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24/06/2022 | FRANCE | N°20/01205

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale b salle 1, 24 juin 2022, 20/01205


ARRÊT DU

24 Juin 2022







N° 895/22



N° RG 20/01205 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TAB2



MD/AL

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LENS

en date du

09 Mars 2020

(RG 19/00285 -section 02)








































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GROSSE :



aux avocats



le 24 Juin 2022





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [O] [H]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Patrick KAZMIERCZAK, avocat au barreau de DOUAI





INTIMÉE :



S.A.S. AUCHAN HYPERMARCHE

[Adresse 2]

[Localité 4]
...

ARRÊT DU

24 Juin 2022

N° 895/22

N° RG 20/01205 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TAB2

MD/AL

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LENS

en date du

09 Mars 2020

(RG 19/00285 -section 02)

GROSSE :

aux avocats

le 24 Juin 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [O] [H]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Patrick KAZMIERCZAK, avocat au barreau de DOUAI

INTIMÉE :

S.A.S. AUCHAN HYPERMARCHE

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Virginie LEVASSEUR, avocat au barreau de DOUAI assisté de Anthony BRICE, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS :à l'audience publique du 26 Avril 2022

Tenue par Monique DOUXAMI

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Nadine BERLY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Monique DOUXAMI

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Alain MOUYSSET

: CONSEILLER

Patrick SENDRAL

: CONSEILLER

ARRÊT :Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 24 Juin 2022,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Monique DOUXAMI, Président et par Nadine BERLY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 05 Avril 2022

EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES

Monsieur [O] [H] a été embauché par la SAS Auchan Hypermarché en qualité de technicien SAV par contrat à durée indéterminée à compter du 17 juillet 2006.

Après avoir été convoqué à un entretien préalable fixé au 16 décembre 2015, il s'est vu notifier une mise à pied disciplinaire par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 janvier 2016.

Par requête reçue par le greffe le 6 août 2019, il a saisi le conseil de prud'hommes de Lens aux fins de contester la sanction disciplinaire et d'obtenir la condamnation de la SA Auchan France au paiement de diverses sommes à titre de rappel de salaire sur la journée de mise à pied, congés payés afférents, dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et frais irrépétibles.

Par jugement rendu le 9 mars 2020, la juridiction prud'homale a débouté les parties de leurs demandes et laissé à chacune d'elles la charge de ses propres dépens.

Par déclaration transmise au greffe par voie électronique le 2 juin 2020, Monsieur [O] [H] a relevé appel de ce jugement.

Par ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 22 juin 2021, il demande à la cour de :

-infirmer le jugement déféré ;

-annuler la sanction disciplinaire ;

-condamner la SAS Auchan Hypermarché au paiement, outre des dépens, des sommes suivantes :

*60,35 euros à titre de rappel sur salaire sur la mise à pied et 6,04 euros au titre des congés payés y afférents,

*6114 euros à titre de dommages-intérêts pour violation de l'exigence de loyauté dans l'exécution du contrat de travail,

*3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

-débouter la SAS Auchan Hypermarché de l'ensemble de ses demandes.

Il soutient en substance que :

-la SA Auchan France ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la réalité des faits sanctionnés par la mise à pied disciplinaire. Cette sanction est disproportionnée au regard de son comportement ;

-la SA Auchan France n'a pas respecté son obligation de bonne foi dans les relations contractuelles et il en a subi un préjudice à double titre, ayant été injustement sanctionné pour un acte grave tel le vol en entreprise et pour avoir été injustement privé de ses heures de délégation.

Par ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 7 mars 2022, la SAS Auchan Hypermarché demande à la cour de :

-débouter Monsieur [O] [H] de l'ensemble de ses demandes ;

-condamner Monsieur [O] [H] au paiement d'une amende civile au Trésor Public d'un montant qu'il lui plaira de fixer dans le respect du plafond fixé au 32-1 du code de procédure civile et d'une somme de 1000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir pour l'essentiel que :

-les faits sanctionnés sont établis et la mise à pied n'en constitue pas une sanction disproportionnée ;

-Monsieur [O] [H] ne démontre pas en quoi elle aurait manqué à son obligation de loyauté.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 avril 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, selon l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

En l'espèce, Monsieur [O] [H] formule une demande concernant les heures de délégation dans la partie discussion de ses conclusions qu'il ne reprend pas dans leur dispositif.

En conséquence, la cour ne statuera pas sur cette demande.

Sur la mise à pied disciplinaire

Selon l'article 1331-1 du code du travail, constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par lui comme fautif que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

Au nombre de ces sanctions figure la mise à pied disciplinaire.

L'article 1333-1 du même code précise qu'en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

En l'espèce, la lettre du 15 janvier 2016 notifiant la mise à pied disciplinaire est ainsi libellée :

« Suite à l'entretien du 16 décembre 2015 en présence de Monsieur [C] [K], Manager production, de M. [G] [L], Directeur du centre de réparation, et de M. [F] [Z], représentant du personnel CFTC qui vous accompagnait, nous vous informons de notre décision de vous sanctionner d'une mise à pied disciplinaire de 1 jour pour les faits suivants :

[P] [A], collaborateur au sein du Centre de réparation et de services de Courcelles, qui travaille au sein de l'atelier a a pris l'initiative de rentrer dans l'établissement une caméra wifi lui appartenant sans avertir sa hiérarchie afin de faire tester le produit à ses collègues de travail en vue des installations et réparations futures que nous pourrions avoir sur ce type de matériel. M. [A] a laissé plusieurs jours sa caméra sur son établi de travail.

Le 23 novembre 2015, veille de la présentation du projet commercial, [W] [X], manager services et de l'atelier vous a demandé de ranger cet espace.

En rangeant l'espace, vous avez demandé à M. [X] ce que vous deviez faire de cette caméra. Ce dernier vous a alors demandé de la ranger sans plus de précision.

Le 25 novembre 2015, M. [A] en reprenant son poste de travail s'aperçoit que sa caméra a disparu et en avertit de suite M. [D], Responsable Production, ainsi que son manager M. [X].

M. [X] vous a alors demandé où vous aviez rangé la caméra trouvée dans l'atelier. Vous lui avez alors répondu que vous aviez rapporté cette caméra chez vous. Quand M. [X] vous a demandé des explications, vous avez refusé de lui en donner et lui avez indiqué que vous la restitueriez le lendemain.

Le 26 novembre 2015, vous avez remis le bien de votre collègue M. [A], à votre manager, M. [C] [K]. M. [K] l'a immédiatement restitué à M. [A].

Face à cette situation, M. [A] très choqué par la disparition et la « ré apparition» de son bien a écrit le 27 novembre 2015 à M. [L], Directeur, afin de l'avertir de cette situation.

Lors de l'entretien, vous êtes revenu sur les propos que vous avez tenus à M. [X] le 25 novembre. Vous avez alors affirmé avoir rangé la caméra de M. [A] dans une armoire de l'atelier. Les explications que nous vous avez données lors de l'entretien sont très confuses et incohérentes. En effet, si vous aviez laissé le produit dans une armoire, vous auriez dû le rendre immédiatement le 25 novembre 2015 à l'un des membres de l'encadrement présent sur le site dont votre manager M. [K].

Nous constatons donc que vous avez donc décidé de manière unilatérale de prendre et de sortir du site de [Localité 5] un bien appartenant à l'un de vos collègues. A aucun moment, vous n'en avez informé votre manager ou l'un des responsables du site.

Vous avez restitué ce bien uniquement car nous vous l'avons exigé. Et enfin nous constatons que vous n'avez exprimé aucun regret auprès de M. [A] quant à la subtilisation de son bien.

Nous vous rappelons que le vol entre collègues à l'intérieur de l'entreprise est fautif au sens du droit disciplinaire.

Nous ne pouvons pas accepter ce comportement (vol avec restitution), c 'est pourquoi vous serez en mise à pied disciplinaire le (mercredi) 3février 2016, avec retenue de salaire correspondante ».

En l'espèce, il ressort des éléments produits aux débats que :

-le 23 novembre 2015, lors du nettoyage de l'atelier son, Monsieur [O] [H] a été autorisé par son manager, qui était avec lui, Monsieur [W] [X], à « déplacer » la caméra qui se trouvait sur l'établi d'un autre salarié, Monsieur [P] [A], à qui elle appartenait ;

-le 26 novembre 2015, Monsieur [O] [H] a restitué la caméra à Monsieur [P] [A] par l'intermédiaire du manager électro, Monsieur [C] [K], sur l'invitation de Monsieur [W] [X], alerté de sa disparition la veille.

En revanche, l'attestation de Monsieur [W] [X], non corroborée par d'autres éléments et rapportant des propos contestés par Monsieur [O] [H], est insuffisante à démontrer qu'entre les 23 et 26 novembre 2015, ce dernier a rapporté cette caméra à son domicile et ne l'a pas laissée dans l'armoire du CHSCT comme il l'indique.

Il s'ensuit qu'un doute subsiste sur la matérialité des faits reprochés à Monsieur [O] [H], consistant a minima à avoir décidé de manière unilatérale de prendre et de sortir du site de [Localité 5] un bien appartenant à l'un de ses collègues, et ce doute doit lui profiter.

En conséquence, l'avertissement sera annulé

Monsieur [O] [H] peut consécutivement prétendre au rappel de salaire sur la mise à pied injustifiée et aux congés payés afférents qu'il sollicite et dont les montants ne sont pas discutés.

En conséquence, la SA Auchan France sera condamnée au paiement de ces sommes et le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur les dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

Monsieur [O] [H] procède par voie d'affirmations avoir été privé injustement de ses heures de délégation et en avoir subi un préjudice, ne produisant aucun élément en ce sens.

En revanche, en lui infligeant une mise à pied non justifiée, la SA Auchan France a commis une faute qui lui a causé un préjudice qui sera réparé par l'allocation de dommages-intérêts à hauteur de 200 euros.

En conséquence, la SA Auchan France sera condamnée au paiement de ces sommes et le jugement déféré sera infirmé en ce sens.

Sur les autres demandes

La SA Auchan France sera déboutée de ses demandes tendant à la condamnation de Monsieur [O] [H] à une amende civile et à des frais irrépétibles et condamnée à payer à Monsieur [O] [H] la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles.

Elle sera également condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire mis à disposition par les soins du greffe,

Infirme le jugement rendu le 9 mars 2020 par le conseil de prud'hommes de Lens sauf en ses dispositions sur l'amende civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Annule la mise à pied disciplinaire notifiée à Monsieur [O] [H] par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 janvier 2016 ;

Condamne la SA Auchan France à payer à Monsieur [O] [H] les sommes suivantes :

-60,35 euros au titre de rappel de salaire sur mise à pied injustifiée et 6,04 euros au titre des congés payés y afférents,

-200 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

-1000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne la SA Auchan France aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER

Nadine BERLY

LE PRESIDENT

Monique DOUXAMI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale b salle 1
Numéro d'arrêt : 20/01205
Date de la décision : 24/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-24;20.01205 ?
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