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20/10/2022 | FRANCE | N°21/04880

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 2, 20 octobre 2022, 21/04880


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 2

ARRÊT DU 20/10/2022

N° de MINUTE : 22/895

N° RG 21/04880 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T22Q

Jugement (N° 11-21-220) rendu le 31 Août 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Douai





APPELANTE



Sa [15]

[Adresse 2]



Représentée par Me François-Xavier Wibault, avocat au barreau d'Arras



INTIMÉS



Sarl [18]

[Adresse 3]



ReprésentÃ

©e par Me Frank Dubois, avocat au barreau de Douai



Monsieur [P] [K]

[Adresse 10]



Société [19] chez [26]

[Adresse 7]



Société [27] chez [20]

[Adresse 8]



Madame [N] [M]

[Adresse 6]



Sa ...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 2

ARRÊT DU 20/10/2022

N° de MINUTE : 22/895

N° RG 21/04880 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T22Q

Jugement (N° 11-21-220) rendu le 31 Août 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Douai

APPELANTE

Sa [15]

[Adresse 2]

Représentée par Me François-Xavier Wibault, avocat au barreau d'Arras

INTIMÉS

Sarl [18]

[Adresse 3]

Représentée par Me Frank Dubois, avocat au barreau de Douai

Monsieur [P] [K]

[Adresse 10]

Société [19] chez [26]

[Adresse 7]

Société [27] chez [20]

[Adresse 8]

Madame [N] [M]

[Adresse 6]

Sa Clinique [25]

[Adresse 24]

Société [13]

[Adresse 11]

Société [17] chez [20]

[Adresse 9]

Société [12] chez [22]

[Adresse 1]

Etablissement Public Sip [Localité 16]

[Adresse 4]

Madame [D] [J]

[Adresse 5]

S.a. [23]

[Adresse 14]

Non comparants, ni représentés

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience

DÉBATS à l'audience publique du 14 Septembre 2022 tenue par Catherine Convain magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, en application de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile , les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 805 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Véronique Dellelis, président de chambre

Catherine Convain, conseiller

Danielle Thébaud, conseiller

ARRÊT PAR DÉFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 octobre 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Véronique Dellelis, Président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement réputé contradictoire prononcé par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Douai, statuant en matière de surendettement des particuliers, le 31 août 2021 ;

Vu l'appel interjeté le 14 septembre 2021 ;

Vu le procès-verbal de l'audience du 2 mars 2022 ;

Vu la mention au dossier en date du 31 mars 2022 ;

Vu le procès-verbal de l'audience du 14 septembre 2022 ;

***

Suivant déclaration déposée le 7 février 2020, M. [P] [K] a saisi la commission de surendettement du Nord d'une demande de bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement des particuliers, ne parvenant pas à s'acquitter de ses dettes en raison de l'absence de ressources mensuelles suffisantes et des dépenses nécessaires pour satisfaire aux besoins de la vie courante.

Le 18 mars 2020, la commission de surendettement des particuliers du Nord, après avoir constaté la situation de surendettement de M. [K], a déclaré sa demande recevable.

Le 13 janvier 2021, après examen de la situation de M. [K] dont les dettes ont été évaluées à 126 481,32 euros, les ressources mensuelles à 2538 euros et les charges mensuelles à 1606,35 euros, la commission qui a déterminé un minimum légal à laisser à la disposition du débiteur de 1367,65 euros, une capacité de remboursement de 931,65 euros et un maximum légal de remboursement de 1178,35 euros, a retenu une mensualité de remboursement de 931,65 euros et a imposé le rééchelonnement de tout ou partie des créances sur une durée maximum de 144 mois, au taux de 0 %. La commission, relevant que la situation de M. [K] s'était sensiblement améliorée puisque, en congé maladie lors du dépôt, il avait repris son activité et avait bénéficié des augmentations de salaires accordées à la profession d'aide-soignant, a estimé que la conservation du bien était possible et compte tenu de la situation du débiteur, de la valeur du bien et des coûts prévisibles de relogement, a considéré que la vente du logement constituant la résidence principale du débiteur ne paraissait plus une solution adaptée.

Ces mesures imposées ont été contestées par la [15].

À l'audience du 15 juin 2021, la [15], représentée par avocat, a demandé au tribunal de :

-dire et juger sa contestation recevable et bien fondée,

-à titre principal, déchoir M. [K] du bénéfice de la procédure de surendettement ouverte à son bénéfice suivant décision en date du 18 mars 2020 dès lors qu'il ne remplissait pas les conditions exigées par les dispositions des articles L 711-1 et suivants du code de la consommation,

-à titre subsidiaire, constater dire et juger que le rééchelonnement de la dette de M. [K] sur 144 mois était contraire aux dispositions de l'article L 733-1 du code de la consommation,

-constater et juger que la décision rendue le 13 janvier 2021 par la commission de surendettement des particuliers du Nord n'était pas justifié, en présence d'un actif réalisable et au regard du comportement adopté par M. [K],

-infirmer en toutes ses dispositions la décision rendue le 13 janvier 2021 par la commission de surendettement des particuliers du Nord,

-en conséquence, ordonner la vente amiable de l'actif immobilier de M. [K] dans un délai qui ne saurait excéder 12 mois,

-dire et juger qu'à défaut pour M. [K] de justifier chaque trimestre auprès des créanciers des démarches entreprises pour procéder à la vente de son immeuble par la production de mandats de vente, les mesures imposées deviendraient caduques après l'envoi d'une mise en demeure restée infructueuse,

-condamner M. [K] au paiement de la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner M. [K] aux entiers frais et dépens engagés dans le cadre de la présente instance.

Au soutien de ses demandes, la [15] a exposé que M. [K] avait déjà obtenu un premier plan de surendettement qu'il n'avait pas respecté ; qu'il n'était pas de bonne foi et devait être déchu de la procédure ; qu'il n'était pas animé d'une volonté sincère d'apurer ses dettes ; qu'au surplus, son endettement avait incontestablement augmenté entre le 24 novembre 2017 (118 187,13 euros) et le 25 mai 2020 (125 370,32 euros) ; qu'à la date du 13 janvier 2021, l'endettement de M. [K] s'élevait à la somme de 126 481,32 euros ; subsidiairement, que la créance de la [15] était fondée non pas sur les échéances d'un emprunt en cours mais sur un titre exécutoire, à savoir un jugement rendu par le tribunal judiciaire de Douai le 12 juin 2017 ; que dès lors, le rééchelonnement de sa créance n'était pas justifié et en tout état de cause ne saurait être supérieur à 84 mois, maximum légal prévu par l'article L 733-1 alinéa 1 du code de la consommation ; que la vente du bien immobilier devait être ordonnée afin de désintéresser l'ensemble des créanciers.

La SARL [18], créancière représentée par avocat, a indiqué soutenir les demandes de la [15], et a sollicité également la vente amiable de l'immeuble.

M. [K] qui a comparu en personne, a demandé le rejet des prétentions adverses. Il a expliqué que l'augmentation de son endettement n'était pas lié à la souscription de nouveaux crédits mais à des dettes fiscales ; qu'il n'avait pas pu respecter le précédent plan en raison d'importantes saisies du Trésor public ; que sa situation était en outre compliquée par la maladie de son fils qui avait été plongé dans un coma artificiel et hospitalisé pendant trois ans ; qu'il avait été en arrêt maladie, percevant un demi traitement ; qu'il avait repris son activité depuis le mois de septembre 2020 et qu'il ne souhaitait pas vendre son logement, expliquant qu'avec le solde lui revenant, il ne pourrait pas se reloger avec ses trois enfants.

Par jugement en date du 31 août 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Douai, statuant en matière de surendettement des particuliers, a notamment déclaré irrecevable la contestation de la [15] sur la recevabilité du dossier, a déclaré recevable en la forme la contestation de la [15] sur les mesures imposées, a rejeté cette demande sur le fond, a dit que M. [K] s'acquittera de ses dettes selon les modalités indiquées en annexe du jugement (plan d'une durée de 141 mois, avec 14 mensualités de 887,54 euros chacune, puis 6 mensualités de 877,03 euros chacune, puis 5 mensualités de 872,74 euros chacune, puis 115 mensualités de 887,06 euros chacune, puis une dernière mensualité de 418,29 euros, permettant de rembourser en totalité ses créanciers, la dette alimentaire de 2000 euros envers Mme [J] est exclue de la procédure, les dettes ne porteront pas intérêts pendant la durée du plan), à charge pour lui de contacter ses créanciers afin de fixer les modalités de paiement de ses échéances, a dit que pendant la durée du plan, les créances ne porteront pas intérêts et que les paiements seront imputés sur le capital, a dit qu'en cas de retour à meilleure fortune, M. [K] devra saisir impérativement la commission de la Banque de France afin de l'informer de l'évolution de sa situation personnelle, a débouté la [15] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et a laissé les dépens à la charge du Trésor public.

La SA [15] a relevé appel de ce jugement le 14 septembre 2021.

À l'audience de la cour du 2 mars 2022, la SA [15], représentée par avocat qui a déposé et développé oralement ses conclusions à l'audience, a demandé à la cour d'infirmer le jugement entrepris, et statuant à nouveau, de :

* A titre principal :

-déchoir M. [K] du bénéfice de la procédure de surendettement ouverte à son bénéfice suivant décision en date du 18 mars 2020 dès lors qu'il ne remplit pas les conditions exigées par les dispositions des articles L 711-1, L 761-1 et suivants du code de la consommation,

* A titre subsidiaire :

-constater dire et juger que le rééchelonnement de la dette de M. [K] sur 141 mois est contraire aux dispositions des articles L 732-3 et L 733-1 du code de la consommation,

En conséquence,

-ordonner la vente amiable de l'actif immobilier de M. [K] dans un délai qui ne saurait excéder 12 mois,

-dire et juger qu'à défaut pour M. [K] de justifier chaque trimestre auprès des créanciers des démarches entreprises pour procéder à la vente de son immeuble par la production de mandats de vente, les mesures imposées deviendraient caduques après l'envoi d'une mise en demeure restée infructueuse,

* En tout état de cause,

-condamner M. [K] au paiement de la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner M. [K] aux entiers frais et dépens engagés dans le cadre de la présente instance.

La [15] a repris en substance les moyens et arguments qu'elle a développés devant le premier juge. Elle a sollicité à titre principal la déchéance de M. [K] de la procédure de surendettement en application de l'article L 761-1 du code de la consommation. Elle a précisé qu'en première instance, elle avait demandé la déchéance de M. [K] de la procédure de surendettement. Elle a soutenu que sa demande de déchéance était recevable et que M. [K] devait être déchu de la procédure de surendettement car il avait aggravé son endettement au préjudice de ses créanciers et fait preuve de mauvaise foi, ce qui constituait une cause de déchéance prévue par l'article L 761-1 du code de la consommation. Subsidiairement, elle a soutenu que sa créance devait être rééchelonnée sur une durée maximum de sept ans, faisant valoir que sa créance résultait d'un cautionnement et non d'un emprunt. Enfin, elle a demandé de subordonner les mesures à la vente amiable du bien immobilier de M. [K] qui avait des revenus de 2480 euros nets et qui pourrait donc faire face à un loyer.

La SARL [18], représentée par avocat qui a déposé ses conclusions à l'audience, a sollicité la confirmation du jugement entrepris.

M. [K] qui a comparu en personne, a exposé sa situation personnelle, professionnelle et financière. Il a indiqué qu'il s'opposait à la vente de son bien immobilier qui constituait sa résidence principale. Il a demandé que le montant de sa contribution mensuelle à l'apurement de son passif soit fixé au montant de sa capacité réelle de remboursement, même si celle-ci dépassait le montant de la quotité saisissable de ses ressources et ce, afin d'éviter la vente de son bien immobilier. Il a précisé qu'il n'avait pas pu respecter son premier plan de surendettement parce que son second fils était tombé malade en 2017 ; que lui-même avait eu ensuite des problèmes de santé et qu'il n'avait pas su gérer ses hospitalisations ; que malgré le moratoire, il avait eu plusieurs saisies, ce qui avait diminué ses revenus ; que depuis octobre, la caisse d'épargne refaisait des prélèvements tous les mois ; qu'il était aide-soignant en soins palliatifs et qu'il avait eu une augmentation de la prime grand âge ; qu'il travaillait à [Localité 21] et avait des frais de transport d'environ 200 euros par mois ; qu'il avait trois enfants, un âgé de 17 ans en garde alternée et deux âgés de 12 ans et 9 ans en droit de visite et d'hébergement la moitié des vacances scolaires et un week-end sur deux.

Les autres intimés régulièrement convoqués par le greffe par lettre recommandée avec avis de réception, n'ont pas comparu ni personne pour les représenter.

Par mention dossier en date du 31 mars 2022, la réouverture des débats a été ordonnée à l'audience du 14 septembre 2022 afin que M. [K] produise toutes pièces utiles justifiant du règlement des dettes fiscales et actualise ses revenus en produisant notamment ses trois derniers bulletins de paie et les trois derniers relevés de tous ses comptes bancaires.

À l'audience du 14 septembre 2022, M. [K] qui a comparu en personne, a produit les pièces sollicitées. Il a précisé qu'il était à jour auprès des impôts ; que sa dette à l'égard de la caisse d'épargne avait diminué puisque cette dernière effectuait depuis novembre 2021 des prélèvements mensuels de 145,18 euros ; qu'il payait régulièrement les charges de copropriété. Il a également indiqué que son bien immobilier était actuellement évalué à 95 000 euros.

La SA [15], représentée par avocat, a précisé qu'elle avait réglé la caisse d'épargne qui avait financé l'acquisition du bien immobilier et que sa créance résultait d'un titre exécutoire. Elle a maintenu ses demandes et notamment sa demande de mise en vente amiable de l'immeuble.

La SARL [18], représentée par avocat, a indiqué que la dette de M. [K] n'était pas réglée et qu'elle s'élevait à 8828,90 euros. Elle a sollicité la confirmation du jugement entrepris.

Les autres intimés n'ont pas comparu ni personne pour les représenter.

Sur ce,

* Sur la déchéance de la procédure de surendettement

Attendu qu'en vertu de L. 761-1 du code de la consommation, est déchue du bénéfice de la procédure de surendettement :

' 1°Toute personne qui a sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts ;

2° Toute personne qui a détourné ou dissimulé ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens ;

3° Toute personne qui, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, a aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou aura procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel ou pendant l'exécution du plan ou des mesures prévues à l'article L. 733-1 ou à l'article L. 733-4.' ;

*

Attendu que la [15] qui sollicite à titre principal la déchéance de M. [K] du bénéfice de la procédure de surendettement, fait valoir que la bonne foi peut être contestée à tout moment de la procédure de sorte que c'est à bon droit qu'elle entend solliciter la déchéance de M. [K] du bénéfice de la procédure de surendettement faute pour celui-ci de faire preuve de bonne foi ; que c'est à tort que le premier juge l'a "déclarée irrecevable en sa demande tendant à voir M. [K] irrecevable à bénéficier de la procédure de surendettement" ; qu'en effet, sa demande porte sur la déchéance de M. [K] au bénéfice de la procédure de surendettement et non à l'irrecevabilité de celui-ci, et que la déchéance peut être prononcée par le juge à tout moment de la procédure, le texte n'imposant aucune limite temporelle ;

Attendu que tant l'absence de bonne foi que la déchéance qui s'analysent en des fins de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, peuvent être soulevées par les parties en tout état de cause en application de l'article 123 du code de procédure civile ;

Que c'est donc à tort que le premier juge a déclaré irrecevable la contestation de la [15] fondée sur les articles L 711-1 et L 761-1 du code de la consommation ;

*

Attendu qu'à l'appui de sa demande de déchéance de M. [K] de la procédure de surendettement, la [15] fait valoir que ce dernier a déposé un nouveau dossier de surendettement alors qu'il n'a jamais appliqué le premier plan dont il bénéficiait suivant jugement du 24 novembre 2017 et que depuis 2017, l'endettement global de M. [K] (qui portait sur la somme de 118 187,13 euros en date du 24 novembre 2017 et qui s'élève à la somme totale de 126 480,32 euros à la date du 13 janvier 2021) ne fait qu'augmenter au préjudice de l'ensemble des créanciers sans que ce dernier ne soit animé d'une quelconque volonté de trouver une issue à sa situation d'endettement de nature à apurer ses dettes et ainsi respecter ses obligations envers l'ensemble de ses créanciers ; qu'elle soutient que "cela constitue manifestement une aggravation de son endettement caractérisant indéniablement la mauvaise foi du débiteur, justifiant que celui-ci soit déchu de la procédure de surendettement dont il bénéficie" ;

Mais attendu que les causes de déchéance prévues à l'article L 761-1 du code de la consommation qui visent trois types de comportements affectant la bonne foi du débiteur et le privant du droit de bénéficier de la procédure de surendettement, sont limitativement énumérées par la loi et d'interprétation stricte ;

Qu'il s'ensuit que l'aggravation de l'endettement du débiteur ne peut entraîner sa déchéance de la procédure de surendettement que si cette aggravation résulte de la souscription de nouveaux emprunts au cours de la procédure de traitement de sa situation de surendettement ou pendant l'exécution du plan ou des mesures prévues à l'article L 733-1 ou à l'article L 733-4 du code de la consommation ;

Qu'en l'espèce, la [15] n'apporte la preuve d'aucun fait constitutif de déchéance imputable à M. [K], ni aucun élément du dossier ne permet d'établir l'existence d'un cas de déchéance prévu à l'article L 761-1 du code de la consommation ;

Que la [15] sera donc déboutée de sa demande tendant à voir déchoir M. [K] du bénéfice de la procédure de surendettement ;

* Sur les mesures de traitement du surendettement

Attendu qu'aux termes de l'article L 731-1 du code de la consommation, 'le montant des remboursements est fixé, dans des conditions précisées par décret en conseil d'État, par référence à la quotité saisissable du salaire telle qu'elle résulte des articles L 3252-2 et L 3252-3 du code du travail, de manière à ce que la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage lui soit réservée par priorité.' ;

Qu'aux termes de l'article L 731-2 du code de la consommation, 'la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage ne peut être inférieure, pour le ménage en cause, au montant forfaitaire mentionné à l'article L 262-2 du code de l'action sociale et des familles. Elle intègre le montant des dépenses de logement, d'électricité, de gaz, de chauffage, d'eau, de nourriture et de scolarité, de garde et de déplacements professionnels ainsi que les frais de santé.' ;

Que selon l'article R 731-1 du code de la consommation, 'pour l'application des dispositions des articles L 732-1, L 733-1 et L 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L 731-1, L 731-2 et L 731-3, par référence au barème prévu à l'article R 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur.' ;

Qu'aux termes de l'article R 731-2 du code de la consommation, « la part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L 731-2 » ;

Que le montant des remboursements stipulés dans le plan ne doit pas excéder la part des ressources du débiteur indispensable aux dépenses courantes du

ménage ; que le juge apprécie la situation du débiteur au regard des éléments dont il dispose au jour où il statue ;

Attendu qu'en l'espèce, il résulte des pièces actualisées produites que les ressources mensuelles de M. [K] s'élèvent en moyenne à la somme de 2447,27 euros (au vu du cumul net imposable de 19 578,21 euros figurant sur son bulletin de paie du mois d'août 2022) ;

Que les revenus mensuels du débiteur s'élevant en moyenne à 2447,27 euros, la part saisissable déterminée par les articles L. 3252-2 et L. 3252-3 du code du travail s'établit à 1054,57 euros par mois ;

Que le montant du revenu de solidarité active pour une personne s'élève à la somme mensuelle de 598,54 euros ;

Que le montant des dépenses courantes du débiteur doit être évalué, au vu des pièces actualisées produites et des éléments du dossier, à la somme mensuelle moyenne de 1674,95 euros ;

Que compte tenu de ces éléments, il convient de fixer à la somme mensuelle de 772,32 euros la capacité de remboursement de M. [K], le montant de cette contribution mensuelle à l'apurement de son passif laissant à sa disposition une somme de 1674,95 euros qui est supérieure au revenu de solidarité active dont il pourrait disposer (598,54 euros), n'excédant pas la différence entre ses ressources mensuelles et ce revenu de solidarité active, soit 1848,73 euros (2447,27 € -

598,54 € = 1848,73 €), et lui permettant de faire face aux dépenses de la vie courante (1674,95 euros) ;

***

Attendu que selon l'article L 733-2 du code de la consommation, le juge saisi de la contestation des mesures imposées par la commission peut vérifier, même d'office, la validité des créances et des titres qui les constatent ainsi que le montant des sommes réclamées ;

Que par ailleurs, aux termes de l'article 1353 du Code civil, « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son

obligation » ;

Attendu qu'en l'espèce, il ressort des débats et des pièces produites à l'audience du 14 septembre 2022 qu'à cette date, la créance de la SARL [18] s'élève à la somme de 8828,90 euros et la créance de la [13] à la somme de 18 275,71 euros ; que ces montants seront donc retenus ;

Qu'en revanche, les pièces produites par M. [K], en l'occurrence les avis d'impôt concernant l'impôt sur les revenus de 2020 et de 2021 et la taxe d'habitation 2021, ne permettent pas d'établir que les créances du SIP de [Localité 16] au titre de l'impôt sur les revenus de 2017 et de la taxe d'habitation 2019 ont été réglées ;

Que dès lors, en considération de ces éléments et au vu du montant non contesté des autres créances retenues par le premier juge, le passif de M. [K] sera fixé à la somme de 124 694 euros (en ce compris la dette alimentaire à l'égard de Mme [J], retenue par la commission de surendettement pour un montant de 2000 euros, qui est exclue de la procédure de surendettement en vertu de l'article L 711-4 du code de la consommation), sous réserve d'autres versements effectués au profit de l'un ou l'autre des créanciers depuis la fixation de l'état des créances par la commission de surendettement et/ou le prononcé du jugement entrepris ;

Attendu que la situation financière actuelle de M. [K] ne lui permet pas d'apurer ses dettes dans un délai de 84 mois, compte tenu de ses revenus et de ses charges incompressibles et du montant de son passif ; que M. [K] qui est propriétaire d'un bien immobilier, s'oppose à la vente de son immeuble qui constitue sa résidence principale ;

Attendu que la [15] se fondant sur l'article L 732-3 alinéa 1 du code de la consommation (qui dispose que « le plan prévoit les modalités de son exécution. Sa durée totale, y compris lorsqu'il fait l'objet d'une révision ou d'un renouvellement, ne peut excéder sept années ») et sur l'article L 733-1 alinéa 1 du même code (qui dispose qu' « en l'absence de mission de conciliation ou en cas d'échec de celle-ci, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, imposer tout ou partie des mesures suivantes : 1° rééchelonner le paiement des dettes de toute nature, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie d'entre elles, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder sept ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours ; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui restait à courir avant la déchéance ») et faisant valoir que sa créance est fondée non pas sur les échéances d'un emprunt en cours mais sur un titre exécutoire, à savoir un jugement rendu par le tribunal judiciaire de Douai en date du 12 juin 2017, soutient que le rééchelonnement de sa créance ne saurait être supérieur à 84 mois, maximum légal prévu par les dispositions du code de la consommation, dès lors que sa créance ne vise pas le remboursement d'un prêt mais le paiement d'une créance mise à la charge de M. [K] par jugement définitif du tribunal judiciaire de Douai ;

Mais attendu que si en vertu des articles L 732-3 et L 733-3 du code de la consommation, la durée totale du plan, y compris lorsqu'il fait l'objet d'une révision ou d'un renouvellement et/ou lorsqu'il met en oeuvre les mesures mentionnées à l'article L 733-1 du code de la consommation, ne peut excéder sept années, toutefois ces deux articles disposent expressément chacun dans leur alinéa 2 que « les mesures peuvent cependant excéder cette durée lorsqu'elles concernent le remboursement de prêts contractés pour l'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale du débiteur dont elle permet d'éviter la cession ou lorsqu'elles permettent au débiteur de rembourser la totalité de ses dettes tout en évitant la cession du bien immobilier constituant sa résidence principale. » ;

Qu'il résulte de ces articles qui instituent une dérogation à la limitation du plan à une durée de sept ans, que les mesures du plan peuvent excéder ce délai non seulement pour le remboursement des prêts contractés pour l'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale du débiteur, mais également pour le remboursement intégral de ses autres dettes et ce, afin d'éviter la cession du bien immobilier qui constitue sa résidence principale ;

Que la [15] n'est donc pas fondée à soutenir que le rééchelonnement de la dette de M. [K] à son égard sur une durée supérieure à 84 mois est contraire aux dispositions des articles L 732-1 et L 733-1 du code de la consommation ;

Attendu que le prix de vente du bien immobilier de M. [K] a été évalué le 5 octobre 2019 entre 90 000 et 100 000 euros nets vendeur ; que la vente de ce bien qui constitue la résidence principale du débiteur, ne permet pas de désintéresser l'intégralité de ses créanciers ;

Qu'à supposer que cet immeuble soit vendu au prix moyen de 95 000 euros, il subsisterait un passif de l'ordre de 28 000 à 30 000 euros ; que le coût prévisible du relogement de M. [K] qui a un fils de 17 ans en garde alternée et deux enfants âgés de 12 ans et 9 ans en droit de visite et d'hébergement, aggraverait les charges du débiteur de l'ordre de 600 euros au minimum et ne laisserait qu'une capacité de remboursement mensuelle de l'ordre de 170 euros par mois, ce qui ne permettrait pas d'apurer l'intégralité du passif résiduel sur une durée de sept ans ;

Qu'en revanche, la capacité de remboursement actuelle de M. [K] qui est âgé de 44 ans et qui a une situation professionnelle stable puisqu'il bénéficie d'un contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'aide-soignant, permet d'apurer la totalité de ses dettes sur une durée raisonnable de 159 mois tout en évitant la cession de son bien immobilier qui constitue sa résidence principale et qui est adapté à sa situation familiale (appartement composé notamment d'un séjour et de deux chambres) ;

Qu'au regard de ces éléments, la [15] sera déboutée de sa demande tendant à voir ordonner la vente amiable de l'actif immobilier de M. [K] et de ses demandes subséquentes ;

*

Attendu qu'en vertu de l'article L 711-6 du code de la consommation, dans le cadre du traitement des situations de surendettement des particuliers, les créances des bailleurs sont réglées prioritairement aux créances des établissements de crédit et des sociétés de financement et aux crédits à la consommation ; que cet article ne fait pas obstacle à l'application de cette priorité de paiement de la créance du bailleur au détriment d'autres créanciers ;

Que la contribution mensuelle (772,32 euros) de M. [K] à l'apurement de son passif sera donc affectée en priorité à l'apurement de la créance de loyers de la société [23], ancien bailleur de M. [K] ;

Attendu que compte tenu du montant et de la nature du passif de M. [K] et du montant de sa capacité mensuelle de remboursement, les dettes seront remboursées sur une durée de 159 mois selon les modalités du plan figurant dans le dispositif du présent arrêt (étant précisé que les versements effectués au profit de l'un ou l'autre des créanciers depuis la fixation de l'état des créances par la commission de surendettement et/ou le prononcé du jugement entrepris s'imputeront sur les dernières échéances dues aux créanciers bénéficiaires de ces règlements) ;

Qu'afin de favoriser le redressement de la situation financière du débiteur, les soldes des créances figurant dans le plan d'apurement du passif ne produiront pas d'intérêts pendant la durée du plan ;

Attendu que le jugement entrepris sera donc infirmé du chef des modalités de remboursement des dettes ;

* Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Attendu que le litige s'inscrivant dans le cadre d'une procédure de surendettement, les dépens de première instance et d'appel seront laissés à la charge du trésor public et il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la [15] la charge de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

Que par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé du chef des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile, d'une part, et la [15] sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, d'autre part ;

Par ces motifs,

La cour statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris sauf des chefs des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

Fixe, pour les besoins de la procédure de surendettement, le passif de M. [P] [K] à la somme de 124 694 euros (sous réserve d'autres versements effectués en cours de procédure) ;

Dit que M. [P] [K] devra rembourser ses dettes selon les modalités fixées dans l'échéancier suivant :

Créanciers

Solde des créances

Du 1er au 2ème mois inclus : 2

mensualités

Du 3ème au 20ème mois inclus : 18 mensualités

Du 21ème au 66ème mois inclus : 46 mensualités

Du 67ème au 159ème mois inclus : 93 mensualités

[18]

copropriétaire charges impayées

8 828,90 €

0,00 €

137,95 €

137,95 €

0,00 €

[23]

330947/BG/317

1 532,74 €

766,37 €

0,00 €

0,00 €

0,00 €

SIP [Localité 16]

IR 2017

3 958,30 €

0,00 €

0,00 €

86,05 €

0,00 €

SIP [Localité 16]

TH 2019

466,70 €

0,00 €

0,00 €

10,15 €

0,00 €

SIP [Localité 16]

TF

0,00 €

0,00 €

0,00 €

0,00 €

0,00 €

[17]

9960087810

751,66 €

0,00 €

41,76 €

0,00 €

0,00 €

[19]

2531705 / 15003.95B0134

972,61 €

0,00 €

54,03 €

0,00 €

0,00 €

[27]

[27]

0049009669

473,57 €

0,00 €

26,31 €

0,00 €

0,00 €

Clinique [25]

191020112

214,00 €

0,00 €

11,89 €

0,00 €

0,00 €

Mme [J]

impayé de pension alimentaire

2 000,00 €

Dette exclue de la procédure

Dette exclue de la procédure

Dette exclue de la procédure

Dette exclue de la procédure

[13]

P0008223225

18 275,71 €

0,00 €

116,41 €

116,41 €

116,41 €

[12]

44243887319001

882,40 €

0,00 €

0,00 €

19,18 €

0,00 €

[K] [X]

prêt famille

0,00 €

0,00 €

0,00 €

0,00 €

0,00 €

[M] [N]

prêt famille

371,85 €

0,00 €

20,66 €

0,00 €

0,00 €

[15]

201208851301 / 1611280003

85 965,56 €

0,00 €

363,31 €

402,58 €

654,92 €

Totaux

124 694,00 €

766,37 €

772,32 €

771,20 €

771,33 €

Dit que les versements effectués au profit de l'un ou l'autre des créanciers depuis la fixation de l'état des créances par la commission de surendettement et/ou le prononcé du jugement entrepris s'imputeront sur les dernières échéances dues aux créanciers bénéficiaires de ces règlements ;

Réduit à 0 % le taux des intérêts dus sur les créances figurant dans cet échéancier pendant la durée du plan ;

Dit que sauf meilleur accord des parties, les paiements devront être effectués le 15 de chaque mois et pour la première fois le 15 du mois suivant la notification du présent arrêt ;

Dit qu'à défaut de paiement d'une seule des mensualités du plan à son terme, l'ensemble du plan est de plein droit caduc quinze jours après une mise en demeure adressée à M. [P] [K] par lettre recommandée avec avis de réception d'avoir à exécuter ses obligations, et restée infructueuse ;

Rappelle que les présentes mesures s'imposent tant aux créanciers qu'au débiteur, et qu'ainsi toutes autres modalités de paiement, tant amiables que forcées, sont suspendues pendant l'exécution de ce plan ;

Dit qu'il appartiendra à M. [P] [K], en cas de changement significatif de ses conditions de ressources ou de ses charges, à la hausse comme à la baisse, de ressaisir la commission de surendettement d'une nouvelle demande de traitement de sa situation de surendettement ;

Déboute la [15] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande ;

Laisse les dépens d'appel à la charge du Trésor public.

LE GREFFIER

Gaëlle PRZEDLACKI

LE PRESIDENT

Véronique DELLELIS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 2
Numéro d'arrêt : 21/04880
Date de la décision : 20/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-20;21.04880 ?
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