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05/05/2022 | FRANCE | N°22/00761

France | France, Cour d'appel de Douai, Etrangers, 05 mai 2022, 22/00761


COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles





N° RG 22/00761 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UIJC

N° de Minute :







Ordonnance du jeudi 05 mai 2022





République Française

Au nom du Peuple Français





APPELANT



M. [G] [G]

né le 15 Septembre 1972 à [Localité 1] - BULGARIE

de nationalité Bulgare

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]

dûment avisé, comparant en personne



assisté de Me Alban

DEBERDT, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d'office et de M. [N] [M] interprète en langue bulgare, tout au long de la procédure devant la cour, serment préalablement prêté ce jour



INTIMÉ

...

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles

N° RG 22/00761 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UIJC

N° de Minute :

Ordonnance du jeudi 05 mai 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

APPELANT

M. [G] [G]

né le 15 Septembre 1972 à [Localité 1] - BULGARIE

de nationalité Bulgare

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]

dûment avisé, comparant en personne

assisté de Me Alban DEBERDT, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d'office et de M. [N] [M] interprète en langue bulgare, tout au long de la procédure devant la cour, serment préalablement prêté ce jour

INTIMÉ

M. LE PREFET DU NORD

dûment avisé, absent non représenté

M. le procureur général : non comparant

MAGISTRAT(E) DELEGUE(E) : Bertrand DUEZ, conseiller à la cour d'appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché

assisté(e) de Véronique THÉRY, greffière

DÉBATS : à l'audience publique du jeudi 05 mai 2022 à 08 h 30

ORDONNANCE : prononcée publiquement à Douai, le jeudi 05 mai 2022 à

Le premier président ou son délégué,

Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu l'ordonnance rendue le 04 mai 2022 par le Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER prolongeant la rétention administrative de M. [G] [G] ;

Vu l'appel interjeté par M. [G] [G] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 04 mai 2022 ;

Vu l'audition des parties ;

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 29 avril 2022 à 19h15 à [Localité 3] (4 cantons) étaient contrôlés, par les services des douanes et au visa de l'article 60 du code des douanes, deux véhicules conduits par deux ressortissants bulgares : messieurs [B] [O] et [G] [G].

La fouille des véhicules permettait de découvrir 40 gilets de sauvetage, un moteur, un canot pneumatique, des pompes de gonflage et quatre bidons de carburant.

Sur la suspicion du délit d'aide à l'entrée à la circulation ou au séjour irrégulier d'un étranger en France, les deux individus étaient remis aux services de police le 29 avril 2022 à 19h35.

Les intéressés étaient placés en garde à vue et expliquaient avoir effectué un travail de transport contre rémunération, sans connaître le matériel objet du fret.

A l'issue de la garde à vue le procureur de la République du Tribunal Judiciaire de Lille a sollicité transmission de la procédure pour classement sans suite (infraction insuffisamment caractérisée) le 30 avril 2022 à 16h40. La fin de garde à vue a été actée à 19h30.

M. [G] [G] a fait l'objet d'une mesure de placement en rétention administrative ordonnée par monsieur le Préfet du Nord et commencée le 30 avril 2022 à 19h40 pour exécution d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français sans délai prononcée par le même autorité le même jour.

Par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer en date du 04 mai 2022 la requête en contestation du placement en rétention administrative a été rejetée et la prolongation du placement en rétention administrative a été prolongée pour une première période de 28 jours.

Devant le juge des libertés et de la détention le conseil de M. [G] [G] , Me Pauline FERDIEU, a indiqué ne pas soutenir les moyens du recours en annulation du placement en rétention administrative et n'a soulevé aucune contestation de la procédure.

M. [G] [G] reprend en cause d'appel les moyens développés devant le premier juge ci après :

Défaut de motivation de l'arrêté de placement en rétention administrative en ce qu'il n'indique pas que l'intéressé disposait d'un document d'identité et d'un document de voyage et ne précise pas que l'appelant avait manifesté sa volonté de retourner en Bulgarie et de ne pas se maintenir en France.

Irrégularité de la décision d'expulsion pouvant être appréciée par le juge judiciaire par voie d'exception en ce que l'obligation de quitter le territoire français porte atteinte à une règle du droit européen, à savoir : l'article 27 de la directive 2004/38/CE ne permettant d'expulser un ressortissant de l'Union Européenne que s'il constitue une menace réelle actuelle et grave à l'ordre public, cette caractéristique n'étant pas motivée en l'espèce selon la déclaration d'appel.

Absence de nécessité du placement en rétention administrative en ce que l'intéressé est ressortissant bulgare, dispose d'un véhicule, de son passeport, des moyens financiers suffisants et souhaite rentrer en Bulgarie.

Et soulève au titre des moyens nouveaux :

Insuffisance de motivation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention pour n'avoir pas répondu aux moyens développés dans la requête en annulation du placement en rétention administrative .

Absence de diligence de l'administration pour organiser l'éloignement

MOTIFS DE LA DÉCISION

1) Sur la motivation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention et la recevabilité des moyens repris en appel tirés du recours en annulation du placement en rétention administrative.

La procédure devant le juge des libertés et de la détention étant orale, l'abandon express à l'audience, par le requérant ou son conseil, de la requête en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative déposée par l'étranger, dispense le juge des libertés et de la détention de répondre aux moyens contenus dans cette requête.

Aucun défaut de motivation ne peut donc être soutenu à l'encontre de la décision déférée.

En revenche, le fait de ne pas avoir soutenu les moyens du recours en annulation du placement en rétention administrative en première instance n'interdit pas de soutenir ces mêmes moyens en appel, les moyens tirés d'une erreur de droit ou de fait de l'arrêté de placement en rétention administrative étant des moyens de fond et non des exceptions de procédure.

2) Sur les moyens appréciés par le juge des libertés et de la détention

a) Sur l'appréciation par voie d'exception de l'obligation de quitter le territoire français

Il est constant que la répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction impose désormais d'exclure tout contrôle par voie d'exception du juge des libertés et de la détention sur la légalité des décisions relevant, par voie d'action, du juge administratif.

(1er Civ 18/12/2019 pourvoi n° 18-26.232)

Ainsi le juge judiciaire ne saurait, même par voie d'exception et même pour s'assurer du respect du droit européen, statuer sur la légalité d'une mesure d'éloignement dont le contentieux est strictement de la compétence du tribunal administratif.

Le moyen sera rejeté

b) Sur la motivation de l'arrêté de placement en rétention administrative ;

L'arrêté de placement en rétention administrative est motivé par le fait que l'appelant est domicilié en Bulgarie et ne dispose d'aucune résidence stable en France susceptible de constituer une garantie de représentation propre à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement.

Indépendamment de toute appréciation de fond, cette motivation fondée sur des éléments de personnalité de M. [G] [G] est suffisante en soi, le préfet n'est pas tenu de motiver sa décision sur l'ensemble des critères de personnalité de l'étranger dés lors qu'il s'appuie sur des motifs suffisants pour justifier l'inanité du recours à l'assignation à résidence.

Ainsi le fait que l'autorité préfectorale n'ait pas inclus dans sa motivation le fait que M. [G] [G] disposait d'un passeport et avait déclaré être volontaire pour repartir en Bulgarie ne prive pas cette décision d'une motivation certaine et personnalisée.

Le moyen est inopérant,

c) Sur la nécessité du placement en rétention administrative

Au titre du contrôle de la proportionnalité de la mesure de placement en rétention administrative il est constant que le juge judiciaire peut sanctionner un placement en rétention disproportionné avec l'objectif de garantir la bonne exécution de l'acte d'éloignement.

A ce titre, lorsqu'il est acquis qu'un étranger en situation irrégulière s'apprêtait à repartir dans le pays de destination par ses propres moyens lorsqu'il a été interpellé et placé en rétention en garantie de la réadmission dans ce même pays, la mesure de placement en rétention administrative est sans nécessité et doit être annulée comme disproportionné.

Tel n'est pas le cas en l'espèce puisque si M. [G] [G] a effectivement manifesté sa volonté de repartir en Bulgarie et dispose des moyens financier et de transport pour ce faire, il convient de constater qu'il a été interpellé dans la région lilloise avec un matériel nautique dont on peut raisonnablement penser qu'il était destiné à des activités côtières sur le littoral français ou belge.

Ainsi il n'est pas acquis que M. [G] [G] a été interpellé sur le chemin du retour vers la Bulgarie, ni même qu'il comptait s'y rendre immédiatement une fois la livraison effectuée.

En conséquence monsieur le Préfet du Nord a pu sans erreur d'appréciation ordonner le placement en rétention administrative de M. [G] [G] pour garantie d'un retour immédiat et direct en Bulgarie.

3) Sur les moyens soulevés pour la première fois en cause d'appel

Le moyen relatif à l'exercice effectif de ses droits par l'étranger ne constitue pas une exception de procédure mais un moyen de fond pouvant être soulevé pour la première fois en cause d'appel.

Il ressort de l'article R 743-11 du CESEDA que l'étranger qui se contente d'affirmer dans sa requête que les diligences 'ne semblent pas suffisantes dans le cas d'espèce' ne formule pas un moyen motivé en fait répondant aux critères de l'article 71 du code de procédure civile, mais avance un simple argument hypothétique auquel le juge n'a pas à répondre.

Tel est le cas en l'espèce dans la mesure où l'appelant se borne à indiquer que l'administration n'a pas fait 'toutes diligences' sans indiquer le fondement factuel de son moyen.

Au surplus il sera constaté de manière superfétatoire que, M. [G] [G] disposant d'un passeport, l'administration a réservé un routing dés le 01/05/2022 à 09h35 alors que le placement en rétention administrative a commencé le 30/04/2022 à 19h40.

La diligence a été faite de manière prompte.

Le moyen sera rejeté.

PAR CES MOTIFS

DÉCLARE l'appel recevable ;

CONFIRME l'ordonnance entreprise.

DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à l'appelant, à son conseil et à l'autorité administrative.

Véronique THÉRY,

greffière

Bertrand DUEZ,

conseiller

N° RG 22/00761 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UIJC

REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE DU 05 Mai 2022 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Pour information :

L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Reçu copie et pris connaissance le jeudi 05 mai 2022 :

- M. [G] [G]

- l'interprète

- l'avocat de M. [G] [G]

- l'avocat de M. LE PREFET DU NORD

- décision notifiée à M. [G] [G] le jeudi 05 mai 2022

- décision transmise par courriel pour notification à M. LE PREFET DU NORD et à Maître Alban DEBERDT le jeudi 05 mai 2022

- décision communiquée au tribunal administratif de Lille

- décision communiquée à M. le procureur général :

- copie à l'escorte, au Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER

Le greffier, le jeudi 05 mai 2022

N° RG 22/00761 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UIJC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Etrangers
Numéro d'arrêt : 22/00761
Date de la décision : 05/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-05;22.00761 ?
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