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24/06/2022 | FRANCE | N°20/00970

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale b salle 1, 24 juin 2022, 20/00970


ARRÊT DU

24 Juin 2022







N° 1079/22



N° RG 20/00970 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S5EE



MD/AL

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BETHUNE

en date du

22 Janvier 2020

(RG 18/00178 -section )







































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GROSSE :



aux avocats



le 24 Juin 2022





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTE :



S.A.R.L. CARROSSERIE BETHUNOISE K.L.S

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Camille PAHAUT, avocat au barreau de BETHUNE





INTIMÉ :



M. [D] [N]

[Adresse 2]
...

ARRÊT DU

24 Juin 2022

N° 1079/22

N° RG 20/00970 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S5EE

MD/AL

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BETHUNE

en date du

22 Janvier 2020

(RG 18/00178 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 24 Juin 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

S.A.R.L. CARROSSERIE BETHUNOISE K.L.S

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Camille PAHAUT, avocat au barreau de BETHUNE

INTIMÉ :

M. [D] [N]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Noémie CALESSE, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS :à l'audience publique du 05 Avril 2022

Tenue par Monique DOUXAMI

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Gaetan DELETTREZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Monique DOUXAMI

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Alain MOUYSSET

: CONSEILLER

Patrick SENDRAL

: CONSEILLER

ARRÊT :Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 24 Juin 2022,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Monique DOUXAMI, Président et par Nadine BERLY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 15 Mars 2022

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES

Monsieur [D] [N] a été embauché par la SARL Carrosserie Béthunoise KLS en qualité de chef d'équipe carrosserie à compter du 26 novembre 2015.

Il a été placé en arrêt de travail à compter du 13 juin 2016.

A l'issue d'une visite de pré-reprise du 1er juin 2017, le médecin du travail a indiqué que son état de santé était incompatible avec une reprise à son poste de travail de tôlier.

A l'issue d'une visite médicale de reprise du 30 juin 2017, le médecin du travail a émis l'avis suivant :  «  R.4624-42. Inapte définitif au poste de travail proposé. Courrier employeur fait le 1er juin 2017. capacité restante : peut exercer un travail strictement administratif sans dépasser vingt minutes de station assise continue et sans station debout prolongée ».

Le 20 juillet 2017, le médecin du travail a établi une fiche « sur pièces » qu'il a qualifiée de 2ème visite dans laquelle il a émis un avis identique à celui du 30 juin 2017.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 juillet 2017, Monsieur [D] [N] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement qui s'est déroulé le 7 août 2017.

Par une seconde lettre recommandée avec accusé de réception du 10 août 2017, il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par demande réceptionnée par le greffe le 6 août 2018, il a saisi le conseil de prud'hommes de Béthune aux fins de contester son licenciement et d'obtenir la condamnation de la SARL Carrosserie Béthunoise K.L.S au paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Par jugement rendu le 22 janvier 2020, la juridiction prud'homale a :

-jugé que la procédure de licenciement pour inaptitude avec impossibilité de reclassement n'avait pas été respectée et que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse ;

-condamné la SARL Carrosserie Béthunoise K.L.S au paiement, outre des dépens, des sommes suivantes à Monsieur [D] [N] :

*2150 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure,

*6450 euros nets au titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*1500 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

*1000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

-ordonné la remise, sous astreinte de 10 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement, des documents de fin de contrat et de l'attestation Pôle emploi rectifiés, en se réservant le droit de liquider l'astreinte ;

-débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

-ordonné l'exécution provisoire de la décision.

Par déclaration transmise au greffe par voie électronique le 17 février 2020, la SARL Carrosserie Béthunoise KLS a relevé appel de ce jugement.

Par ordonnance de référé du 15 juin 2020, le premier président de la cour d'appel de Douai a ordonné l'arrêt de l'exécution provisoire dont ce jugement était assorti.

Par ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 18 mai 2021, la SARL Carosserie Béthunoise KLS demande à la cour de :

-infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à payer à Monsieur [D] [N] diverses sommes au titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure, dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail et frais irrépétibles ;

-confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur [D] [N] de ses demandes de rappel de salaires et de congés payés y afférents ;

-débouter Monsieur [D] [N] de l'intégralité de ses demandes ;

-condamner Monsieur [D] [N] au paiement de la somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

Elle soutient en substance que :

Sur le respect de la procédure de licenciement

-il ne peut lui être reproché aucun manquement sur le déroulement de la procédure médicale : le médecin du travail est le seul responsable de la rédaction de ses avis médicaux et du respect des diligences prévues par le code du travail, Monsieur [D] [N] n'a pas contesté les avis médicaux comme il en avait la possibilité et il ne justifie d'aucun préjudice, l'examen médical ayant donné lieu au déclenchement de la procédure d'inaptitude date du 20 juillet 2017, elle a bien échangé avec le médecin du travail et il n'est pas mentionné que cet examen a eu lieu uniquement sur pièces ;

-elle a effectivement posté le courrier de notification du licenciement le 9 août 2017, en ne respectant pas le délai de 2 jours ouvrables après l'entretien préalable prévu par l'article L1232-6 du code du travail. Toutefois, il s'agit d'une simple irrégularité de forme qui ne remet pas en cause le bien-fondé du licenciement et ne peut donner lieu à une indemnisation que si l'existence d'un préjudice est démontrée, ce qui n'est pas le cas ;

Sur le respect de l'obligation de reclassement

-elle a respecté son obligation de reclassement : elle ne fait pas partie d'un groupe et a effectué en vain des recherches au sein de son unique établissement de moins de 10 salariés pour trouver un poste correspondant aux préconisations du médecin du travail et aux compétences de Monsieur [D] [N]. Elle n'a pas agi dans la précipitation, n'ayant pas besoin, compte tenu de sa taille, d'un temps très long pour aboutir à la conclusion d'une absence de poste disponible ;

-elle n'a pas prononcé le licenciement le jour de la réception de l'avis médical mais a indiqué au salarié deux jours ouvrables après le second examen médical ayant conduit au constat de l'inaptitude que son reclassement au sein de son entreprise s'avérait impossible ;

Sur le rappel de salaire

-les primes réclamées n'étaient pas systématiquement dues puisqu'elles étaient liées à des objectifs (taux de consommation des consommables, état de propreté du lieu de travail et niveau de productivité) ;

-les tableaux récapitulatifs personnels que Monsieur [D] [N] prétend ne pas avoir reçus pour les mois d'avril, mai et juin 2016 sont transmis à la fin de chaque trimestre. Étant en arrêt maladie à compter du 13 juin 2016, il n'a pas pu les recevoir puisqu'ils ont été transmis au personnel qu'en juillet 2016 ;

-en accord avec l'ensemble des salariés, elle a mis en place des modalités de paiement de ces primes sous la forme de l'octroi de chèques-cadeaux ;

Sur l'exécution fautive du contrat de travail

-le versement des indemnités d'assurance maladie est effectivement tardif. Toutefois, ce retard n'est pas de sa responsabilité mais de celle de la prévoyance maladie qui a tardé à transmettre les décomptes pour permettre l'établissement des bulletins de paie. Par ailleurs, elle n'a pas tardé à envoyé les chèques de règlement ;

-Monsieur [D] [N] n'apporte aucun élément corroborant l'argumentation qu'il développe pour la première fois en appel selon laquelle ses conditions de travail difficiles sont à l'origine de son arrêt de travail ;

Sur les intérêts au jour de la requête enregistrée devant le conseil de prud'hommes

-A titre subsidiaire, si la cour fait droit à tout ou partie des demandes de l'intimé, cette mesure apparaît inéquitable et disproportionnée alors qu'elle rencontre des difficultés économiques importantes en raison de la crise sanitaire liée au covid.

Par ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 5 mars 2021, Monsieur [D] [N] demande à la cour de :

-confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SARL Carrosserie Béthunoise K.L.S à lui payer diverses sommes au titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure et dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

-infirmer le jugement déféré sur le surplus ;

-condamner la SARL Carrosserie Béthunoise K.L.S au paiement, outre des dépens, des sommes suivantes :

*2150 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

*6450 euros net à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*3000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

*1100, 80 euros à titre de rappel de salaire et 110 euros au titre des congés payés y afférents,

*1500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance,

*1500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;

-ordonner la remise, sous astreinte de 10 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, des documents de fin de contrat et des documents Pôle emploi rectifiés ;

-débouter la SARL Carrosserie Béthunoise K.L.S de l'ensemble de ses demandes ;

-dire qu'en application de l'article 1153-1 du code civil, les sommes dues porteront intérêts à compter du jour de l'enregistrement de la requête par le conseil de prud'hommes.

Il fait valoir pour l'essentiel que :

Sur le respect de la procédure de licenciement

-la visite médicale du 20 juillet 2017 a eu lieu au-delà du délai de 15 jours imposé par la loi et sur pièces. A l'issue de cette dernière, l'encart relatif à l'inaptitude a été rempli en précisant que c'était la seconde visite et que l'examen de pré-reprise datait du 1er juin 2017. Dans ces conditions, aucun échange avec le médecin du travail n'a pu intervenir, il n'a pas pu faire valoir ses observations et s'est senti exclu de la procédure dont la SARL Carosserie Béthunoise KLS devait s'assurer du respect ;

-l'entretien préalable s'est tenu le 7 août 2017 et la lettre de licenciement a été envoyée par courrier recommandé du 9 août 2017 alors qu'elle ne pouvait l'être avant le 10 ;

Sur l'obligation de reclassement

la SARL Carosserie Béthunoise KLS ne peut prétendre avoir effectué loyalement et sérieusement des recherches de reclassement en lui ayant indiqué ne pas avoir de poste disponible seulement deux jours ouvrables après l'avis du médecin du travail ;

Sur le rappel de salaire

-il n'a perçu ni l'intégralité de son salaire ni aucune prime, n'ayant d'ailleurs pas été destinataire des tableaux récapitulatifs d'avril, mai et juin 2016 qui ne sont pas produits aux débats ;

-il n'était pas au courant du paiement des primes par chèques-cadeaux et n'a donc jamais pu l'accepter. Il n'a reçu des chèques-cadeaux d'un montant de 80 euros qu'à noël 2015;

-il ressort des tableaux produits qu'il a réalisé ses objectifs pour les 3 premiers mois ;

Sur l'exécution du contrat de travail

-les conditions de travail chez la SARL Carosserie Béthunoise KLS ont causé son arrêt de travail ;

-la SARL Carosserie Béthunoise KLS a tardé à lui envoyer les chèques de paiement des prestations assurance maladie, ce retard lui ayant occasionné de grandes difficultés financières ;

Sur les intérêts au jour de la requête enregistrée devant le conseil de prud'hommes

la réalité des difficultés économiques de la société pose question.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 mars 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les dommages-intérêts pour non respect de la procédure

Sur la constatation de l'inaptitude par le médecin du travail

Selon l'article L4624-4 du code du travail, dans sa version applicable, après avoir procédé ou fait procéder par un membre de l'équipe pluridisciplinaire à une étude de poste et après avoir échangé avec le salarié et l'employeur, le médecin du travail qui constate qu'aucune mesure d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n'est possible et que l'état de santé du travailleur justifie un changement de poste déclare le travailleur inapte à son poste de travail. L'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail est éclairé par des conclusions écrites, assorties d'indications relatives au reclassement du travailleur.

L'article R4624-31, dans sa version applicable, prévoit une procédure en trois temps :

-réalisation d'un examen médical, d'une étude de poste et d'une étude des conditions de travail,

-échange avec l'employeur et le travailleur portant sur l'avis d'inaptitude et les propositions de changement de poste,

-avis du médecin du travail qui doit être notifié dans un délai maximal de quinze jours.

En l'espèce, quand bien même l'intégralité de ces étapes n'aurait pas été respectée par le médecin du travail, ces manquements, imputables à ce dernier, ne sauraient engager la responsabilité de la SARL Carosserie Béthunoise KLS.

Au demeurant, Monsieur [D] [N] ne justifie pas d'un préjudice qui serait résulté pour lui de ces manquements, se bornant à indiquer qu'il n'a pas pu faire valoir ses observations et s'est senti exclu de la procédure qui a abouti à un avis du médecin du travail qu'il ne conteste pas.

Dès lors, sa demande de dommages-intérêts de ce premier chef ne peut prospérer.

Sur le non respect du délai prévu par l'article L1232-6 du code du travail

Il ressort de l'article L1232-6 du code du travail que la lettre notifiant le licenciement ne peut être expédiée moins de 2 jours ouvrables après la date de l'entretien préalable.

En l'espèce, la lettre de licenciement ayant été adressée le 9 août 2017 alors que l'entretien préalable a eu lieu le 7 août précédent, le délai de 2 jours ouvrables prévu par l'article L1232-6 du code du travail n'a pas été respecté.

Toutefois, Monsieur [D] [N] n'invoque ni a fortiori ne justifie d'un préjudice qui en serait résulté pour lui.

Dès lors sa demande de dommages-intérêts de ce second chef ne peut prospérer.

En conséquence, Monsieur [D] [N] sera débouté de sa demande de dommages-intérêts et le jugement déféré sera infirmé en ce sens.

Sur le licenciement

Selon l'article L1226-2 du code du travail, dans sa version applicable, lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel lorsqu'ils existent, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

Selon l'article L1226-2-1 du même code, dans sa version applicable, lorsqu'il est impossible à l'employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent à son reclassement. L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L.1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi. L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L1226-2, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail. S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III du présent livre.

L'obligation de reclassement n'étant pas une obligation de résultat, l'employeur n'est pas tenu de proposer un poste qui n'est pas disponible ni de créer un nouveau poste, ou un poste sans réelle utilité ou encore incompatible avec le fonctionnement de l'entreprise.

En cas d'impossibilité démontrée de reclassement, qui s'apprécie également au regard de l'entreprise et de la structure des emplois, le licenciement sera fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Les explications des parties et les documents fournis font apparaître que la SARL Carosserie Béthunoise KLS est une petite structure n'appartenant à aucun groupe et comptant, outre un gérant non salarié, huit salariés dont une assistante de direction, un employé à la gestion des devis, du suivi des expertises, des commandes de pièces et de l'atelier, deux peintres, deux carrossiers et deux mécaniciens.

Au regard de la limitation du périmètre de reclassement découlant des petites dimensions de la SARL Carosserie Béthunoise KLS, le délai de 5 jours séparant l'avis d'inaptitude du médecin du travail du 20 juillet 2017 et l'envoi le 25 juillet suivant du courrier informant Monsieur [D] [N] de l'impossibilité de le reclasser ne saurait caractériser à lui seul une absence de sérieux et de loyauté de la recherche de reclassement.

La SARL Carosserie Béthunoise KLS produit son registre des entrées et sorties du personnel qui démontre qu'elle ne disposait pas au moment de la recherche de reclassement de poste disponible compatible avec les restrictions médicales.

Dès lors que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, Monsieur [D] [N] sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et le jugement déféré sera infirmé en ce sens.

Sur le rappel de salaire au titre du salaire mensuel net et des primes

Monsieur [D] [N] produit aux débats une attestation du gérant de la SARL Carosserie Béthunoise KLS du 2 novembre 2015 mentionnant qu'il était embauché pour « un salaire mensuel net de 2000 euros, avec primes quadrimestrielles sur la consommation des consommables et la propreté du lieu de travail et de la productivité ».

En premier lieu, les bulletins de paie font apparaître que son salaire net imposable correspond à cette attestation, s'élevant à 2073,28 euros durant les mois sans absence. Dès lors qu'il a été rempli de ses droits, Monsieur [D] [N] sera débouté de sa demande de rappel de salaire au titre du salaire mensuel net.

En second lieu, il ressort des explications des parties et des éléments fournis que les primes s'élevaient à 25 euros par mois pour la consommation des consommables, 25 euros par mois pour la propreté du lieu et 100 euros par mois pour la productivité.

La SARL Carosserie Béthunoise KLS soutient que leur attribution est liée à la réalisation d'objectifs mais ne fournit pas d'éléments permettant de connaître l'étendue de ceux assignés à Monsieur [D] [N] et leur taux de réalisation par ce dernier, ne communiquant même pas le tableau récapitulatif personnel du salarié des mois d'avril, mai et juin 2016.

Il s'ensuit que cette condition n'est pas opposable à Monsieur [D] [N] qui peut prétendre au paiement de l'intégralité des primes pour la période du 26 novembre 2015 au 13 juin 2016.

Le paiement des primes n'est pas mentionné sur les bulletins de paie. Quand bien même plusieurs salariés attestent que ce paiement était effectué par chèques-cadeaux, ce mode de paiement illégal n'est pas de nature à remplir Monsieur [D] [N] de ses droits. Au demeurant, la SARL Carosserie Béthunoise KLS ne démontre pas avoir utilisé ce mode de paiement des primes pour Monsieur [D] [N] qui le conteste, se bornant à fournir la seule attestation de la compagne du gérant non probante compte tenu du fort risque de partialité de son auteur.

En conséquence, la SARL Carosserie Béthunoise KLS sera condamnée à payer à Monsieur [D] [N] un rappel de salaire au titre des primes de 1050 euros et les congés payés y afférents de 105 euros et le jugement déféré sera infirmé en ce sens.

Sur les dommages-intérêts pour inexécution fautive du contrat de travail

En premier lieu, Monsieur [D] [N] produit aux débats des photographies de ses outils de travail (auxquelles la SARL Carosserie Béthunoise KLS oppose d'autres photographies) et des attestations de paiement d'une pension d'invalidité du mois de janvier 2020 au mois de janvier 2021 qui sont insuffisantes à établir que, comme il le soutient, ses conditions de travail sont à l'origine de son arrêt de travail.

En second lieu, Monsieur [D] [N] établit qu'en février, juin et juillet 2017, la SARL Carosserie Béthunoise KLS a tardé à lui envoyer les chèques de règlement des prestations de l'assurance maladie. Toutefois, il ne justifie pas des graves difficultés financières qu'il invoque qui seraient résultées pour lui de ces trois retards durant la période d'arrêt de travail ayant débuté en juin 2016.

En conséquence, il sera débouté de sa demande de dommages-intérêts et le jugement déféré sera infirmé en ce sens.

Sur les autres demandes

Il convient de condamner la SARL Carosserie Béthunoise KLS à remettre à Monsieur [D] [N] les documents de fin de contrat conformes au présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette condamnation d'une astreinte.

Il convient de rappeler que les condamnations prononcées emportent intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation pour les créances de nature salariale et à compter de la décision qui les alloue pour les créances de nature indemnitaire et les frais irrépétibles.

La SARL Carosserie Béthunoise KLS sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles et condamnée à payer à Monsieur [D] [N] la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, sa condamnation aux frais irrépétibles de première instance étant confirmée.

La SARL Carosserie Béthunoise KLS sera condamnée aux dépens d'appel, sa condamnation aux dépens de première instance étant confirmée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire mis à disposition par les soins du greffe,

Infirme le jugement rendu le 22 janvier 2020 par le conseil de prud'hommes de Béthune sauf en ses dispositions sur le rappel de salaire sur le salaire mensuel net, les congés payés afférents, la remise des documents de fin de contrat, les frais irrépétibles et les dépens de première instance ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la SARL Carosserie Béthunoise KLS à payer à Monsieur [D] [N] les sommes suivantes :

-1050 euros à titre de rappel de salaire sur les primes et 105 euros au titre des congés payés y afférents,

-1000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Rappelle que les condamnations prononcées emportent intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation pour les créances de nature salariale et à compter de la décision qui les alloue pour les créances de nature indemnitaire et les frais irrépétibles ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne la SARL Carosserie Béthunoise KLS aux dépens d'appel.

LE GREFFIER

[I] [L]

LE PRESIDENT

Monique DOUXAMI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale b salle 1
Numéro d'arrêt : 20/00970
Date de la décision : 24/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-24;20.00970 ?
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