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04/06/2020 | FRANCE | N°19/01066

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 2, 04 juin 2020, 19/01066


République Française


Au nom du Peuple Français








COUR D'APPEL DE DOUAI





CHAMBRE 2 SECTION 2





ARRÊT DU 04/06/2020








****








N° de MINUTE : 20/


N° RG 19/01066 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SFQ2





Ordonnance (N° 2018015944) rendue le 17 janvier 2019 par le tribunal de commerce de Lille


Métropole


Arrêt avant dire droit rendu le 17 octobre 2019 par la Cour d'appel de Douai



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APPELANT





M. N... M...


né le [...] à Billy Montigny (62420), de nationalité française


demeurant [...]


représenté par Me Ioannis Kappopoulos, avocat au barreau de Valenciennes, substitué à l'audience par Me François Bizeur,...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 04/06/2020

****

N° de MINUTE : 20/

N° RG 19/01066 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SFQ2

Ordonnance (N° 2018015944) rendue le 17 janvier 2019 par le tribunal de commerce de Lille

Métropole

Arrêt avant dire droit rendu le 17 octobre 2019 par la Cour d'appel de Douai

APPELANT

M. N... M...

né le [...] à Billy Montigny (62420), de nationalité française

demeurant [...]

représenté par Me Ioannis Kappopoulos, avocat au barreau de Valenciennes, substitué à l'audience par Me François Bizeur, avocat au barreau de Valenciennes

INTIMÉE

SA Francelog prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

ayant son siège social [...]

[...]

représentée par Me Marie-Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai

ayant pour conseil Me Grégory Lefebvre, de la SELARL Vauban société d'avocats, avocat au barreau de Compiègne

DÉBATS à l'audience publique du 17 décembre 2019 tenue par Nadia Cordier magistrat chargé d'instruire le dossier.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Valérie Roelofs

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Laurent Bedouet, président de chambre

Nadia Cordier, conseiller

Agnès Fallenot, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 04 juin 2020 après prorogation du délibéré initialement prévu le 05 mars 2020 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Laurent Bedouet, président et Audrey Cerisier, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 03 septembre 2019

****

FAITS ET PROCÉDURE

La société Francelog conçoit et réalise des produits électroniques spécifiques dans le domaine industriel (conception, fabrication et négoce de composants et équipements électriques et électroniques et d'automatisme).

Mme Q... W... a été embauchée par Francelog en 1990. De formation comptable, elle a été promue en 2000 responsable administratif et financier de la société Francelog.

En 2016, M. D... Y..., principal actionnaire et dirigeant de la société Francelog a décidé de céder son entreprise.

L'offre de Mme W..., associée à M. N... M..., responsable du bureau d`études de la société Francelog, candidats à la reprise de l'entreprise, n'a pas prospéré.

Le groupe TEC Automatismes, dirigé par M. K... V... a été finalement retenu.

Mme W... ayant fait l'objet d'un licenciement économique par la société Francelog le 30 mars 2017, elle a crée avec M. H... I..., également licencié économique de la dite société, la société Akens, immatriculée le 21 mars 2018, dont elle est présidente, et M. I... le directeur général, cette société développant une activité de conception de systèmes.

Les relations entre Mme W... et H... I... au sein de la société Akens se sont détériorées rapidement et ce dernier, suite à une sommation interpellative délivrée le

11 juillet 2018 par la société Francelog, soupçonnant des actes de concurrence déloyale de la part de la société Akens, a notamment dénoncé l'actionnariat occulte de M. N... M..., au sein de la société Akens.

Le 17 juillet 2018, la société Francelog a déposé une requête auprès du président du tribunal de commerce de Lille Métropole afin de désigner un huissier accompagné d'un expert informatique pour recueillir toutes informations susceptibles d'identifier l'ampleur des actes de concurrence déloyale et de saisir tous documents de nature à établir les actes frauduleux et déloyaux accomplis par la société Akens, au siège de la dite société et aux domiciles de Mme W... et de M. M....

Suivant ordonnance du 23 juillet 2018, rectifiée par ordonnance du 10 septembre 2018, le président du tribunal de commerce de Lille Métropole a autorisé les mesures sollicitées.

Les mesures d'instructions ordonnées ont été effectivement exécutées.

Suivant acte d'huissier du 15 octobre 2018, M. M... a saisi le président du tribunal de commerce de Lille aux fins de voir celui-ci, pour l'essentiel, se déclarer incompétent pour connaître des demandes formulées par Francelog à son encontre, dire que l'huissier a dépassé les limites de l'ordonnance du 23 juillet 2018 et en conséquence rétracter les ordonnances des 23 juillet 2018 et 10 septembre 2018.

Par ordonnance contradictoire du 17 janvier 2019, le président du tribunal de commerce de Lille Métropole a :

Au principal,

- renvoyé les parties à se pourvoir,

Au provisoire,

- débouté M. M... de sa demande visant à la rétractation des ordonnances rendues les 23 juillet 2018 et 10 septembre 2018,

- condamné solidairement M. M... à payer à la SA FRANCELOG la somme de

3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné solidairement M. M... aux dépens.

Suivant déclaration du 18 février 2019, M. M... a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions, signifiées voie électronique le 18 mars 2019, il demande à la cour de :

Vu les articles L. 1411-1 et suivants du Code du travail,

Vu les articles 16, 145, 146 alinéa 2, 147, 493, 496 alinéa 2, 497 et 875 du Code de procédure civile,

Vu l'article 8 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme,

Vu l'article 9 du Code civil,

Dire bien appelé, mal jugé,

En conséquence :

In limine litis et à titre principal :

- DÉCLARER la juridiction commerciale incompétente pour connaître des demandes formulées par la société FRANCELOG à son encontre,

A titre subsidiaire et avant dire droit :

- DÉCLARER IRRECEVABLES les pièces 10 à 29 produites par la société FRANCELOG,

A titre subsidiaire et Au fond :

- DIRE et JUGER que l'huissier instrumentaire a dépassé les limites de l'ordonnance du 23 juillet 2018 en procédant à la saisie du matériel informatique,

- DIRE et JUGER que le recours à une mesure d'instruction sollicitée à son encontre est illégitime,

- DIRE et JUGER que la demande de mesure d'instruction sollicitée par la société FRANCELOG porte une atteinte injustifiée au principe du contradictoire,

- DIRE et JUGER que la demande de mesure d'instruction sollicitée par la société FRANCELOG porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale,

Par conséquent,

- CENSURER l'ordonnance du 17 janvier 2019 dans toutes ses dispositions y compris en ce qu'elle l'a condamné à payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- RÉTRACTER les ordonnances du 23 juillet 2018 et du 10 septembre 2018,

- REJETER la requête présentée par la société FRANCELOG le 17 juillet 2018,

- JUGER que les mesures d'investigation effectuées par l'huissier instrumentaire sont nulles et de nul effet,

- ORDONNER à l'huissier instrumentaire de lui restituer l'appareillage informatique saisi en méconnaissance des termes de l'ordonnance,

- ORDONNER à l'huissier instrumentaire de lui restituer l'intégralité des documents prélevés lors de l'exécution de ses diligences,

- INTERDIRE à la société FRANCELOG de faire état, de produire, d'utiliser les documents et renseignements prélevés par l'huissier instrumentaire à l'occasion d'une éventuelle instance judiciaire,

En tout état de cause,

- CONDAMNER la société FRANCELOG au paiement d'une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- CONDAMNER la société FRANCELOG aux entiers dépens de l'instance.

Aux termes de ses dernières conclusions, signifiées par voie électronique le 18 avril 2019, la SA Francelog demande à la cour de :

Vu les articles 145, 493 et suivants du code de procédure civile notamment,

- confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il est dit que :

les pièces versées au débat sont bien licites et recevables,

le Tribunal de commerce de Lille Métropole est bien compétent matériellement,

la société FRANCELOG avait un motif légitime quant à sa requête,

les circonstances imposaient un recours à une procédure non contradictoire,

les mesures ordonnées sont légalement admissibles,

- débouter M. N... M... de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. N... M... au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. N... M... aux entiers dépens.

Suivant arrêt avant dire droit du 17 octobre 2019, cette cour, après avoir indiqué dans les motifs de sa décision que le juge de la rétractation puis la cour à qui le litige est dévolu, ne peuvent en aucun cas juger de l'existence du motif légitime de la requête sur la base d'éléments recueillis en exécution de la mesure dont le fondement est discuté devant eux a :

- ordonné la réouverture des débats à l'audience du 17 décembre 2019,

- ordonné à la société FRANCELOG de verser aux débats l'ensemble des pièces ayant été produites au soutien de la requête ainsi que toute pièce qu'elle jugera utile, sous réserve des indications contenues dans les motifs de la présente décision, les pièces obtenues en exécution de la mesure d'instruction ordonnée ne pouvant en aucune cas être retenues par la cour pour trancher le présent litige,

- sursis à statuer sur l'ensemble des demandes et réserve les dépens.

Suite à cet arrêt, M. M... n'a pas conclu de nouveau mais a adressé à la cour une note en délibéré, par ailleurs signifiée par voie électronique le 19 décembre 2019.

Par conclusions du 16 décembre 2019, la société Francelog demande à la cour :

- de la dire recevable et bien fondée,

- de révoquer l'ordonnance de cloture rendue le 3 septembre 2019 et dire recevables les conclusions et pièces communiquées postérieurement par la société Francelog,

- de confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il est dit que :

* les pièces versées au débat sont licites et recevables,

* le tribunal de commerce de Lille Métropole est compétent,

* la société Francelog avait un motif légitime quant à sa requête,

* les circonstances imposaient un recours à une procédure non contradictoire,

* les mesures ordonnées sont légalement admissibles,

- de dire n'y avoir lieu à écarter des débats les pièces régulièrement communiquées par la société Francelog postérieurement à la requête,

- de condamner M. M... au paiement de la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de le condamner aux dépens.

La société Francelog a, le 8 janvier 2020, présenté des observations en réponse à la note en délibéré de M. M....

SUR CE

La cour constate que, conformément à l'article 444 du code de procédure civile, la société Francelog, dans ses écritures postérieures à l'arrêt avant dire droit du 17 octobre 2019 de cette cour, a repris les moyens et prétentions développés dans ses écritures antérieures, sans les modifier, et y ajoutant, débattu contradictoirement des éléments de fait et de droit induits par les conséquences de la réouverture des débats ordonnée dans le dit arrêt.

Il en va de même de M. M... qui a formulé quelques observations en réponse aux dernières conclusions et nouvelles pièces versées par la société Francelog dans sa note en délibéré, auxquelles il a été répondu par cette dernière.

***

M. M... soutient que le président du tribunal de commerce était incompétent pour ordonner les mesures d'investigations.

Il conclut à l'irrecevabilité des pièces 10 à 29, soutient que l'huissier instrumentaire n'a pas respecté le contenu de l'ordonnance, fait valoir que le recours à la mesure d'instruction est illégitime et qu'il a été porté une atteinte injustifiée au principe du contradictoire outre une atteinte disproportionnée à ses droits et libertés.

Selon l'article 145 du code de procédure civile, 's'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées, à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé'.

Le juge, saisi d'une demande de rétractation d'une ordonnance sur requête ayant ordonné une mesure sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile est tenu d'apprécier, au jour où il statue, sur les mérites de la requête ; il doit s'assurer de l'existence d'un motif légitime à ordonner la dite mesure probatoire, au jour du dépôt de la requête initiale, à la lumière des éléments de preuve produits à l'appui de la dite requête et de ceux produits ultérieurement devant lui, et des circonstances justifiant de ne pas y procéder contradictoirement.

Selon l'article 493 du code de procédure civile, l'ordonnance sur requête est une décision rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.

L'article 875 du code de procédure civile prévoit pour sa part que le tribunal de commerce peut ordonner sur requête, dans les limites de la compétence du tribunal, toutes mesures urgentes lorsque les circonstances exigent qu'elle ne soient pas prises contradictoirement.

Ainsi, les mesures d'instruction prévues à l'article 145 du code de procédure civile ne peuvent être ordonnées sur requête que lorsque les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement.

L'urgence n'est pas une condition requise pour que soient ordonnées sur requête des mesures d'instruction sur le fondement de l'article 145 ; l'existence de contestations sérieuses ne constitue pas un obstacle à la mise en oeuvre de la mesure sollicitée, l'application de cet article n'impliquant aucun préjugé sur la responsabilité des parties appelées à la procédure, ni sur les chances de succès du procès susceptible d'être ultérieurement engagé.

Il résulte enfin de l'article 145 que le demandeur à la mesure d'instruction n'a pas à démontrer l'existence des faits qu'il invoque puisque cette mesure 'in futurum' est destinée à les établir, mais qu'il doit justifier d'éléments rendant crédibles les griefs allégués, les différents éléments recueillis au cours de la mesure d'instruction autorisée par le juge ne pouvant justifier a posteriori, devant le juge de la rétractation puis devant la cour d'appel, saisie du litige relatif au bien fondé de la mesure d'instruction, du bien fondé de la requête.

***

S'agissant de la compétence du président du tribunal de commerce, c'est vainement que la société Francelog soutient qu'elle est justifiée par la circonstance que M. M... s'est comporté en associé de fait de la société Akens, ce point ne pouvant être tranché par le juge des requêtes ou le juge des référés.

Il est établi en revanche que M. M... est salarié de la société Akens.

C'est par une requête unique devant le président du tribunal de commerce que la société Francelog a sollicité de celui-ci qu'il ordonne diverses mesures d'instruction.

Elle a abouti à une ordonnance du 23 juillet 2018, autorisant les mesures sollicitées à l'égard de la société Akens, de Mme W... et de M. M....

La dite requête étant justifiée, selon la requérante, par la nécessité d'établir l'existence d'actes de concurrence déloyale de la part de la société Akens, dont Mme W... est la dirigeante, avec la complicité de M. M..., salarié de la société Francelog, c'est à bon droit que cette dernière a pu saisir le président du tribunal de commerce de Lille d'une requête, visant également M. M..., en raison du lien d'invisibilité existant entre les demandes relatives a ces trois parties.

L'ordonnance sera, à ces motifs substitués, confirmée en ce qu'en a dit que le président du tribunal de commerce de Lille était compétent pour statuer sur la requête présentée par la société Francelog.

***

S'agissant du bien fondé de l'ordonnance dont appel, c'est en application des principes rappelés ci-dessus que la cour, dans son arrêt du 17 octobre 2019, a demandé à Francelog de procéder à une distinction entre les pièces versées au soutien de la requête, les pièces éventuellement versées ultérieurement devant le juge de la rétractation pour en justifier du bien fondé, et les pièces obtenues en exécution de la mesure d'exécution.

Postérieurement au dit arrêt, la société Francelog a versé aux débats la requête et l'ordonnance sur requête objet du présent litige ainsi que l'ordonnance rectificative de la précédente.

Cette dernière a modifié une simple erreur matérielle qui faisait référence, de manière erronée, à la société 'Prestocable' au lieu de la société Prestocab France.

S'agissant plus spécifiquement des pièces du débat, elle a procédé dans son bordereau de communication de pièces à une distinction entre :

- les 'pièces jointes à la requête initiale' (pièces 1 à 9),

-les 'pièces produites postérieurement au dépôt de la requête' (pièces 15, 16 et 17, 26,29, 30 à 49),

-les pièces 'issues des mesures d'instruction' (pièces 10 à 14, 18 à 25, 27,28),

- et les 'pièces communiquées suite à l'arrêt avant dire droit' : il s'agit des pièces 44 à 49 déjà visées dans les 'pièces produites postérieurement au dépôt de la requête'.

Les pièces issues des mesures d'instruction seront écartées des débats au vu des développements qui précèdent et de l'arrêt avant dire droit de cette cour du 17 octobre 2019, dès lors que la société Francelog ne peut justifier a posteriori du bien fondé de la mesure d'instruction ordonnée par la production de pièces dont elle est issue.

Les pièces jointes à la requête initiale ayant donné lieu à l'ordonnance sur requête critiquée, seront en revanche examinées par la cour pour juger du bien fondé de la dite ordonnance sur requête, l'appelant ne contestant pas leur recevabilité.

Si les pièces 'produites postérieurement au dépôt de la requête', incluent les nouvelles pièces versées devant la cour, lesquelles ne sont pas irrecevables en elles-mêmes pourvu qu'elles respectent les dispositions du dit arrêt selon la distinction à opérer relativement à la production des pièces, il convient d'observer qu'aucune précision n'est apportée par la société Francelog quand à la provenance des dites pièces alors que M. M... demande à la cour de les écarter.

Faute de pouvoir établir leur origine et notamment le fait qu'elles ne sont pas issues de la mesure d'instruction ordonnée à l'égard de l'appelant, elles seront écartées des débats.

Pour justifier du bien fondé de sa requête, l'intimée soutient que les pratiques de

M. M... ont eu pour objet, en collusion avec la société Akens et Mme W... de s'approprier de manière illégitime les savoir-faire et la clientèle de la société Francelog, dont le fonds de commerce a été repris alors qu'elle était en grande difficulté.

Elle verse aux débats (pièces n°1 à 6), son extrait K bis, le contrat de travail de

M. M... (pièce 8 bis) ainsi qu'un bulletin de paie de ce dernier (pièce 8), le contrat de travail de Mme W... ainsi que l'avenant ultérieur au dit contrat, le curriculum vitae de cette dernière, la lettre de licenciement économique dont elle a fait l'objet par la société Francelog, le reçu pour solde de tout compte de Mme W..., l'extrait Kbis de la société Akens, qui fait apparaître que la dite société a pour activité la conception de systèmes, leur réalisation étant faite en sous traitance et chez les clients, que sa présidente est Mme W... et son directeur général M. H... I..., ainsi que l'extrait K bis de la société Prestocab, lequel fait apparaître qu'elle exerce une activité de câblage électrique, de fabrication et de négoce d'ensembles et composants (pièce n°9).

E... produit également (pièce n°7) une sommation interpellative datée du 11 juillet 2018, réalisée à son initiative, auprès de Monsieur I....

Cet acte d'huissier, comporte la mention suivante : ' la société Francelog a eu connaissance de faits graves laissant à penser l'existence d'une concurrence déloyale de grande ampleur, émanant de salariés et d'anciens salariés.

Elle entend dans ce contexte, vérifier la véracité des informations portées à sa connaissance au moyen de la présente sommation interpellative.'

Figure ensuite l'indication selon laquelle l'huissier précise 'En conséquence je vous fais sommation d'avoir à répondre immédiatement et sans délai au questions suivantes:'

Dans ses déclarations M. I... indique, répondant aux questions qui lui sont

posées :

-qu'il est actionnaire et directeur général de la société Akens qui a une activité concurrente de la société Francelog,

-que trois clients de la société Francelog ont été démarchés par la société Akens,

-que la dite société est hébergée par Prestocab à Tourcoing.

Les questions 11, 12 et 15 sont ainsi respectivement libellées:

'Pouvez vous nous indiquer si M. M... joue un rôle actif au quotidien et si oui, nous détailler ses missions pour le compte de la société Akens''

'D'après vos constatations personnelles, est ce que M. M... utilise pour le compte de la société Akens, ses outils, procédés ou procédures, fichiers ou autres supports qui appartiennent ou proviennent de la société Francelog''

'M. M... est-t-il en relation avec les fournisseurs de la société Francelog pour ses activités développées au sein de la société Akens''

M. I... précise, en réponse à ces questions, que M. M... est chargé de la veille technologique et de l'étude des produits et des relations commerciales, qu'il procède à l'extraction des nomenclatures issues de la base E..., des procédures de test et des outils de tests et de programmation, et qu'il est en relation avec les fournisseurs de E....

Les griefs invoqués par la société Francelog à l'encontre de M. M..., qu'elle considère comme étant l'animateur de la société Akens, reposent pour l'essentiel sur la sommation interpellative et les déclarations de M. I... qui y sont contenues, notamment en ce que celui-ci déclare, ainsi qu'il a été dit plus haut, que M. M... est chargé, pour le compte de la société, de la veille technologique, de l'étude des produits et des relations commerciales, qu'il procède à l'extraction des nomenclatures issues de la base E... des procédures de test et des outils de tests et de programmation et qu'il est en relation avec les fournisseurs de E....

Toutefois, ces affirmations émanent d'un individu dont il n'est contesté par aucune des parties qu'il entretient des relation conflictuelles avec la société Akens, M. M... et Mme W....

Elles ne sont confirmées par aucune des autres pièces sus-mentionnées, ni le mail du

9 novembre 2017, ni la lettre d'avertissement notamment, ne comportant de référence aux faits rapportés.

Il n'est pas ailleurs pas contesté que Mme W... ou M. M... n'étaient ou ne sont liés par aucune clause de non concurrence avec la société Francelog.

Les déclarations de M. I..., insuffisamment précises dans leur contenu, sujettes à caution compte tenu du litige l'opposant à Mme W..., la société Akens, et

M. M..., et non corroborées par d'autres pièces régulièrement communiquées de la société Francelog, justifient, sans que la cour n'ait à examiner les autres moyens soulevés par l'appelant, l'infirmation de l'ordonnance dont appel, aucun motif légitime n'étant suffisamment démontré pour justifier du bien fondé de la mesure d'instruction ordonnée, et la rétractation de l'ordonnance du 17 juillet 2018 rectifiée par ordonnance du 10 septembre 2018.

Il convient en conséquence, d'annuler les mesures d'investigation effectuées en application de l'ordonnance sur requête du 17 juillet 2018 rectifiée, et d'ordonner que soient restitués à l'appelant l'ensemble des pièces, documents et données, quel qu'en soit le support, appréhendés à l'occasion de l'exécution de la dite ordonnance.

Le sens de l'arrêt conduit à infirmer les dispositions de l'ordonnance dont appel relatives aux dépens et aux frais irrépétibles de première instance.

Statuant à nouveau de ce chef la cour condamne la société Francelog aux dépens de première instance et d'appel.

Elle la condamne en outre à payer la somme de 3 000,00 euros à M. M... au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Vu l'arrêt avant dire droit de cette cour du 17 octobre 2019,

Ecarte des débats les pièces n° 10 à 14, 15,16,17,18 à 28, 29 à 47 ;

Infirme l'ordonnance entreprise ;

Rétracte l'ordonnance du 17 juillet 2018 rectifiée par ordonnance du 10 septembre 2018 ;

Annule en conséquence les mesures d'investigation effectuées en application de la dit ordonnance rectifiée ;

Ordonne que soit restitué à l'appelant l'ensemble des pièces, documents et données, quel qu'en soit le support, appréhendés à l'occasion de l'exécution de la dite

ordonnance ;

Condamne la société Francelog aux dépens de première instance et d'appel ;

La condamne en outre à payer la somme de 3 000,00 euros à M. N... M... au titre des frais irrépétibles.

Le greffier Le président

Audrey Cerisier Laurent Bedouet


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 2
Numéro d'arrêt : 19/01066
Date de la décision : 04/06/2020

Références :

Cour d'appel de Douai 22, arrêt n°19/01066 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-06-04;19.01066 ?
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