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07/07/2022 | FRANCE | N°20/00797

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 07 juillet 2022, 20/00797


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 07/07/2022



N° de MINUTE : 22/670

N° RG 20/00797 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S4TV

Jugement (N° 19-001372) rendu le 20 décembre 2019 par le tribunal d'instance de Lille



APPELANTE



Sa Cofidis prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 3]



Représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de

Douai et Me Xavier Helain, avocat au barreau de Lille



INTIMÉS



Monsieur [P] [W]

né le 06 février 1952 à [Localité 9] - de nationalité française

[Adresse 2]

[L...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 07/07/2022

N° de MINUTE : 22/670

N° RG 20/00797 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S4TV

Jugement (N° 19-001372) rendu le 20 décembre 2019 par le tribunal d'instance de Lille

APPELANTE

Sa Cofidis prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai et Me Xavier Helain, avocat au barreau de Lille

INTIMÉS

Monsieur [P] [W]

né le 06 février 1952 à [Localité 9] - de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Guillaume Ghestem, avocat au barreau de Lille et Me Ariane Vennin, avocat au barreau de Paris

Maître [D] [O] es qualités de liquidateur judiciaire de la société E.C.Log

de nationalité française

[Adresse 7]

[Localité 5]

Régulièrement assigné en reprise d'instance par acte du 6 janvier 2021 remis à personne habilitée, n'a pas constitué avocat

Sasu E.C.Log. exerçant sous le nom commercial Air Eco Logis

[Adresse 1]

[Localité 6]

A laquelle la déclaration d'appel a été signifiée par acte du 22 juin 2020 (article 659 cpc)

DÉBATS à l'audience publique du 04 mai 2022 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Harmony Poyteau

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

Catherine Convain, conseiller

ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 07 juillet 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 26 avril 2022

Expose du litige

Selon bon de commande numéro du 11 juillet 2017, dans le cadre d'un démarchage à domicile, M. [P] [W] a contracté auprès de la société E.C.LOG, exerçant sous l'enseigne commerciale 'Air Eco Logis', une prestation relative à l'installation d'un système aérovoltaïque 'Air'System'pour un montant de 23'000 euros TTC.

Le 11 juillet 2017, la société Cofidis exerçant sous l'enseigne 'Projexio by Cofidis' a consenti à M. [W] un crédit affecté à la réalisation de cette prestation d'un montant de 23'000 euros, remboursable en 144 mensualités, précédées d'un différé de paiement de six mois, incluant les intérêts au taux nominal annuel de 2,69 %.

Par acte d'huissier en date des 18 et 22 mars 2019, M. [W] a fait assigner les sociétés E.C.LOG et Cofidis en justice afin de voir prononcer, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à titre principal, la nullité des contrats de vente et de crédit affecté, et à titre subsidiaire leur résolution, de condamner la société Cofidis à lui restituer les sommes versées par lui, de condamner la société E.C.LOG à procéder à la dépose de l'installation ainsi qu'à la remise en état à ses frais et de condamner la société Cofidis à lui payer la somme de 2 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par jugement réputé contradictoire en date du 20 décembre 2019, le tribunal d'instance de Lille a :

- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 11 juillet 2017 entre M. [W] et la société E.C.LOG,

- constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre M. [W] et la société Cofidis en date du 11 juillet 2017,

- condamné la société Cofidis à restituer à M. [W] l'ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 11 juillet 2017,

- ordonné à la société E.C.LOG de procéder à la désinstallation du matériel suivant bon de commande du 11 juillet 2017 et à la remise en état de la toiture de M. [W] à ses frais,

- condamné la société E.C.LOG à payer à la société Cofidis la somme de 23'000 euros,

- débouté M. [W] du surplus de ses demandes,

- débouté la société Cofidis du surplus de ses demandes,

- condamné la société Cofidis à payer à M. [W] la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les sociétés Cofidis et E.C.LOG aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

La société Cofidis a relevé appel de l'ensemble des chefs du jugement par déclaration reçue par le greffe de la cour le 10 février 2020. Elle a signifié sa déclaration d'appel et ses conclusions d'appelante et pièces à la société E.C.LOG par acte d'huissier en date du 22 juin 2020 selon procès-verbal de recherches infructueuses.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 décembre 2020, la société Cofidis demande à la cour de :

- dire et juger M. [W] irrecevable et subsidiairement mal fondé en ses demandes, fins et conclusions et l'en débouter,

- la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

y faisant droit :

- infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

- débouter M. [W] de ses demandes de nullité et de résolution,

- condamner M. [W] à poursuivre l'exécution du contrat de crédit conformément aux stipulations contractuelles telles que retracées dans le tableau d'amortissement,

- à titre subsidiaire, si la cour confirmait la nullité des conventions ou prononçait leur résolution,

- dire et juger qu'elle n'a commis aucune faute de nature à la priver de sa créance de restitution du capital,

- dire et juger, en toute hypothèse, que M. [W] ne justifie pas d'un préjudice de nature à la priver de sa créance de restitution du capital,

- en conséquence, condamner M. [W] à lui rembourser le capital emprunté d'un montant de 23'000 euros au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, déduction à faire des échéances payées,

- à titre infiniment subsidiaire, condamner M. [W] à lui rembourser une partie du capital dont le montant sera fixé souverainement par la juridiction,

- en tout état de cause,

- condamner M. [W] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 septembre 2020, et signifié à la société E.C.LOG par acte d'huissier en date du 25 septembre 2020 selon procès-verbal de recherches infructueuses, M. [W] demande à la cour :

- juger infondé l'appel formé par la société Cofidis à l'encontre du jugement rendu par le tribunal d'instance de Lille le 20 décembre 2019,

- débouter la société Cofidis de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre,

in limine litis :

- juger irrecevable les demandes de la société Cofidis tenant à la réformation du jugement de première instance en ce qu'il a prononcé l'annulation du bon commande et du contrat de crédit affecté, tant que Me [D] [O], liquidateur judiciaire de la société E.C.LOG n'aura pas été assigné en intervention forcée,

- à titre principal, dans l'hypothèse où la procédure d'appel serait régularisée par la société Cofidis, par l'assignation en intervention forcée du liquidateur judiciaire de la société E.C.LOG :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal d'instance de Lille du 20 décembre 2019 en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat de vente conclu avec la société E.C.LOG le 11 juillet 2017,

- confirmer le jugement ce qu'il a prononcé l'annulation de plein droit du contrat de crédit affecté conclu avec la société Cofidis le 11 juillet 2017, annulation qui a pour effet de priver la banque de son droit aux intérêts dudit contrat,

- infirmer le jugement du tribunal d'instance de Lille en ce qu'il a condamné la société E.C.LOG à procéder à la dépose des matériels vendus au titre du bon de commande annulé et à remettre en l'état son habitation,

- statuer à nouveau et lui donner acte ce qu'il tiendra à la disposition de Maître [D] [O], ès qualité de liquidateur de la société E.C.LOG, l'ensemble des matériels de l'installation photovoltaïque achetés au titre du bon commande annulé et de ce qu'il prendra à sa charge l'intégralité des frais afférents au démontage desdits matériels et à leur mise à disposition auprès du mandataire,

à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la procédure d'appel serait régularisée par la société Cofidis par l'assignation en intervention forcée du liquidateur judiciaire et si par impossible la cour ne confirmait pas à titre principal l'annulation des contrats en

cause :

- prononcer la résolution judiciaire du contrat conclu avec la société E.C.LOG le 11 juillet 2017,

- prononcer la résolution judiciaire de plein droit du contrat de crédit affecté conclu avec la banque Cofidis le 11 juillet 2017, résolution judiciaire qui a pour effet de priver la banque de son droit aux intérêts dudit contrat,

- lui donner acte ce qu'il tiendra à la disposition de Maître [D] [O], ès qualité de liquidateur de la société E.C.LOG, l'ensemble des matériels de l'installation photovoltaïque achetés au titre du bon commande annulé et de ce qu'il prendra à sa charge l'intégralité des frais afférents au démontage desdits matériels et à leur mise à disposition auprès du mandataire,

en tout état de cause,

- confirmer le jugement du tribunal d'instance de Lille du 20 décembre 2019 en ce qu'il a jugé que la société Cofidis a commis une faute dans le déblocage des fonds,

- confirmer en conséquence le jugement du tribunal d'instance en ce qu'il a jugé que la faute de la société Cofidis la prive de son droit à restitution du capital prêté,

- le confirmer en ce qu'il a condamné la société Cofidis à lui restituer le montant total des échéances du prêt affecté déjà remboursées par lui,

- condamner la société Cofidis à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

La société E.C.LOG a été placé en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Bobigny en date du 24 juin 2020, Me [D] [O] ayant été désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

Par acte en date du 6 janvier 2021, la société Cofidis a assigné en reprise d'instance et intervention Me [D] [O], qui n'a pas constitué avocat.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 avril 2022 et l'affaire fixée pour être plaidée à l'audience du 4 mai 2022.

MOTIFS

Sur la fin de non-recevoir soulevée par M. [W]

Par acte en date du 6 janvier 2021, la société Cofidis a assigné en reprise d'instance et intervention le liquidateur de la société E.C.LOG, de sorte que la procédure est régulière et les demandes de cette dernière tendant à l'infirmation du jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu et celle subséquente du contrat de crédit sont parfaitement recevables.

Sur la demande de nullité du contrat de vente

Le contrat ayant été conclu le 11 juillet 2017, il sera fait application des dispositions du code de la consommation dans leur version issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

En vertu des articles L.221-9 et L.221-29 du code de la consommation, les contrats hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat écrit daté don't un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat. Il comprend toutes les informations prévues par l'article L.221-5, don't les informations prévues aux articles L.111-1 et L.111-2 du code de la consommation, et lorsque le droit de rétractation existe, les conditions d'exercice de ce droit, ainsi que les informations relatives aux coordonnées du professionnel. Le contrat doit être accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L.221-5.

Selon l'article L.111-1 du code de la consommation, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné,

2° le prix du bien ou du service en application de l'article L.112-1 à L.112-4,

3° en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service,

4° les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;

5° s'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique, et le cas échéant, à son intéropérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et autres conditions contractuelles ;

6° la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre 1er du livre VI. (...)'

En vertu de l'article L.242-1du code de la consommation, les dispositions de l'article L.221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

En l'espèce, le contrat de vente litigieux conclu le 11 juillet 2017 porte sur la fourniture et la pose d'un système aérovoltaïque de marque Soluxtec composé de 10 modules solaires photovoltaïques d'une puissance unitaire de 300 Wc soit soit une puissance totale de 3 000 Wc, 4 bouches de distribution d'air chaud, et d'un Kit d'intégration en toiture, la société EC LOG s'engageant à accomplir les démarches administratives auprès d'ERDF, le coût du raccordement étant pris en charge à 100 % par elle, pour un montant global de 23 000 euros TTC.

Il ressort de l'examen du bon de commande produit qu'il n'est pas conforme aux dispositions légales prescrites à peine de nullité en ce qu'il ne comporte pas les caractéristiques essentielles de l'installation aérovoltaïque : l'onduleur, qui est le moteur de l'installation et par conséquent un élément indispensable et essentiel à son fonctionnement, n'est pas mentionné ; a fortiori sa marque n'est précisée.

Alors que des encarts spécifiques 'fourniture' et 'pose' ont été prévus au bon de commande, le prix des matériels et de la main d'oeuvre n'est pas distingué alors que le montant élevé de l'opération et sa complexité, comprenant des travaux en toiture, imposent la mention, a minima, de la distinction entre les prix des matériaux et de la main d'oeuvre, faute de quoi le consommateur n'est pas en mesure d'effectuer des comparaison entre différentes offres.

Par ailleurs, le bon de commande mentionne au recto une date de livraison /travaux à 120 jours à compter de la signature de bon de commande, ce qui est contradictoire avec les stipulations se trouvant au verso qui précisent que 'la livraison des produits et matériels dans la limite des stocks disponibles est déterminée avec le distributeur qui fixe avec le client une date de livraison/installation dans la limite de 60 jours à compter de la signature du présent bon de commande, pour l'étude et l'acceptation du dossier de financement choisi par le client le cas échéant.'. Aucune date de livraison n'est précisée de façon certaine sur le bon de commande, et il ne comporte aucune indication sur la calendrier d'exécution des travaux jusqu'à la mise en service définitive de l'installation.

Enfin, outre que le bordereau de rétractation vise l'article L.121-21 du code de la consommation (au lieu de l'article L.221-18) qui n'était plus applicable à la date de conclusion du bon de commande, il omet de préciser que le point de départ du délai de rétractation peut également partir de la réception du bien par le consommateur ou un tiers pour les contrats de vente de bien et les contrats de prestation de services incluant la livraison de bien.

Au regard de ces éléments, le bon de commande en date du 11 juillet 2017 est donc irrégulier, ce qui entraîne sa nullité sans que le consommateur ait à démontrer le caractère déterminant pour son consentement des informations manquantes, s'agissant d'une nullité d'ordre public.

Sur la confirmation de la nullité alléguée

Sur le fondement de l'article 1182 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la société Cofidis fait valoir que M. [W] a confirmé la nullité invoquée dans la mesure où il a réitéré son consentement et exécuté le contrat en toute connaissance des vices affectant le bon de commande, puisque les articles du code de la consommation relatifs au démarchage à domicile étaient reproduits sur ledit bon de commande.

Si la violation du formalisme prescrit par les dispositions précitées du code de la consommation, et qui a pour finalité la protection des intérêts de l'acquéreur démarché, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle il peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, il résulte des dispositions de l'article 1182 que la confirmation tacite d'un acte nul est subordonnée à la double condition que son auteur ait eu connaissance du vice l'affectant et qu'il ait eu l'intention de le réparer.

La renonciation à se prévaloir de la nullité du contrat par son exécution doit, dès lors que la confirmation d'une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d'un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l'obligation et l'intention de le réparer, être caractérisée par sa connaissance préalable de la violation des dispositions destinées à le protéger.

Il ressort tout d'abord de l'examen du bon de commande que sont mentionnées au verso les dispositions des articles du code de la consommation antérieurs à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, alors qu'elles n'étaient plus applicables à la date de conclusion du contrat, la reproduction de ces articles figurant, en outre, parmi de longues conditions générales écrites en petits caractères.

Le rappel de ces dispositions ne sauraient suffire à établir que l'acquéreur a agi en toute connaissance de cause et renoncé à invoquer les vices de forme du contrat de vente alors que, pour que la confirmation soit valable, il faut que son auteur ait pris conscience de la cause de nullité qui affecte l'acte et que la connaissance certaine de ce vice ne peut résulter, pour un consommateur profane, du seul rappel des dispositions du code de la consommation, au demeurant erronées en l'espèce, relatives aux mentions du bon de commande prévues à peine de nullité.

Dès lors, ni l'écoulement du délai de rétractation, ni l'absence de protestation lors de la livraison et de la pose des matériels commandés, ni la signature par le consommateur de l'attestation de fin de travaux, ni le versement des fonds par la société Cofidis, ni l'acceptation des démarches de raccordement, ni la signature du contrat d'énergie, ni le paiement des échéances du crédit, ne sauraient constituer à cet égard des circonstances de nature à caractériser une telle connaissance et une telle intention de la part de l'acquéreur et ne peuvent donc couvrir la nullité relative encourue.

Il en résulte que faute pour M. [W] d'avoir eu connaissance des vices affectant le bon de commande, aucun de ses agissements postérieurs ne saurait être interprété comme une confirmation tacite de l'obligation entachée de nullité.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat principal de vente.

La nullité emporte l'effacement rétroactif du contrat qui est réputé n'avoir jamais existé. Elle a pour effet de remettre les parties dans l'état antérieur à la conclusion du contrat.

Cependant compte tenu de la liquidation judiciaire de la société E.C LOG, aucune condamnation à restituer le prix réglé par M. [W] ne peut être prononcée, ce qui n'est d'ailleurs pas demandé par lui.

La restitution du matériel installé sera opérée par une mise à disposition au liquidateur judiciaire jusqu'à la clôture de la procédure collective.

Il est donné acte à M. [W], qui le demande, de ce qu'il prendre à sa charge l'intégralité des frais afférents au démontage et à la mise à disposition du matériel au mandataire si celle-ci était exigée.

Sur l'annulation du crédit accessoire

En application du principe de l'interdépendance des contrats constatée par l'article L.312-55 du code de la consommation dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 applicable à l'espèce, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé. Cette disposition n'est applicable que si le prêteur est intervenu à l'instance ou s'il a été mis en cause par le vendeur ou l'emprunteur, ce qui est bien le cas en l'espèce.

Il y a donc lieu d'annuler le contrat de crédit en date du 11 juillet 2017 souscrit par M. [W] auprès de la société Cofidis.

Sur les conséquences de l'annulation du contrat accessoire de crédit

Il est rappelé que les annulations prononcées des contrats de crédit entraînent en principe la remise des parties en l'état antérieur à la conclusion des contrats. Ainsi, l'annulation du contrat de prêt en conséquence de celle du contrat de vente qu'il finançait emporte, pour l'emprunteur, l'obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, peu important que ce capital ait été été versé directement au vendeur par le prêteur, sauf si l'emprunteur établi l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute. Elle emporte également pour le prêteur l'obligation de restituer les sommes déjà versées par l'emprunteur.

Le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution peut être privé de tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

En versant ainsi les fonds au prestataire de services sans avoir vérifié au préalable la régularité du contrat principal alors que les irrégularités du bon de commande précédemment retenues étaient manifestes, le prêteur a commis une faute.

Par ailleurs, il résulte des éléments de la cause que la société Cofidis a débloqué les fonds sur la base d'une 'attestation de livraison du bien ou d'exécution de la prestation de service' en date du 20 octobre 2017, aux terme de laquelle M. [W] confirmait 'avoir obtenu et accepté sans réserve la livraison des marchandises et constate expressément que tous les travaux et prestations qui devaient être effectuées à ce titre ont été pleinement réalisés et que les démarches de raccordement aux réseau ont bien été engagées. En conséquence, je demande à Cofidis de bien vouloir procéder au décaissement de ce crédit et d'en verser le montant directement entre les mains de la société Eco environnement'.

Cette attestation ne pouvait manifestement pas rendre compte de ce que les travaux commandés, qui incluaient le raccordement de l'installation au réseau ERDF étaient terminés alors qu'elle mentionnait expressément que les démarches de raccordement étaient seulement engagées, étant observé par ailleurs que l'attestation de concormité du Consuel a été établie le 10 novembre 2017, soit postérieurement à la remise des fonds.

Le premier juge a privé la banque de sa créance de restitution sans qu'il soit besoin à M. [W] de rapporter la preuve d'un préjudice, en relevant que la privation de la banque de sa créance de restitution s'analyse comme une sanction du professionnel destinée à l'inciter à la plus grande vigilance quant à la régularité des opérations de démarchage à domicile qu'il finance, et que l'ordre public de protection prime indépendammant de toute indemnisation du consommateur et par conséquent de toute démonstration d'un quelconque préjudice.

Cependant, les fautes pouvant être retenues à l'encontre de la banque ne dispensent pas ipso facto l'emprunteur de son obligation de rembourser le capital à la suite de l'annulation, et il doit justifier avoir subi un préjudice né et actuel en lien avec cette faute.

En l'espèce, les fautes commises par la banque dans le déblocage des fonds entraînent un préjudice dans la mesure où les emprunteurs ne seront pas en mesure de récupérer le prix payé auprès de la société E.C LOG, ni d'obtenir la désinstallation de l'équipement du fait de la déconfiture de cette dernière, alors que la restitution du prix et la remise en état de leur toiture par la société installatrice aurait dû être la conséquence normale de l'annulation du contrat principal.

Cependant, l'intimé ne produit aucune pièce susceptible de démontrer que le raccordement de l'installation n'aurait pas été effectué, ni que l'installation ne fonctionnerait pas, ni aucune lettre de réclamation à l'encontre du vendeur, et pourra la conserver dès lors qu'à défaut de déclaration de créance et de restitution du prix de vente par le liquidateur, la restitution des matériels ne sera pas exigée.

Au regard de ces éléments, il convient en conséquence, par des motifs substitués à ceux du premier juge, la cour ayant retenu l'existence d'un préjudice subi par M. [W], de priver partiellement la banque de son droit à restitution du capital emprunté.

Dès lors, il y a lieu de condamner M. [W] à payer à la société Cofidis la somme de 10 000 euros au titre de sa créance de restitution, sous déduction des sommes versées par lui au titre du remboursement de l'emprunt, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt.

Sur les demandes accessoires

Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

La société Cofidis et M. [W], succombant partiellement, chacun gardera la charge de ses dépens et frais irrépétibles exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire ;

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a ordonné à la société E.C LOG de procéder à la désinstallation du matériel suivant bon de commande du 11 juillet 2017 et à la remise en état de la toiture de M. [P] [W] à ses frais, et a condamné la société E.C LOG à payer à la société Cofidis la somme de 23 000 euros ;

Stutuant à nouveau et y ajoutant ;

L'infirme pour le surplus ;

Condamne M. [P] [W] à payer à la société Cofidis la somme de 10 000 euros, sous déduction des sommes versées par lui au titre du contrat de crédit affecté du 11 juillet 2017, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt ;

Dit que la restitution par l'acquereur du matériel installé par la société E.C LOG sera opérée par sa mise à disposition du liquidateur judiciaire de la société E.C LOG jusqu'à la clôture de la procédure collective ;

Donne acte à M. [W] de ce qu'il prendre à sa charge l'intégralité des frais afférents au démontage et à la mise à disposition du matériel au liquidateur judiciaire si elle est exigée ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Laisse à la société Cofidis et à M. [W] la charge de leurs dépens et frais irrépétibles d'appel;

Déboute la société Eco Environnement de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le greffier,Le président,

G. PrzedlackiY. Benhamou


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 1
Numéro d'arrêt : 20/00797
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;20.00797 ?
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