La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/09/2022 | FRANCE | N°20/01992

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale b salle 1, 30 septembre 2022, 20/01992


ARRÊT DU

30 Septembre 2022







N° 1490/22



N° RG 20/01992 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TGPM



PS/AL





























Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de Béthune

en date du

25 Août 2020

(RG F 19/00020 -section )



































GROSSE :


<

br>Aux avocats



le 30 Septembre 2022



République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTE :



S.A. PSA AUTOMOBILES

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Gonzague TALVARD, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉ :



M. [G] [N]

[Adresse 2]

[Localité 3]

rep...

ARRÊT DU

30 Septembre 2022

N° 1490/22

N° RG 20/01992 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TGPM

PS/AL

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de Béthune

en date du

25 Août 2020

(RG F 19/00020 -section )

GROSSE :

Aux avocats

le 30 Septembre 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

S.A. PSA AUTOMOBILES

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Gonzague TALVARD, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉ :

M. [G] [N]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par M. [G] [V] (Défenseur syndical)

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Monique DOUXAMI

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Alain MOUYSSET

: CONSEILLER

Patrick SENDRAL

: CONSEILLER

GREFFIER lors des débats : Serge LAWECKI

DÉBATS : à l'audience publique du 24 Mai 2022

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Septembre 2022,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Alain MOUYSSET, Conseiller et par Cindy LEPERRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 03 Mai 2022

FAITS ET PROCEDURE

La société PSA AUTOMOBILES (PSA) produit à [Localité 5] des moteurs pour l'industrie automobile. A l'époque des faits litigieux M.[N] y travaillait, à temps partiel, les nuits du samedi au dimanche et du dimanche au lundi au sein d'équipes dites de suppléance. En rémunération du travail effectué il a perçu, pour toutes ses heures, son taux horaire contractuel majoré de 50 %, une majoration de 12 % des heures des samedi et dimanche entre 6 et 22 heures ainsi qu'une majoration de 22 % puis 21% de ses heures de nuit des samedis et dimanches entre 22 heures et 6 heures.

Se plaignant de ne pas avoir vu sa majoration pour toutes ses heures de nuit augmentée de moitié et de n'avoir perçu aucune majoration de ses heures du lundi entre 0 et 6 heures M.[N] a attrait son employeur devant le Conseil de Prud'hommes de Béthune. Par jugement ci-dessus référencé ledit Conseil, présidé par le juge départiteur, a condamné la société PSA à lui payer diverses sommes à titre de :

'majoration des heures de nuit effectuées les lundis de 0 h à 6 heures

'majoration de 50 % de la majoration de 22 % au titre des heures de nuit

'indemnités de congés payés afférente

'indemnité de procédure sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu l'appel formé par la société PSA contre ce jugement et ses conclusions par lesquelles elle demande son infirmation, le rejet des demandes adverses ainsi qu'une somme au titre de ses frais non compris dans les dépens

Vu les conclusions par lesquelles M.[N] demande à la cour de condamner la société PSA au paiement de diverses sommes à titre de :

'rappel de salaires sur incommodités de nuit

'rappel de salaires pour les heures à 50% 

'indemnité de congés payés afférente

'frais non compris dans les dépens, outre la remise sous astreinte des bulletins de paie rectifiés de chacun des mois concernés

Vu l'article 455 du code de procédure civile

Vu l'ordonnance de fixation de l'affaire et de clôture

MOTIFS

LA DEMANDE DE MAJORATION DE 50 % DES MAJORATIONS DE 22 % PAYÉES AU TITRE DU TRAVAIL DE NUIT

En application de l'article L 3132-19 du code du travail la rémunération des salariés de l'équipe de suppléance doit être majorée d'au moins 50 % par rapport à celle qui serait due pour une durée équivalente effectuée suivant l'horaire normal de l'entreprise. En vertu de divers accords d'entreprise les salariés de semaine de PSA travaillant la nuit bénéficiaient d'une majoration de 22 % puis 21% de leur taux de rémunération horaire, ce sous le vocable « prime d'incommodité de nuit ».

L'employeur soutient que l'horaire normal de l'entreprise à prendre en compte pour déterminer les droits de l'équipier de suppléance s'entend de l'horaire de jour et de semaine dans la mesure où un faible pourcentage de salariés travaille exceptionnellement la nuit. Il ajoute que par accord d'entreprise du 22 novembre 2016 l'horaire normal a été défini comme celui « de jour et de semaine » et qu'il ne peut s'agir de l'horaire de nuit vu son caractère exceptionnel. M.[N] explique pour sa part qu'en application du texte précité il a droit à une majoration de 50 % de la majoration de ses heures de nuit puisque les heures de nuit effectuées en semaine sont majorées.

Sur ce,

il y a lieu de distinguer selon les périodes.

Pour la période précédant l'entrée en vigueur de l'accord du 22/11/2016

la Cour observe que les partenaires sociaux n'ont pas défini l'horaire normal de l'entreprise et que la loi n'en donnait elle-même aucune définition. Dès lors qu'environ 10 % de ses effectifs travaillaient de nuit et que l'usine ne comportait aucun service fonctionnant uniquement avec l'équipe de nuit, ce dont il est déduit que la production d'automobiles et l'organisation interne étaient non pas séparées mais continues et interdépendantes, l'horaire normal à prendre en compte s'entend en l'espèce de l'horaire de semaine.

Les salariés de semaine bénéficiant d'un taux horaire majoré de 22 % pour chaque heure de nuit effectuée c'est à juste titre que M.[N] demande que les 50 % d'augmentation du taux horaire prévue par l'article L 3132-19 du code du travail s'appliquent à ses heures de nuit majorées ce qui lui ouvrirait droit à une majoration de 33 % calculé comme suit:

22 + (¿ x 22).

Il ne résulte cependant ni des éléments versés aux débats (aucun décompte n'est fourni au dossier remis à la cour malgré les demandes réitérées du greffe) ni des explications des parties que M.[N] ait effectué des heures de nuit avant le 22 novembre 2016 étant observé qu'en cause d'appel il ne précise pas à quelle période se rapporte sa réclamation et qu'il n'allègue pas l'accomplissement d'heures avant la date précitée. Sa demande sera donc rejetée.

pour la période postérieure

l'employeur se prévaut d'un accord écrit d'adaptation des statuts de PSA [Localité 5] en vue de sa convergence avec ceux de PSA aux termes duquel la direction et des syndicats ont prévu, parmi de nombreuses autres dispositions, que:

« ..à compter de la signature du présent accord... le personnel en horaires réduits de fin de semaine bénéficiera du versement d'une majoration de 50% par rapport à la rémunération perçue pour une durée équivalente effectuée suivant l'horaire normal de l'entreprise, étant entendu comme étant l'horaire de jour de semaine... »

En premier lieu cet accord n'a pas été annulé et son annulation n'est pas présentement demandée. La disposition litigieuse porte sur les salaires, elle relève donc du champ normal de la négociation collective et elle ne contrevient à aucune disposition d'ordre public. Du reste, le Conseil constitutionnel a jugé que le législateur et les tribunaux ne sauraient porter aux contrats légalement conclus une atteinte qui ne soit justifiée par un motif d'intérêt général suffisant sans méconnaître les exigences résultant des articles 4 et 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 et le 8e alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 relatif à la participation des travailleurs, par l'intermédiaire de leurs délégués, à la détermination collective des conditions de travail.

La cour ajoute que les rapports de prévalence entre la loi et l'accord reposent sur l'application du principe de faveur. Au cas présent, en matière de rémunération, cadre d'appréciation pertinent, l'accord d'entreprise comporte des dispositions plus favorables que la loi (et que la Convention collective). Ainsi en est-il de ses stipulations suivantes :

'article 4 prévoyant que pour tenir compte des pauses la durée de travail hebdomadaire payée est de 36 h 40

'chapitre 3 relatif à la convergence des statuts du personnel ouvrier prévoyant une majoration automatique de 5 % de la rémunération minimale hiérarchique servant de base au calcul de la prime d'ancienneté prévue par la convention et les accords de branche

'même article : augmentation générale rétroactive au 1er avril 2016

'chapitre 4 : augmentation générale de la prime d'évolution garantie des primes et indemnités, mise en place du régime d'assurance collective des aléas de carrière

'même chapitre : entrée en vigueur à [Localité 5] d'une douzaine de primes selon les conditions plus avantageuses appliquées aux autres établissements de PSA

'intégration pour certains salariés de la prime de rentrée dans le salaire de base

'intégration de 5 minutes de temps de pause sur 25 dans le salaire de base

'pour les salariés des équipes de suppléance rémunération totale des pauses de 25 minutes

'versement de primes de nuit, à un taux supérieur de 7 points au taux minimal prévu par la Convention collective.

Il se déduit de l'ensemble de ces considérations que pour la période démarrant le 22/11/2016, date d'entrée en vigueur de la disposition litigieuse (et non le 1/1/2017), M.[N] est mal fondé en sa demande.

La demande de paiement des majorations pour les heures de nuit du lundi entre 0 et 6 heures

M.[N] soutient que :

-la société PSA AUTOMOBILES n'explique pas pour quelle raison la contrainte serait moindre après minuit le lundi pour les salariés de suppléance alors que ses collègues de semaine bénéficient de la majoration et que tous doivent être traités de façon identique

-l'accord RTT du 26 mai 1999 ne permet pas d'exclure les salariés de suppléance la nuit du bénéfice de la majoration de 22 % décidée pour tous

-l'Accord national de la Métallurgie du 3 janvier 2002 prévoit une majoration minimale de 15 % pour les travailleurs de nuit postés de 21 heures à 6 heures ce qui est son cas.

La société PSA AUTOMOBILES rétorque que :

-le principe d'égalité de traitement avec les salariés de semaine, bénéficiant d'une majoration de 22 %, ne s'applique pas dans la mesure où leur situation n'est pas identique à celle de M.[N]

-par voie conventionnelle il a été décidé que les équipes de semaine (du lundi au vendredi) percevraient une majoration de 22 % de leurs heures de nuit et que celles de suppléance verraient leur rémunération de base majorée de 50 %, outre 22 % pour les seules heures de nuit effectuées les samedis et dimanche, ce qui ne contrevient pas au principe d'égalité et dépasse les garanties prévues par les dispositions conventionnelles

-elle ne s'est jamais engagée unilatéralement ou conventionnellement à majorer les heures de nuit du lundi pour les équipes de suppléance.

Sur ce,

compte-tenu du nombre d'heures de nuit effectuées, dépassant le seuil prévu par l'accord de branche sur la métallurgie du 3 janvier 2002, M.[N], travailleur de nuit, devait bénéficier à ce titre au minimum de la majoration de 15 % prévue par ledit accord prévoyant que : 

« pour chaque poste, les heures de travail réellement effectuées par un travailleur de nuit au cours de la plage horaire comprise entre 22 heures et 6 heures ouvrent droit, à condition que leur nombre soit au moins égal à 6 au cours de cette plage, à une majoration du salaire réel égale à 15 % du salaire minimal prévu pour l'intéressé par la convention collective de la métallurgie applicable.»

Cet accord précise cependant que :

« pour vérifier si le salarié a bénéficié de cette majoration, il sera tenu compte des éventuels avantages salariaux versés par les entreprises spécifiquement au titre du travail de nuit, même lorsqu'il sont intégrés au salaire de base et quelle qu'en soit la dénomination (majoration d'incommodité, indemnité de pause payée, indemnité d'emploi, prime de panier à l'exception de la part exonérée des cotisations de sécurité sociale, etc.), ainsi que de ceux versés au titre du travail en équipes successives, pour le montant correspondant à l'exécution du poste de nuit. »

Force est de constater que la rémunération horaire de M.[N] a été majorée de 50 % pour toutes ses heures, y compris celles du lundi et qu'elle a perçu, en sus, une majoration de 22 puis 21% de ses heures de nuit du samedi et du dimanche. Il en ressort que sa rémunération globale au titre des heures de nuit a dépassé les minima conventionnels.

Le principe « à travail égal salaire égal » ne peut du reste recevoir application puisque M.[N], qui bénéficiait d'un régime de travail sur 24 heures hebdomadaires assorti d'avantages non consentis à ses collègues de semaine, n'était pas placé dans la même situation que ces derniers rémunérés sur la base d'un taux horaire non majoré.

Il est ajouté que dans l'accord RTT du 26 mai 1999, régissant la situation jusqu'à l'entrée en vigueur de l'accord de novembre 2016, il était prévu qu'afin d'atténuer l'écart de ressources consécutif à la suppression de la nuit du cycle du dimanche au lundi la majoration pour incommodités de nuit serait portée à 22 % mais elle était instituée pour atténuer l'écart de ressources consécutif à la suppression du cycle de nuit du dimanche au lundi. La demande portant précisément sur cette nuit-là cet accord ne peut être interprété comme obligeant l'employeur à majorer complémentairement de telles heures. Par ailleurs, si en 1988 l'employeur a unilatéralement décidé d'une majoration de 22 % des heures de nuit son engagement ne portait pas sur les heures du lundi mais sur celles du samedi au dimanche. Pour l'ensemble de ces raisons la demande sera rejetée.

Il serait inéquitable de condamner l'une ou l'autre des parties au paiement d'une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile tant en appel qu'en première instance.

PAR CES MOTIFS, LA COUR

INFIRME le jugement

statuant à nouveau

DEBOUTE M.[N] de l'ensemble de ses demandes

DIT n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE M.[N] aux dépens d'appel et de première instance.

LE GREFFIER

[E] [B]

P/LE PRESIDENT EMPECHE

Le Conseiller

Alain MOUYSSET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale b salle 1
Numéro d'arrêt : 20/01992
Date de la décision : 30/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-30;20.01992 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award