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29/11/2022 | FRANCE | N°22/02129

France | France, Cour d'appel de Douai, Etrangers, 29 novembre 2022, 22/02129


COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles





N° RG 22/02129 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UTOV

N° de Minute : 2142







Ordonnance du mardi 29 novembre 2022





République Française

Au nom du Peuple Français





APPELANT



M. [H] [C]

né le 25 Décembre 1999 à [Localité 1]

de nationalité Indienne

Actuellement au centre de rétention de [Localité 3]

dûment avisé, comparant en personne par visioconférence



assisté

de Me Claire GUILLEMINOT, avocat au barreau de DOUAI, avocate commise d'office et de Mme [B] [U] interprète assermenté en penjabi, tout au long de la procédure devant la cour, serment préalablement prêté ce j...

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles

N° RG 22/02129 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UTOV

N° de Minute : 2142

Ordonnance du mardi 29 novembre 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

APPELANT

M. [H] [C]

né le 25 Décembre 1999 à [Localité 1]

de nationalité Indienne

Actuellement au centre de rétention de [Localité 3]

dûment avisé, comparant en personne par visioconférence

assisté de Me Claire GUILLEMINOT, avocat au barreau de DOUAI, avocate commise d'office et de Mme [B] [U] interprète assermenté en penjabi, tout au long de la procédure devant la cour, serment préalablement prêté ce jour

INTIMÉ

MONSIEUR LE PREFET DU PAS DE CALAIS

dûment avisé, représenté par le Cabinet ADES, substitué par Me KARAM Laure

PARTIE JOINTE

M. le procureur général près la cour d'appel de Douai : non comparant

MAGISTRAT DELEGUE : Bertrand DUEZ, conseiller à la cour d'appel de Douai désigné par ordonnance pour remplacer le premier président empêché

assisté de Jean-Luc POULAIN, Greffier

DÉBATS : à l'audience publique du mardi 29 novembre 2022 à 10 h 00

Les parties comparantes ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance sera rendue par mise à disposition au greffe

ORDONNANCE : rendue à Douai par mise à disposition au greffe le mardi 29 novembre 2022 à 14h00

Le premier président ou son délégué,

Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et spécialement les articles L 743-21, L 743-23, R 743-10, R 743-11, R 743-18 et R 743-19 ;

Vu l'aricle L 743-8 du CESEDA ;

Vu la demande de l'autorité administrative proposant que l'audience se déroule avec l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle ;

Vu l'accord du magistrat délégué ;

Vu l'ordonnance rendue le 27 novembre 2022 par le Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER prolongeant la rétention administrative de M. [H] [C] ;

Vu l'appel motivé interjeté par M. [H] [C] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 28 novembre 2022 ;

Vu le procès-verbal des opérations techniques de ce jour ;

Vu l'audition des parties, les moyens de la déclaration d'appel et les débats de l'audience ;

EXPOSE DU LITIGE

Le 23 novembre 2022 à 14h10, les fonctionnaires de police de la Police Aux Frontières de Boulogne-sur-Mer contrôlaient un groupe de 22 individus circulant pédestrement [Adresse 5] à [Localité 2] en vertu de réquisitions du placement en rétention administrative près le Tribunal Judiciaire de Boulogne-sur-Mer en date du 16/11/2022 autorisant les contrôles d'identité au visa de l'article 78-2 du code de procédure pénale le mercredi 23/11/2022 de 07h00 à 17h00 dans la zone concernée pour la recherche d'infractions de dégradation et de violences volontaires.

Ont été appréhendées pour ce contrôle 13 personnes de nationalité indienne, 08 personnes de nationalité afghane et une personne de nationalité ougandaise dont aucune ne possédait de document d'identité ou de titre de séjour.

L'ensemble des personnes contrôlées ont été présentée à l'officier de police judiciaire de permanence le 23 novembre 2022 à 14h35 pour un placement en retenue selon l'article L 813-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

C'est dans ce cadre que monsieur [H] [C], de nationalité indienne a fait l'objet d'un placement en rétention administrative ordonné par monsieur le Préfet du Pas-de-Calais le 24/11/2022 pour l'exécution d'un éloignement vers l'Autriche, pays dans lequel l'intéressé est enregistré comme demandeur d'asile au titre d'une réadmission sollicitée dans le cadre du règlement UE n° 604/2013 du 26 juin 2013.

Aucun recours en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative n'a été déposé devant le juge des libertés et de la détention par l'étranger retenue au visa de l'article L 741-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

' Vu l'article 455 du code de procédure civile

' Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Boulogne-sur-Mer en date du 27 novembre 2022 (11h25) ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de l'appelant pour une durée de 28 jours.

' Vu la déclaration d'appel recevable du 28 novembre 2022 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative

Au titre de sa déclaration d'appel monsieur [H] [C] indique avoir été interpellé avec 21 autres personnes [Adresse 5] à [Localité 2] car une distribution alimentaire était programmée à cet endroit par l'association 'la vie Active' et que ce lieu se situait à proximité du campement démantelé parallèlement aux interpellations.

Au soutien de son appel il expose les moyens suivants déjà soutenus devant le juge des libertés et de la détention :

Irrégularité du contrôle d'identité pour détournement des réquisitions du procureur de la République en ce que les contrôles d'identité ont été ciblés sur les migrants du campement qui attendaient une distribution de nourriture par une association agrée pour ce faire.

Irrégularité du contrôle d'identité qualifié de discriminatoire et systématique.

Il est versé à l'appui de la déclaration d'appel une attestation d'une personne observant pour le compte de l'association 'l'Auberge des migrants' les opérations de démantèlement du camps de migrants.

L'ordonnance déférée a répondu à ce moyen en considérant que l'autorité préfectorale était libre de procéder au choix des personnes à qui elle entend délivrer un placement en rétention administrative et que le contrôle d'identité n'était pas discriminatoire même s'il concernait des personnes dans la même situation puisque toutes les personnes appréhendées ont été contrôlées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1) Sur le moyen tiré du contrôle d'identité.

Prive de base légale une décision qui retient le caractère discriminatoire d'un contrôle d'identité sans rechercher, si la différence de traitement n'était pas justifiée par des éléments objectifs, étrangers à toute discrimination, tels que notamment un soupçon de commission d'une infraction que faisait naître l'attitude de la personne contrôlée ou les circonstances du contrôle.

Cour de cassation, Chambre civile 1, 9 novembre 2016, 15-25.872

En revenche un contrôle d'identité réalisé selon des critères tirés de caractéristiques physiques associées à une origine ou une nationalité, réelle ou supposée, sans aucune justification objective préalable doit être qualifié de discriminatoire.

Pour autant un contrôle d'identité peut être ciblé et non aléatoire dés lors qu'il n'est ni systématique ni discriminatoire et se trouve motivé par des constances spécifiques rendant raisonnable le contrôle d'individus en provenance d'un endroit donné.

Cour de cassation civ 1ère 25 mai 2016 n° 15-50.063

Enfin le caractère déloyal d'une interpellation n'est caractérisé que lorsque l'étranger a été interpellé compte tenu de son absence de droit au séjour alors qu'il avait été amené à se présenter spontanément à l'autorité administrative pour un tout autre objet.

Il est en dernier lieu constant qu'en l'absence de man'uvre déloyale, une interpellation conforme aux dispositions de l'article 78-2, alinéa 8, du code de procédure pénale ne peut être considérée comme déloyale au motif que le contrôle d'identité a eu lieu à proximité du siège d'une association qui se livre à une action d'aide aux populations défavorisées.

(1re Civ., 2 décembre 2015, pourvoi n° 14-50.075, Bull. 2015, J, n° 303)

1) En l'espèce il ressort des procès-verbaux et des termes de la déclaration d'appel que le contrôle de l'appelant a eu lieu sur la voie publique de la [Adresse 5] à [Localité 2], ce dernier indiquant que les personnes migrantes s'étaient regroupées en l'attente d'une distribution alimentaire.

Il s'en suit que le contrôle d'identité n'est pas illégal comme il l'aurait été s'il avait été effectué dans un lieu privé.

2) Il ressort également du procès-verbal de saisine faisant foi jusqu'à preuve contraire que l'ensemble des personnes se trouvant sur la voie publique ont été contrôlées et ce, quelque soient leurs nationalités.

Le contrôle d'identité ne peut donc être considéré comme discriminatoire à ce titre, étant rappelé qu'à la suite d'un contrôle d'identité l'autorité préfectorale reste libre de placer en retenue et en rétention les individus qu'elle souhaite et ce, en raison de différentes contraintes administrative et d'hébergement sur lesquelles le juge judiciaire ne peut se prononcer.

Il s'en suit que, même si le contrôle d'identité était ciblé et non aléatoire puisqu'il apparaissait que le groupe de personne sis sur la voie publique provenait du campement démantelé en parallèle aux dits contrôles, ce contrôle n'était pour autant pas systématique et ne revêtait pas un effet équivalent à un contrôle aux frontières.

Dés lors ce contrôle est régulier et ne détourne pas les réquisitions données par le procureur de la République puisqu'il a été réalisé dans les circonstances de temps et de lieux visées par ces réquisitions et qui plus est en rapport avec les infractions recherchées.

3) En dernier lieu, même s'il semble évident que les opérations de contrôle ont été facilitées par le fait que les personnes contrôlées étaient regroupées dans l'attente d'une livraison de nourriture par les associations humanitaires, cette façon de procéder ne doit pas être considérée comme déloyale au sens des principes ci dessus énoncés dés lors qu'il n'est pas démontré que le regroupement aurait été initié de manière fallacieuse par l'administration elle-même en vue de tromper les personnes en situation irrégulières et de les amener à se présenter à un point de regroupement dans le but masqué d'être interpellées.

Le moyen tiré de l'irrégularité du contrôle d'identité sera rejeté en ses deux branches.

2) Sur la demande de prolongation du placement en rétention administrative

La cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qui seront intégralement adoptés au visa de l'article 955 du code de procédure civile, que le premier juge a statué sur le fond en ordonnant la prolongation de la rétention, laquelle est nécessaire en l'attente du laissez-passer consulaire sollicité (ou) de la réponse de l'Etat requis au visa du règlement UE n° 604/2013 du 26 juin 2013.

Sur la notification de la décision à M. [H] [C]

En application de l'article R. 743-19 al 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'ordonnance rendue par le premier président ou son délégué est communiquée au ministère public. Elle est notifiée sur place à l'étranger et à son conseil, s'il en a un, ainsi qu'à l'autorité qui a prononcé la rétention.

Les parties présentes en accusent réception. Le greffier la notifie par tout moyen et dans les meilleurs délais aux autres parties qui en accusent réception.

En l'absence de M. [H] [C] lors du prononcé de la décision, la présente ordonnance devra lui être notifiée par les soins du greffe du centre de rétention administrative et en tant que de besoin, par truchement d'un interprète.

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARE l'appel recevable ;

CONFIRME l'ordonnance entreprise ;

DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [H] [C] par l'intermédiaire du greffe du centre de rétention administrative par truchement d'un interprète en tant que de besoin, à son conseil et à l'autorité administrative ;

LAISSE les dépens à la charge de l'État.

Jean-Luc POULAIN, greffier

Bertrand DUEZ, conseiller

A l'attention du centre de rétention, le mardi 29 novembre 2022

Bien vouloir procéder à la notification de l'ordonnance en sollicitant, en tant que de besoin, l'interprète intervenu devant le premier président ou le conseiller délégué : Mme [B] [U]

Le greffier

N° RG 22/02129 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UTOV

REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE 2142 DU 29 Novembre 2022 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l'intéressé au greffe de la cour d'appel de Douai par courriel - [Courriel 4]) :

Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Pour information :

L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Reçu copie et pris connaissance le

- M. [H] [C]

- par truchement téléphonique d'un interprète en tant que de besoin

- nom de l'interprète (à renseigner) :

- décision transmise par courriel au centre de rétention de pour notification à M. [H] [C] le mardi 29 novembre 2022

- décision transmise par courriel pour notification à MONSIEUR LE PREFET DU PAS DE CALAIS et à Maître Claire GUILLEMINOT le mardi 29 novembre 2022

- décision communiquée au tribunal administratif de Lille

- décision communiquée à M. le procureur général

- copie au Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER

Le greffier, le mardi 29 novembre 2022

N° RG 22/02129 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UTOV


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Etrangers
Numéro d'arrêt : 22/02129
Date de la décision : 29/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-29;22.02129 ?
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