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12/05/2022 | FRANCE | N°21/05824

France | France, Cour d'appel de Douai, Troisieme chambre, 12 mai 2022, 21/05824


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



TROISIEME CHAMBRE



ARRÊT DU 12/05/2022





****





N° de MINUTE : 22/213

N° RG 21/05824 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T6WX



Ordonnance (N° ) rendue le 19 octobre 2021 par le juge de la mise en état de Bethune





APPELANTE



Société Macif (la dénomintaion exacte est Société d'Assurance Mutuelle à Cotisations Variables Mutuelle Assurance des Commercants et Industriels

de France et des Cadres et Salaries de l'Industrie et du Commerce) prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 9]



Représ...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 12/05/2022

****

N° de MINUTE : 22/213

N° RG 21/05824 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T6WX

Ordonnance (N° ) rendue le 19 octobre 2021 par le juge de la mise en état de Bethune

APPELANTE

Société Macif (la dénomintaion exacte est Société d'Assurance Mutuelle à Cotisations Variables Mutuelle Assurance des Commercants et Industriels de France et des Cadres et Salaries de l'Industrie et du Commerce) prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentée par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai et Me Garance Geoffroy, avocat au barreau de Bethune

INTIMÉS

Monsieur [K] [C]

né le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 10]

de nationalité française

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représenté par Me Nicolas Pelletier, avocat au barreau de Lille

Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Lille Douai prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 6]

A laquelle la déclaration d'appel a été signifiée le 9 décembre 2021 à personne habilitée

SAS Valauto [Localité 7] prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés

en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 7]

A laquelle la déclaration d'appel a été signifiée le 9 décembre 2021 à personne habilitée

DÉBATS à l'audience publique du 30 mars 2022 tenue par Guillaume Salomon magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Guillaume Salomon, président de chambre

Claire Bertin, conseiller

Danielle Thébaud, conseiller

ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 mai 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Guillaume Salomon, président et Harmony Poyteau, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 21 mars 2022

****

EXPOSE DU LITIGE

1. Les faits et la procédure antérieure :

Le 20 septembre 2016, M. [K] [C] a été impliqué dans un accident de la circulation.

M. [C] a déclaré un sinistre auprès de la Macif, son assureur, aux fins d'indemnisation de préjudices corporels et matériels qu'il a indiqué résulter de cet accident.

Par jugement du 28 mars 2019, le tribunal correctionnel d'Arras a notamment condamné M. [C] pour avoir commis le 20 septembre 2016 (i) des blessures involontaires avec incapacité n'excédant pas trois mois par conducteur de véhicule terrestre à moteur, infraction commise avec au moins deux circonstances aggravantes, (ii) un refus de se soumettre aux vérifications destinées à établir l'état alcoolique et (iii) un délit de fuite.

Par actes du 26 et 28 août 2020, M. [C] a assigné devant le tribunal judiciaire de Béthune la Macif, la caisse primaire d'assurance maladie de Lille Douai et la SAS Valauto [Localité 7] aux fins notamment d'ordonner une expertise médicale pour apprécier l'état séquellaire de ses blessures et de condamner la Macif à l'indemniser des conséquences dommageables de cet accident.

La Macif s'est opposée par voie d'incident à cette demande en invoquant l'acquisition de la prescription biennale.

2. L'ordonnance dont appel :

Par ordonnance d'incident rendue le 19 octobre 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Béthune a notamment :

'dit que le délai biennal de prescription est inopposable à M. [C] ;

'rejeté en conséquence la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la Macif ;

'déclaré recevable l'action de M. [C] ;

'rejeté la demande de production sous astreinte du certificat médical du centre 'hospitalier de [Localité 10] formulée par la Macif ;

'condamné la Macif à payer à M. [C] la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

'condamné la Macif aux dépens de l'incident.

3. La déclaration d'appel :

Par déclaration du 18 novembre 2021, la Macif a formé appel de l'intégralité du dispositif de cette ordonnance d'incident.

4. Les prétentions et moyens des parties sur l'incident :

4.1.Aux termes de ses dernières conclusions d'incident signifiées le 15 décembre

2021, la Macif demande à la cour de':

- infirmer l'ordonnance entreprise ;

Statuant à nouveau,

- constater que l'accident s'est déroulé le 20 septembre 2016 ;

- constater que l'assignation a été délivrée le 26 août 2020 ;

- constater qu'aucun acte suspensif ou interruptif d'instance n'a été effectué ;

En conséquence,

- constater et juger prescrite l'action engagée par M. [C] ;

- le condamner en tous les frais et dépens ;

A titre subsidiaire,

- enjoindre à M. [C] de verser aux débats l'original du certificat du centre hospitalier de [Localité 10] en date du 21 septembre 2016, sous astreinte de 50 euros par jour de retard dans les 15 jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir que :

- le contrat d'assurance automobile de 2015 est produit ainsi qu'un courriel du 11 novembre 2016 démontrant que M. [C] a bien pris connaissance des conditions générales de la police et notamment des stipulations relatives à la prescription figurant en page 62 du contrat et qui sont conformes aux dispositions des articles L. 114-1 et suivant du code des assurances et à l'article R. 112-1 du même code ;

- aucun acte interruptif de prescription n'est intervenu, de sorte que l'assignation est intervenue après l'expiration du délai biennal ;

- la nullité du contrat pour fausse déclaration intentionnelle sera soulevée au fond si la cour ne fait pas droit à la fin de non-recevoir invoquée dans le cadre du présent incident : en effet, M. [C] a produit un certificat médical qui semble falsifié, dès lors que des mentions sur les circonstances de l'accident y ont été blanchies, de sorte qu'à titre subsidiaire, il convient de le condamner à produire sous astreinte l'original de cette pièce médicale.

4.2.Aux termes de ses conclusions d'incident notifiées le 12 janvier 2022, M.

[C] demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance d'incident rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Béthune le 19 octobre 2021 en toutes ses dispositions ;

- renvoyer à la mise en état du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Béthune, à l'affaire inscrite au rôle général sous le numéro 20/03458 ;

- condamner la Macif au paiement d'une indemnité à hauteur de 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

A l'appui de ses prétentions, il fait valoir que :

- la prescription biennale lui est inopposable, dès lors qu'il appartient à la Macif de produire les conditions particulières de la police d'assurance qu'il aurait signées afin de démontrer qu'elle a respecté son obligation d'information ; à cet égard, le courriel produit par la Macif est postérieur à l'accident et les conditions générales produites ne sont pas celles signées et communiquées à M. [C] dès lors que les stipulations y figurant et relatives à la prescription reprennent la formulation de l'article L. 114-2 du code des assurances, dans sa version en vigueur depuis le 1er avril 2018 : il ne peut donc pas s'agir des conditions générales de la police souscrite avant le sinistre, de sorte que la Macif ne prouve pas lui avoir communiqué des conditions comportant les mentions exigées à l'article R. 112-1 du même code ;

- la demande de communication du certificat médical doit être rejetée, dès lors que la falsification de ce document n'est pas établie par la Macif, qui invoque à cet égard une pièce illisible et insusceptible de rapporter la preuve d'un trucage.

Pour un plus ample exposé des moyens de chacune des parties, il y a lieu de se référer aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la prescription de l'action dérivant du contrat d'assurance

Sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai biennal de prescription prévu par l'article L. 114-1 du code des assurances, l'article R. 112-1 du même code oblige l'assureur à rappeler dans le contrat d'assurance les dispositions des titres I et II du livre I de la partie législative de ce code concernant la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance et donc :

- les causes d'interruption, y compris ordinaires, de la prescription biennale prévues à l'article L. 114-2 du même code ;

- les différents points de départ du délai de la prescription biennale tels qu'ils sont cités à l'article L. 114-1 du même code.

La charge de la preuve d'une telle obligation d'information pèse sur l'assureur.

En l'espèce, alors qu'il n'est pas contesté que la Macif assurait M. [C] à la date du sinistre, ce dernier conteste toutefois que l'assureur lui ait communiqué la police d'assurance applicable au sinistre survenu le 20 septembre 2016.

La Macif produit en cause d'appel un courriel daté du 11 novembre 2016 dans lequel M. [C] indique avoir reçu des «'nouvelles conditions d'assurance'». La Macif produit également des conditions générales, indiquant que ce sont celles qui étaient applicables au moment du sinistre.

Pour autant, la Macif ne produit en premier lieu aucune conditions particulières signées permettant de déterminer les conditions générales applicables au sinistre et démontrant que M. [C] a bien eu connaissance de stipulations contractuelles relatives à la prescription conformes aux dispositions des articles L. 114-1 et suivant et R. 112-1 du code des assurances.

En second lieu, alors que la Macif prétend que les conditions générales qu'elle produit désormais devant la cour datent de 2015, une série d'éléments concordants invalide une telle allégation :

- d'une part, le courriel dont elle se prévaut pour démontrer la connaissance qu'aurait eu M. [C] des conditions générales en novembre 2016, tandis que M. [C] indique dans ce courriel qu'il s'agit de «'nouvelles'» conditions générales, ce qui tend à démontrer que les conditions générales auxquelles il fait référence dans ce courriel ne sont pas celles applicables au sinistre ;

- d'autre part, la connaissance par l'assuré des conditions générales comportant les mentions sur la prescription biennale doit être contemporaine de la conclusion du contrat, ou au moins être antérieure à la survenance du sinistre : à cet égard, la Macif n'établit pas avoir informé son assuré avant le 20 septembre 2016.

- enfin, alors que les conditions générales produites par la Macif datent d'avril 2015, aucun élément ne permet de s'assurer qu'il s'agit de la version applicable au contrat conclu par M. [C] et applicable au sinistre, dès lors que la date de conclusion de ce contrat d'assurance n'est elle-même pas connue.

Faute d'avoir produit des conditions générales signées par l'assuré ou les conditions particulières permettant de s'assurer de la version des conditions générales applicables, la Macif n'établit pas avoir respecté les dispositions de l'article R. 112-1 précité, de sorte que la prescription est inopposable à M. [C].

L'ordonnance critiquée est par conséquent confirmée en ce qu'elle a déclaré recevable l'action diligentée par M. [C].

Sur la demande de communication de l'original du certificat médical

La Macif verse aux débats une pièce médicale datant du 21 septembre 2016 rédigée par le docteur [I] [O] exerçant au centre hospitalier de [Localité 10].

Cette pièce médicale indique que M. [C] s'est présenté au centre hospitalier le lendemain du sinistre.

Néanmoins, la cour constate que des parties du contre-rendu médical ont été effacées au blanco, partiellement pour ce qui concerne «'La conclusion médicale'» et entièrement s'agissant de la partie relative à l'«'Histoire de la maladie'».

Dès lors que la Macif envisage de se prévaloir de la nullité du contrat pour fausse déclaration intentionnelle devant le tribunal judiciaire, il convient d'ordonner à M. [C] de communiquer l'original de cette pièce dans un délai de 30 jours à compter de la signification du présent arrêt, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai.

L'ordonnance sera ainsi infirmée de ce chef.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer l'ordonnance querellée sur les dépens et les frais irrépétibles de l'incident en première instance.

La cour précise à cet égard que le rejet de la demande de production sous astreinte du certificat médical du centre hospitalier de [Localité 10] en première instance était justifiée par le fait que la Macif n'avait pas produit ledit certificat.

M. [C] qui succombe en cause d'appel sera en revanche condamné aux entiers dépens de l'incident au titre de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par mise à disposition au greffe, publiquement et contradictoirement,

Confirme l'ordonnance rendue le 19 octobre 2021 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Béthune sauf en ce qu'elle a rejeté la demande de production sous astreinte du certificat médical du centre hospitalier de [Localité 10] formulée par la Macif ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Ordonne à M. [K] [C] de communiquer à la Macif l'original de la pièce médicale établie le 21 septembre 2016 par le docteur [I] [O], exerçant au centre hospitalier de [Localité 10] et qui était adressée au docteur [H] et ce dans un délai de 30 jours à compter de la signification de la présente ordonnance sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai ;

Condamne M. [K] [F] entiers dépens de l'incident au titre de la procédure d'appel.

La GreffièreLe Président

Harmony PoyteauGuillaume Salomon


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Troisieme chambre
Numéro d'arrêt : 21/05824
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;21.05824 ?
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