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28/05/2020 | FRANCE | N°16/05552

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 28 mai 2020, 16/05552


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 28/05/2020



****





N° de MINUTE : 20/

N° RG 16/05552 - N° Portalis DBVT-V-B7A-QCPM



Jugement (N° 2088/01174) rendu le 16 décembre 2009 par le tribunal de commerce de Lille

Arrêt (RG 10/2186) rendu le 20 septembre 2012 par la Cour d'appel de Douai

Arrêt (N° 134 F-P+B) rendu le 28 janvier 2014 par la Cour de cassation

Ordonnance (RG 14/4029) rendue le

4 février 2016 par la Cour d'appel de Douai

Ordonnance (RG 16/5552) rendue le 5 juillet 2018 par la Cour d'appel de Douai

Ordonnance (RG 16/5552) rendue le 4 avril 2019 p...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 28/05/2020

****

N° de MINUTE : 20/

N° RG 16/05552 - N° Portalis DBVT-V-B7A-QCPM

Jugement (N° 2088/01174) rendu le 16 décembre 2009 par le tribunal de commerce de Lille

Arrêt (RG 10/2186) rendu le 20 septembre 2012 par la Cour d'appel de Douai

Arrêt (N° 134 F-P+B) rendu le 28 janvier 2014 par la Cour de cassation

Ordonnance (RG 14/4029) rendue le 4 février 2016 par la Cour d'appel de Douai

Ordonnance (RG 16/5552) rendue le 5 juillet 2018 par la Cour d'appel de Douai

Ordonnance (RG 16/5552) rendue le 4 avril 2019 par la Cour d'appel de Douai

APPELANTS

M. [C] [V]

né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 5], de nationalité française

Et

Mme [G] [V] née [S]

née le [Date naissance 2] 1953 à [Localité 6], de nationalité française

demeurant ensemble [Adresse 7] (Portugal)

représentés par Me François Deleforge, avocat au barreau de Douai, substitué à l'audience par Me Cathetine Camus-Demailly, avocat au barreau de Douai

assistés de Maître Xavier Haranger, avocat au barreau de Paris

INTIMÉE

SA société générale agissant par ses représentants légaux dont ses président et conseil d'administration

ayant son siège social [Adresse 3]

représentée et assistée par Me Benoît de Berny, avocat au barreau de Lille

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Véronique Renard, présidente de chambre

Anne Molina, conseiller

Geneviève Créon, conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Stéphanie Hurtrel

DÉBATS à l'audience publique du 19 décembre 2019 après rapport oral de l'affaire par Véronique Renard

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 28 mai 2020 après prorogation du délibéré initialement prévu le 19 mars 2020 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Véronique Renard, présidente et Stéphanie Hurtrel, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 24 octobre 2019

****

M. et Mme [V] sont à l'origine de la création d'un groupe de sociétés intervenant dans le domaine du textile situé dans l'agglomération lilloise et en Tunisie, qui s'est constitué à partir de la société Medianor considérée comme étant la société historique. Dans un contexte de fragilité financière du groupe, la Société Générale a, par acte du 13 mars 1998, accordé au groupe un concours financier dénommé 'crédit de campagne' d'un montant de trois millions de francs (soit 457.347,05 euros), prêt à court terme remboursable le 30 juin 1998.

Par acte du même jour, M. [V] s'est porté caution solidaire de l'ensemble des engagements de la société Medianor pour une durée illimitée à concurrence de

500.000 francs (soit 76. 224,50 euros) et Mme [S] épouse [V] a acquiescé à ce cautionnement.

La société Medianor a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Lille du 18 janvier 1999, un plan de continuation a été adopté le

19 janvier 2000 et n'a pas pu être exécuté. Par jugement du 21 juin 2000, la liquidation judiciaire a été prononcée et étendue aux sociétés Tertianor, MTV et STTC.

Le tribunal de commerce de Lille saisi par le liquidateur d'une action en responsabilité à l'encontre de la banque pour soutien abusif résultant de l'octroi fautif de crédits a, par jugement du 12 juin 2003 confirmé par arrêt de la cour d'appel de Douai du 30 mars 2006, condamné la banque à payer au liquidateur la somme de 460.000 euros.

A la suite de cette condamnation, les époux [V] ont recherché la responsabilité de la banque pour obtenir la réparation de leurs préjudices personnels résultant de leurs engagements de cautions, d'actionnaires et de dirigeants ou de tiers intéressés, et par jugement du 16 décembre 2009, le tribunal de commerce de Lille a pour l'essentiel débouté la Société Générale de ses demandes d'irrecevabilité, débouté les époux [V] et les SCI Berzin, des Famards et Martin Havez de l'ensemble de leurs demandes sur les fautes qu'aurait commises la Société Générale au titre d'un dol commis dans le nantissement d'un contrat VALCAP, au titre des devoirs de conseil, d'information et de mise en garde de M. [C] [V], pour non respect des obligations contractuelles, pour avoir encouragé M. [C] [V] à investir l'ensemble de son patrimoine et les a déboutés de leurs demandes de condamnation pour préjudice subis du fait des fautes de la banque.

Par arrêt du 20 septembre 2012, la cour d'appel de Douai a confirmé le jugement du

16 décembre 2009 sauf en ce qu'il a rejeté la responsabilité délictuelle de la société Générale, et statuant à nouveau de ce chef, a dit que la faute contractuelle commise par la société Générale à l'encontre de la société Medianor a causé un dommage aux époux [V] et a condamné la société Générale à payer à ces derniers la somme de 350.000 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt outre 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Cet arrêt a été partiellement cassé par arrêt de la Cour de cassation du 28 janvier 2014 au motif que M. [C] [V] était une caution avertie et qu'il n'était pas fondé à rechercher la responsabilité de la banque à raison de la faute commise par elle lors de l'octroi du crédit.

Les époux [V] ont saisi la cour d'appel de Douai, cour de renvoi autrement composée le 27 juin 2014.

Dans cette procédure, le conseiller de la mise en état a, par ordonnance du 4 février 2016, sursis à statuer sur l'ensemble des prétentions des parties jusqu'à ce qu'il soit définitivement statué sur la procédure initiée par la Société Générale à l'encontre des époux [V] afin d'obtenir leur condamnation au paiement au titre de cautionnement de la société Medianor accordé par eux le 13 mars 1998, procédure ayant donné lieu à un jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole du 25 septembre 2013, puis à un arrêt de la cour d'appel de Douai du 30 octobre 2014, objet d'un pourvoi en cassation (n° 14-29346), et dans cette attente a prononcé la radiation de l'affaire du rôle de la 2ème chambre 1ère section de la cour.

Par ordonnance du 5 juillet 2018 le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Douai a à nouveau sursis à statuer sur les demandes des parties à la demande des époux [V] et a ordonné la réouverture des débats sur incident invitant les parties à conclure à nouveau.

Par ordonnance du 4 avril 2019 le conseiller de la mise en état, à la demande de la Société Générale, a révoqué le sursis à statuer prononcé par l'ordonnance du 4 février 2016, a rejeté le surplus des demandes et a fixé un calendrier de procédure.

En parallèle, au mois de novembre 2010, la banque a fait assigner M. et Mme [V] en paiement de la somme garantie par le cautionnement et par jugement du 25 septembre 2013, le tribunal de commerce de Lille Métropole a pour l'essentiel condamné M. et Mme [V] à payer solidairement à la Société Générale la somme de 76.224,50 euros au titre de leur engagement de caution, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 8 novembre 2010.

Suite à l'appel interjeté par M. et Mme [V], la cour de Douai a, par arrêt du

30 octobre 2014 infirmé le jugement du 25 septembre 2013, dit que le cautionnement est devenu sans cause, donc sans effet, débouté la Société Générale de l'ensemble de ses demandes, et a condamné la Société Générale à payer à M. et Mme [V] une somme de 8. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec application de l'article 699 du même code.

Par arrêt du 28 juin 2016, la Cour de cassation a cassé en toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel de Douai du 30 octobre 2014 au visa de l'article 455 du code de procédure civile, reprochant à la cour d'appel de ne pas avoir analysé, même sommairement, les pièces sur lesquelles elle fondait sa décision alors qu'elle avait relevé par ailleurs, dans un arrêt du 20 septembre 2012 que si la banque avait donné un accord de principe sur un plan de restructuration financier des sociétés Medianor et Tertianor, ce plan n'était pas encore arrêté au mois de mai 1998 et que, dans un autre arrêt distinct, elle avait retenu que les garanties avaient été données en contrepartie de l'augmentation du crédit de campagne et non du plan de restructuration financière encore en discussion et non arrêté.

La Cour a renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel d'Amiens.

M. et Mme [V] ont saisi une première fois la cour d'appel d'Amiens sur renvoi de l'arrêt de cassation du 28 juin 2016 par acte du 31 août 2016.

Le conseiller de la mise en état, saisi par la Société Générale d'un incident tendant à voir déclarer nulle la déclaration de saisine après cassation, a fait droit à cette demande par ordonnance du 15 mai 2018.

La cour d'appel d'Amiens statuant sur déféré de cette ordonnance, l'a, par un arrêt du 15 novembre 2018 confirmée en toutes ses dispositions.

Les époux [V] ont, par une nouvelle déclaration de saisine du 18 mai 2018, à nouveau saisi la cour d'Amiens sur renvoi de l'arrêt de cassation du 28 juin 2016.

Par ordonnance du 6 novembre 2018, la présidente de chambre de la cour d'appel d'Amiens a déclaré la banque irrecevable en son incident visant à voir déclarer cette seconde saisine irrecevable eu égard à l'annulation de la précédente saisine visant la même affaire.

Par arrêt du 21 février 2019, la cour d'appel d'Amiens a débouté la Société Générale de sa demande en nullité de la déclaration de saisine du 18 mai 2018, déclaré la saisine de la cour d'appel d'Amiens par la déclaration du 18 mai 2018 irrecevable, débouté la Société Générale de sa demande de dommages intérêts pour procédure abusive, condamné M. [C] [V] et Mme [G] [S] épouse [V] à payer à la société Générale la somme de 1.600 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de la procédure devant la cour d'appel d'Amiens.

Dans la procédure soumise à la présente cour de renvoi, par dernières écritures notifiées par voie électronique le 10 octobre 2019, dont le dispositif est expurgé des demandes qui ne sont pas des prétentions au sens de l'article 4 du Code de procédure civile M. et Mme [V] demandent à la cour, en ces termes de :

Sur la nullité de la déclaration de saisine et des actes subséquents,

- déclarer irrecevable l'exception de nullité,

- à défaut, rejeter l'exception de nullité,

Au fond,

- condamner la Société Générale à supporter la condamnation prononcée contre les époux [V] dans la procédure relative au cautionnement, ayant donné lieu à deux arrêts de la cour d'appel d'Amiens des 15 novembre 2018 et 21 février 2019 dans l'hypothèse où cette condamnation deviendrait irrévocable,

- condamner la Société Générale à leur verser la somme de 7.359. 096 euros (ou

subsidiairement selon les hypothèses retenues dans le tableau ci-dessous) au titre des postes de préjudice listés ci-dessous :

- indemnisation au titre de la perte du contrat Valcap 727. 834 euros (à titre principal), 655. 050 euros (à titre subsidiaire)

- préjudice lié à la déchéance des termes des crédits souscrits par les époux [V] 1.337.977 euros (à titre principal), 394. 222 euros (à titre subsidiaire),

A titre subsidiaire, sur la perte de valeur des parts sociales détenues par les époux [V] dans la SCI Berzin 1. 391.140 euros (à titre subsidiaire)

- préjudice lié aux apports de fonds des Epoux [V] 469.507 euros

- préjudice lié à la perte de valeur des parts sociales détenues par les époux [V] dans la SCI des Famards et la SCI Martin Havez 1 099 709 euros

- préjudice lié à la perte de valeur des sociétés Médianor, Tertianor, STTC et MTV 2.502.551 euros

- préjudice lié à la perte des salaires, indemnités et retraites des Epoux [V] 576.592 euros

- préjudice lié à la vente forcée de la propriété de [Localité 8] 108 499 euros

- préjudice aux honoraires supportés par les Epoux [V] dans les diverses procédures 176.708 euros

- préjudice moral 275.000 euros

- préjudice issu de la condamnation des Epoux [V] à régler une somme à la banque Scalbert Dupont, en leur qualité de caution de Tertianor

54.230 euros

- préjudice lié à la somme prêtée par Madame [E] et remboursée par les époux [V] 30.489 euros

Total : 7. 359. 096 euros,

Subsidiairement, dans l'hypothèse où la Cour considérerait que seul Monsieur [V] peut être indemnisé :

- condamner la Société Générale à supporter la condamnation prononcée contre Monsieur [V] dans la procédure relative au cautionnement, ayant donné lieu à deux arrêts de la cour d'appel d'Amiens des 15 novembre 2018 et 21 février 2019 dans l'hypothèse où cette condamnation deviendrait irrévocable,

- condamner la banque à lui verser la somme de 3. 679.548 euros (ou subsidiairement selon les hypothèses du tableau ci-dessous) au titre des postes de préjudice listés ci-dessous :

- indemnisation au titre de la perte du contrat Valcap 363.917 euros (à titre principal) 327.525 euros (à titre subsidiaire)

- préjudice lié à la déchéance des termes des crédits souscrits par les époux [V] 668. 988,5 (à titre principal), 197.111 euros (à titre subsidiaire),

A titre subsidiaire, sur la perte de valeur des parts sociales détenues par les époux [V] dans la SCI Berzin 695 570 euros :

- préjudice lié aux apports de fonds 234.753,50 euros,

- préjudice lié à la perte de valeur des parts sociales détenues dans la SCI des Famards et la SCI Martin Havez 549.854,5 euros,

- préjudice lié à la perte de valeur des sociétés Médianor, Tertianor, STTC et MTV 1 251.275,5 euros,

- préjudice lié à la perte des salaires, indemnités et retraites de Monsieur [V] 288. 296 euros,

- préjudice lié à la vente forcée de la propriété de [Localité 8] 54 249,50 euros,

- préjudice aux honoraires supportés dans les diverses procédures 88 354 euros,

- préjudice moral 137.500 euros,

- préjudice issu de la condamnation à régler une somme à la banque Scalbert Dupont, en leur qualité de caution de Tertianor 27.115 euros,

-préjudice lié à la somme prêtée par Madame [E] et remboursée par les époux [V] 15. 244,5 euros,

Total : 3. 679.548 euros

Dans l'hypothèse où la Cour considèrerait que seule Madame [V] peut être indemnisée :

- condamner la Société Générale à supporter la condamnation prononcée contre

Madame [V] dans la procédure relative au cautionnement, ayant donné lieu à deux arrêts de la cour d'appel d'Amiens des 15 novembre 2018 et 21 février 2019 dans l'hypothèse où cette condamnation deviendrait irrévocable,

- condamner la banque à lui verser la somme de 3.679.548 euros (ou subsidiairement selon les hypothèses du tableau ci-dessous) au titre des postes de préjudice listés ci-dessous :

- indemnisation au titre de la perte du contrat Valcap 363.917 euros (à titre principal), 327. 525 euros (à titre subsidiaire)

- préjudice lié à la déchéance des termes des crédits souscrits par les époux [V] 668 988,5 (à titre principal), 197.111 euros (à titre subsidiaire)

A titre subsidiaire, sur la perte de valeur des parts sociales détenues par les époux [V] dans la SCI Berzin 695 570 euros (à titre subsidiaire)

- préjudice lié aux apports de fonds 234.753,50 euros

- préjudice lié à la perte de valeur des parts sociales détenues dans la SCI des Famards et la SCI Martin Havez 549. 854,5 euros

- préjudice lié à la perte de valeur des sociétés Médianor, Tertianor, STTC et MTV 1.251.275,5 euros

- préjudice lié à la perte des salaires, indemnités et retraites de Madame [V] 288.296 euros

- préjudice lié à la vente forcée de la propriété de [Localité 8] 54. 249,50 euros

- préjudice aux honoraires supportés dans les diverses procédures 88. 354 euros

- préjudice moral 137.500 euros

- préjudice issu de la condamnation à régler une somme à la banque Scalbert Dupont, en leur qualité de caution de Tertianor 27.115 euros

-préjudice lié à la somme prêtée par Madame [E] et remboursée par les époux [V] 15.244,5 euros,

TOTAL 3 679 548 euros

Encore plus subsidiairement, si la cour souhaitait des précisions sur le calcul de certains postes de préjudice :

- nommer un expert judiciaire avec pour mission d'éclairer la cour sur le calcul de certains postes de préjudice,

- dire que les frais d'expertise (en ce compris la provision) seront supportés par la Société Générale.

En tout état de cause,

- constater que l'incident puis l'exception de nullité a été engagée particulièrement légèrement par la banque,

En conséquence,

- condamner la Société Générale au paiement, aux époux [V], de la somme de 4.000 euros en indemnisation du préjudice subi

- condamner la Société Générale au paiement aux époux [V] de la somme de 33.410 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction à la SCP Deleforge & Franchi en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Dans la présente procédure, par écritures notifiées par voie électronique le 9 octobre 2019, la Société Générale demande à la cour de :

Avant toute défense au fond,

- annuler la déclaration de saisine de la cour et les conclusions des époux [V] et leur communication de pièces,

- déclarer en tant que de besoin, la saisine de la cour et les demandes des époux [V] irrecevables,

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Lille du 16 décembre 2009 sauf à procéder à un retranchement,

- déclarer les époux [V] irrecevables ou mal fondés en leurs demandes,

- condamner in solidum Monsieur [C] [V] et Madame [P]

[S] à lui payer la somme de 20.000 euros de dommages et intérêts pour recours abusif,

- les condamner à lui payer une somme supplémentaire de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- les condamner, in solidum, aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 octobre 2019 à 15h19.

Le même jour à 15h58 la société Générale a notifié par voie électronique des écritures n° 2 bis.

Par conclusions de procédure notifiées par voie électronique le 25 octobre 2019, les époux [V] ont sollicité le rejet des conclusions notifiées par la société Générale le 24 octobre 2019 comme prises postérieurement à l'ordonnance de clôture et subsidiairement comme portant atteinte au principe du contradictoire, et encore plus subsidiairement la révocation de l'ordonnance de clôture et le report de la date des débats.

Le 28 octobre 2019, la société Générale a notifié par voie électronique un bordereau de communication de pièces n° 2 'après révocation de l'ordonnance de clôture'.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 30 octobre 2019, la société Générale a sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture et son prononcé au 19 novembre 2019, et subsidiairement le rejet des conclusions et pièces des époux [V] des 9 et 10 octobre 2019.

Par conclusions de procédure notifiées par voie électronique le 6 novembre 2019, les époux [V] ont sollicité le maintien de l'ordonnance de clôture, le rejet de toutes les demandes de la Société Générale contenues dans ses conclusions d'incident et au besoin, de ses écritures et de la pièce signifiée le jour de la clôture après le prononcé de l'ordonnance de clôture.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 20 novembre 2019, la société Générale a à nouveau sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture et son prononcé au 19 novembre 2019, et subsidiairement le rejet des conclusions et pièces des époux [V] des 9 et 10 octobre 2019.

Par conclusions de procédure notifiées par voie électronique le 26 novembre 2019, les époux [V] ont à nouveau conclu au maintien de l'ordonnance de clôture, au rejet de toutes les demandes de la Société Générale contenues dans ses conclusions d'incident et au besoin, de ses écritures et de la pièce signifiée le jour de la clôture et après le prononcé de l'ordonnance de clôture.

Sur la révocation de l'ordonnance de clôture

Aux termes de l'article 783 du Code de procédure civile dans sa version antérieure au décret du 11 décembre 2019, 'Après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.

Sont cependant recevables les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu'à l'ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l'objet d'aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture.

Sont également recevables les conclusions qui tendent à la reprise de l'instance en l'état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption'.

Selon l'article 784 du même code, 'l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue ; la constitution d'avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation.

Si une demande en intervention volontaire est formée après la clôture de l'instruction, l'ordonnance de clôture n'est révoquée que si le tribunal ne peut immédiatement statuer sur le tout.

L'ordonnance de clôture peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l'ouverture des débats, par décision du tribunal'.

En l'espèce, l'ordonnance de clôture a été rendue le 24 octobre 2019 et notifiée aux parties par voie électronique à 15h19.

Par conclusions du 30 octobre 2019, la société Générale a sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture et son prononcé au 19 novembre 2019, et subsidiairement le rejet des conclusions et pièces des époux [V] des 9 et 10 octobre 2019 aux motifs que la clôture a été prononcée le 24 octobre 2019, 14 jours après les conclusions des époux [V] qui comprennent 101 pages et après la communication par eux de 67 pièces nouvelles numérotées 135 à 202, ce alors qu'elle en avait sollicité le report et que 'sa demande ne semble pas avoir été prise en compte'.

Cependant, par ordonnance du 4 avril 2019, le conseiller de la mise en état, révoquant notamment le sursis à statuer prononcé par l'ordonnance du conseiller de la mise en état de Douai du 4 février 2016 à la demande de la Société Générale, a fixé un calendrier de procédure au 12 juin 2019 pour dernières écritures de la Société Générale, 9 octobre 2019 pour dernières écritures des époux [V], 24 octobre 2019 pour clôture et 19 décembre 2019 pour plaidoiries.

Faisant totalement abstraction de ce calendrier, la Société Générale a conclu les 18 avril 2019, 24 juin 2019 et 9 octobre 2019.

Les époux [V] ont quant à eux conclu les 9 et 10 octobre 2019.

L'ordonnance de clôture annoncée le 4 avril 2019 a donc été rendue le 24 octobre 2019 conformément au calendrier qui avait été fixé, après que chacune des parties a été en mesure de conclure et rejet de la demande de report de la banque.

Il n'existe donc aucune cause grave justifiant la révocation de l'ordonnance de clôture du 24 octobre 2019 ni aucun motif pour que les dernières écritures des époux [V] et les pièces qui y sont annexées, notifiées le 10 octobre 2019, soit antérieurement à l'ordonnance de clôture, soient écartées des débats.

En conséquence, les écritures n° 2 bis de la société Générale notifiées par voie électronique le 24 octobre 2019 à 15h58, manifestement en réaction à la réception de la notification de l'ordonnance de clôture, et qui lui sont postérieures, doivent être déclarées irrecevables tout comme les pièces qui y sont annexées et celles visées au bordereau de communication de pièces n° 2 notifié le 28 octobre 2019 alors que l'ordonnance de clôture n'avait pas été révoquée.

Par ailleurs, il convient de rappeler à titre liminaire que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières écritures des parties en application de l'article 954 du Code de procédure civile.

Sur les demandes de nullité de la déclaration de saisine de la cour, des conclusions des époux [V] et de leur communication de pièces et/ou d'irrecevabilité de la saisine de la cour

La société Générale conclut 'avant toute défense au fond' à l'annulation de la déclaration de saisine de la cour, des conclusions des époux [V] et de leur communication de pièces et 'en tant que de besoin' à l'irrecevabilité de la saisine de la cour.

Elle indique dans l'exposé des procédures figurant dans ses conclusions du 9 octobre 2019 (page 29) 'reprendre son exception de nullité de la déclaration de saisine de la cour de renvoi et des actes consécutifs, notamment des conclusions adverses, et subsidiairement son exception d'irrecevabilité de la saisine en 'se prévalant de son argumentation développée devant la cour d'appel d'Amiens' qu'elle rappelle néanmoins dans ses mêmes écritures prises dans le cadre du présent litige.

Elle fait valoir deux pages plus haut et au visa des articles 112 et suivants et 122 et suivants du code de procédure civile, qu'en 2016 et 2017, les époux [V] ont déclaré être domiciliés [Adresse 9], que le caractère fictif de ce domicile est apparu début 2018 tout en indiquant qu'un procès-verbal de recherches infructueuses a été établi le 24 octobre 2017 par l'huissier de justice chargé de délivrer un commandement aux époux [V] à la demande du Crédit du Nord, et que (donner) une adresse inexacte ou une fausse adresse constitue un agissement déloyal qui ne peut être régularisé.

Les époux [V] ont répondu à cette argumentation et soulèvent l'irrecevabilité de la demande dès lors que la banque a eu connaissance du vice affectant les actes depuis 2014 et qu'elle a conclu au fond postérieurement, et à titre subsidiaire invoque l'absence de grief pour la banque lié au caractère erroné de leur adresse. Ils ajoutent qu'en tout état de cause, l'exception soulevée par la Société Générale présente un caractère abusif et sollicitent à ce titre le paiement de la somme de 4.000 euros à titre de dommages intérêts.

La présente cour de renvoi après cassation du 28 janvier 2014 a été saisie par les époux [V] par déclaration du 27 juin 2014. Dans cette déclaration de saisine, les demandeurs ont déclaré être domiciliés [Adresse 9], ce qui correspondait à cette époque à leur adresse.

Il n'y a donc pas lieu d'annuler la déclaration d'appel pas plus que de la déclarer irrecevable, étant précisé qu'une partie de l'argumentation de la banque, contenue dans ses écritures du 9 octobre 2019, concernait manifestement la saisine de la cour d'appel d'Amiens et non pas de la cour d'appel de Douai.

Il n'est pas contesté par les époux [V] que leurs conclusions postérieures à la déclaration de saisine, notifiées en 2016 et 2017 comportaient toujours l'adresse de [Adresse 9] alors qu'ils indiquent avoir déménagé chez leur fille au [Adresse 4] en novembre 2014 puis au Portugal en juin 2015.

L'indication d'un domicile inexact est une cause d'irrecevabilité des conclusions en application des articles 960 et 961 du Code de procédure civile et non pas une cause de nullité. Elle peut donc être soulevée en tout état de cause. Pour autant, en l'espèce, dès leurs conclusions du 7 septembre 2018 les appelants ont indiqué leur adresse actuelle au Portugal. Il n'y a pas lieu dès lors de prononcer l'irrecevabilité des conclusions des époux [V] ni de leur communication de pièces.

Sur l'irrecevabilité des demandes des époux [V]

La banque conclut, toujours en tant que de besoin, à l'irrecevabilité des demandes des époux [V]. Elle invoque à la foi le caractère nouveau de la demande tendant à obtenir sa condamnation à leur payer 1.310.000 euros résultant d'un 'préjudice issu de la déchéance du terme des crédits de 8.000. 000 frs souscrits par eux' le 8 juin 1993 auprès de la SBN, la chose jugée et la prescription, et ajoute que les demandes indemnitaires fondées sur la réticence dolosive sont également irrecevables au motif que les époux [V] ne prouvent pas que la banque a eu sur la situation de Medianor et du groupe [V], des informations qu'ils n'auraient pas eues.

Sur la demande nouvelle

Les époux [V] n'ont pas répondu à l'exception de nouveauté de la demande tendant à obtenir la condamnation de la banque à leur payer la somme de

1.310.000 euros résultant d'un préjudice issu de la déchéance du terme des crédits de 8.000.000 francs souscrits par eux.

Devant le tribunal, ils sollicitaient paiement de la somme globale de 4.810.547, 61 euros sans qu'il soit possible d'identifier chacune de leurs demandes.

Devant la cour d'appel de Douai initialement saisie, il ont sollicité paiement de la somme totale de 3.641.642 euros correspondant à divers chefs de préjudice réclamés au titre des apports de fonds, de la perte de valeur des sociétés, de la perte de salaires, des indemnités de licenciement, retraites, parts de la SCPI Pierre Patrimoine, frais de procédure et préjudice moral. Cependant, la demande tendant à obtenir la condamnation de la banque à leur payer la somme de 1.310.000 euros résultant d'un préjudice issu de la déchéance du terme des crédits de 8.000.000 francs souscrits par eux tend aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges, à savoir obtenir réparation d'un préjudice résultant de fautes commises par la banque. Elle doit donc être déclarée recevable en application de l'article 565 du Code de procédure civile.

Sur la chose jugée

La banque fait valoir que les demandes des époux [V] sont irrecevables à raison de la chose jugée en vertu de l'arrêt de la cour de cassation du 28 juin 2014 (en réalité 28 janvier 2014) et de l'arrêt de la cour d'appel de Douai du 20 septembre 2012.

Par arrêt du 20 septembre 2012, la cour d'appel de Douai, déboutant les époux [V] du surplus de leurs prétentions, a dit que le préjudice subi par eux doit s'analyser en la perte de chance de ne pas avoir contracté, pour M. [V], de ne pas s'être porté caution et de ne pas avoir consenti de nantissement sur son contrat d'assurance-vie, et pour Mme [V], de ne pas avoir autorisé le cautionnement donné par son mari et ainsi engagé les biens communs.

Par arrêt du 28 janvier 2014, la Cour de Cassation a cassé et annulé l'arrêt rendu le

20 septembre 2012 par la cour d'appel de Douai seulement en ce qu'il a condamné la société Générale à payer à M. et Mme [V] la somme de 350.000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de son prononcé et 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, au motif que M. [C] [V] était une caution avertie et qu'il n'était pas fondé à rechercher la responsabilité de la banque à raison de la faute commise par elle lors de l'octroi du crédit. Rejetant par ailleurs le second moyen du pourvoi incident des époux [V] qui faisaient grief à l'arrêt du 20 septembre 2012 d'avoir rejeté leur demande tendant à obtenir, au titre de la responsabilité civile délictuelle de la banque, réparation des préjudices subis au titre des apports personnels de fonds, de la perte de valeur des sociétés, de la perte de salaire, indemnités de licenciement, retraite, parts de la SCPI Pierre patrimoine, de frais de procédure et de préjudice moral, la Cour de Cassation a dit, qu'ayant relevé qu'il ressortait tant de l'arrêt du 30 mars 2006 que d'un jugement du 22 avril 2010 qu'au moment de l'octroi du crédit de campagne jugé illégitime et de la prise des garanties, la situation de la société était lourdement obérée et que le crédit avait retardé l'ouverture de la procédure collective de la société, ce dont il résultait que le préjudice dont la réparation incombait à la banque consistait seulement en l'aggravation du passif résultant de ce retard, la cour d'appel a exactement retenu que les différents chefs de préjudices invoqués ne résultaient pas de la faute de la banque.

En conséquence, il y a donc bien autorité de chose jugée sur l'étendue du préjudice des époux [V] et ces derniers ne peuvent devant la cour de renvoi invoquer d'autres préjudices que celui consistant en l'aggravation du passif de la société Médianor et résultant du retard dans l'ouverture de la procédure collective de la société occasionné par l'octroi du crédit de campagne.

Sur la prescription

Se fondant sur l'article L 110-4 ancien du code de commerce la banque fait ici valoir que 'la demande' est irrecevable dès lors que le prétendu dommage s'est manifesté en 1999, soit plus de dix ans avant la demande.

L'arrêt du 20 septembre 2012 de la cour d'appel de Douai, confirmant le jugement du tribunal de commerce de Lille du 16 décembre 2009, a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action principale des époux [V]. Ce point n'a pas fait l'objet d'un pourvoi et a fortiori n'a pas été atteint par la cassation. Il n'y a donc pas lieu de statuer à nouveau sur la prescription.

Sur l'irrecevabilité des demandes indemnitaires fondées sur la réticence dolosive

La recevabilité d'une demande n'étant pas subordonnée à la démonstration préalable de son bien fondé, la demande de la banque tendant à voir déclarer irrecevables les demandes indemnitaires des époux [V] fondées sur la réticence dolosive au motif qu'ils ne prouvent pas que la banque a eu sur la situation de Medianor et du groupe [V], des informations qu'ils n'auraient pas eues, doit être rejetée.

Sur les demandes des époux [V]

Par arrêt confirmatif du 30 mars 2006, définitif, la cour d'appel de Douai a condamné la banque, poursuivie par maître [X] ès qualités de liquidateur de la société Medianor en responsabilité, à payer à ce dernier la somme de 460.000 euros en réparation du préjudice résultant de l'octroi du crédit de campagne de trois millions de francs, considérant que celui-ci n'était pas légitime et que ce concours n'avait servi qu'à retarder la procédure collective de la société Médianor et se trouvait à l'origine d'un préjudice subi par celle-ci.

Les époux [V] agissent dans le cadre du présent litige en responsabilité contre la banque sur le fondement de l'article 1382 ancien du Code civil en raison de différentes fautes qu'elle aurait commises à l'encontre de la société Médianor. Ils reprochent à la banque à la fois d'avoir soutenu abusivement la société Médianor, octroyé à la société Médianor un crédit de campagne inadapté, refusé d'octroyer à la société Médianor le crédit à moyen terme et d'avoir refusé de débloquer l'assurance vie Valcap pour la recapitalisation, points sur lesquels elle s'était engagée et abusivement rompu son concours à la société Médianor.

Il est constant que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage.

En l'espèce il a été définitivement jugé que la faute contractuelle de la banque commise à l'encontre de la société Médianor est à l'origine d'un préjudice distinct et personnel des époux [V] en raison de la seule mise en oeuvre des garanties consenties en suite de la procédure collective des sociétés Medianor et Tertianor survenues le 18 janvier 1999, tout autre préjudice ayant été exclu.

Pour autant, s'agissant de la demande tendant à faire supporter par la banque la condamnation prononcée contre les époux [V] dans la procédure relative au cautionnement ayant donné lieu aux arrêts de la cour d'appel d'Amiens des 15 novembre 2018 et 21 février 2019, il suffit de relever que les appelants indiquent eux mêmes que ces deux décisions font actuellement l'objet de pourvois en cassation déposés pour le premier le 6 mars 2019 et le second le 21 mars 2019. Les demandes formées dans l'hypothèse où les arrêts de la cour d'appel d'Amiens seraient irrévocables ne peuvent donc prospérer.

S'agissant du nantissement sur le contrat d'assurance vie et en tout état de cause,

M. [V] était une caution avertie, ce qu'il ne conteste pas.

Par ailleurs, la Cour de Cassation, dans son arrêt du 28 janvier 2014, a rejeté le premier moyen du pourvoi incident des époux [V] ; elle a approuvé la cour d'appel qui, dans son arrêt du 20 septembre 2012, après avoir relevé que M. [V], président du conseil d'administration et dirigeant de plusieurs entités juridiques du groupe auquel appartenait la société, était totalement impliqué dans l'opération de restructuration financière qu'il a lui-même proposée à la banque, a retenu que M.[V] ne démontrait pas que la banque lui avait dissimulé son intention véritable qui était de se constituer un débiteur substitué et de ne pas consentir à la restructuration et aux concours sollicités, et d'avoir déduit de ces constatations et appréciations qu'en l'absence d'éléments tendant à démontrer que la banque avait sur la société des informations que M. [V] ignorait, celui-ci, parfaitement informé de la situation de ses sociétés, ne pouvait reprocher à la banque un manquement à son obligation d'information et une quelconque réticence dolosive.

M. [V] ne peut donc invoquer devant la cour de renvoi l'existence de circonstances exceptionnelles tenant au fait que la banque savait, au moment où elle a sollicité sa garantie et celle de M. [O] [V], qu'elle n'accorderait pas le crédit à moyen terme et ne cherchait, en réalité, que des débiteurs de substitution ou encore qu'il y avait dissymétrie d'informations entre lui et la Société Générale. Il ne peut pas plus utilement soutenir que le préjudice auquel il peut prétendre ne résulte pas de la faute de la banque lors de l'octroi du crédit et qu'il ne pouvait anticiper ses agissements. Il n'est dès lors pas fondé à rechercher la responsabilité de la banque à raison de la faute commise par celle-ci lors de l'octroi du crédit.

S'agissant de Mme [V], il résulte tant de l'acte de cautionnement du 13 mars 2018 que du jugement du tribunal de commerce de Lille du 25 septembre 2013, que cette dernière n'était pas caution de la société Medianor. Mme [V] était cependant associée de la société Tertianor dans laquelle elle occupait un poste de direction, associée des sociétés Medianor, MTV et STTC, des SCI des Famars et Berzin, et cogérante de la SCP Coudel. Elle a ainsi consenti au cautionnement donné par

M. [V] en totale connaissance de la situation financière de la société Medianor et ne peut pas plus rechercher la responsabilité de la Société Générale à raison de la faute commise par elle lors de l'octroi du crédit de campagne.

Enfin les autres préjudices invoqués ne résultent pas de la faute de la banque telle que retenue à l'encontre de la société Médianor, et partant de M. et/ ou Mme [V].

En conséquence, les époux [V], pris ensemble ou séparément, doivent être déboutés de l'intégralité de leurs demandes, et ce sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise pour évaluer leurs préjudices.

Sur les autres demandes

Le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt, sous réserve toutefois d'abus, et le fait d'intenter une action ou d'opposer des moyens de défense à une demande n'est pas en soi générateur de responsabilité. Il y a lieu en conséquence de débouter la Société Générale de sa demande de dommages intérêts pour recours abusif, au demeurant non motivée.

Les époux [V] qui succombent seront condamnés, in solidum, aux dépens.

Enfin la Société Générale a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge. Il y a lieu en conséquence de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture.

Déclare irrecevables les conclusions notifiées par voie électronique le 24 octobre 2019 postérieurement à l'ordonnance de clôture par la Société Générale.

Déboute la Société Générale de sa demande de nullité de la saisine de la cour, des conclusions des époux [V] et de leur communication de pièces.

Rejette la demande de dommages intérêts des époux [V].

Déclare irrecevables les demandes des époux [V] tendant à obtenir réparation de préjudices autres que celui consistant en l'aggravation du passif résultant du retard dans l'ouverture de la procédure collective de la société Médianor occasionné par l'octroi du crédit de campagne.

Rejette le surplus des fins de non recevoir.

Déboute les époux [V] de l'ensemble de leurs demandes d'indemnisation dirigées à l'encontre de la Société Générale.

En conséquence,

Confirme le jugement rendu le 16 décembre 2009 par le tribunal de commerce de Lille.

Déboute la Société Générale de sa demande de sa demande de dommages intérêts pour recours abusif.

Condamne M. et Mme [V] à payer à la Société Générale la somme de

3.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Rejette le surplus des demandes.

Condamne in solidum M. et Mme [V] aux dépens.

Le greffierLa présidente

Stéphanie HurtrelVéronique Renard


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 16/05552
Date de la décision : 28/05/2020

Références :

Cour d'appel de Douai 21, arrêt n°16/05552 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-05-28;16.05552 ?
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