suite de sa contamination à la Covid-19, cela ne suffit pas à établir que Maître Barège, conseil désigné par M. [J] pour le représenter dans cette affaire, n'a pas pu lui-même finaliser les conclusions en raison de circonstances relevant de la force majeure.

En effet, sachant qu'il est acquis aux débats que depuis le 3 janvier 2022, les personnes, cas contact, n'avaient plus l'obligation de s'isoler, le conseil de M. [J] ne produit aucune pièce de nature à justifier de son empêchement personnel, ni d'ailleurs d'éventuel élément sur l'empêchement de ses associés et autres collaborateurs ainsi que sur la fermeture du cabinet qui en serait nécessairement résultée alors pourtant qu'il prétend que tous ses membres se sont isolés à leur domicile dans l'attente d'un test négatif.

Il sera au surplus observé que dans son message d'envoi de ses conclusions d'intimé, le conseil de M. [J] n'a pas d'initiative fait état de circonstances particulières indépendantes de sa volonté, pour expliquer la tardiveté de cette transmission auprès du conseiller de la mise en état.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [J] échoue à établir le caractère insurmontable et irrésistible des circonstances avancées pour justifier de l'envoi hors délai de ses conclusions déposées le 3 février 2022, de sorte qu'il ne peut se prévaloir d'un cas de force majeure au sens de l'article 910-3 précité.

A défaut de démontrer l'existence d'un cas de force majeure, l'irrecevabilité des conclusions d'intimé non déposées dans le délai raisonnable de 3 mois imparti par l'article 909 précité ne constitue pas une sanction disproportionnée au but poursuivi qui est d'assurer la célérité et l'efficacité de la procédure d'appel avec représentation obligatoire, sachant que chaque partie est soumise aux mêmes exigences procédurales et bénéficie de l'assistance d'un professionnel du droit parfaitement informé des délais impartis pour conclure, de sorte qu'elle n'est pas contraire aux exigences de l'article 6§ 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Il convient en conséquence d'infirmer l'ordonnance déférée et de déclarer irrecevables les conclusions de M. [J] déposées le 3 février 2022 ainsi que les pièces communiquées ou déposées au soutien desdites conclusions.

Les dépens d'incident suivront le sort de ceux d'appel.

L'équité commande enfin de débouter les parties de leur demande respective sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

INFIRME l'ordonnance déférée rendue le 24 juin 2022 par le conseiller de la mise en état,

statuant à nouveau,

DECLARE irrecevables les conclusions de M. [B] [J] déposées le 3 février 2022 ainsi que les pièces communiquées ou déposées au soutien desdites conclusions ;

DÉBOUTE les parties de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que les dépens d'incident suivront le sort des dépens d'appel.

LE GREFFIER

Gaetan DELETTREZ

LE PRESIDENT

Marie LE BRAS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale b salle 1
Numéro d'arrêt : 22/01030
Date de la décision : 16/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-16;22.01030 ?
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