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22/09/2022 | FRANCE | N°20/05324

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 22 septembre 2022, 20/05324


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 22/09/2022





****





N° de MINUTE : 22/

N° RG 20/05324 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TLC5



Jugement (N°19/00168) rendu le 03 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer







APPELANTE



SCI PAJF, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

ayant son siège social [Adresse 1]
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représentée par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée par Me Jean-Pierre Vandamme, avocat plaidant, substitué à l'audience par Me Fabienne Moluri, avocats au...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 22/09/2022

****

N° de MINUTE : 22/

N° RG 20/05324 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TLC5

Jugement (N°19/00168) rendu le 03 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer

APPELANTE

SCI PAJF, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée par Me Jean-Pierre Vandamme, avocat plaidant, substitué à l'audience par Me Fabienne Moluri, avocats au barreau de Lille

INTIMÉE

SAS Les Sports, prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

ayant son siège social [Adresse 2] [Localité 6]

représentée par Me Sébastien Boulanger, avocat au barreau de Boulogne-sur-Mer, avocat constitué

assistée de Maître Daniel Gaubour, avocat plaidant, substitué à l'audience par Me François Mendy, avocat au barreau d'Amiens

DÉBATS à l'audience publique du 1er juin 2022 tenue par Dominique Gilles magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Valérie Roelofs

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DELIBERE

Véronique Renard, présidente de chambre

Dominique Gilles, président

Pauline Mimiague, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 septembre 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Dominique Gilles, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 04 mai 2022

****

La SAS Les Sports, exploitant à titre commercial un immeuble sis [Localité 3] au [Localité 9], a étendu cette exploitation à l'immeuble contigu sis [Adresse 4], propriété de la SCI PAJF, qui abrite notamment une galerie marchande. La SAS Les Sports exploite encore pour son commerce un local situé [Adresse 7], qui est également contigu à l'immeuble déjà mentionné de la SCI PAJF. Par voie de cession de bail commercial et de baux commerciaux, la SAS Les Sports, entre le 28 juin 2016 et le 31 janvier 2017, a été autorisée à exploiter la plupart des lots de l'immeuble de la SCI PAJF. Le bailleur reproche à ce locataire d'avoir installé une terrasse en bois sur la terrasse de l'immeuble. Par acte extrajudiciaire du 21 décembre 2018, la SCI PAJF a assigné la SAS Les Sports en remise en état.

C'est dans ces conditions que le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer, par jugement du 3 novembre 2020, au visa des articles 1103, 1188, 555 et 681 du code civil, a :

-débouté la SCI PAJF de sa demande tendant à condamner sous astreinte la SAS Les Sports à démonter la terrasse et à défaut d'exécution dans les trois mois à être autorisé à détruire la terrasse aux frais du locataire ;

-débouté la SCI PAJF de sa demande de condamnation de la SAS Les Sports à remettre en place la réserve ;

 -débouté la SCI PAJF de sa demande d'indemnité d'occupation ;

-condamné la SCI PAJF à payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dépens en sus.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 21 décembre 2020, la SCI PAJF a interjeté appel de ce jugement dont elle critique l'ensemble des dispositions.

Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par la voie électronique le 5 avril 2022, la SCI PAJF demande à la Cour de :

-vu les articles 1104 et 1231-1 du code civil ;

-recevoir l'appel de la SCI PAJF et le déclarer bien fondé ;

-réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer ;

-condamner la société Les Sports au démontage de la terrasse et de la cloison dans un délai de trois mois sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

-à défaut, autoriser la SCI PAJF à procéder aux destructions aux frais de la société Les Sports ;

-condamner la société Les Sports au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 1 000 euros à compter du 20 avril 2018 et jusqu'à la remise en état de la toiture ;

-ordonner avant dire droit la désignation d'un expert, en vue de déterminer si le mur de séparation entre les lots 44 et 50 respecte les limites des deux propriétés, si ce même mur empêche de manière définitive tout accès ou passage entre les deux fonds, si la toiture du lot du n°44 dépasse sur le lot n° 50, si la gouttière d'évacuation des eaux pluviales du lot n°44 se déverse sur le lot n°50 ;

-condamner la société Les Sports au paiement d'une somme de 15 000 euros au titre de dommages et intérêts ;

-condamner la société Les Sports au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-débouter la société Les Sports de ses demandes.

Par dernières conclusions déposées et notifiées par la voie électronique le 1er avril 2021, la société Les Sports, au visa des articles 1188, 1190, 1101 et 1103 du code civil, 145 et 564 du code de procédure civile prie la Cour de :

-confirmer le jugement entrepris ;

-déclarer irrecevables comme nouvelles en appel les demandes au titre de la démolition de la cloison sur le passage de la galerie et sollicitant l'expertise judiciaire ;

-dire n'y avoir lieu à expertise judiciaire ;

-condamner la SCI PAJF à lui payer 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

L'ordonnance de clôture est du 4 mai 2022.

 

SUR CE

LA COUR

 

Les moyens développés par la SCI PAJF au soutien de son appel ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs exacts que la Cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation.

A ces justes motifs, il sera cependant ajouté ce qui suit.

Les parties sont contraires sur l'existence d'un droit contractuel de la société Les Sports d'aménager et d'exploiter la terrasse de l'immeuble à usage de galerie.

Le règlement intérieur de la galerie contient la clause suivante :

« Les parties communes de la [Adresse 8] sont celles qui ne sont pas affectées à l'usage exclusif d'un local commercial.

Les locataires en auront libre usage selon leur destination sans toutefois que ces parties puissent faire l'objet d'une occupation privative et à condition de ne pas faire obstacle aux droits des autres usagers, sauf ce qui sera dit dans les contrats et baux.

Toute vente ou manifestation commerciale, distribution, prospectus, etc'est formellement interdite sur les parties communes générales, si elle n'a pas obtenu l'approbation du propriétaire.

Chacun des exploitants devra utiliser ou ne devra laisser utiliser par quiconque aucune des parties communes, galeries, trottoirs, etc'pour faire aucun déballage ou emballage, pour exposer aucune marchandise, pour poser des comptoirs, machines distributeurs kiosques ou autres installations ».

Il est constant que la SAS Les Sports a pris à bail commercial plusieurs cellules et réserves dépendant de la galerie, aux termes de plusieurs contrats ou baux écrits, qui chacun a été reçu par acte authentique signé par les parties et qui comportent :

-une clause établissant une liste des parties communes, chaque bail précisant cependant que l'énumération est purement énonciative et non limitative ;

-une clause intitulée Règlement intérieur qui indique que : « Cet ensemble immobilier a fait l'objet d'un règlement intérieur, dont une copie a été remise au preneur dès avant ce jour ».

 Il en est ainsi :

-du contrat de cession de bail commercial au bénéfice de la société Les Sports du 28juin 2016, portant sur les lots 4, 4bis, 5, 6 et 7 au fond de la galerie au rez-de-chaussée, outre les réserves 7,12 et 13 au premier étage ;

-du bail commercial du 23 décembre 2016, portant sur les lots 8, 9 et 10au rez-de-chaussée, consistant en trois cellules, outre les réserves 1 et 2 au premier étage ;

-du bail commercial du 31janvier 2017 portant sur trois magasins à droite de la galerie et autant de réserves situées au-dessus de chacun de ces magasins.

A l'appui de son argumentation, la société Les Sports se prévaut essentiellement, d'une part, de l'offre de bail manuscrite, établie et signée par la gérante de la société Les Sports en cette qualité le 16novembre 2016 et revêtue de la mention « Bon pour accord » par le gérant de la SCI PAJF et, d'autre part d'une lettre de la SCI PAJF du 17 novembre 2016.

L'offre de contrat datée du 16 novembre 2016 porte sur la signature d'un bail commercial pour l'exploitation des cellules commerciales 8, 9, et 10 outre les réserves 1 et 2. La société Les Sports a précisé des conditions financières, telles le montant du loyer mensuel et des provisions pour charges, du droit au bail, d'un droit d'accès et du dépôt de garantie ; la société Les Sports a également précisé des possibilités d'installation de tables et de chaises, de réfections des décorations de la galerie, du sol et du plafond de celle-ci, de rénovation de l'escalier et de transformation d'un local WC. Cette offre de contrat mentionne encore :

« Courrier pour accord de principe sur terrasse et pour décaissement en cas d'accord avec DPAM

Accord de principe pour le percement du mur en plusieurs endroits entre le mur des Sports et DPAM.

Voir plus tard pour transformation des réserves en salle. »

Par la lettre du 17 novembre 2016, la société PAJF a indiqué qu'elle confirmait divers points « sous la réserve expresse d'un accord bilatéral », en particulier : « la possibilité de rénover et transformer la toiture en terrasse ».

Il résulte des actes authentiques déjà mentionnés et conclus après la négociation formalisée par les lettres déjà mentionnées que :

-le bail cédé le 28 juin 2016 énonce l'exigence d'un accord écrit préalable et exprès du bailleur pour toute installation extérieure et indique que le bailleur donne son accord au cessionnaire pour le percement du mur pour permettre l'accès à l'immeuble mitoyen déjà exploité par le preneur, selon un plan annexé et pour le percement ou l'élargissement d'une porte de secours donnant sur la cour ;

-le bail du 23 décembre 2016 mentionne l'autorisation et les conditions du bailleur pour installer des tables et des chaises uniquement devant les cellules louées, pour refaire la décoration de la galerie, pour rénover l'escalier menant aux réserves, pour transformer le local WC, d'aménager les réserves situées à l'étage ;

-la clause « transformations » du bail du 31 janvier 2017 rappelle que le preneur ne peut pas nuire « au règlement » et précise : « Observation étant ici faite qu'ont déjà été autorisés la possibilité d'aménager l'escalier d'accès à l'étage, des travaux de percement du mur mitoyen entre ce local commercial et celui déjà exploité par la SAS Les Sports, de décaisser le sol pour permettre l'aménagement et l'installation de la future activité de micro-brasserie dans ces différentes cellules, de procéder à l'alignement de la façade des trois cellules au niveau du couloir de la galerie intérieure.

Ce dernier bail comporte d'ailleurs dans la clause particulière précisant les aménagements et travaux autorisés par le bailleur une stipulation ultime qui envisage expressément « tout travaux permettant au preneur d'exercer dans les lieux loués l'activité prévue audit bail, et de réaliser tous les travaux nécessaires ['] »

La Cour considère que peu important qu'aucun de ces actes authentiques ne précise l'autorisation de transformer la toiture en terrasse, les lettres des 16 et 17 novembre 2016, en présence des autres éléments de la négociation concrétisée par les parties dans les actes authentiques dans leur ensemble, suffisent à établir l'accord écrit des volontés des parties sur ce point.

En particulier, la réserve exprimée par le bailleur dans la lettre du 17 novembre 2016 - laquelle est une acceptation écrite et non une offre - et tenant à l'intervention d'un accord bilatéral, doit être considérée comme réalisée au vu des différents contrats écrits qui formalisent l'ensemble de ce que les parties ont voulu et dont la société PAJF est mal venue de retirer désormais l'autorisation d'exploiter la terrasse à laquelle elle a consenti, qui 'portant sur une partie d'immeuble accessoire à celles ayant fait l'objet des actes et baux authentiques- était manifestement essentielle à la négociation de l'ensemble contractuel en vue de l'exploitation du fonds de commerce de la SAS Les Sports au moyen de ces baux commerciaux tel que les parties l'ont voulu, qui ne dépendait que de la volonté du bailleur et qui n'a été soumise par le bailleur à aucune condition de loyer supplémentaire ou de réitération par un acte écrit supplémentaire. Cependant, la remise en question de cette autorisation est de nature à remettre en question l'exploitation du fonds de commerce de la SAS Les Sports telle que les parties l'onts voulue.

Contrairement à ce que soutient la SCI PAJF, la circonstance qu'aucun des baux au bénéfice de la SAS Les Sports et conclus en la forme authentique ne désigne la terrasse parmi les biens loués n'empêche pas que le propriétaire de l'immeuble a bien autorisé la SAS Les Sports, ainsi qu'il a été dit et par un contrat autre que les baux authentiques -contrat dont la preuve est rapportée et qui porte sur un local accessoire-, à aménager et à exploiter la terrasse.

Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la SCI PAJF de sa demande tendant à condamner sous astreinte la SAS Les Sports à démonter la terrasse et à défaut d'exécution dans les trois mois à être autorisé à détruire la terrasse aux frais du locataire.

Pour les mêmes raisons, les prétentions en appel relatives à une indemnité d'occupation sont mal fondées et doivent être également rejetées.

En dépit de développement sur le démontage d'une cloison non autorisée dans le passage de la galerie marchande, tel que figurant dans le corps des conclusions de la SCI PAJF, la Cour n'est saisie d'aucune prétention en ce sens par le dispositif de ces écritures qui seul la lie.

Concernant la demande d'expertise formée en appel pour la première fois, la SCI PAJF affirme qu'elle est recevable, en vertu des articles 565 et 566 du code de procédure civile, au moyen qu'elle tend aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, à savoir que l'intimé doit démolir la terrasse qu'il a édifiée sur la toiture. Toutefois, ce fait n'est pas établi, dès lors qu'au contraire la demande d'expertise ne se rattache, selon le jugement entrepris non valablement contrebattu sur ce point, qu'à des prétentions qui, à les supposer avoir saisi le tribunal de commerce bien que celui-ci ait constaté qu'elles n'avaient pas été reprises au dispositif des conclusions récapitulatives, ont porté, d'une part,  sur la démolition consécutive au prétendu empiétement d'un mur construit dans l'immeuble dont la SAS Les Sports est propriétaire et d'autre part, sur la démolition d'une gouttière et de canalisations d'évacuation d'eaux pluviales faisant verser ces eaux sur le fonds de la SCI PAJF, en violation de l'article 681 du code civil.  Or, ces prétentions ne tendent pas aux mêmes fins que l'action contractuelle en démolition de la terrasse, par ailleurs déjà rejetée.  

 

La demande d'expertise est donc irrecevable.

La mauvaise foi reprochée à la SAS Les Sports n'est nullement établie et la demande en dommages-intérêts de la SCI PAJF doit être rejetée.

Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé et la SCI PAJF verra rejeter toutes ses demandes.

Elle supportera la charge des dépens d'appel.

En équité, elle versera à la SAS Les Sports une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile dont le montant sera précisé au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

 

La cour,

Dit que la demande en expertise judiciaire est irrecevable ;

Confirme le jugement entrepris ;

Rejette les demandes de la SCI PAJF ;

Condamne la SCI PAJF à payer à la SAS Les Sports une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

Condamne la SCI PAJF aux dépens d'appel.

 

 Le greffierLe président

Valérie RoelofsDominique Gilles


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 20/05324
Date de la décision : 22/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-22;20.05324 ?
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