COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre des Libertés Individuelles
N° RG 22/01221 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UMUH
N° de Minute :
Ordonnance du mardi 19 juillet 2022
République Française
Au nom du Peuple Français
APPELANT
M [E] [B] [O]
né le 10 Mai 1996 à [Localité 1]
de nationalité Marocaine
Actuellement retenu au centre de rétention de LESQUIN
dûment avisé, comparant en personne
assisté de Me Lilia LAMBERT, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d'office et de M. [J] [F] interprète assermenté en langue Arabe, tout au long de la procédure devant la cour,
INTIMÉ
M. LE PREFET DU NORD
dûment avisé, absent non représenté
M. le procureur général : non comparant
MAGISTRAT(E) DELEGUE(E) : Myriam CHAPEAUX, Conseillère à la cour d'appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché
assisté(e) de Aurélie DI DIO, Greffière
DÉBATS : à l'audience publique du mardi 19 juillet 2022 à 08 h 30
ORDONNANCE : prononcée publiquement à Douai, le mardi 19 juillet 2022 à 15H00
Le premier président ou son délégué,
Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;
Vu l'ordonnance rendue le 15 juillet 2022 par le Juge des libertés et de la détention de LILLE prolongeant la rétention administrative de M. [E] [B] [O]
Vu l'appel interjeté par M. [E] [B] [O] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 18 juillet 2022 ;
Vu l'audition des parties ;
EXPOSÉ DU LITIGE
[E] [B] [O], ressortissant Marocain, a fait l'objet, suite à un placement en garde-à-vue pour des faits de vol aggravé, d'un arrêté du préfet de l'Essonne le 4 juin 2022 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire sous l'identité de [M] [D], qui lui a été régulièrement notifié et qui n'a pas été contesté.
Par décision administrative du 15 juin 2022, le préfet du Nord a ordonné son placement en rétention administrative.
Par ordonnance du 17 juin 2022, confirmée par la cour d'appel, le juge des libertés et de la détention a constaté la régularité du placement en rétention et autorisé la prolongation de celle-ci pour vingt-huit jours.
Par requête du 14 juillet 2022, le préfet du Nord a sollicité la prolongation de la rétention de [E] [B] [O] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée de trente jours.
Par ordonnance du 15 juillet 2022 à 14 heures 40, le juge des libertés et de la détention de Lille a autorisé la prolongation de la rétention de [E] [B] [O] pour une durée de 30 jours à compter du 15 juillet 2022 à 11 heures.
[E] [B] [O] a interjeté appel le 18 juillet 2022 à 14 heures 05 de l'ordonnance dont il sollicite l'infirmation.
Lors de l'audience, [E] [B] [O], assisté d'un interprète, indique qu'il souhaite quitter la France et n'était que de passage. Il souligne que la rétention est très difficile pour lui. Il indique à nouveau que son refus d'effectuer le test PCR est lié à des difficultés de santé.
L'avocat de [E] [B] [O], développant à l'oral le mémoire d'appel, sollicite l'infirmation de l'ordonnance aux motifs de l'irrégularité de la requête et du défaut de diligences réitérées de l'autorité administrative.
Le préfet n'a pas fait parvenir de conclusions à la cour et n'était pas représenté lors de l'audience.
MOTIFS DE LA DÉCISION
De manière liminaire il est rappelé que le juge judiciaire ne peut se prononcer ni sur le titre administratif d'éloignement de l'étranger, ni, directement ou indirectement, sur le choix du pays de destination.
Les prérogatives judiciaires se limitent à vérifier la régularité et le bien-fondé de la décision restreignant la liberté de l'étranger en plaçant ce dernier en rétention, ainsi qu'à vérifier la nécessité de la prolongation de la rétention au vu des diligences faites par l'administration pour l'exécution de l'expulsion et le maintien de la rétention dans la plus courte durée possible.
Sur la recevabilité de l'appel et des moyens tirés des exceptions de procédure
L'appel de l'étranger ayant été introduit dans les formes et délais légaux est recevable.
Les articles 933 du code de procédure civile et R. 743-11 du CESEDA, ne permettent, sauf indivisibilité ou demande d'annulation du jugement, que de discuter en cause d'appel des seuls moyens mentionnés dans l'acte d'appel et soutenus oralement à l'audience.
Sur les moyens tirés de la demande de prolongation du placement en rétention
Sur la compétence de l'auteur de la requête saisissant le premier juge
S'agissant d'une procédure civile, il appartient à l'appelant de démontrer en quoi son moyen est fondé et notamment en quoi le délégataire de l'autorité préfectorale ne disposait pas de mandat spécial aux fins de saisir le juge des libertés et de la détention, preuve qui n'est pas rapportée en l'espèce alors pourtant que les documents à l'appui du dit moyen sont actes administratifs accessibles puisque joints à la requête préfectorale saisissant le juge des libertés et de la détention.
De manière surabondante, il ressort des pièces du dossier que le signataire de la requête saisissant le juge des libertés et de la détention disposait de la signature préfectorale pour la période concernée.
Le moyen est inopérant.
Sur les diligences aux fins d'éloignement
L'article L. 742-4 du CESEDA que : ''Le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu'à l'article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1 En cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public ;
2 Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3 Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement ;
b) de l'absence de moyens de transport.
L'étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l'article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours.
L'obstruction est constituée par tout acte matériel effectué par action ou par omission dans le seul but d'éviter l'exécution de l'éloignement.
Ainsi le fait de donner ou de maintenir une identité ou une nationalité fausse de manière à éviter
Si le fait d'accepter ou de refuser de subir un acte médical, tel un test PCR sur sa personne, relève du droit dont dispose chaque individu sur son propre corps, l'exercice de ce droit n'est pas exempt d'abus lorsque le refus du test n'est réellement motivé que par la volonté d'éviter une expulsion vers un pays imposant cette sécurité à toute personne rejoignant son territoire en cette période de pandémie.
En l'espèce, [E] [B] [O] ayant remis son passeport original en cours de validité, un vol à destination de Casablanca était réservé le 5 juillet 2022. Cependant, [E] [B] [O] ayant refusé d'effectuer le test PCR requis par les autorités marocaines pour entrer sur leur territoire, ce vol a dû être annulé. Lors de son audition, [E] [B] [O] a indiqué refuser le test PCR (le premier qu'il faisait selon lui) en raison de problèmes de cloison nasale puis pour empêcher son retour au pays. Il est ainsi suffisamment démontré qu'il a voulu faire obstacle à son éloignement, ce qui justifie la seconde prolongation.
Une demande de routage et de laissez-passer consulaires ont été effectuées et un nouveau vol est réservé pour le 4 août 2022.
Dans l'attente de l'aboutissement de ces démarches, il y a lieu d'autoriser la prolongation de la détention.
L'ordonnance est confirmée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
DÉCLARE l'appel recevable ;
CONFIRME l'ordonnance entreprise.
DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;
DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à l'appelant, à son conseil et à l'autorité administrative.
Aurélie DI DIO, Greffière
Myriam CHAPEAUX, Conseillère
N° RG 22/01221 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UMUH
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE DU 19 Juillet 2022 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :
Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Pour information :
L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Reçu copie et pris connaissance le mardi 19 juillet 2022 :
- M. [E] ALIAS [M] [O] ALIAS [D]
- l'interprète
- l'avocat de M. [E] ALIAS [M] [O] ALIAS [D]
- l'avocat de M. LE PREFET DU NORD
- décision notifiée à M. [E] ALIAS [M] [O] ALIAS [D] le mardi 19 juillet 2022
- décision transmise par courriel pour notification à M. LE PREFET DU NORD et à Maître Lilia LAMBERT le mardi 19 juillet 2022
- décision communiquée au tribunal administratif de Lille
- décision communiquée à M. le procureur général :
- copie à l'escorte, au Juge des libertés et de la détention de LILLE
Le greffier, le mardi 19 juillet 2022
N° RG 22/01221 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UMUH