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15/12/2022 | FRANCE | N°22/02731

France | France, Cour d'appel de Douai, Troisieme chambre, 15 décembre 2022, 22/02731


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



TROISIEME CHAMBRE



ORDONNANCE DU 15/12/2022



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N° de MINUTE :22/481

N° RG 22/02731 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UKD5



Jugement rendu par le tribunal de proximité de Tourcoing en date du 06 Mai 2022







DEMANDERESSE A L'INCIDENT



SELARL Millois Spatari Cornelio

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représentée par Me Marine Craynest, avocat au ba

rreau de Lille, avocat constitué



DEFENDEUR A L'INCIDENT



Monsieur [V] [H]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représenté par Me Jean-Luc Wabant, avocat au barreau de L...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ORDONNANCE DU 15/12/2022

*

* *

N° de MINUTE :22/481

N° RG 22/02731 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UKD5

Jugement rendu par le tribunal de proximité de Tourcoing en date du 06 Mai 2022

DEMANDERESSE A L'INCIDENT

SELARL Millois Spatari Cornelio

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Marine Craynest, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

DEFENDEUR A L'INCIDENT

Monsieur [V] [H]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Jean-Luc Wabant, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT : Claire Bertin

GREFFIER : Harmony Poyteau

DÉBATS : à l'audience du 19 octobre 2022

ORDONNANCE prononcée par mise à disposition au greffe le 15/12/2022

***

EXPOSE DU LITIGE

1. Les faits et la procédure antérieure :

Considérant que la SELARL Millois Spatari Cornelio avait commis des fautes lors de la signification d'un arrêt de la cour d'appel de Douai rendu le 1er mars 2018, M.'[V] [H], par requête enregistrée au greffe le 12 janvier 2021, a fait comparaître celle-ci devant le tribunal de proximité de Tourcoing pour obtenir sa condamnation à lui restituer ledit arrêt sous astreinte de 50 euros par jour de retard, outre à lui payer les sommes de 87,02 euros correspondant au coût de signification dudit acte, de 1'677,36

euros à titre de dommages et intérêts, de 1'000 euros d'indemnité procédurale, et les dépens.

2. Le jugement dont appel :

Par jugement rendu en dernier ressort le 6 mai 2022, le tribunal de proximité de Tourcoing a :

1. constaté le désistement des demandes reconventionnelles de la SELARL Millois Spatari Cornelio à l'encontre de M.'[H] ;

2. débouté M.'[H] de l'intégralité de ses demandes ;

3. condamné M.'[H] à payer à la SELARL Millois Spatari Cornelio une somme de 2'000 euros de dommages et intérêts ;

4. condamné M.'[H] à payer à la SELARL Millois Spatari Cornelio une somme de 1'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

5. condamné M.'[H] aux dépens de l'instance ;

6. débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

7. rappelé que la décision était exécutoire par provision en application de l'article 514 du code de procédure civile.

3. La déclaration d'appel :

Par déclaration du 7 juin 2022, M.'[H] a formé appel, dans des conditions de forme et de délai non contestées, de ce jugement en limitant la contestation du jugement critiqué aux seuls chefs du dispositif numérotés 2, 3, 4, 5 ci-dessus.

4. Les prétentions et moyens des parties sur l'incident :

4.1. Aux termes de ses dernières conclusions d'incident notifiées le 19 octobre

2022, la SELARL Millois Spatari Cornelio demande au magistrat chargé de la mise en état, au visa des articles 33 et suivants, 542 et suivants, 914 du code de procédure civile, de :

- déclarer l'appel de M.'[H] irrecevable ;

- condamner M.'[H] à lui verser la somme de 500 euros au titre de l'article 1240 du code civil pour procédure d'appel abusive ;

- condamner M.'[H] à lui verser la somme de 500 euros pour la procédure d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M.'[H] aux entiers dépens comprenant le timbre fiscal de 225 euros.

A l'appui de ses prétentions, la SELARL Millois Spatari Cornelio fait valoir que :

- le jugement querellé a été rendu en dernier ressort ;

- par jugement du 8 août 2022, le juge de proximité a rejeté la requête en rectification d'erreur purement matérielle, déposée par M. [H], tendant à la requalification du jugement du 6 mai 2022 en «'jugement rendu en premier ressort'»;

- seule la voie de la cassation est désormais ouverte à M.'[H] s'il entend en contester la teneur ;

- M.'[H] a abandonné, en cours d'instance devant le premier juge, sa demande tendant à voir restituer l'expédition exécutoire de l'arrêt ;

- les demandes en paiement cumulées de M. [H] s'élevent à la somme 3'818,91 euros, et sont bien inférieures au taux du ressort de 5'000 euros ;

- l'appel de M. [H] doit être déclaré irrecevable.

4.2. Aux termes de ses conclusions d'incident notifiées le 18 octobre 2022,

M.'[H], demande au magistrat chargé de la mise en état, au visa des articles 35 à 39, 536, 543, 586, 680 du code de procédure civile, de :

- le déclarer recevable en son appel ;

- débouter la SELARL Millois Spatari Cornelio de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la SELARL Millois Spatari Cornelio à lui verser la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- réserver les dépens de l'instance et de l'appel.

A l'appui de ses prétentions, M. [H] fait valoir que :

- la voie de l'appel est ouverte en toutes matières, même gracieuses, contre les jugements de première instance s'il n'en est autrement disposé ;

- l'ouverture de l'appel contre les décisions des juridictions du premier degré est le principe, ce qui correspond à la définition classique de la voie de recours ordinaire ;

- en application de l'article 536 précité, la qualification inexacte d'un jugement par les juges qui l'ont rendu est sans effet sur le droit d'exercer un recours ;

- si le jugement est inexactement qualifié en dernier ressort, l'appel reste cependant recevable ;

- le jugement dont appel n'a toujours pas été signifié ;

- pour déterminer la valeur du litige et apprécier s'il se situe en deçà du taux du ressort, il faut prendre en considération le montant total des demandes ;

- en cas de demande indéterminée, le jugement est par nature rendu en premier ressort ;

- sa demande de restitution d'un arrêt original de cour d'appel, et sa demande d'inscription de faux en vue d'écarter une pièce des débats sont des demandes indéterminées, par nature impossibles à chiffrer ;

- son appel ne peut être considéré comme un abus de procédure.

Pour un plus ample exposé des moyens de chacune des parties, il y a lieu de se référer aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'appel

Aux termes de l'article 543 du code de procédure civile, la voie de l'appel est ouverte en toutes matières, même gracieuses, contre les jugements de première instance s'il n'en est autrement disposé.

Aux termes des articles 35 alinéa 2 et 40 dudit code, lorsque les prétentions réunies sont fondées sur les mêmes faits ou sont connexes, la compétence et le taux du ressort sont déterminés par la valeur totale de ces prétentions.

Le jugement qui statue sur une demande indéterminée est, sauf disposition contraire, susceptible d'appel.

Aux termes de l'article R.'211-3-24 du code de l'organisation judiciaire, lorsque le tribunal judiciaire est appelé à connaître, en matière civile, d'une action personnelle ou mobilière portant sur une demande dont le montant est inférieur ou égal à la somme de 5'000 euros, le tribunal judiciaire statue en dernier ressort.

En l'espèce, le jugement dont appel a été rendu en dernier ressort le 6 mai 2022 par le tribunal de proximité de Tourcoing.

Par jugement du 2 août 2022, ladite juridiction a déclaré recevable mais non fondée la requête en rectification d'erreur matérielle présentée par le conseil de M.'[H], qui sollicitait la rectification de la qualification en jugement rendu en premier ressort.

Dans ses conclusions récapitulatives et responsives développées à l'audience du 8 mars 2022 devant le tribunal de proximité de Tourcoing, M.'[H] demandait à la juridiction de :

- lui donner acte que la SELARL Millois Spatari Cornelio n'était pas en mesure de restituer la grosse de l'arrêt de la cour d'appel qui lui avait été confiée ;

- ordonner le retrait de la pièce n°15 de la SELARL Millois Spatari Cornelio qui constituait un faux ;

- condamner la SELARL Millois Spatari Cornelio au paiement des sommes suivantes :

'87,02 euros pour le remboursement des frais de l'acte de signification de l'arrêt, lequel comportait un vice de forme ;

'1'731,89 euros à titre de dommages et intérêts pour avoir refusé de prêter son ministère avec intérêts au taux légal à compter du 3 décembre 2018 ;

'2'000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

'2'400 euros à titre d'indemnité de procédure ;

'les entiers frais et dépens de l'instance.

En premier lieu, le montant cumulé des prétentions formulées par M. [H] à l'égard de la SELARL Millois Spatari Cornelio s'éleve à la somme de 3'818,91 euros, et non de 6'218 euros comme le soutient à tort ce dernier, la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ne figurant pas au rang des prétentions dont la valeur doit être prise en compte pour déterminer le taux du ressort.

Il s'ensuit que les prétentions chiffrées de M.'[H] sont inférieures au taux du ressort fixé à 5'000 euros.

En deuxième lieu, il s'observe que M. [H] n'a pas maintenu, ni oralement à l'audience, ni dans ses conclusions écrites, sa demande initiale tendant à obtenir sous astreinte la condamnation de la SELARL Millois Spatari Cornelio à lui restituer la grosse de l'arrêt rendu le 1er mars 2018.

En troisième et dernier lieu, sa demande tendant à voir écarter des débats la pièce n°15 produite par son adversaire ne s'analyse pas en une prétention indéterminée par nature, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une prétention autonome mais d'une prétention consécutive à ses demandes en paiement, dont le montant cumulé est inférieur au taux du ressort.

Il se déduit de l'ensemble de ces éléments et considérations que le jugement dont appel, ensemble le jugement de rejet de la requête en rectification d'erreur matérielle, a été valablement qualifié de jugement rendu en dernier ressort par le tribunal, de sorte que l'appel formé par M. [H] contre celui-ci est irrecevable.

Sur l'abus de droit d'agir en justice

En application de l'article 1240 du code civil dans sa rédaction postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, l'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, d'erreur grossière équipollente au dol, de faute, même non grossière ou dolosive, ou encore de légèreté blâmable, dès lors qu'un préjudice en résulte.

Il appartient à toutes les juridictions de statuer sur le dommage causé par le comportement abusif de l'une des parties dans le développement procédural dont elle a eu à connaître.

En l'espèce, M.'[H] a choisi de former appel d'un jugement rendu en dernier ressort, et a poursuivi la procédure après le rejet de sa requête en rectification d'erreur matérielle tendant à la requalification du jugement critiqué. En agissant ainsi, il a contraint l'intimée à constituer avocat en cause d'appel et à exposer des frais supplémentaires pour le procès. Son attitude procédurière et dilatoire est fautive, et a causé un préjudice à la partie adverse qui sera exactement indemnisé par l'allocation d'une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les dépens et l'indemnité de procédure

Le sens de la présente ordonnance conduit à condamner M.'[H] aux dépens de l'incident, lesquels comprendront le coût du timbre fiscal de 225 euros que la SELARL Millois Spatari Cornelio a été contrainte de régler pour constituer avocat en cause d'appel.

L'équité commande de condamner M.'[H] à régler à la SELARL Millois Spatari Cornelio une somme de 500 euros à titre d'indemnité de procédure d'incident sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le magistrat chargé de la mise en état,

Déclare irrecevable l'appel formé par M. [V] [H] contre le jugement du 6 mai 2022, ensemble le jugement de rejet de la requête en rectification d'erreur matérielle du 2 août 2022, lequel a été rendu en dernier ressort par le tribunal de proximité de Tourcoing ;

Condamne M. [V] [H] à payer à la SELARL Millois Spatari Cornelio une somme de 500 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour procédure d'appel abusive ;

Condamne M. [V] [H] aux entiers dépens de la procédure d'incident, en ce compris le coût du timbre fiscal de 225 euros exposé par la SELARL Millois Spatari Cornelio ;

Le condamne en outre à payer à la SELARL Millois Spatari Cornelio la somme de 500 euros à titre d'indemnité de procédure d'incident sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La Greffière Le Conseiller de la mise en état

Harmony Poyteau Claire Bertin


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Troisieme chambre
Numéro d'arrêt : 22/02731
Date de la décision : 15/12/2022
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-15;22.02731 ?
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