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23/06/2022 | FRANCE | N°21/01697

France | France, Cour d'appel de Douai, Troisieme chambre, 23 juin 2022, 21/01697


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



TROISIEME CHAMBRE



ARRÊT DU 23/06/2022





****





N° de MINUTE :

N° RG 21/01697 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TQYT



Jugement (N° 20/01596) rendu le 21 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Valenciennes





APPELANT



Monsieur [H] [Y]

né le 03 avril 1971 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représenté par Me Stephane Dominguez

, avocat au barreau de Valenciennes

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 591780022021003848 du 15/04/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Douai)



INTIMÉES



Caisse Primaire d'Assurance...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 23/06/2022

****

N° de MINUTE :

N° RG 21/01697 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TQYT

Jugement (N° 20/01596) rendu le 21 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Valenciennes

APPELANT

Monsieur [H] [Y]

né le 03 avril 1971 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Stephane Dominguez, avocat au barreau de Valenciennes

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 591780022021003848 du 15/04/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Douai)

INTIMÉES

Caisse Primaire d'Assurance Maladie du Hainaut

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Auquel la déclaration d'appel a été signifiée le 7 mars 2021 à étude

SA GMF

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Jean Thevenot, avocat au barreau de Valenciennes

DÉBATS à l'audience publique du 31 mars 2022 tenue par Danielle Thébaud magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Fabienne Dufossé

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Guillaume Salomon, président de chambre

Claire Bertin, conseiller

Danielle Thébaud, conseiller

ARRÊT RENDU PAR DEFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 juin 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Guillaume Salomon, président et Fabienne Dufossé, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 7 mars 2022

****

EXPOSE DU LITIGE

1. Les faits et la procédure antérieure :

Le 25 mars 2010, M. [H] [Y] a été victime d'un accident de la circulation, ayant perdu le contrôle de son véhicule sans implication d'un tiers.

A la suite de cet accident, M. [Y] a présenté un traumatisme cervical bénin, un traumatisme du coude gauche et un traumatisme du bras droit ayant nécessité une prise en charge chirurgicale.

Le véhicule conduit par M. [Y] est assuré auprès de la GMF.

Sur la base d'une première expertise amiable réalisée le 3 janvier 2012 par le docteur [F], concluant à un déficit fonctionnel de 11 %, M. [Y] a perçu, le 25 janvier 2012, une somme de 12 100 euros par la GMF.

M. [Y] était revu par le docteur [F] le 19 janvier 2015, suite à une demande en aggravation de son préjudice. Le docteur [F], concluait "à une discrète aggravation" motivant une majoration du déficit fonctionnel permanent chiffré à 2%, soit un taux de 13 %. La GMF proposait sur cette base une indemnisation, à hauteur de 1 100 euros du point, soit la somme de 4 400 euros.

N'étant pas satisfait de ces conclusions et de la proposition d'indemnisation émise, M. [Y] a saisi avant-dire droit, le président du tribunal de grande instance de Valenciennes par assignation du 20 août 2018, sollicitant une expertise médicale judiciaire.

Par ordonnance rendue le 9 octobre 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance de Valenciennes a ordonné une mesure d'expertise médicale, confiée au docteur [X], lequel a déposé son rapport le 20 juin 2019.

Contestant l'indemnisation amiable proposée par son assureur et se prévalant d'une aggravation de son état de santé, M. [Y] a, par acte d'huissier délivré le 25 juin 2020, assigné la GMF et la caisse primaire d'assurance maladie du Hainaut (CPAM) devant le tribunal judiciaire de Valenciennes afin d'obtenir que soit ordonnée une nouvelle expertise médicale, et subsidiairement une indemnisation par la GMF.

2. Le jugement dont appel :

Par jugement du 21 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Valenciennes a :

- débouté M. [H] [Y] de sa demande d'expertise médicale ;

- l'a débouté de l'ensemble des demandes présentées à l'encontre de la compagnie d'assurance GMF ;

- l'a condamné aux dépens de l'instance ;

- déclaré le présent jugement commun à la CPAM ;

- rappelé que la décision est assortie de l'exécution provisoire.

3. La déclaration d'appel :

Par déclaration au greffe du 22 mars 2021, M. [Y] a interjeté appel de l'intégralité du dispositif jugement querellé dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas critiquées.

4. Les prétentions et moyens des parties :

Dans ses dernières conclusions notifiées le 4 juin 2021, M. [Y] demande à la cour au visa des articles 145 du code de procédure civile, 1103 du code civil, et L. 132-1 du code de la consommation, de :

- ordonner une nouvelle contre-expertise afin de déterminer si son état doit être déclaré comme consolidé au jour de l'expertise à intervenir,

à titre subsidiaire,

- déclarer non satisfactoire l'offre de la GMF portant sur une somme de 1 100 euros du point d'AIPP,

- dire non écrite la clause limitative d'indemnisation de la GMF fixant son indemnisation à 1 100 euros du point,

- fixer à 4 000 euros du point l'indemnisation complémentaire,

- condamner en conséquence la GMF à lui verser la somme de 8 000 euros au titre de l'aggravation de l'AIPP,

- la condamner à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de la résistance abusive,

- la condamner la GMF à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que :

- son état de santé s'est aggravé depuis la dernière expertise, notamment s'agissant du taux d'incapacité physique permanente ;

- il résulte de l'examen médical du 13 février 2020, ainsi que du certificat médical du 1er avril 2021 qu'il souffre maintenant d'une tendinopathie du tendon proximal du long biceps ; que son état n'est pas consolidé compte tenu des douleurs qu'il ressent et de cette pathologie ;

- le barème contractuel sur lequel s'appuie la GMF, constitue un déséquilibre significatif et manifeste entre les droits et obligations des parties, de sorte que la clause en cause devrait être réputée non écrite, en application de l'article L132-1 du code de la consommation.

- au regard de son âge et du taux d'lPP retenu, il devrait bénéficier d'une indemnisation calculée, s'agissant des deux points d'aggravation relevés entre 2012 et 2019, sur le base de 4 000 euros le point.

Dans ses conclusions notifiées le 21 juillet 2021, la GMF sollicite la confirmation du jugement querellé. Elle demande à la cour de :

- dire bien jugé, mal appelé,

- débouter M. [Y] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- reconventionnellement,

- le condamner à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de la procédure abusive,

- le condamner au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, la GMF fait valoir que :

- sur la demande de contre-expertise :

* l'expert judiciaire a clairement indiqué que la consolidation était intervenue depuis longtemps et que la raideur douloureuse ressentie aux deux coudes n'était pas imputable à l'accident,

- sur la proposition d'indemnisation :

* dès l'ordonnance de commission d'expert, elle a versé aux débats l'offre d'indemnisation en date du 24 novembre 2017,

* elle a respecté les termes du contrat prévoyant une indemnisation en droit commun,

* les différents experts sont unanimes sur le taux d'aggravation qu'ils fixent à 2%,

* son offre est satisfaisante compte tenu du "barème d'indemnisation Mornet",

* l'aggravation de son état de santé n'est pas en lien avec les conséquences de l'accident, mais résulte d'un fait extérieur imputable à M. [Y].

- sur la clause abusive :

* d'une part, l'article L 132-1 du code de la consommation est abrogé, d'autre part M. [Y] ne produit pas la mention qui serait abusive,

- sur la résistance abusive :

* elle a refusé d'accéder aux demandes de M. [Y] car elles étaient excessives,

- sur sa demande au titre de la procédure abusive :

* M. [Y] a formé des demandes saugrenues et notoirement excessives en justice.

Pour un plus ample exposé des moyens de chacune des parties, il y a lieu de se référer aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant ont été signifié le 7 juin 2021 à la CPAM du Hainaut, par remise à l'étude d'huissier, qui n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2022.

MOTIFS

Sur la demande de contre-expertise :

Le recours à une contre-expertise judiciaire est justifiée s'il est démontré que le rapport établi par l'expert initialement commis présente des lacunes, des erreurs manifestes ou des incohérences, étant précisé que le seul désaccord d'une partie avec ses conclusions ne constitue pas une cause suffisante pour y recourir.

En l'espèce, pour étayer sa demande de contre-expertise, M. [Y] invoque exclusivement le compte rendu médical d'une radiographie et d'une échographie du bras et du coude droit, en date du 13 février 2020 (sa pièce 12), concluant à l'existence d'une tendinopathie du tendon proximal du long biceps, sans évidence de rupture, et constatant que la fracture diaphysaire humérale distale, conséquence de l'accident du 25 mars 2010 est consolidée. Ces examens ayant été réalisés suite à un traumatisme récent comme en atteste le motif de réalisation de ces examens, "claquement lors du port d'une charge lourde effectué 15 jours", auparavant (sa pièce 14), alors qu'il ressort du certificat médical du docteur [R], en date du 12 juin 2015, (sa pièce 9) que le port de charge était interdit de façon définitive à M. [Y] au regard des conséquences de la fracture en question.

Pour autant, il résulte des éléments médicaux versés aux débats, et notamment des rapports d'expertises médicales effectuées en 2012 et en 2015 par le docteur [F], (pièces [Y] n°1 et 2A) que depuis son accident du 25 mars 2010, M. [Y] a été consolidé le 9 décembre 2011 avec un taux de déficit fonctionnel permanent initial évalué à 11% lors de la première expertise en janvier 2012, puis revu en aggravation le 19 janvier 2015, l'examen clinique du docteur [F] relevant "[...] une discrète aggravation de la cinétique des coudes ainsi que l'amyotrophie droite à l'origine d'une réduction franche de la force de préhension" et concluant "à une discrète aggravation" motivant une majoration du déficit fonctionnel permanent chiffré à 2%, soit un taux de 13 %.

Dans son rapport d'expertise judiciaire en date du 25 avril 2019 (pièce [Y] n°2B), le docteur [X] indique que la rupture tendineuse partielle bicipitale mise en exergue par les examens complémentaires du bras droit en date des 23 mars et 7 avril 2015, n'est pas imputable à l'accident du 25 mars 2010, mais à un traumatisme récent comme en atteste le motif de réalisation de ces examens « effort de soutènement ». Il souligne que l'électromyogramme des membres supérieurs ne montre pas d'atteinte motrice sensitive significatif d'arguments contributifs pour les douleurs alléguées par Monsieur [Y] et précise que les radiographies du 28 septembre 2015 ne montrent pas d'aggravation osseuse significative ; il conclut à ce que les données de l'examen clinique au jour de l'expertise sont similaires à celles obtenues le 19 janvier 15, justifiant conformément au barème de droit commun le déficit fonctionnel permanent chiffré à 13 %.

Il s'en déduit que les derniers éléments médicaux versés par M. [Y], relatif à l'existence d'une tendinopathie, ne justifient pas une nouvelle appréciation du taux d'aggravation du déficit fonctionnel permanent, fixé tant part l'expert judiciaire [X], que par le docteur [F] à un taux de 2%, dès lors que l'aggravation invoquée n'est pas en lien de causalité avec l'accident survenu en 2010 et garanti par la GMF, mais résulte d'un nouvel événement traumatique, imputable au patient et causé par le claquement intervenu à la suite du port d'une charge lourde. La consolidation au titre des séquelles en lien de causalité avec cet accident était acquise.

Dès lors, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a débouté M. [Y] de ce chef.

Sur le caractère abusif d'une clause du contrat d'assurance :

M. [Y] conteste la proposition d'indemnisation faite par la GMF au motif que le barème retenu par la GMF constitue un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties et évoque l'existence d'une clause limitant son droit à indemnisation à 1 100 euros du point dont il sollicite qu'elle soit déclarée non-écrite en application de l'article L 132-1 du code de la consommation.

La cour constate, outre que l'article sur lequel M. [Y] fonde son action concerne le délit de pratique commerciale trompeuse, ce dernier ne produit pas plus en cause d'appel qu'en première instance, des éléments relatifs au contrat d'assurance en cause ou à la proposition d'indemnisation contestée. Au surplus, la cour constate qu'il ne ressort pas de ces documents, tels que transmis par la GMF elle-même, l'existence d'une clause limitative d'indemnisation fixant l'indemnisation de M. [Y] à 1 100 euros du point.

Le jugement ayant débouté M. [Y] de sa demande de ce chef est confirmé.

Sur l'indemnisation au titre de l'aggravation de 2 % :

La GMF ne conteste pas sa garantie au titre d'une aggravation de 2 points du déficit fonctionnel permanent subi par M. [Y] et résultant de l'accident survenu en 2010.

La proposition de la GMF, figurant au procès-verbal de transaction en date du 24 novembre 2017, d'indemniser l'aggravation du déficit fonctionnel permanent fixé à un taux de 2 % par l'expert [X], sur la base de 2 200 euros du point, assure la réparation intégrale du préjudice subi, étant précisé d'une part qu'il n'existe pas de barème obligatoire en la matière, et d'autre part, que pour un homme âgé de 40 ans à la date de la consolidation, atteint d'un déficit fonctionnel de 2%.

Dès lors, il convient d'infirmer le jugement ayant débouté M. [Y] de sa demande indemnitaire.

Sur la demandes formées par les parties au titre d'abus de procédure :

En application de l'article 1240 du code civil dans sa rédaction postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, l'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, d'erreur grossière équipollente au dol, de faute, même non grossière ou dolosive, ou encore de légèreté blâmable, dès lors qu'un préjudice en résulte.

La résistance d'une des parties ne peut dégénérer en abus, susceptible d'engager sa responsabilité, que lorsqu'elle présente un caractère dolosif ou malveillant.

En l'espèce, la cour constate que tant M. [Y] que la GMF n'apportent aucun élément au soutien de leurs demandes indemnitaires.

En conséquence, M. [Y] et la GMF seront déboutés de leurs demandes de ce chef.

Sur les demandes accessoires

Le sens du présent arrêt conduit :

d'une part à confirmer le jugement attaqué sur ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile,

et d'autre part, à condamner M. [Y] aux entiers dépens d'appel et à verser à la GMF la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement rendu le 21 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Valenciennes, sauf en ce qu'il a débouté M. [H] [Y] de sa demande indemnitaire ;

Statuant à nouveau de ce seul chef et y ajoutant,

Condamne la GMF à payer à M. [H] [Y] la somme de 4 400 euros au titre de l'indemnisation d'une aggravation de son déficit fonctionnel permanent de 2 % résultant de l'accident survenu le 25 mars 2010 ;

Déboute M. [H] [Y] de sa demande au titre de la résistance abusive,

Déboute la société GMF de sa demande au titre de la procédure abusive,

Condamne M. [H] [Y] aux entiers dépens d'appel,

Condamne M. [H] [Y] à verser à la société GMF la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure d'appel.

Le GreffierLe Président

F. DufosséG. Salomon


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Troisieme chambre
Numéro d'arrêt : 21/01697
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;21.01697 ?
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