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19/05/2022 | FRANCE | N°21/01015

France | France, Cour d'appel de Douai, Troisieme chambre, 19 mai 2022, 21/01015


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



TROISIEME CHAMBRE



ARRÊT DU 19/05/2022





****





N° de MINUTE : 22/222

N° RG 21/01015 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TOOC



Jugement (N° 19/02532) rendu le 01 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Lille





APPELANT



Monsieur [U] [V] [K]

né le [Date naissance 3] 1971 à [Localité 9]

de nationalité française

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Représenté par Me Etienne Chevalier, avocat au barreau de Lille et Me Lionel Djeatsa Fouematio, avocat au barreau de Grenoble



INTIMÉE



Madame [C] [I]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 5]



Repr...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 19/05/2022

****

N° de MINUTE : 22/222

N° RG 21/01015 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TOOC

Jugement (N° 19/02532) rendu le 01 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Lille

APPELANT

Monsieur [U] [V] [K]

né le [Date naissance 3] 1971 à [Localité 9]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Etienne Chevalier, avocat au barreau de Lille et Me Lionel Djeatsa Fouematio, avocat au barreau de Grenoble

INTIMÉE

Madame [C] [I]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Catherine Camus-Demailly, avocat au barreau de Douai constituée aux lieu et place de Me Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai et Me Paul-Albert Iweins, avocat au barreau de Paris substitué par Me Chereau, avocat au barreau de Paris

DÉBATS à l'audience publique du 03 mars 2022 tenue par Danielle Thébaud magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Fabienne Dufossé

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Guillaume Salomon, président de chambre

Claire Bertin, conseiller

Danielle Thébaud, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 19 mai 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Guillaume Salomon, président et Fabienne Dufossé, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

OBSERVATIONS DU MINISTERE PUBLIC : 21 février 2022

Communiquées aux parties le 24 février 2022

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 3 mars 2022

****

Exposé du litige

1. Les faits et la procédure antérieure :

Le 22 février 2019, Mme [C] [I], huissier de justice exerçant au sein de la SCP Darras [I] Martin, à [Localité 6], a signifié à M. [U] [V] [K] une contrainte à la demande de l'Urssaf (ou la CGSS), prise en la personne de son directeur en exercice, et élisant domicile à [Adresse 7], agissant en vertu de l'article 15 de la loi n°2017-1836 du 30 décembre 2017 qui acte la suppression juridique du RSI à compter du 1er janvier 2018 et le transfert du recouvrement des cotisations et contributions sociales personnelles des travailleurs indépendants aux Urssaf (ou les CGSS dans les DOM), pour un montant, au principal, de 6 368 euros.

Par acte intitulé « déclaration en inscription en faux à titre principal » déposé au service d'accueil unique du justiciable du tribunal de grande instance de Lille le 4 mars 2019, M. [V] [K] a entendu déclarer s'inscrire en faux contre la signification de contrainte du 22 février 2019.

Par exploit d'huissier en date du 19 mars 2019, M. [V] [K] a fait assigner Mme [I] devant le tribunal de Lille en inscription de faux de la signification de la contrainte.

2. Le jugement dont appel :

Par jugement du 1er décembre2020, le tribunal judiciaire de Lille a :

- débouté Mme [I] de sa demande tendant à l'irrecevabilité de l'action en inscription de faux de M. [V] [K] ,

- déclaré M. [V] [K] recevable en son action d'inscription de faux,

- l'a débouté de sa demande principale en inscription de faux,

- l'a condamné au paiement d'une amende civile 250 euros,

- l'a condamné aux entiers dépens,

- l'a condamné à payer à Mme [I] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes demandes, fins et prétentions, plus amples ou contraires, des parties.

3. La déclaration d'appel :

Par déclaration au greffe du 12 février 2021, M. [V] [K] a interjeté appel partiel du jugement querellé en ce qu'il :

- l'a débouté de sa demande principale en inscription de faux,

- l'a condamné :

- au paiement d'une amende civile d'un montant de 250 euros,

- aux entiers dépens,

- à payer à Mme [I] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

4. Les prétentions et moyens des parties :

Dans ses dernières conclusions notifiées le 10 mai 2021, M. [V] [K] sollicite l'infirmation du jugement querellé. Il demande à la cour de :

- déclarer recevable et fondé l'appel qu'il a interjeté,

Y faisant droit et statuant à nouveau,

- dire et juger que l'acte de signification du 22 février 2019 constitue un faux,

- déclarer nul et de nul effet la signification de la contrainte du 22 février 2019,

- débouter Me [I] de ses demandes, fins et conclusions,

- la condamner à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance.

Au soutien de ses demandes il a fait valoir que :

- en traitant la question posée de l'absence de mention de la forme juridique de la personne morale, sous le prisme des nullités de forme, le tribunal a commis une erreur d'appréciation à un double égard :

* d'abord parce que l'obligation de la mention de la forme juridique de l'Urssaf est intrinsèque à son existence légale, car c'est l'article 1145 du code civil qu'il aurait fallu questionner,

* ensuite parce que même si on devait admettre que l'absence de mention de la forme juridique de l'Urssaf ne soit passible que d'une nullité de forme, susceptible d'être couverte, le tribunal judiciaire en ne constatant pas si cette irrégularité a été couverte l'a laissé subsister,

- au visa de l'article 648 du code de procédure civile, l'huissier de justice est tenu de mentionner, dans l'acte authentique qu'il dresse, la forme juridique d'une personne morale, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement, que l'acte d'un huissier de justice vaut jusqu'à inscription de faux ; que prétendre que "l'Urssaf" serait sa forme juridique, est la preuve rapportée de l'altération de la vérité telle que prévue par l'article 441-1 du code pénale ;

- en l'absence de forme juridique de l'Urssaf, il appartient à l'huissier de justice de s'assurer de la réalité de sa capacité juridique et de s'assurer de la validité des formalités de sa constitution sous peine de faire un faux au sens de l'article 441-1 du code pénal ;

- les autorités publiques ne s'accordent pas sur la forme juridique de I'Urssaf, qui est dépourvue de capacité juridique ;

- au visa des articles 9 et 23 de l'ordonnance du 4 octobre 1945, de l'article 1 et 36 du décret de 1960 et de l'article L. 40 devenu L. 216-1 du code de la sécurité sociale, les unions de recouvrement doivent considérées être des associations régies par le code de la mutualité ;

- les caisses primaires de sécurité sociale, qui sont membres des unions de recouvrement, ont été créées en l'absence de base légale et en conséquence, les unions de recouvrement, et notamment l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais, ne sont pas valablement créées. ;

- il ne s'inscrit pas dans un mouvement concerté contre les Urssaf, mais dans une volonté de soumettre ses arguments à une juridiction ; il ne conteste d'ailleurs pas l'obligation de s'affilier pour cotiser au titre de la sécurité sociale mais seulement le fait qu'une entité dépourvue d'existence légale exerce une activité de droit, au point d'émettre des titres exécutoires.

Dans ses conclusions notifiées le 9 août 2021, Mme [I] demande à la cour sur le fondement des articles L. 213-1 et L. 151-1 du Code de la sécurité sociale, de la loi n°2017-1836 du 30 décembre 2017, de l'article 32-1 du Code de procédure civile, de :

=$gt; A titre principal : infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille le 1er décembre 2020 en ce qu'il :

- l'a déboutée de sa demande tendant à l'irrecevabilité de l'action en inscription de faux ;

- a déclaré M. [V] [K] recevable en son action d'inscription de faux ;

Statuant à nouveau, le déclarer irrecevable en son action d'inscription de faux

=$gt; A titre subsidiaire : confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [V] [K] de l'intégralité de ses demandes ;

=$gt; En tout état de cause :

Statuant à nouveau,

- condamner M. [V] [K] à lui verser des dommages et intérêts de 2 000 euros au titre du caractère abusif de la procédure ;

- confirmer le jugement en ce que M. [V] [K] a été condamné à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, y ajoutant la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

- confirmer le jugement en ce qu'il l'a condamné aux entiers dépens de première instance, y ajoutant les entiers dépens d'appel ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté toutes ses demandes, fins et prétentions, plus amples ou contraires.

Au soutien de ses prétentions, Mme [I] fait valoir que :

La procédure en inscription de faux est irrecevable au motif que :

- l'acte de signification litigieux respecte les dispositions de l'article 648 du code de procédure civile ;

- font ainsi foi jusqu'à inscription de faux les énonciations relatant des circonstances que l'huissier a pour fonction de certifier : date de l'acte, date de la délivrance de la copie, formalités qui l'accompagnent telles que dépôt en mairie, diligences entreprises par l'huissier de justice, avis de passage ; mais la mention concernant la forme juridique du mandant ne fait pas foi jusqu'à inscription de faux ;

L'acte de signification litigieux est valable :

- au visa des articles L. 231-1 et L. 151-1 du code de la sécurité sociale, ainsi que de l'article 36 de l'ordonnance du 4 octobre 1945, les Urssaf ont été créées par la loi avec une personnalité morale ; elles tiennent leur capacité et leur qualité à agir de la loi ; elles ne sont pas tenues de produire leurs statuts ; il n'est pas besoin de remonter jusqu'à la première Urssaf pour s'assurer de la validité des obligations de constitution de l' Urssaf ;

- elle n'était pas tenue de s'astreindre aux vérifications que M. [V] [K] lui reproche de ne pas avoir effectuées ; aucun texte ne fait obligation à l'huissier de justice de contrôler la légalité de la constitution de la personne morale de son mandant, qui est un fait extrinsèque que l'huissier de justice n'est pas capable de vérifier dans le cadre de sa mission de signification d'une contrainte et qui échappe ainsi à la procédure d'inscription de faux ;

- les griefs formulés à son encontre sont vagues et imprécis ; et s'adressent en réalité à l'Urssaf du Nord Pas-de-Calais, à laquelle il est reproché de n'avoir pas indiqué sa forme juridique, ni produit ses statuts de création datés ;

- l'action de M. [V] [K] s'inscrit dans un mouvement d'actions en justice similaires visant de nombreuses études d'huissier en France qui a pour objectif de retarder le paiement de la dette aux Urssaf.

Par conclusions du 21 février 2022, le procureur général à sollicité la confirmation de la décision dont appel.

Pour un plus ample exposé des moyens de chacune des parties, il y a lieu de se référer aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 mars 2022.

Motifs

A titre liminaire, en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les «'dire et juger'» et les «'constater'» qui ne sont pas des prétentions en ce qu'ils ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert dès lors qu'ils s'analysent en réalité comme le rappel des moyens invoqués.

Sur la recevabilité de l'action en inscription de faux

L'article 122 du code de procédure civile prévoit que constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Aux termes de l'article 71 du code de procédure civile, constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen au fond du droit, la prétention de l'adversaire.

En l'espèce, Mme [I] soutient que l'action de M. [V] [K] serait irrecevable au motif que la procédure d'inscription de faux ne s'applique qu'à certaines énonciations des actes d'huissier, et aux déclarations dont ce dernier doit vérifier l'exactitude, et que la mention concernant la forme juridique du mandant ne fait pas foi jusqu'à inscription de faux.

Le moyen soulevé par Mme [I] tend à démontrer que la demande de M. [V] [K] n'est pas fondée au motif que la mention concernant la forme juridique du mandant ne fait pas foi jusqu'à inscription de faux. Elle constitue donc une défense au fond nécessitant un examen au fond des mentions susceptibles d'inscription de faux et non une fin de non recevoir.

Il convient de rejeter ce moyen et de déclarer M. [V] [K] recevable en son action.

Le jugement dont appel sera confirmé sur ce point.

Sur l'action en inscription de faux

L'article 1371 du code civil dispose que l'acte authentique fait foi jusqu'à inscription de faux de ce que l'officier public dit avoir personnellement accompli ou constaté.

L'article 648 du code de procédure civile, dispose que :"Tout acte d'huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs :

1. Sa date ;

2. a) Si le requérant est une personne physique :ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;

b) si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui le représente légalement ;

3. Les nom, prénoms, demeure et signature de l'huissier de justice ;

4. Si l'acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire, ou, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination et son siège social.

Ces mentions sont prescrites à peine de nullité."

A titre liminaire, il convient de relever que les prescriptions posées par l'article 648 du code de procédure civile, et notamment l'identification complète d'une personne morale, sont sanctionnées par la nullité pour vice de forme sous réserve que le destinataire de l'acte établit que le vice lui cause grief. Ainsi, l'omission de la mention de la forme d'une personne morale dans l'exploit d'huissier ne constitue pas, en soi, un faux dans un acte authentique.

Il appartient à celui qui s'est inscrit en faux contre un acte authentique d'établir l'inexactitude des énonciation litigieuse qu'il comporte.

Il est constant que l'acte authentique fait foi jusqu'à inscription de faux uniquement des faits que l'officier public y a énoncés comme les ayant accomplis lui-même ou comme s'étant passés en sa présence dans l'exercice de ses fonctions, ou de l'inobservation des formalités qu'il énonce. La fausseté d'un acte dressé par huissier doit s'apprécier au regard de la véracité des énonciations qu'il contient. Ce qui est établi dès lors qu'il existe une discordance entre les énonciations de l'acte et la réalité. A l'inverse, tous les autres faits, qui relèvent des mentions extrinsèques que l'huissier de justice ne peut pas vérifier, n'ont pas la force probante d'un acte authentique et peuvent être combattus en dehors d'une procédure d'inscription de faux.

En l'espèce, M. [V] [K] soutient que la signification de la contrainte établie par Mme [I] le 22 février 2019, serait un faux car la forme sociale de I'Urssaf, demandeur à la contrainte n'est pas indiquée ; que prétendre que l'Urssaf est une forme juridique est constitutif d'un faux, d'une altération de la vérité en application de l'article 441-1 du code pénal ; que l'Urssaf est dépourvue de personnalité morale et donc de capacité à agir.

Tout d'abord, il sera rappelé que l'article 441-1 du code pénal, qui définit l'infraction de faux en écriture publique n'est pas applicable en l'espèce, dans la mesure où, la qualification de faux en matière civile ne suppose pas que l'officier public instrumentaire ait eu conscience du caractère inexact des constatations arguées de faux et ne suppose pas davantage l'existence d'un préjudice résultant de ce caractère inexact.

L'acte de signification litigieux mentionne :

« A LA DEMANDE DE :

L'Urssaf (ou la CGSS) prise en la personne de son Directeur en exercice et élisant domicile à [Adresse 8], agissant en vertu de l'article 15 de la loi n°2017-1836 du 30 décembre 2017 qui acte la suppression juridique du RSI à compter du 1er janvier 2018 et le transfert du recouvrement des cotisations et contributions sociales personnelles des travailleurs indépendants aux Urssaf (ou les CGSS dans les DOM.) »

La cour constate qu'il n'est pas contesté que l'Urssaf a mandaté Mme [I] dans le cadre de la signification d'une contrainte pour recouvrir des cotisations impayées. Aussi, sur ce point, Mme [I] n'a pas travesti la réalité des faits qu'elle a pu constater en sa qualité d'huissier de justice en délivrant une contrainte au nom de I'Urssaf.

S'agissant de la forme sociale de l'Urssaf, il résulte des dispositions des articles L.'111-1, R.'111-2-1, L.'111-2-2'et de L.'213-1'du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de la loi précitée n°2017-1836'du 30'décembre'2017, que les Urssaf sont des organismes légaux de sécurité sociale qui disposent de la personnalité morale et qui tiennent de la loi, dès leur création par l'arrêté prévu par l'article D. 213-1'du même code, la capacité et la qualité pour agir pour l'exécution des missions qui leur sont confiées, ce qui les exonère, par ailleurs, de toute obligation de déposer leurs statuts en préfecture et de justifier, devant les juridictions, de leur forme juridique et de leur capacité à ester en justice.

Ces unions sont habilitées légalement au recouvrement des cotisations et à assurer le contentieux qui en découle. Elles revêtent le caractère d'un organisme chargé d'une mission de service public placé sous la tutelle de l'État ou sous son contrôle, ainsi que cela résulte de la décision n°'90-285'DC du 28'décembre'1990'du Conseil constitutionnel. Les dispositions qui régissent le fonctionnement de ces unions sont issues du code de la sécurité sociale et non du code de la mutualité comme le soutient M. [V] [K]. Elles relèvent donc exclusivement du code de la sécurité sociale et non du code de la mutualité, dont le rôle est défini par l'article L.111-1'du code de la mutualité, et complémentaire du régime légal d'assurance maladie et maternité auquel les mutuelles peuvent participer.

Dès lors l'acte de signification litigieux n'a pas à mentionner en plus, la forme de la personne morale, celle-ci n'étant ni une société, ni une association, ni une mutuelle, ni une institution de prévoyance au sens des textes invoqués.

Par ailleurs, les premiers juges ont retenu avec pertinence que si l'article 648 du code de procédure civile impose la mention de la forme de la personne morale dans un acte d'huissier sous peine de nullité de l'acte pour vice de forme, aucun texte ne fait obligation à l'huissier de justice de contrôler la légalité de la constitution de son mandant dans le cadre d'une signification d'un acte juridique.

En tout état de cause, la légalité de la constitution d'une personne morale est un fait extrinsèque que l'huissier de justice n'est pas capable de vérifier dans le cadre de sa mission de signification d'une contrainte et qui échappe ainsi à la procédure d'inscription de faux. En effet, il sera rappelé que font foi jusqu'à inscription de faux les faits que l'officier public y a énoncés comme les ayant accomplis lui- même ou comme s'étant passés en sa présence dans l'exercice de ses fonctions.

Ce moyen de droit tiré de l'illégalité de la constitution de I'Urssaf, et donc de sa capacité à agir en justice, sera écarté en ce qu'il ne peut fonder une action en inscription de faux.

M. [V] [K], échoue à établir l'inexactitude des énonciations portées par Me [I] dans la signification de la contrainte qui lui a été faite pour un montant, au principal, de 6368 euros, au bénéfice de I'Urssaf.

Dès lors sa demande en inscription de faux sera rejetée et le jugement querellé confirmé sur ce point.

Sur la demande en indemnisation au titre de la procédure abusive

L'exercice d'une action en justice ne peut constituer un abus de droit que dans des circonstances particulières le rendant fautif. En effet, l'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol.

En l'espèce, M. [V] [K] a intenté une procédure contentieuse afin de retarder le paiement de ses cotisations, qu'il ne conteste d'ailleurs pas, à l'instar des différentes décisions produites aux débats.

Cette attitude empreinte d'une parfaite mauvaise foi traduit sans conteste un abus de procédure qui, a obligé Mme [I] à assurer sa représentation en justice et, a porté atteinte à la probité de cette dernière, officier public, en lui reprochant d'avoir effectué un faux, ce qui lui a nécessairement causé un préjudice particulier.

M. [V] [K] sera donc condamné à lui verser la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur l'amende civile

Selon l'article 305 du code de procédure civile, le demandeur en faux qui succombe est condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.

M. [V] [K], demandeur en faux succombant, sera condamné à une amende civile d'un montant de 1 000 euros compte tenu des moyens de fait et de droit inopérants au soutien d'une demande principale en inscription de faux.

La décision querellée sera infirmée sur ce point.

Sur les demandes accessoires

Le sens du présent arrêt conduit :

- d'une part à confirmer le jugement attaqué sur ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile,

- et d'autre part, à condamner M. [V] [K] aux entiers dépens d'appel, et à payer à Me [I] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure d'appel.

Par ces motifs,

La cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 1er décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Lille, sauf en ce qu'il a condamné M. [U] [V] [K] au paiement d'une amende civile de 250 euros,

Statuant à nouveau de ce chef du jugement critiqué et y ajoutant,

Condamne M. [U] [V] [K] à payer à Mme [C] [I] une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamne M. [U] [V] [K] au paiement d'une amende civile d'un montant de 1 000 euros,

Condamne M. [U] [V] [K] aux dépens d'appel,

Le condamne en outre à payer à Mme [C] [I] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

Ordonne la communication de la présente décision au procureur général de la cour d'appel de Douai, aux fins de recouvrement de l'amende civile.

Le GreffierLe Président

F. DufosséG. Salomon


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Troisieme chambre
Numéro d'arrêt : 21/01015
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;21.01015 ?
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