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30/06/2022 | FRANCE | N°20/04108

France | France, Cour d'appel de Douai, Troisieme chambre, 30 juin 2022, 20/04108


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



TROISIÈME CHAMBRE



ARRÊT DU 30/06/2022





****





N° de MINUTE : 22/261

N° RG 20/04108 - N° Portalis DBVT-V-B7E-THPO



Jugement (N° 1118002112) rendu le 23 mai 2019 par le tribunal d'instance de Valenciennes





APPELANTE



Madame [L] [P]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 7]



Représentée par Me Godelive Tiabou Tiome

la, avocat au barreau de Valenciennes constituée aux lieu et place de Me Blandine Olivier-Denis, avocat au barreau de Valenciennes



INTIMÉES



SELARL [B] [T] et [I] [N] [H] en la personne de Me [I] [N] [H] liquidateur ju...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 30/06/2022

****

N° de MINUTE : 22/261

N° RG 20/04108 - N° Portalis DBVT-V-B7E-THPO

Jugement (N° 1118002112) rendu le 23 mai 2019 par le tribunal d'instance de Valenciennes

APPELANTE

Madame [L] [P]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Godelive Tiabou Tiomela, avocat au barreau de Valenciennes constituée aux lieu et place de Me Blandine Olivier-Denis, avocat au barreau de Valenciennes

INTIMÉES

SELARL [B] [T] et [I] [N] [H] en la personne de Me [I] [N] [H] liquidateur judiciaire de la Sarl Budniok Immobilier nommé à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Valenciennes du 17 août 2020

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Manuel de Abreu, avocat au barreau de Valenciennes

SAS Groupe Solly Azar agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Catherine Camus-Demailly, avocat au barreau de Douai et Me Céline Braka, avocat au barreau de Paris

DÉBATS à l'audience publique du 07 avril 2022 tenue par Guillaume Salomon et Claire Bertin magistrats chargés d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, ont entendu les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Fabienne Dufossé

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Hélène Château, première présidente de chambre

Guillaume Salomon, président de chambre

Claire Bertin, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 30 juin 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Hélène Château, présidente et Fabienne Dufossé, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 21 mars 2022

****

EXPOSE DU LITIGE

1. Les faits et la procédure antérieure :

Par acte sous seings privés du 1er novembre 2008, Mme [P] a donné à bail à Mme [Z] un appartement situé [Adresse 1], moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 650 euros hors charges, outre 80 euros de charges mensuelles.

Parallèlement, la propriétaire bailleresse a adhéré le 21 novembre 2008, à effet au 1er décembre 2008, au contrat "groupe habitation" proposé par son mandataire de gestion immobilière, la société Budniok immobilier, afin de garantir les loyers impayés et l'absence de locataire dans le cadre d'un contrat groupe, commercialisé par la société Groupe solly azar exerçant sous l'enseigne commerciale « Solly azar assurances », courtier grossiste en assurance pour le compte de la société Gan eurocourtage.

Au terme du bail le 30 septembre 2011, Mme [P] n'a pas réussi à relouer son appartement.

Elle a sollicité en vain auprès de son assureur la mise en 'uvre de la garantie souscrite.

Par acte d'huissier du 19 juin 2015, Mme [P] a fait assigner la société Solly azar assurances devant le tribunal d'instance de Valenciennes afin d'obtenir une indemnisation dans le cadre de la garantie souscrite en application de l'article 1134 ancien du code civil.

Par acte du 27 janvier 2017, la société Solly azar assurances a fait assigner en intervention forcée la société Budniok immobilier en sa qualité de mandataire de la bailleresse pour la voir condamner à la relever et garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre.

2. Le jugement dont appel :

Par jugement rendu le 23 mai 2019, le tribunal d'instance de Valenciennes a :

- ordonné la jonction des procédures n°11-18-2112 et 11-18-2114 sous le numéro RG le plus ancien n°11-18-2112 ;

- dit Mme [P] recevable en son action ;

- débouté Mme [P] de ses demandes ;

- débouté la société Solly azar assurances de ses demandes ;

- condamné Mme [P] aux dépens.

3. La déclaration d'appel :

Par déclaration du 13 octobre 2020, Mme [P] a formé appel, dans des conditions de forme et de délai non contestées, de ce jugement en limitant la contestation du jugement critiqué aux seuls chefs du dispositif numérotés 3 et 5 ci-dessus.

4. Les prétentions et moyens des parties :

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 21 novembre 2021, Mme [P], appelante principale, demande à la cour, au visa des articles 1103, 1217 et 1231-6 du code civil, d'infirmer le jugement dont appel en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes, et condamnée aux dépens et, statuant à nouveau, de :

- juger que la garantie loyers impayés et absence de locataires, qu'elle a souscrite auprès de la société Solly azar assurances, doit s'appliquer ;

- en conséquence, condamner solidairement ou l'un à défaut de l'autre les sociétés Solly azar assurances et Budniok immobilier à lui payer les sommes suivantes :

3 900 euros au titre de cette garantie ;

les intérêts légaux sur les sommes dues au principal et ce, à partir de la date de l'acte introductif d'instance, soit le 19 juin 2015 ;

1 500 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

les entiers frais et dépens ;

- débouter les parties intimées de toutes demandes et prétentions contraires.

A l'appui de ses prétentions, Mme [P] fait valoir que :

- la garantie « absence de locataire » doit s'appliquer, dès lors que le titre 5 du bulletin d'adhésion prévoit que « l'assureur garantit à l'assuré la perte financière consécutive à l'absence de perception du loyer, résultant de la non-location des locaux à compter de la date de fin de bail du dernier locataire et de son départ effectif ; l'assureur garantit une proportion du montant du revenu locatif attendu pendant la ou les périodes(s) indiquée(s) au recto ; le revenu locatif garanti est calculé sur la base du loyer mensuel demandé au précédent locataire » ;

- conformément au bulletin d'adhésion, la franchise est d'une durée d'un mois avec un maximum de garantie fixée à 6 mois à 100% du loyer hors charges ;

- suite à l'absence de réponse de la société Budniok immobilier aux demandes de la société Solly azar assurances, aucune solution ne lui a été apportée ;

- le contrat d'adhésion a été établi avec l'en-tête et les coordonnées de la société Solly azar assurances, qui est restée son interlocutrice dans le cadre de sa réclamation ;

- si la société Budniok immobilier a fait preuve de négligence, la société Solly azar assurances ne l'a à aucun moment informée de la nécessité de se rapprocher de son mandataire pour obtenir l'indemnisation de la vacance locative, ni de la nécessité de solliciter les interventions des sociétés Gan eurocourtage et Groupama protection juridique.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 3 mars 2022, la société Groupe solly azar, intimée et appelante incidente, demande à la cour, au visa des articles 32-1 et 122 du code de procédure civile, 1134 et suivants du code civil, de :

à titre principal,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable l'action de Mme [P] ;

- déclarer irrecevables les demandes de condamnations de Mme [P] formées à son encontre ;

à titre subsidiaire,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [P] de l'ensemble de ses demandes ;

en toute hypothèse,

- condamner Mme [P] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens de l'instance et d'appel.

A l'appui de ses prétentions, la société Groupe solly azar fait valoir que :

- elle n'est pas l'assureur « garantie des loyers impayés » de Mme [P], mais une société spécialisée dans l'activité de courtier grossiste en assurance ;

- elle est intervenue comme mandataire de l'assureur, la société Gan eurocourtage, et ne peut être confondue avec ce dernier qui est seul autorisé à délivrer les garanties

souscrites ;

- la société Budniok immobilier est une société de courtage en assurance et gestionnaire de biens immobiliers, laquelle a été mandatée par Mme [P] ;

- c'est la société Budniok immobilier qui a souscrit un contrat groupe auprès de la société d'assurance Gan eurocourtage, et qui détient un mandat de gestion pour le compte de Mme [P] dans le cadre de la souscription du contrat d'assurance ;

- elle intervient auprès des courtiers en sa seule qualité de mandataire des compagnies d'assurance, agissant par ou sur délégation de celles-ci, et en qualité de centre de gestion de sinistres, toujours pour le compte des compagnies d'assurance ;

- la société Budniok immobilier lui a bien déclaré le sinistre par courrier du 23 décembre 2011, puis lui a adressé une relance par lettre du 9 janvier 2013, mais n'a jamais répondu à ses lettres du 28 novembre 2013, 13 mars et 16 juin 2014, par lesquelles elle réclamait des documents complémentaires pour continuer l'instruction du dossier ;

- le fait d'être intervenue à un contrat en qualité de mandataire du cocontractant ne lui confère pas la qualité d' « assureur par délégation » de Mme [P] ;

- seule la société Budniok immobilier est responsable du préjudice allégué par

l'appelante ;

- l'assurée n'invoque pas la moindre faute délictuelle à son égard, mais fonde son action sur la responsabilité contractuelle en sollicitant paiement de l'indemnité au titre de l'exécution du contrat d'assurance ;

- il est indifférent que le contrat d'adhésion mentionne en en-tête son nom et ses coordonnées ;

- l'assureur ne pouvait indemniser la propriétaire sans que celle-ci ne rapporte la preuve d'une recherche effective de locataires ;

- elle ne forme plus d'appel en garantie contre la société Budniok immobilier, laquelle a été placée sous liquidation judiciaire.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 6 janvier 2022, la SELARL [T] et [H] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Budniok immobilier, intimée et appelante incidente, demande à la cour, au visa des articles 6 du code de procédure civile et 622-24 et suivants du code de commerce, de :

Sur l'appel principal de Mme [P] :

à titre principal,

- prononcer sa mise hors de cause ;

- débouter purement et simplement Mme [P] de l'ensemble de ses demandes ;

à titre subsidiaire,

- juger la créance de Mme [P] inopposable à la procédure collective de la société Budniok immobilier ;

Sur l'appel incident de la société Groupe Solly azar :

- lui donner acte de ce qu'aucune demande n'est formulée à son encontre par la société Groupe solly azar ;

En tout état de cause :

- condamner Mme [P] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens de l'instance.

A l'appui de ses prétentions, la SELARL [T] et [H] ès qualités fait valoir

que :

- par jugement du 17 août 2020, le tribunal de commerce de Valenciennes a ouvert une procédure de liquidation judiciaire au bénéfice de la société Budniok immobilier, la désignant en qualité de liquidateur judiciaire ;

- Mme [P] entend voir engager la responsabilité contractuelle de la société Groupe solly azar en vertu d'une inexécution contractuelle ;

- elle ne développe aucun argument à l'encontre de la société Budniok immobilier ;

- le défaut de communication qui serait imputable à la société Budniok immobilier n'est pas démontré et émane exclusivement des propres déclarations de la protection juridique de Mme [P] ;

- l'action de Mme [P] concerne les modalités d'application d'un contrat d'assurance auxquelles la société Budniok immobilier est étrangère ;

- en tout état de cause, aucune condamnation ne peut intervenir à l'encontre d'une société en liquidation judiciaire ; il ne pourrait s'agir que d'une fixation de créance au passif de la société Budniok immobilier en vertu des dispositions des articles L. 622-24, L. 622-26 et R. 622-24 du code de commerce ;

- la créance éventuelle de Mme [P] doit être déclarée inopposable à la procédure collective de la société Budniok immobilier.

Pour un plus ample exposé des moyens de chacune des parties, il y a lieu de se référer aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'instruction du dossier a été clôturée par ordonnance du 21 mars 2022.

Suivant note en délibéré du 12 avril 2022, le conseil de la société Groupe solly azar adresse au greffe un extrait Kbis dont il résulte qu'elle est immatriculée au registre du commerce et des sociétés (RCS) de Paris sous le numéro 353 508 955 et qu'elle exerce notamment sous l'enseigne commerciale « Solly azar assurances ».

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les « dire et juger » et les « constater » qui ne sont pas des prétentions en ce qu'ils ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert dès lors qu'ils s'analysent en réalité comme le rappel des moyens invoqués, ou en ce qu'ils formulent exclusivement des réserves alors que la partie qui les exprime n'est pas privée de la possibilité d'exercer ultérieurement les droits en faisant l'objet.

 

Sur la fin de non-recevoir soulevée par le mandataire de l'assureur

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

En l'espèce, la société Groupe solly azar soulève l'irrecevabilité de l'action contractuelle dirigée contre elle par Mme [P] sur le fondement du contrat d'assurance.

L'examen des pièces versées au débat enseigne que le 14 novembre 2008, Mme [P] a confié à la société Budniok immobilier un mandat de gestion immobilière afin d'administrer, gérer, louer et percevoir les loyers de l'appartement dont elle était propriétaire à [Localité 7].

Le 21 novembre 2008, Mme [P] a régularisé avec effet au 1er décembre 2008 un bulletin d'adhésion au contrat d'assurance groupe garantissant les impayés de loyers et l'absence de locataire, lequel avait été précédemment souscrit par la société Budniok immobilier auprès de l'assureur, la société Gan eurocourtage, par l'intermédiaire du courtier de cette dernière, la société Groupe solly azar.

Si le contrat d'assurance groupe est ainsi conclu entre le souscripteur, la société Budniok immobilier, et l'assureur, la société Gan eurocourtage, il n'en demeure pas moins que l'adhérente, qui se voit refuser après sinistre le paiement de l'indemnité d'assurance, présente bien intérêt et qualité à agir tant à l'encontre de son gestionnaire qu'à l'encontre du mandataire de l'assureur.

Le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action de Mme [P].

Sur le bien fondé des demandes dirigées contre la société Groupe solly azar

Aux termes de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que le loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Aux termes des articles 1142 et 1147 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts, en cas d'inexécution de la part du débiteur.

Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

En l'espèce, par lettre du 27 juillet 2011, la locataire de Mme [P] lui notifiait la résiliation de son contrat de bail d'habitation avec effet au 1er octobre 2001.

Par lettre du 23 décembre 2011, le société Budniok immobilier agissant en qualité de gestionnaire se rapprochait de la société Groupe solly azar afin que celle-ci mît en 'uvre la « garantie absence de locataire » pour l'appartement de Mme [P] sis [Adresse 1], resté vacant après le départ de la précédente locataire survenu le 30 septembre 2011 ; elle déclarait joindre à sa demande une copie du bail de la locataire sortante et de l'état des lieux de sortie.

Par lettre du 9 janvier 2013, la société Budniok immobilier relançait la société Groupe solly azar prise en sa qualité de centre de gestion de l'assureur, s'étonnant de n'avoir reçu aucune réponse de sa part, l'informant que les démarches de recherche d'un nouveau locataire étaient restées vaines, et déclarant joindre à sa demande une copie du bail, un état des lieux d'entrée et de sortie, et des publicités.

Par courriel du 28 novembre 2013, le service sinistres de la société Groupe solly azar demandait à la société Budniok immobilier, afin de continuer l'instruction du dossier sinistre référencé n°CY11002491, de lui faire parvenir une liste complète de pièces comprenant :

- la copie du bail du locataire sortant ;

- la lettre de congé du locataire sortant ;

- le compte locatif du locataire sortant avec imputation du dépôt de garantie ;

- l'accusé de réception du congé ;

- l'état des lieux de sortie ou le procès-verbal d'huissier ;

- les justificatifs de réparation des dommages constatés à la sortie pour rendre le lot disponible à la location ;

- la confirmation du maintien de son mandat de gestion et de relocation ;

- les justificatifs de recherche d'un nouveau locataire avec indication du montant du nouveau loyer ;

- après relocation, la copie du bail du nouveau locataire ou l'attestation de non relocation.

Suivant courriel du 13 mars 2014, la société Groupe solly azar informait la société Budniok immobilier qu'après ses multiples relances restées sans réponse, elle classait le dossier, faute de pouvoir l'instruire.

Par lettre du 20 mai 2014, la société Matmut, assureur protection juridique de Mme [P], mettait la société Groupe solly azar en demeure de garantir le sinistre, laquelle lui répondait le 16 juin 2014 qu'il lui manquait encore des pièces indispensables à l'octroi de la garantie pour vacance locative, et qu'elle allait à nouveau se rapprocher de la société Budniok immobilier pour les obtenir.

Par courriel du même jour, elle invitait ainsi une dernière fois la société Budniok immobilier à lui envoyer :

- la copie de la réponse apportée par ses services à la lettre de congé de la locataire du 27 juillet 2011 ;

- la confirmation du mandat de relocation ;

- les justificatifs de recherche d'un nouveau locataire pour les mois d'août 2011 à avril 2012 (copie d'une annonce presse ou internet par mois) ;

- la copie du nouveau bail de location ou une attestation de non relocation.

De l'examen de ces échanges, il ressort à l'évidence qu'en dépit de ses multiples relances, le mandataire de l'assureur n'a jamais reçu l'ensemble des pièces lui permettant de gérer le sinistre pour vacance locative, notamment la preuve de la recherche effective d'un locataire durant la période garantie.

Ni Mme [P] ni son gestionnaire de bien immobilier ne démontrent avoir adressé au centre de gestion des sinistres de la société Gan eurocourtage les éléments de nature à permettre le règlement du sinistre et l'indemnisation.

Alors que la société Groupe solly azar n'est intervenue comme centre de gestion qu'en sa seule qualité de mandataire de l'assureur, et non comme assureur par délégation comme le retient par erreur le premier juge, l'appelante n'articule à son égard ni manquement contractuel ni faute délictuelle dans sa gestion du dossier.

Faute d'établir l'exercice fautif de la mission confiée au mandataire de l'assureur dans le cadre du règlement de son sinistre, l'appelante sera déboutée de sa demande en paiement dirigée contre la société Groupe solly azar.

Sur le bien fondé des demandes dirigées contre la société Budniok immobilier

Sur la mise hors de cause de la société Budniok immobilier

En application de l'article L. 141-1 du code des assurances, le contrat d'assurance de groupe, lequel constitue une opération tripartite entre un assureur, un souscripteur et un adhérent, suppose l'existence d'un lien de droit entre l'adhérent et le souscripteur. L'adhésion au contrat d'assurance de groupe, bien que conséquence d'une stipulation pour autrui, n'en crée pas moins un lien contractuel direct entre l'adhérent et l'assureur, le souscripteur étant alors un tiers par rapport au contrat d'assurance liant l'assureur à l'adhérent assuré.

En l'espèce, si la société Budniok immobilier prise en qualité de souscriptrice reste un tiers au rapport contractuel liant l'adhérente à la société Gan eurocourtage, il reste pour autant que dans ses écritures, Mme [P] lui reproche d'avoir été négligente dans le suivi du sinistre et dans l'exécution du mandat de gestion qui lui avait été confié.

Les développements précédents montrent à l'évidence qu'en s'abstenant entre 2012 et 2014 d'adresser au centre de gestion de l'assureur les justificatifs manquants requis la société Budniok immobilier a fait preuve de négligence dans la gestion du sinistre pour le compte de sa mandante.

Il s'ensuit que la demande de la SELARL [T] et [H] en qualité de liquidateur de la société Budniok immobilier tendant à sa mise hors de cause sera purement et simplement rejetée.

Sur l'inopposabilité de la créance de l'appelante à la procédure collective

La cour relève que Mme [P] dirige uniquement ses demandes de condamnation en cause d'appel à l'encontre de la société Budniok immobilier qu'elle considère comme in bonis, alors que celle-ci a été placée en liquidation judiciaire simplifiée par jugement du tribunal de commerce de Valenciennes rendu le 17 août 2020, lequel a été publié au BODACC le 26 août 2020, et que la SELARL [T] et [H] a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

En application des articles L. 622-24, L. 622-26 et R. 622-24 du code de commerce, Mme [P] ne justifie pas avoir déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Budniok immobilier dans le délai de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au BODACC, lequel expirait le 26 octobre 2020, ni avoir saisi le juge-commissaire d'une demande de relevé de forclusion de sa créance avant le 26 février 2021, soit dans le délai légal de six mois qui lui était imparti.

Il s'ensuit que la créance alléguée de Mme [P] s'avère en tout état de cause inopposable à la procédure collective de la société Budniok immobilier.

De manière surabondante, il s'observe enfin que la société Groupe solly azar ne forme plus en cause d'appel aucune demande en garantie contre la société Budniok immobilier, tenant ainsi compte de l'impécuniosité de cette dernière depuis son placement en liquidation judiciaire.

Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive

Le sens de l'arrêt conduit à débouter Mme [P] de sa demande dirigée contre les intimées aux fins de condamnation à des dommages et intérêts pour résistance abusive.

Sur les dépens et l'indemnité de procédure

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer le jugement dont appel sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance.

Mme [P] qui succombe sera condamnée aux entiers dépens d'appel.

L'équité commande en cause d'appel de condamner Mme [P] à payer à la société Groupe solly azar et à la SELARL [T] et [H] ès qualités la somme de 1 200 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par mise à disposition au greffe, publiquement et contradictoirement,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 23 mai 2019 par le tribunal d'instance de Valenciennes,

Y ajoutant,

Rejette la demande de mise hors de cause de la SELARL [T] et [H] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Budniok immobilier,

Déclare la créance de Mme [L] [P] inopposable à la liquidation judiciaire de la société Budniok immobilier,

Condamne Mme [L] [P] aux dépens d'appel,

La condamne en outre à payer à la société Groupe solly azar, et à la SELARL [T] et [H] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Budniok immobilier, la somme de 1 200 euros chacune au titre des frais irrépétibles d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le GreffierLa Présidente

F. DufosséHélène CHÂTEAU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Troisieme chambre
Numéro d'arrêt : 20/04108
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;20.04108 ?
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