La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/06/2022 | FRANCE | N°20/00447

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 23 juin 2022, 20/00447


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 23/06/2022





****





N° de MINUTE :

N° RG 20/00447 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S3QR



Jugement (N° 18/00794) rendu le 12 décembre 2019

par le tribunal de grande instance de Cambrai







APPELANT



Monsieur [O] [I]

né le 28 septembre 1976 à Cambrai (59400)

296 route de Lecy

74570 Groisy



rep

résenté par Me Loïc Le Roy, membre de la SELARL Lexavoué, avocat au barreau de Douai

assisté de Me Simon Dubois, avocat au barreau de Paris





INTIMÉE



SA Clesence SA d'HLM venant aux droits de la SA Maison du Cil prise en la p...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 23/06/2022

****

N° de MINUTE :

N° RG 20/00447 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S3QR

Jugement (N° 18/00794) rendu le 12 décembre 2019

par le tribunal de grande instance de Cambrai

APPELANT

Monsieur [O] [I]

né le 28 septembre 1976 à Cambrai (59400)

296 route de Lecy

74570 Groisy

représenté par Me Loïc Le Roy, membre de la SELARL Lexavoué, avocat au barreau de Douai

assisté de Me Simon Dubois, avocat au barreau de Paris

INTIMÉE

SA Clesence SA d'HLM venant aux droits de la SA Maison du Cil prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social, 12 boulevard Roosevelt

02100 Saint Quentin

représentée et assistée de Me Cathy Beauchart, avocat au barreau de Cambrai

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Catherine Bolteau-Serre, président de chambre

Sophie Tuffreau, conseiller

Jean-François Le Pouliquen, conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Anaïs Millescamps

DÉBATS à l'audience publique du 21 février 2022 après rapport oral de l'affaire par Catherine Bolteau-Serre.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 juin 2022 après prorogation du délibéré en date du 02 juin 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Catherine Bolteau-Serre, présidente et Anaïs Millescamps, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 28 juin 2021

****

Vu le jugement en date du 12 décembre 2019 rendu par le tribunal de grande instance de Cambrai,

Vu la déclaration d'appel de M. [O] [I] du 22 janvier 2020,

Vu les conclusions de M. [O] [I] du 18 janvier 2021,

Vu les conclusions de la société d'HLM Clésence du 24 juin 2021,

Vu l'ordonnance de clôture du 28 juin 2021

EXPOSE DU LITIGE

La société Maison du cil aux droits de laquelle vient désormais la société d'HLM Clésence, a acquis le 4 mai 1999 de la SA d'HLM du Hainaut, notamment un ensemble immobilier situé à Cambrai l7 bis rue Lepot cadastré section AT n°585.

Selon l'acte authentique de vente, l'ensemble comprenait un bâtiment principal de deux étages divisé en cinq appartements et un bâtiment secondaire divisé en deux appartements, ainsi que cinq garages.

La société venderesse avait elle-même fait l`acquisition de cet ensemble le 7 mars 1985 de Mme [D], laquelle conservait pour elle une partie des bâtiments, cadastrés section AT n°584.

L'acte de vente du 7 mars 1985 précisait que les biens vendus consistaient en une maison d'un étage et grenier et de ' divers bâtiments à usage de garage'. Suivait immédiatement une mention selon laquelle existait 'une servitude de passage sous la voûte donnant sur la rue Ernest Lepot et en limite du garage restant appartenir à la venderesse', le fonds servant étant l'immeuble cadastré section AT n°584.

L`acte en question précisait également que trois garages étaient loués, séparément ou avec un appartement.

Les stipulations concernant cette servitude ont été reprises dans l'acte authentique d`acquisition en date du 4 mai 1999 :

'L'immeuble présentement vendu et celui contigu cadastré section AT n°584 restant appartenir à la venderesse et dont l'origine de propriété est identique à celle de l'immeuble objet des présentes, sont délimités au plan sus-énoncé.

Par suite, la situation quant aux mitoyennetés, servitudes et conditions particulières de la vente résultera des indications portées audit plan, étant précisé :

-que les 89 m² de servitude de passage sur la parcelle cadastrée section AT n° 584 devront être libres de tout véhicule

-que le droit de passage pourra être exercé en tout temps et toute heure par les propriétaires des immeubles section AT n° 585, les membres de leur famille, leurs domestiques, employés, puis ultérieurement dans les mêmes conditions par les propriétaires successifs de l'immeuble présentement vendu pour se rendre à celui-ci et en revenir, avec les instruments, machines ou autres choses nécessaires à la seule exploitation de l'immeuble à l'exception de tout droit de stationnement. »

Le fonds servant, initialement cadastré section AP n°584 a, par la suite, été divisé en trois fonds cadastrés section AT n°707,708 et709.

M. [O] [I] a acquis les fonds cadastrés section AT n°709 (fonds servant) et 708 le 1er avril 2016.

Au titre des servitudes, l'acte de vente reprenait les termes de la servitude bénéficiant au fonds section AT n° 585 et indiqué également une servitude de passage 'véhicule piétons' au profit des fonds n°707 et 708.

Début septembre 2016, M. [I] a fermé le portail d'accès et en mars 2018, a fait installer dans le passage un arceau bloquant la circulation des véhicules à 4 roues.

Par acte du 29 mai 2018, la société Clésence a fait assigner M. [I] devant le tribunal de grande instance de Cambrai pour le voir condamner à faire cesser toute entrave à l'exercice de la servitude de passage sous astreinte de 200 euros par jour de retard, enlever l'arceau au sol sur l'assiette de ladite servitude, verser 2 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par jugement en date du 12 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Cambrai a :

- dit que la servitude consentie par acte notarié du 7 mars 1985 est destinée au passage piétonnier mais également au passage de véhicules motorisés à deux et quatre roues;

- condamné M. [O] [I] à procéder ou faire procéder à la dépose de l'arceau et tout autre obstacle à la circulation des véhicules sur la servitude de passage et ce, dans un délai de quinze jours à compter dc la signification de la présente décision,

- dit que passé ce délai et à défaut d`exécution, une astreinte de 150 euros (cent cinquante euros) par jour de retard commencera de courir contre M.[O] [I] (sic) et ce, pendant une période de quatre mois,

-condamné M. [O] [I] à verser à la société Clésence une somme de 3 000 (trois mille) euros au titre de dommages et intérêts,

- condamné la société Clésence à procéder ou faire procéder à l'entretien du passage voûté, à réparer et repeindre les murs et plafonds dudit passage et à faire toutes démarches utiles pour la reprise et la sécurisation des gaines électriques et ce, dans un délai d`un mois à compter de la signification de la présente décision.

- dit que passé ce délai et à défaut d`exécution une astreintc de 100 euros (cent euros) par jour de retard commencera de courir contre la société Clésence et ce pendant une période de quatre mois,

- condamné la société Clésence à verser à M. [O] [I] une somme de 500 (cinq cents) euros à titre de dommages ct intérêts.

Par déclaration en date du 22 janvier 2020, M. [O] [I] a interjeté appel du jugement.

Par conclusions en date du 18 janvier 2021, M. [O] [I] demande à la cour, au visa des articles 538, 640, 678 du code de procédure civile, des articles 1103 et 637 et suivants du code civil, de :

- infirmer la décision déférée en ce qu'elle a (i) qualifié la servitude consentie par acte

notarié du 7 mars 1985 de passage de véhicules motorisés à deux et quatre roues et (ii)

condamné M. [I] à la dépose de l'arceau et tout autre obstacle à la circulation des véhicules et au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de dommages et intérêts;

Statuant à nouveau :

- dire que la servitude consentie par acte notarié du 7 mars 1985 n'est pas destinée au

passage de véhicules motorisées à deux ou quatre roues ;

- débouter la société Clésence de ses autres demandes ;

A titre subsidiaire :

- ordonner avant dire droit, un transport sur les lieux ;

- infirmer le jugement en ce qu'il n'est pas assez précis dans la description de l'obligation de réparation et de peinture du porche à la charge de Clésence, en précisant que les travaux de réparation et de peinture doivent permettre de redonner au porche l'état dans lequel Clésence l'a acquis, c'est-à-dire, notamment, en réalisant ou faisant réaliser les panneaux de moulure sur les murs et plafonds ;

En tout état de cause :

- la confirmer pour le surplus ;

- condamner la société Clésence au remboursement des frais avancés pour l'entretien de la porte cochère, soit la somme de 3 576 euros ;

- condamner la société Clésence au paiement, au titre de dommages et intérêts,

de la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral et de la somme de 3 000 euros au titre du préjudice financier ;

- condamner la société Clésence au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions en date du 24 juin 2021, la société d'HLM Clésence demande à la cour de :

- déclarer la société Clésence recevable et bien fondée en son appel incident

- déclarer M. [I] irrecevable et mal fondé en son appel

- déclarer M. [I] irrecevable en ce qui concerne ses demandes de remboursement des frais avancés pour l'entretien de la porte cochère d'un montant de 3 576 euros et de dommages et intérêts à hauteur de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et 3 000 euros au titre de son préjudice financier, subsidiairement le débouter de ses demandes,

- le débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a :

condamné la société Clésence à procéder ou faire procéder à l'entretien du passage voûté, à réparer et repeindre les murs et plafonds dudit passage et à faire toutes

démarches utiles pour la reprise et la sécurisation des gaines électriques et ce, dans un

délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision,

dit que passé ce délai et à défaut d'exécution, une astreinte de 100 euros (cent euros) par jour de retard commencera à courir contre la société Clésence et ce pendant une période de quatre mois.

condamné la société Clésence à verser à M. [O] [I] une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts

- infirmer en conséquence le jugement en ce qu'il a :

condamné la société Clésence à procéder ou faire procéder à l'entretien du passage voûté, à réparer et repeindre les murs et plafonds dudit passage et à faire toutes

démarches utiles pour la reprise et la sécurisation des gaines électriques et ce, dans un

délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision,

dit que passé ce délai et à défaut d'exécution, une astreinte de 100 euros (cent euros) par jour de retard commencera à courir contre la société Clésence et ce pendant une période de quatre mois.

condamné la société Clésence à verser à M. [O] [I] une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts

En conséquence :

- déclarer M. [I] irrecevable en ses demandes tendant à la condamnation de la société Clésence à réaliser les travaux, l'entretien du passage sur les murs et plafonds,

- Subsidiairement, préciser la nature des travaux à réaliser comme étant le badigeon à la chaux naturelle sur les moulures, la pose d'enduit lisse à la chaux sur les parties briques, la peinture en soubassement dans le ton d'origine et la pose de faux plafond en BA 13 hydrofuge au niveau de l'ancien plafond et projection de plâtre.

Y ajoutant :

condamner M. [I] à verser une indemnité de 2 000 euros au titre de son

trouble de jouissance subi depuis le jugement

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [O] [I] à procéder ou faire procéder à la dépose de l'arceau et tout autre obstacle à la circulation des véhicules sur la servitude de passage. Y ajoutant, il conviendra d'interdire à M. [O] [I] de poser un cadenas sur la porte cochère qui a pour effet d'en réduire l'usage, de le rendre plus incommode et insécure ou à tout le moins lui enjoindre de déposer ce cadenas sous astreinte,

- condamner M. [I] à verser à la Société Clésence une indemnité de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [I] aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions déposées, soutenues à l'audience et rappelées ci-dessus.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 juin 2021.

Par message en date du 4 mars 2022, soit postérieurement à l'audience des plaidoiries, le conseil de M. [O] [I] a adressé à la cour une note en délibéré.

Par message du 9 mars 2022, le conseil de la socété Clésence a sollicité le rejet de la note en délibéré.

Par message en date du 2 juin 2022, les conseils des parties ont été invités, au visa de l'article 462 du code de procédure civile, à faire part de leurs observations éventuelles sur l'erreur matérielle contenue dans le dispositif du jugement, mentionnant le nom de M. [O] [I] au lieu de M. [O] [I].

Par message en date du 7 juin 2022, le conseil de M. [I] a confirmé l'orthographe du nom patronymique.

Par message en date du 7 juin 2022, les parties ont été invitées à faire part de leurs observations, au plus tard le 14 juin 2022, sur la recevabilité de la demande de la société d'HLM Clésence tendant à voir déclarer irrecevables les demandes de M. [I] au titre des frais de réparation de la porte cochère, du préjudice moral et du préjudice financier et ce au visa des articles 907 et 789 du code de procédure civile et sur le moyen soulevé d'office de l'irrecevabilité desdites demandes au visa de l'article 910-4 du code de procédure civile.

Par message en date du 14 juin 2022, le conseil de M. [I] a fait part de ses observations.

Le conseil de la société D'HLM Clésence n'a pas fait d'observations.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1- sur la rectification d'erreur matérielle

Aux termes de l'article 462 du code de procédure civile, 'les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande [...]'.

Le dispositif du jugement dont appel est affecté d'une erreur matérielle en ce que le nom de M. [O] [I] est mentionné comme étant '[I]'.

Il convient en conséquence de rectifier le jugement selon le dispositif du présent arrêt.

2- sur la note en délibéré de M. [I] du 4 mars 2022

Aux termes de l'article 445 du code de procédure civile, après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444.

L'appelant a adressé à la cour le 4 mars 2022 une note en délibéré.

Or, aucune note en délibéré n'a été autorisée à l'issue des plaidoiries qui ont eu lieu le 21 février 2022, ni demandée postérieurement, à l'exception de celles du 2 et du 7 juin 2022 visées à l'exposé du litige du présent arrêt.

En conséquence, la note en délibéré sera rejetée des débats.

3- sur la servitude de passage

a- sur la nature de la servitude

M. [I] considère qu'il s'agit d'une servitude du fait de l'homme et non d'une servitude légale, que l'acte du 7 mars 1985 a eu pour objet d'aménager contractuellement la servitude non en raison de l'enclavement de la parcelle cédée mais de la nécessité de préciser les conditions d'exercice d'une servitude qui existait déjà et établie par destination du père de famille.

La société Clésence soutient qu'il s'agit d'une servitude légale car elle résulte de son état d'enclave.

Aux termes de l'article 682 du code civil, le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.

L'article 684 dispose que si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'une vente, d'un échange, d'un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de ces actes.

Toutefois, dans le cas où un passage suffisant ne pourrait être établi sur les fonds divisés, l'article 682 serait applicable.

En l'espèce, il est établi par l'acte du 7 mars 1985 que Mme [D] possédait les deux parcelles AT n°585 et 584 constituées d'immeubles dont l'un donnant sur la rue Ernest Lepot, traversé par un passage voûté (584), puis via ce passage, sur une grande cour arborée, des immeubles (585), qu'elle a vendu cette dernière parcelle AT n°585 à la société HLM du Hainaut mais a gardé la parcelle AT n°584.

Au regard de la disposition des lieux, le passage de la rue Ernest Lepot vers la parcelle AT n°585 s'effectuait obligatoirement par le couloir voûté objet du présent litige dépendant de la parcelle AT n°584.

La servitude de passage apparente existait entre la parcelle AT n° 584 (fonds servant) et la parcelle AT n°585 (fonds dominant) avant l'acte précité. L'enclave a donc été créée par la décision de la propriétaire des deux parcelles de vendre la parcelle AT n°585.

L'acte du 7 mars 1985 a donc eu pour objet d'aménager conventionnellement la servitude légale afin de préciser les conditions d'exercice d'une servitude qui existait déjà.

b- sur l'interprétation de la clause de l'acte de vente du 7 mars 1985

M. [I] soutient que la commune intention des parties à l'acte du 7 mars 1985 a été d'exclure le stationnement et le passage d'automobiles avec un énoncé limitatif et exhaustif des modalités d'exercice de la servitude de passage.

La société Clésence fait valoir au contraire qu'il ne résulte pas de l'acte que les parties ont entendu limiter conventionnellement l'exercice du droit de passage aux seuls piétons et n'ont pas interdit le passage aux véhicules quatre roues.

En l'espèce, l'acte du 7 mars 1985 entre Mme [D] et la société HLM du Hainaut relative à la vente de la parcelle AT n°585 mentionne notamment :

« servitudes

L'immeuble présentement vendu et celui contigu cadastré section AT n° 584 restant appartenir à la venderesse et dont l'origine de propriété est identique à celle de l'immeuble objet des présentes, sont délimités au plan sus énoncé.

Par suite la situation quant aux mitoyennetés, servitudes et conditions particulières de la vente résultera des indications portées audit plan, étant précisé

-que les 89 m² de servitude de passage sur la parcelle cadastrée sectionAT n°584 devront être libres de tout véhicule

le droit de passage pourra être exercé en tout temps et à toute heure par les propriétaires des immeubles section AT n°585, les membres de leur famille, leurs domestiques et employés, puis ultérieurement dans les mêmes conditions par les propriétaires successifs de l'immeuble présentement vendu, pour se rendre à celui-ci et en revenir, avec les instruments, machines ou autres choses nécessaires à la seule exploitation de l'immeuble, à l'exception de tout droit de stationnement.

Il est précisé que sur l'assiette de cette servitude de passage sera comprise la possibilité de faire passer tous réseaux d'eau, d'électricité, gaz et assainissement, réseaux sur lesquels l'acquéreur autorise dès à présent, la venderesse ou ses ayants droits successifs à se brancher.

L'entretien de l'ensemble de l'assiette de la servitude de passage, porte, murs et plafonds sera assuré aux frais exclusifs de l'acquéreur et des propriétaires successifs.»

Aux termes de l'acte du 4 mai 1999 pour la vente de la parcelle AT n°585 entre la société HLM du Hainaut et la société Maison du cil (devenue société d'HLM Clésence), la clause ci-dessus est littéralement retranscrite.

Par acte du 5 avril 2012 rectifié le 7 juin 2012 et le 6 juillet 2012, la parcelle AT n°584 a été divisée en parcelles AT n°707, AT n°708 et AT n°709.

La parcelle AT n°707 a été acquise par Mme [S] [H] le 28 mars 2014 et les parcelles AT n°708 et 709 par M. [O] [I] le 1er avril 2016.

Les actes de vente de 2014 et 2016 comportent la retranscription littérale de la clause 'Servitudes' de l'acte du 7 mars 1985.

En outre, ils mentionnent les servitudes générées par la division de la parcelle AT n°584 en parcelles AT n°707, 708 et 709, les deux premières étant désenclavées par une servitude de passage véhicules et piétons qui s'exerce sur la parcelle AT n°709 qui correspond au passage voûté litigieux.

Aux termes du premier alinéa de l'article 696 du code civil, 'quand on établit une servitude, on est censé accorder tout ce qui est nécessaire pour en user [...]'

En outre, l'article 1188 dudit code dispose que le contrat s'interprète d'après la commune intention des parties plutôt qu'en s'arrêtant au sens littéral de ses termes.

Lorsque cette intention ne peut être décelée, le contrat s'interprète selon le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation.

En l'espèce, l'acte de 1985 portait sur la vente de plusieurs appartements et de garages, lesquels étaient loués.

Selon la définition que M. [I] en donne lui-même dans ses écritures, un garage est un lieu où on remise les véhicules.

Les termes utilisés 'les instruments, machines ou autres choses nécessaires à la seule exploitation de l'immeuble, à l'exception de tout droit de stationnement' au regard de l'existence de garages, figurant sur le plan du géomètre annexé à l'acte du 7 mars 1985, impliquent nécessairement que les utilisateurs des garages puissent y accéder et y garer leur véhicule.

Certes, le passage est étroit puisque selon le procès-verbal de l'huissier du 6 janvier 2020, la largeur est de 2,40 mètres, le rendant en outre dangereux pour les piétons qui ne disposent pas d'un espace suffisant pour traverser le passage en présence d'un véhicule entrant ou sortant, comme en atteste l'huissier.

M. [I] affirme sans être sérieusement démenti que les camions notamment de déménagement ne peuvent traverser le passage et y restent stationnés ce qui est contraire à la clause qui interdit tout stationnement dans ledit passage, ce que confirment les photographies (p.24 et 27 des conclusions de l'appelant), sa déclaration de main courante du 26 novembre 2016 et les constatations de l'huissier sur la largeur du passage.

De même, le gérant de la société Belmer, couvreur, indique dans un écrit du 9 juillet 2019 que chargé d'effectuer la réfection de la toiture de l'immeuble appartenant à M. [I], à l'avant (rue) comme à l'arrière (cour), il n'a pas rentré les véhicules du chantier ni les bennes 'du fait de l'étroitesse du passage et de l'inadaptation de ce dernier à cet usage' et a sollicité une autorisation d'occupation temporaire du domaine public.

La clause de l'acte du 7 mars 1985 a été établie à une date où les parties avaient pleine connaissance de ces difficultés. En interdisant le stationnement dans le passage, elles ont entendu de facto limiter le passage aux véhicules dont la largeur et le volume étaient trop importants, étant rappelé que ce passage - comme l'ensemble des immeubles - date du XVIIIème siècle et permettait la circulation de véhicules hippomobiles (carrosses, calèches, berlines...) dont il peut difficilement être allégué que leur gabarit était égal ou supérieur à un camion.

L'argument selon lequel les véhicules des pompiers doivent pouvoir accéder à la parcelle AT n°585 est inopérant, d'une part parce que ceux-ci sont équipés d'un matériel et de véhicules de différents gabarits leur permettant d'accéder à des endroits difficiles, d'autre part parce qu'en cas de danger, ils peuvent prendre toutes dispositions pour accéder auxdits endroits.

En outre, M. [I] affirme que la cour arborée existant en 1985 a été transformée par le propriétaire de la parcelle AT n°585 en parking sur lequel stationnent des véhicules. La transformation est clairement établie par les photographies de l'Institut géographique national (p.24 et 25 des conclusions de l'appelant) et les constats d'huissier des 18 et 20 janvier et 13 février 2018.

Si la clause de l'acte de vente doit effectivement permettre aux possesseurs des garages d'y garer leurs véhicules, - l'argumentation de la société Clésence porte sur ce droit des occupants des garages et non sur une éventuelle demande d'extension de la servitude -, elle ne doit pas s'interpréter en un sens qui aggrave la servitude, notamment permettre à tous occupants de l'immeuble correspondant à la parcelle AT n°585, autres que ceux disposant d'un garage, d'emprunter le passage pour y stationner.

L'affirmation selon laquelle les photographies de l'IGN montrent 'l'existence de larges passages sur les côtés permettant l'accès aux garages' outre qu'elle ne se vérifie pas sur les photographies quant à leur largeur, n'implique pas un droit de stationner pour tout autre véhicule d'un occupant, ce qui à l'époque de l'acte de 1985 aurait eu pour conséquence, du fait des arbres, d'empêcher les possesseurs des garages d'y accéder.

La société Clésence ne peut se prévaloir de la servitude de passage piétons et véhicules de la parcelle AT n°709 (M. [I]) créée au profit de la parcelle AT n°707 (Mme [H]) pour revendiquer un droit de passage de tout occupant de la parcelle AT n°585 pour y stationner sur un parking non prévu en 1985, puis postérieurement, s'agissant d'une servitude n'engendrant aucun litige, Mme [H] n'étant pas dans la cause.

Enfin, il n'est pas allégué par la société Clésence dans ses écritures que M. [I], hors la pose d'un arceau et d'un parpaing qui a engendré le présent litige, et désormais d'un cadenas, a tenté de diminuer l'usage du fonds servant ou à le rendre plus incommode.

De même, il résulte des termes du jugement (p.6) auxquels la cour se rapporte, que selon les messages de M. [I] des 5 juillet, 19 juillet et 4 septembre 2016, ce dernier reconnaissait que la servitude de passage incluait la circulation de véhicules automobiles.

En conséquence, la servitude consentie par acte du 7 mars 1985 est destinée au passage piétonnier et au passage de véhicules motorisés à deux et quatre roues des occupants des trois garages et à tout véhicule nécessaire à l'exploitation de l'immeuble, sous réserve que son gabarit n'excède pas la largeur et la hauteur du passage ayant pour conséquence le stationnement du véhicule dans le passage, lequel est interdit par la clause de l'acte de 1985.

Le jugement sera émendé en ce sens.

c-sur l'atteinte au droit de passage

M. [I] affirme qu'il a enlevé les dispositifs au sol en janvier 2020 et que conformément à l'article 647 du code civil, il a le droit de se clore et donc d'apposer un cadenas sur la porte cochère, dont il a remis une clé aux occupants et ce, depuis 2018.

La société Clémence soutient que M. [I] rend incommode l'exercice du droit de passage par les locataires des appartements qui veulent accéder à leur garage pour y stationner leur véhicule en fermant la porte cochère par un cadenas alors que cette porte cochère jusqu'à l'acquisition de M. [I] était toujours ouverte.

Aux termes de l'article 701 du code civil, 'le propriétaire du fonds débiteur de la servitude ne peut rien faire qui tende à en diminuer l'usage, ou à le rendre plus incommode [...]'

En l'espèce, en faisant poser un arceau empêchant la circulation de tout véhicule automobile, M. [I] a entravé de façon manifeste et délibérée l'exercice de la servitude de passage auquel il était tenu, causant un préjudice de jouissance aux occupants du fonds dominant.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [I] à enlever l'arceau au sol du passage et plus généralement, à libérer ledit passage et ce sous astreinte.

Il sera constaté par le procès-verbal du 8 janvier 2020 que M. [I] a exécuté le jugement de ce chef.

Cependant, conformément à l'article 647 du code civil, le propriétaire d'un fonds grevé d'une servitude de passage conserve le droit de se clore à la condition de ne pas porter atteinte au droit de passage et de ne pas en rendre l'exercice plus incommode.

L'appréciation des circonstances modificatives de cet usage entre dans les pouvoirs souverains des juges du fond.

En l'espèce, la pose d'un cadenas rend l'usage plus incommode pour les occupants des garages lorsqu'ils rentrent ou sortent leur véhicule, M. [I] reconnaissant lui-même les difficultés, même avec la porte ouverte, pour manoeuvrer dans ce passage, venant ou sortant de la rue.

En revanche, M. [I] affirme subir de nombreuses nuisances, des dégradations de la porte cochère et du passage, des intrusions de personnes extérieures.

Il ne peut être sérieusement contesté que le fait de laisser la porte cochère ouverte jour et nuit génère une insécurité certaine, la société Clésence ne démontrant pas que cette porte avant l'acquisition de M. [I], était constamment ouverte.

M. [J], architecte du patrimoine, chargé par la société Clésence d'une mission de maîtrise d'oeuvre pour effectuer les réparations du passage, indique notamment dans son avant-projet (p.4): 'la suggestion de mettre en 'uvre un portier à multiples sonnettes avec passe électronique serait a minima une proposition que nous ferions afin d'éviter un accès libre anxiogène et propice aux incivilités de notre époque.'

En conséquence, il appartient aux parties de se rapprocher et d'envisager la mise en place d'un tel système permettant une ouverture et une fermeture automatiques de la porte cochère pour l'entrée et la sortie des véhicules autorisés conformément à la lettre de la clause de 1985, avec un système d'ouverture et de fermeture automatique et séparé pour l'entrée piéton.

A défaut, la porte cochère comprenant l'entrée piéton, devra être maintenue close mais non fermée par un cadenas ou un autre système rendant incommode l'accès au passage.

d- sur les dommages-intérêts

Le comportement de M. [I], en posant le dispositif au sol dans le passage, a entravé le libre exercice de la servitude par les occupants de l'immeuble en fond de cour.

En l'espèce, le préjudice de jouissance a été subi principalement par les locataires de la société Clésence disposant de garages et non par la société Clésence elle-même.

Celle-ci affirme que les locataires l'interpellent et se plaignent des désagréments que leur causent l'arceau, le cadenas qui les empêchent d'accéder à leur garage et place de parking et que trois locataires ont donné leur congé.

Outre que la servitude de passage prévoyait l'accès aux garages et non l'existence de parkings sur la cour arborée, ce qui constitue une aggravation de la servitude, il n'est pas établi que les résiliations de baux produites aient un quelconque lien avec le comportement de M. [I], s'agissant d'un locataire mis sous protection ne pouvant plus se maintenir seul dans le logement, d'une locataire ayant acquis un bien immobilier et d'une troisième ne donnant aucun motif.

Le préjudice subi par la société Clésence du fait de l'entrave à la servitude sera justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

M. [I] sera condamné à payer à la société Clésence la somme de 1 000 euros à ce titre.

4- sur les demandes de remise en état et d'entretien du passage

a- sur la recevabilité des demandes

La société Clésence reproche à M. [I] de n'avoir dirigé ses demandes qu'à son égard alors que Mme [H], propriétaire de la parcelle AT n°707 est également bénéficiaire de la servitude de passage.

M. [I] s'appuie sur la clause de l'acte de 1985, reprise dans les actes postérieurs, qui met la charge de l'entretien du passage aux frais exclusifs de la société Clésence.

Aux termes de l'article 697 du code civil, celui auquel est due une servitude a droit de faire tous les ouvrages nécessaires pour en user et pour la conserver.

L'article 698 dudit code dispose que ces ouvrages sont à ses frais, et non à ceux du propriétaire du fonds assujetti, à moins que le titre d'établissement de la servitude ne dise le contraire.

En l'espèce, la clause insérée à l'acte du 7 mars 1985, reprise dans les actes de vente postérieurs, indique effectivement : 'L'entretien de l'ensemble de l'assiette de la servitude de passage, porte, murs et plafonds sera assuré aux frais exclusifs de l'acquéreur et des propriétaires successifs.'

Aucune clause en ce sens n'est prévue dans les actes de vente de Mme [H] et de M. [I].

M. [I], assigné par la société Clésence, au titre de la servitude résultant de l'acte de 1985 et non de celle résultant de la division de la parcelle AT 584, est en droit de réclamer à la seule société Clésence les travaux de mise en état et d'entretien auxquels elle est tenue.

Sa demande dirigée à l'encontre de la société Clésence est donc recevable.

b- sur la nature des travaux

La société Clésence estime que la nature exacte des travaux lui incombant n'est pas précise, qu'il ne s'agit pas de restaurer à l'identique mais de réparer et entretenir.

Les photographies insérées aux constats d'huissier produits par M. [I] et au rapport de l'architecte mandaté par la société Clésence démontrent le mauvais état d'entretien du passage, l'importance des dégradations, voire sa dangerosité au regard des gaines électriques passant par le passage voûté et alimentant le fonds dominant lesquelles pendent de façon anarchique.

En tant que propriétaire de la parcelle AT n°709 (passage), M. [I] est légitime à solliciter un droit de regard sur les travaux qu'entend réaliser la société Clésence.

En l'espèce, selon les pièces produites, la mairie de Cambrai et un architecte des bâtiments de France ont été consultés.

La société Clésence a, en outre, mandaté un architecte du patrimoine comme maître d'oeuvre des travaux.

Les travaux préconisés par ces professionnels sont décrits dans la lettre adressée à M. [I] le 23 janvier 2020 soit :

- badigeon à la chaux naturelle sur les moulures

- poses d'enduit lisse à la chaux sur les parties briques

-peinture des soubassements dans le ton d'origine

-pose de faux plafond en BA 13 hydrofuge au niveau de l'ancien plafond et projection de plâtre.

Cette même lettre indique que les travaux « seront réalisés sur les parties existantes et sans toucher au caisson réalisé par vos soins dans le cadre de vos travaux. En outre nous ferons réaliser prochainement la peinture du portail dans le coloris identique après vérification des gonds et les parties basses ['] »

La nature de ces travaux est donc aujourd'hui très précise. En outre, les travaux seront effectués sous le contrôle d'un architecte du patrimoine.

S'agissant des gaines électriques, la société Clésence indique qu'une partie des câbles ne lui appartient pas de sorte qu'elle ne peut faire intervenir la société Enedis.

Elle produit un courrier du 20 janvier 2020 adressé à la société Enedis mais ne justifie pas de la réponse de celle-ci.

L'entretien du passage étant à sa charge et eu égard à la dangerosité de cette situation, il appartient en conséquence à la société Clésence, qui n'a fait aucune démarche pour remédier à la situation avant le jugement, de recueillir l'accord du ou des propriétaires des câbles afin de faire intervenir Enedis.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement dans son principe sur la condamnation de la société Clésence mais à l'infirmer sur les modalités, conformément au dispositif ci-après.

5- sur la demande de dommages intérêts de M. [I]

Aux termes de ses écritures, M. [I] ne sollicite pas l'infirmation du jugement de ce chef.

La société Clésence en demande l'infirmation.

Le tribunal a considéré que M. [I] avait subi un préjudice limité à l'aspect vétuste et au manque d'entretien du porche objet de la servitude et lui a alloué la somme de 500 euros à ce titre.

Les photographies produites aux débats démontrent un manque d'entretien certain du passage à la charge de la société Clésence.

Le jugement sera confirmé de chef.

6- sur les demandes de M. [I] au titre des frais avancées de la porte cochère, de son préjudice moral et de son préjudice financier

La société Clésence soulève l'irrecevabilité des demandes au visa de l'article 910-4 du code de procédure civile, au motif que ces demandes n'ont pas été formées dès les premières conclusions.

M. [I] n'a pas répondu au moyen soulevé dans ses dernières conclusions. Suite à la note en délibéré de la cour du 7 juin 2022, il demande de déclarer les fins de non-recevoir de la société Clésence irrecevables.

Aux termes des dispositions de l'article 789 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 : 'Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour : (...) 6° Statuer sur les fins de non-recevoir.

Lorsque la fin de non-recevoir nécessite que soit tranchée au préalable une question de fond, le juge de la mise en état statue sur cette question de fond et sur cette fin de non-recevoir. Toutefois, dans les affaires qui ne relèvent pas du juge unique ou qui ne lui sont pas attribuées, une partie peut s'y opposer. Dans ce cas, et par exception aux dispositions du premier alinéa, le juge de la mise en état renvoie l'affaire devant la formation de jugement, le cas échéant sans clore l'instruction, pour qu'elle statue sur cette question de fond et sur cette fin de non-recevoir. Il peut également ordonner ce renvoi s'il l'estime nécessaire. La décision de renvoi est une mesure d'administration judiciaire.

Le juge de la mise en état ou la formation de jugement statuent sur la question de fond et sur la fin de non-recevoir par des dispositions distinctes dans le dispositif de l'ordonnance ou du jugement. La formation de jugement statue sur la fin de non-recevoir même si elle n'estime pas nécessaire de statuer au préalable sur la question de fond. Le cas échéant, elle renvoie l'affaire devant le juge de la mise en état.

Les parties ne sont plus recevables à soulever ces fins de non-recevoir au cours de la même instance à moins qu'elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état.'

Le conseiller de la mise en état ne peut statuer qu'à compter du 1er janvier 2021 et dans des appels formés à compter du 1er janvier 2020, sur des fins de non-recevoir autres que celles prévues à l'article 914 du code de procédure civile.

L'appel ayant été interjeté le 22 janvier 2020, il appartenait à la société d'HLM Clésence de saisir le conseiller de la mise en état de sa demande d'irrecevabilité des demandes de M. [I].

La demande d'irrecevabilité sera donc déclarée irrecevable.

L'article 910-4 dudit code à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

La cour a soulevé d'office le moyen d'irrecevabilité des demandes de M. [I].

En effet, M. [I] a été débouté de sa demande au titre du remboursement des réparations de la porte cochère, mais n'a pas sollicité en appel, dans ses premières conclusions, l'infirmation du jugement de ce chef.

Les demandes au titre du préjudice moral et du préjudice financier qui n'avaient pas été formées devant le premier juge, n'apparaissent pas dans les premières conclusions d'appel du 18 août 2020.

Contrairement à ce que M. [I] affirme à titre principal dans sa réponse à la note en délibéré de la cour, ces demandes ne sont pas destinées à répliquer aux conclusions de l'appel incident de la société Clésence. De même, s'il considère, à titre subsidiaire que ces demandes ne sont pas nouvelles car visées dans ses écritures de première instance, il lui appartenait également de solliciter l'infirmation du jugement de ces chefs dans ses premières conclusions.

En outre, au visa du 3ème alinéa de l'article 954 du code de procédure civile, ces demandes ne font l'objet d'aucune motivation dans ses conclusions d'appel.

Elles seront déclarées irrecevables.

7- sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Les parties seront déboutées de leurs demandes au titre des disposition de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel.

Chacune des parties conservera la charge de ses dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

Rejette des débats la note en délibéré de M. [O] [I] en date du 4 mars 2022,

Constate que le jugement dont appel est affecté d'une erreur matérielle en ce qu'il est mentionné le nom de [O] [I] au lieu de [O] [I],

Rectifie en conséquence le dispositif et dit qu'il convient de lire M.[O] [I] au lieu de M. [O] [I],

Infirme le jugement ainsi rectifié sauf en ce qu'il a :

- condamné M. [O] [I] à procéder ou faire procéder à la dépose de l'arceau et tout obstacle à la circulation des véhicules sur la servitude de passage dans un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement, passé ce délai et à défaut d'exécution, sous astreinte de 150 euros par jour de retard pendant une période de 4 mois,

- condamné la société Clésence à payer à M. [O] [I] la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts,

- débouté les parties de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles

- laissé aux parties la charge de leurs dépens,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la servitude consentie par acte notarié du 7 mars 1985 est destiné au passage des piétons et des véhicules motorisés à deux ou quatre roues des occupants des garages du fonds dominant et à tout véhicule nécessaire à l'exploitation de l'immeuble, à l'exception de tout stationnement dans le passage,

Condamne M. [O] [I] à payer à la société d'HLM Clésence la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice de jouissance subi,

Déclare recevable la demande de M. [I] au titre des travaux d'entretien et de réparation du passage, assiette de la servitude,

Condamne la société d'HLM Clésence à procéder ou faire procéder à ses frais exclusifs, aux travaux suivants d'entretien et de réparation des porte, murs et plafond de l'ensemble de l'assiette de la servitude :

- badigeon à la chaux naturelle sur les moulures

- poses d'enduit lisse à la chaux sur les parties briques

-peinture des soubassements dans le ton d'origine

-pose de faux plafond en BA 13 hydrofuge au niveau de l'ancien plafond et projection de plâtre,

et ce sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard, quatre mois après signification du présent arrêt, pendant quatre mois,

Déboute M. [I] du surplus de sa demande à ce titre,

Déclare irrecevable la demande de la société d'HLM Clésence tendant à voir déclarer irrecevables les demandes de M. [I] au titre des frais de réparation de la porte cochère, du préjudice moral et du préjudice financier,

Déclare irrecevables les demandes de M. [I] au titre des frais de réparation de la porte cochère, du préjudice moral et du préjudice financier,

Dit n'y a voir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

Déboute les parties de leurs demandes respectives à ce titre,

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Le greffier Le président

Anaïs MillescampsCatherine Bolteau-Serre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 20/00447
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;20.00447 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award