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09/06/2022 | FRANCE | N°20/02909

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 09 juin 2022, 20/02909


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 09/06/2022





****





N° de MINUTE : 22/

N° RG 20/02909 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TDZX



Jugement n°2019001035 rendu le 02 juillet 2020 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Ordonnance (N°21/158) rendue le 10 juin 2021 par le conseiller de la mise en état de la Cour d'appel de Douai





APPELANT



Monsieur [S] [I]

né le 27 septembre 1951 à Karditsa, de nationalité française

demeurant 4 rue Jean Chemin - 59148 Flines Les Râches

représenté par Me Frédéric Leplat, avocat au barreau de Lille



INTIMÉE



La Caisse...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 09/06/2022

****

N° de MINUTE : 22/

N° RG 20/02909 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TDZX

Jugement n°2019001035 rendu le 02 juillet 2020 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Ordonnance (N°21/158) rendue le 10 juin 2021 par le conseiller de la mise en état de la Cour d'appel de Douai

APPELANT

Monsieur [S] [I]

né le 27 septembre 1951 à Karditsa, de nationalité française

demeurant 4 rue Jean Chemin - 59148 Flines Les Râches

représenté par Me Frédéric Leplat, avocat au barreau de Lille

INTIMÉE

La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France, prise en la personne de Madame [N] [Y], responsable du service juridique

ayant son siège social 10 avenue Foch - BP 369 - 59020 Lille Cédex

représentée par Me Martine Mespelaere, avocat au barreau de Lille

DÉBATS à l'audience publique du 23 février 2022 tenue par Véronique Renard magistrat chargé d'instruire le dossier qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Angie Dauthieux

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Véronique Renard, présidente de chambre

Dominique Gilles, président

Pauline Mimiague, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 09 juin 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Véronique Renard, présidente et Valérie Roelofs, greffier lors du délibéré, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 02 février 2022

****

Vu le jugement contradictoire rendu le 2 juillet 2020 par le tribunal de commerce de Lille Métropole qui a :

- déclaré l'action engagée par M. [I] à l'encontre de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France tant irrecevable que mal fondée,

En conséquence,

- débouté M. [S] [I] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France de la demande visant à l'obtention d'une indemnité de 5 000 euros pour procédure abusive et vexatoire,

- condamné M. [S] [I] à payer à la caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [S] [I] aux entiers frais et dépens, taxés et liquidés à la somme de 73,24 euros en ce qui concerne les frais de greffe,

Vu la déclaration d'appel du 25 juillet 2020 de M. [I],

Vu l'ordonnance rendue le 10 juin 2021 par le conseiller de la mise en état qui a rejeté la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir de M. [I], condamné la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France à payer à M. [I] une indemnité procédurale de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'incident,

Vu les dernières conclusions au fond remises au greffe et notifiées par voie électronique le 27 octobre 2021 par M. [I] qui demande à la cour de :

- infirmer le jugement en toute(s) ses dispositions,

- dire et juger l'action recevable,

- dire et juger que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France a commis des fautes,

En conséquence condamner la banque à payer :

- 260 000 euros pour la perte des revenus jusqu'à l'âge de la retraite,

- 174 000 euros en raison de la minoration de la retraire de M. [I],

- 440 000 euros du fait de la perte de l'activité M. [I],

- 50.000 euros au titre du préjudice moral,

Dans tous les cas,

- condamner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France à payer à Monsieur [S] [I] 10 000 euros au titre de l'article 700 CPC (code de procédure civile) ainsi qu'aux entiers dépens,

Vu les dernières conclusions au fond remises au greffe et notifiées par voie électronique le 24 janvier 2022 par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France qui demande à la cour de :

- confirmer le jugement frappé d'appel en ce qu'il a déclaré l'action engagée par M. [I] tant irrecevable que mal fondée, débouté M. [I] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions et condamné M. [I] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens,

Et statuant de nouveau,

- infirmer le jugement frappé d'appel en ce qu'il a débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France de sa demande visant à l'obtention d'une indemnité de 5 000 euros pour procédure abusive et vexatoire,

En toute hypothèse,

- débouter M. [I] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

- le condamner au paiement de la somme de 5 000 euros pour procédure abusive et vexatoire,

- le condamner aux entiers frais et dépens, ainsi qu'au paiement d'une somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'ordonnance de clôture du 2 février 2022 ;

SUR CE,

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

Il sera simplement rappelé que M. [I] exerçait dans le cadre d'une entreprise individuelle une activité d'exportation de pommes de terre vers la Grèce.

Le 11 avril 2007, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France (ci-après le Crédit Agricole ou la banque) lui a consenti une ouverture de crédit en compte courant de 50 000 euros pour une durée indéterminée.

Une deuxième ouverture de crédit de 50 000 euros lui a été consentie par la banque pour une durée de 32 mois 'par période de 12 mois renouvelable'.

Les relations se sont dégradées entre les parties et par courriers des 17 juillet et 22 septembre 2014, la banque a mis fin à l'autorisation d'ouverture de crédit à durée indéterminée de 50 000 euros 60 jours après l'envoi de son courrier.

Aucun remboursement n'étant intervenu, le Crédit Agricole a, par courrier recommandé du 11 décembre 2014, mis en demeure M. [I] de lui payer la somme de 52 272,99 euros dans un délai de 10 jours.

La liquidation judiciaire de M. [I] a été prononcée par jugement du 25 février 2015, la date provisoire de la cessation des paiements étant fixée au 17 septembre 2014 et la liquidation judiciaire clôturée par jugement du 14 juin 2017.

A la requête du ministère public, M. [I] a fait l'objet d'une mesure d'interdiction de gérer pour une durée de cinq années prononcée par le tribunal de commerce de Douai selon jugement du 4 mai 2017.

Ce dernier, considérant que le Crédit Agricole avait engagé sa responsabilité envers lui en ne dénonçant son concours bancaire que le 22 septembre 2014, lui facturant entre temps de nombreux frais, a, selon acte d'huissier du 17 janvier 2019, fait assigner la banque devant le tribunal de commerce de Lille Métropole aux fins de la voir condamner à lui payer les sommes de 260 000 euros pour perte de revenus jusqu'à l'âge de la retraite, 174 000 euros en raison de la minoration de sa retraite, 440 000 euros du fait de sa perte d'activité et 50 000 euros au titre du préjudice moral.

C'est dans ce contexte qu'est intervenue la décision dont appel.

Pour conclure à l'infirmation du jugement qui l'a débouté de l'intégralité de ses demandes, M. [I], appelant, invoque deux fautes à l'encontre de la banque, à savoir le non respect de la durée du contrat de prêt consenti à durée déterminée et le non respect de la durée du contrat de prêt consenti à durée indéterminée, et soutient qu'il existe un lien de causalité entre ces fautes et les préjudices qu'il invoque dès lors que selon lui son activité était parfaitement viable mais tributaire des crédits de la banque.

Le Crédit Agricole, reprenant manifestement ses conclusions devant le conseiller de la mise en état, conclut à l'irrecevabilité de l'action de M. [I] pour défaut de qualité à agir et de réel fondement juridique à l'action. Sur le fond, elle conteste toute faute de sa part tant dans la rupture de l'ouverture de crédit en compte courant à durée indéterminée que dans la rupture alléguée de l'ouverture de compte courant à durée déterminée dès lors, s'agissant du premier, qu'elle a accordé à M. [I] un délai de prévenance supérieur au délai légal et s'agissant du second, qu'elle n'a fait qu'user de son pouvoir discrétionnaire de ne pas renouveler le contrat à son terme conformément aux stipulations contractuelles. Elle conteste en tout état de cause tout lien de causalité entre les fautes invoquées et les préjudices allégués ainsi que l'existence même de ces préjudices, et sollicite des dommages intérêts pour procédure abusive et vexatoire.

Sur l'irrecevabilité de l'action de M. [I]

Il suffit de rappeler que selon ordonnance du 10 juin 2021, le conseiller de la mise en état a rejeté la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir de M. [I]. Cette ordonnance n'ayant pas été déférée à la cour, il n'y a pas lieu dans le cadre du présent litige de revenir sur ce point.

Enfin M.[I] indique dans ses dernières écritures agir sur le fondement des articles

L. 313-12 du code monétaire et financier ainsi que 1231-1 du code civil à titre principal, et à titre subsidiaire 1240 du même code, de sorte qu'à supposer que le défaut de fondement juridique des demandes constitue une cause d'irrecevabilité, le moyen manque en fait.

Sur la responsabilité de la banque

* au titre de l'ouverture de crédit durée déterminée

Selon M. [I], la banque lui a consenti le 1er août 2011 une autorisation de crédit en compte courant pour un montant de 50.000 euros pour une durée de 32 mois soit 2 ans et 8 mois et ce contrat est arrivé à échéance en mars 2014. L'avis de réalisation de cette ouverture de crédit du 22 août 2011 qu'il produit fait en efft état d'une date de réalisation au 1er août 2011.

La banque soutient quant à elle avoir consenti la dite ouverture de crédit à M. [I] le 22 août 2011, de sorte que le contrat serait venu à son terme le 22 avril 2014. Elle produit à cet effet un contrat non signé mais qui fait état d'une date d'émission au 19 août 2011.

Pour autant, le contrat a été consenti pour une durée de 32 mois, ce que ne conteste pas M. [I] et plus précisément pour '32 mois par période de 12 mois renouvelable' selon le courrier de la banque du 22 août 2011, ce qui ne signifie pas une durée de '32 mois renouvelable pour une période de 12 mois' et ne modifie pas la durée contractuellement fixée.

S'agissant d'un crédit consenti pour une durée déterminée, il a donc pris fin en mars ou en avril 2014 et la banque n'a commis aucune faute en décidant de ne pas le renouveler à son terme.

L'action en responsabilité de M. [I] contre la banque ne peut donc prospérer de ce chef.

* au titre de l'ouverture de crédit durée indéterminée

Le crédit Agricole a consenti le 4 avril 2007 une ouverture de crédit en compte courant de 50 000 euros à durée indéterminée ayant pour but de financer la trésorerie de l'entreprise de M. [I].

Ce dernier soutient à ce titre que la liquidation judiciaire dont il a fait l'objet a été la conséquence directe de la rupture du crédit par la banque qui dès lors revêt un caractère abusif.

Par courrier du 17 juillet 2014 présenté le 22 juillet suivant, réitéré par courrier du 22 septembre 2014 non réclamé, la banque a informé son client que conformément aux articles L 313-12 et D 313-14-1du code monétaire et financier, le concours prendrait fin à l'expiration d'un délai de 60 jours à partir de la date d'envoi de son courrier. Ce délai expirait donc a minima le 17 septembre 2014 et au maximum le 22 novembre 2014 alors que le contrat a été rompu selon courrier du 11 décembre 2014 réceptionné par M. [I] le 17 décembre suivant.

Il n'est donc démontré aucune faute de la banque qui a accordé un délai de prévenance supérieur à 60 jours.

Enfin s'agissant des commissions d'intervention prélevées en mai 2015, celles-ci concernent, à la lecture des relevés produits par M. [I], le compte support de l'ouverture de crédit à durée déterminée et non pas l'ouverture de crédit à durée indéterminée. Ce grief n'est donc pas plus de nature à engager la responsabilité de la banque.

En définitive, les demandes de M. [I] infondées doivent être rejetées et le jugement confirmé de ce chef.

Sur la demande incidente en dommages intérêts

L'article 546 du code de procédure civile dispose que le droit d'appel est un droit qui appartient à toute partie qui y a intérêt, sous réserve toutefois de l'abus et fait d'intenter une action n'est pas en soi générateur de responsabilité. En l'espèce, aucun des moyens allégués par la banque qui se contente d'affirmer que la procédure est abusive de par les montants qui sont réclamés, et vexatoire dès lors qu'elle n'a commis aucune des fautes qui lui sont reprochées, ne caractérise aucun abus de droit de la part de M. [I]. En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le Crédit Agricole de sa demande de dommages intérêts.

Sur les autres demandes

M. [I] qui succombe sera condamné aux entiers dépens.

Enfin, la banque a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge. Il y a lieu en conséquence de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement rendu le 2 juillet 2020 par le tribunal de commerce de Lille Métropole en ce qu'il a débouté M. [S] [I] de l'intégralité de ses demandes, débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France de sa demande de dommages intérêts pour procédure abusive et vexatoire et condamné M. [S] [I] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France la somme de 2 000,00 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Y ajoutant,

Condamne M. [I] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France la somme de 3 000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [I] aux entiers dépens d'appel.

Le greffierLa présidente

Valérie RoelofsVéronique Renard


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 20/02909
Date de la décision : 09/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-09;20.02909 ?
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