République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
TROISIEME CHAMBRE
ARRÊT DU 30 AVRIL 2020
N° MINUTE :20/135
N° RG 18/06910 - N° Portalis DBVT-V-B7C-SBFL
Jugement (N° 17/01256) rendu le 8 novembre 2018
par le tribunal de grande instance de Cambrai
APPELANTE
SA AXA FRANCE IARD prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 2]
[Localité 8]
Représentée par Me Loïc LE ROY, avocat au barreau de Douai
et Me Xavier Leducq, avocat au barreau de Paris
INTIMÉS
Monsieur [F] [U]
né le [Date naissance 1] 1992 à [Localité 11]
[Adresse 3]
[Localité 9]
Représenté par Me Guy FOUTRY, avocat au barreau de Douai
et Me Mounir Aidi, avocat au barreau de Paris
Monsieur [C] [X]
né le [Date naissance 6] 1938 à LE [Localité 10]
[Adresse 7]
[Localité 9]
Représenté par Me Loïc LE ROY, avocat au barreau de DOUAI
et Me Xavier Leducq, avocat au barreau de Paris
Etablissement CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU HAINAUT Prise en la personne de son représentant légal
à laquelle la déclaration d'appel a été signifiée le 6 février 2019 à personne habilitée
[Adresse 5]
[Localité 4]
DÉBATS à l'audience publique du 26 février 2020 tenue par Claire Bertin magistrate chargée d'instruire l'affaire qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile ).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Betty MORADI
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Hélène CHATEAU, Première présidente de chambre
Claire BERTIN, Conseillère
Sara LAMOTTE, Conseillère
ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition le 30 Avril 2020 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Hélène CHÂTEAU, Président et Véronique CAILLIEZ, adjointe administrative greffière, à laquelle la minute a été remise par la magistrate signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 21 JANVIER 2020
EXPOSE DU LITIGE
Le 4 septembre 2013 vers 19 heures 15 à [Localité 9] (Nord) est survenu un accident de la circulation routière entre le véhicule automobile conduit par M. [X], qui a effectué une man'uvre pour tourner à gauche afin de se stationner devant son domicile, et la motocyclette conduite par M. [U], qui, circulant en sens inverse, et doublant un véhicule de sapeurs-pompiers, est venue percuter l'arrière du véhicule de M. [X].
Grièvement blessé à la suite de la collision, M. [U], âgé de 20 ans pour être né le [Date naissance 1] 1992, a été conduit à l'hôpital, où lui ont été diagnostiqués une paralysie du plaxus brachial droit, un traumatisme thoracique, des fractures de la rotule droite, des deux os de l'avant bras gauche, et de la malléole gauche.
Par jugement du 7 mars 2014, le tribunal correctionnel de Cambrai a relaxé M. [X] des chefs de blessures involontaires et refus de priorité, au motif qu'il n'existait pas d'élément de nature à caractériser ces infractions, mais l'a condamné pour conduite d'un véhicule automobile en état alcoolique.
Par ordonnance du 25 septembre 2014, le président du tribunal de grande instance de Nanterre a ordonné une mesure d'expertise judiciaire et a condamné M. [X] et son assureur, la société Axa France Iard, à payer à M. [U] une indemnité provisionnelle de 7500 euros à valoir sur la réparation de son préjudice.
Dans son rapport d'expertise du 11 avril 2016, le professeur [T] a fixé la date de consolidation de M. [X] au 25 janvier 2016, et a retenu un déficit fonctionnel permanent à hauteur de 45% en raison des séquelles physiques en rapport direct avec l'accident.
La société Axa France Iard a procédé à différents versements provisionnels au bénéfice de M. [U] dont les montants ne sont pas contestés, soit 7 500 euros en exécution de l'ordonnance de référé, puis 30 000 euros selon offre du 24 mars 2015, 45 000 euros selon offre du 9 septembre 2016, et 30 000 euros selon offre du 20 mars 2018.
Par jugement du 8 novembre 2018, le tribunal de grande instance de Cambrai a :
- fixé comme suit les préjudices subis par M. [U] à l'occasion de l'accident de la circulation survenu le 4 septembre 2013 et impliquant son propre véhicule terrestre à moteur et celui conduit par M. [X] :
57,57 euros au titre des dépenses de santé actuelles,
3 660,78 euros au titre des perte de gains professionnels actuels,
19 333,62 euros au titre des frais divers,
330 596,58 euros au titre perte de gains professionnels futurs,
310 388,82 euros au titre de l'incidence professionnelle,
472 920,88 euros au titre de la réduction d'autonomie, se décomposant comme suit :
3 414,02 euros au titre des frais de logement adapté,
10 695,69 euros au titre des frais de véhicule adapté,
458 811,17 euros au titre de l'assistance par une tierce personne permanente,
18 365 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,
35 000 euros au titre des souffrances endurées,
3 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,
144 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,
6 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent,
20 000 euros au titre du préjudice d'agrément,
9 000 euros au titre du préjudice sexuel,
- dit que M. [U] avait commis une faute de nature à limiter de 15 % l'indemnisation des dommages qu'il a subis au travers de l'accident de la circulation du 4 septembre 2013 impliquant son propre véhicule terrestre à moteur et celui conduit par M. [X], et limité comme suit les préjudices qu'il a subis :
49,83 euros au titre des dépenses de santé actuelles,
3 111,66 euros au titre des perte de gains professionnels actuels,
16 433,57 euros au titre des frais divers,
281 007,09 euros au titre perte de gains professionnels futurs,
263 830,46 euros au titre de l'incidence professionnelle,
401 982,74 euros au titre de la réduction d'autonomie,
15 610,25 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,
29 750 euros au titre des souffrances endurées,
2 550 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,
122 400 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,
5 100 euros au titre du préjudice esthétique permanent,
17 000 euros au titre du préjudice d'agrément,
7 650 euros au titre du préjudice sexuel,
- déclaré M. [X] et la société Axa France Iard, son assureur, solidairement responsables des dommages subis par M. [U] lors de l'accident de la circulation du 4 septembre 2013, à hauteur de 85 %,
- constaté qu'une indemnisation provisionnelle d'un montant de 112 500 euros avait été versée à M. [U] par la société Axa France Iard,
- constaté qu'aucune offre d'indemnisation n'avait été faite à M. [U] dans les délais impartis par le code des assurances,
- condamné en conséquence solidairement M. [X] et la société Axa France Iard au paiement de la somme de 1 053 974,73 euros à M. [U], en réparation du préjudice global subi,
- dit que cette somme produira doublement intérêts à compter du 5 mai 2014 jusqu'au jour du jugement devenu définitif,
- fixé la créance de la CPAM du Hainaut à la somme de 116 796,59 euros,
- condamné solidairement M. [X] et la société Axa France Iard à payer à M. [U] la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles,
- condamné solidairement M. [X] et la société Axa France Iard aux entiers dépens, en ce compris ceux de l'instance de référé, et accordé à Me Mounir Aidi, membre de la SELARL Desse-Carmignac-Aidi, avocat au barreau de Paris, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- déclaré le jugement commun à la CPAM du Hainaut,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire de la décision.
Par déclaration au greffe du 20 décembre 2018, la société Axa France Iard a interjeté appel en toutes ses dispositions du jugement du 8 novembre 2018, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas critiquées.
Dans leurs conclusions d'appelants n°2 notifiées le 30 août 2019, la société Axa France Iard et M. [X] demandent à la cour de :
- les déclarer recevables et bien fondés en leurs appel et appel incident,
- infirmer la décision entreprise et statuant à nouveau :
- réduire le droit à indemnisation de M. [U] à hauteur de 75 %, la faute de conduite de la victime ayant contribué à la survenance de son dommage à hauteur de 25 %,
- surseoir à statuer s'agissant de l'indemnisation des pertes des gains professionnels actuels et futurs, incidence professionnelle et déficit fonctionnel permanent, dans l'attente de la production par M. [U] de :
la créance actualisée de la CPAM du Hainaut,
la notification du montant de l'allocation adulte handicapé,
l'attestation sur l'honneur de M. [U] relative à l'absence de perception d'indemnités journalières du 26 janvier 2016 au 3 septembre 2016,
l'attestation sur l'honneur de M. [U] relative à l'absence de perception d'une pension d'invalidité à compter du 3 septembre 2016,
la production des justificatifs de recherche d'emploi ayant permis la perception d'allocations de retour à l'emploi du 19 décembre 2016 au 19 janvier 2019,
la production des bordereaux de versement des allocations de retour à l'emploi du 19 décembre 2016 au 19 janvier 2019,
subsidiairement,
- ordonner le versement des postes patrimoniaux permanents futurs sous forme de rente, soit encore, la moitié sous forme de rente et la moitié sous forme de capital,
- fixer l'indemnisation du préjudice corporel de M. [U] de la façon suivante après réduction du droit à indemnisation :
4 608 euros au titre des frais divers (tierce personne avant consolidation),
3 800,48 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels,
débouté au titre des frais futurs (frais divers après consolidation),
débouté au titre des pertes de gains professionnels futurs,
subsidiairement,
30 361,92 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs échus,
une rente de 375 euros indexée chaque année selon les dispositions de l'article 43 de la loi du 5 juillet 1985 au titre des pertes de gains professionnels futurs à échoir,
sur l'incidence professionnelle :
débouté au titre du préjudice d'inactivité,
débouté au titre du préjudice de carrière,
débouté au titre de l'incidence sur les droits à la retraite,
30 000 euros au titre de la dévalorisation sur le marché du travail,
8 021,76 euros au titre de l'aménagement du véhicule,
361 366,71 euros au titre de l'assistance par tierce personne définitive, alloués sous forme de rente viagère et trimestrielle, revalorisée conformément à la loi du 5 juillet 1985 et qui sera suspendue en cas de prise en charge du blessé dans un établissement médical,
13 773,75 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,
6 000 euros au titre du préjudice sexuel,
- fixer la sanction du doublement des intérêts sur le montant de l'offre provisionnelle, soit 7500 euros du 4 mai 2014 au 9 septembre 2014,
subsidiairement,
- constater que la société Axa France Iard a présenté une offre par courrier recommandé du 7 juin 2017 portant des propositions complètes et suffisantes,
- dire et juger que le doublement de l'intérêt au taux légal interviendra sur la somme offerte de 218 381,87 euros avant déduction des provisions sur la période écoulée entre le 6 novembre 2016 et le 7 juin 2017,
- condamner M. [U] au versement d'une somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de la présente instance.
Dans ses conclusions de synthèse notifiées le 1er octobre 2019, M. [U] sollicite l'infirmation du jugement querellé en ses dispositions contraires à ses écritures. Il demande à la cour de :
sous déduction des sommes exposées par la CPAM du Hainaut poste par poste conformément aux dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale,
- débouter M. [X] et la société Axa France Iard de l'ensemble de leurs fins et conclusions contraires à ses écritures,
- juger que M. [X] et la société Axa France Iard sont solidairement responsables à hauteur de 100% des dommages qu'il a subis lors de l'accident de la circulation du 4 septembre 2013,
- condamner conjointement et solidairement M. [X] et la société Axa France Iard à lui payer les sommes suivantes :
57,57 euros au titre des dépenses de santé actuelles,
20 357,62 euros au titre des frais divers se décomposant comme suit :
179,25 euros au titre des frais de télévision,
7 458 euros au titre des frais de déplacement,
2 160 euros au titre des frais de médecin conseil,
832,37 euros au titre des frais divers,
9 758 euros au titre de la tierce personne avant consolidation,
12 016,82 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels,
249,99 euros au titre des frais divers après consolidation,
423 094,96 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs,
464 956,35 euros au titre de l'incidence professionnelle,
510 167,10 euros au titre de l'assistance par une tierce personne après consolidation,
12 866,86 euros au titre des frais de véhicule adapté,
3 414,02 euros au titre des frais de logement adapté,
19 319,98 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,
35 000 euros au titre des souffrances endurées,
3 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,
144 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,
15 000 euros au titre du préjudice sexuel,
6 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent,
20 000 euros au titre du préjudice d'agrément,
- dire que toutes les condamnations porteront intérêts au double du taux de l'intérêt légal à compter du 5 mai 2014,
- ordonner la capitalisation du doublement des intérêts,
- dire que le recours de la caisse s'exercera dans les conditions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale,
- dire et juger qu'il conviendra de déduire de son préjudice personnel les provisions d'ores et déjà versées pour la somme de 112 500 euros,
- confirmer la condamnation de M. [X] et de la société Axa France Iard à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile prononcée par le tribunal de grande instance de Cambrai,
y ajoutant,
- condamner conjointement et solidairement M. [X] et la société Axa France Iard à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner conjointement et solidairement M. [X] et la société Axa France Iard aux entiers dépens comprenant ceux de la procédure de référé expertise, ceux de la procédure de première instance et ceux de la procédure d'appel, dont distraction pour ces derniers au profit de Me Foutry, avocat aux offres de droit.
La CPAM du Hainaut n'a pas constitué avocat devant la cour, mais par courrier reçu le 10 juillet 2019, déclarant ne pas entendre intervenir dans l'instance d'appel, elle a fixé le montant de ses débours définitifs suivant décompte arrêté au 8 décembre 2016 à la somme de 116 796,59 euros.
Pour un plus ample exposé des moyens de chacune des parties, il y a lieu de se référer aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 janvier 2020.
MOTIFS DE LA DECISION
I - Sur l'étendue du droit à indemnisation de la victime
Le premier juge a dit que M. [U] avait commis une faute de nature à limiter de 15 % l'indemnisation des dommages qu'il a subis suite à l'accident de la circulation du 4 septembre 2013 impliquant son propre véhicule terrestre à moteur et celui conduit par M. [X].
M. [X] et la société Axa France Iard demandent à la cour de réduire de 25% le droit à indemnisation de M. [U], faisant valoir que la faute de ce dernier en relation avec son dommage doit être appréciée en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur impliqué ; ils exposent que M. [U] circulait en agglomération à une vitesse excessive lors de l'accident, opérant une man'uvre de dépassement d'un camion de pompiers sur la voie opposée sans aucune visibilité.
M. [U] sollicite la reconnaissance d'un droit à indemnisation intégral, indiquant qu'il n'a jamais été établi qu'il se trouvait en excès de vitesse au moment de l'accident lequel, s'il était démontré, serait constitutif d'une faute de comportement qui doit être en lien de causalité dans la survenance du fait dommageable. Il rappelle que M. [X] était lui-même sous l'empire d'un état alcoolique.
Sur ce,
Aux termes de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis.
En application de ces dispositions, la faute est opposable à la victime conducteur pour l'indemnisation de tous ses dommages corporels et matériels, étant précisé qu'est considéré comme conducteur celui qui accomplit les gestes nécessaires à la conduite d'un véhicule ou qui, tout au moins, en conserve la maîtrise.
Des procès-verbaux d'enquête de police, il apparaît que le 4 septembre 2013 vers 19 heures 15 à [Localité 9] est survenu un accident de la circulation routière entre l'automobile conduite par M. [X], qui a tourné à gauche pour se stationner devant son domicile, et qui, alors qu'il terminait sa man'uvre, a été percuté à l'arrière par une motocyclette Honda de forte cylindrée (600cm3) conduite par M. [U] qui, circulant en sens inverse, doublait un camion de sapeurs-pompiers sans aucune visibilité.
Entendu, M. [X], qui avait consommé de l'alcool, a indiqué qu'il n'avait pas vu arriver le motocycliste, alors qu'il s'était déjà engagé pour se stationner devant chez lui.
Si le motard a déclaré ne plus se souvenir des circonstances de l'accident, il ressort des auditions des pompiers que ce dernier, qui était entrain de les doubler, accélérait fortement, alors que leur camion circulait en agglomération à une vitesse de l'ordre de 40 à 50 km/h, et que la visibilité inexistante en raison d'un soleil éblouissant ne lui avait pas permis de voir le véhicule automobile qui tournait.
Le pompier, M. [Y], a entendu que le motocycliste «'passait un rapport de vitesse en mettant les gaz'», et a estimé que «'la moto était arrivée très vite sur la voiture [...] avec des circonstances climatiques qui gênaient l''il'».
Comme l'a exactement apprécié le premier juge, le comportement de M. [U] a contribué à la réalisation de son propre dommage, par une man'uvre intrinsèquement dangereuse (le dépassement d'un véhicule en agglomération) et rendue davantage encore périlleuse par les conditions de sa réalisation (la mauvaise visibilité), le privant de la maîtrise nécessaire de son allure et de son véhicule, l'amenant à percuter l'arrière du véhicule de l'automobiliste, étant rappelé que le camion des sapeurs-pompiers, dépassé par le motocycliste et circulant donc immédiatement derrière celui-ci, a lui été en mesure de ralentir et s'arrêter devant la collision, sans générer de sur-accident.
La cour considère qu'il y a lieu de retenir la commission par la victime d'une faute ayant contribué à la réalisation de son propre préjudice, dans une proportion qu'il convient de fixer à 25 %.
Le droit à indemnisation de M. [U] sera par conséquent limité à 75%.
II - Sur l'indemnisation de M. [U]
A - Sur la demande de sursis à statuer sur les postes de préjudices soumis à recours de l'organisme social
M. [X] et la société Axa France Iard sollicitent qu'il soit sursis à statuer sur les demandes de M. [U] au titre des préjudices soumis à recours dans l'attente de la production de pièces complémentaires. Ils soutiennent que la créance de la CPAM du Hainaut n'est pas actualisée dans le relevé de débours définitifs du 8 décembre 2016, dans la mesure où il n'est pas précisé le montant des indemnités journalières versées jusqu'aux trois ans de l'accident, ni la pension d'invalidité susceptible d'être perçue par M. [U]. Ils objectent que la perception d'une allocation adulte handicapé, outre d'indemnités d'aide au retour à l'emploi, n'est pas exclusive de la perception d'une pension d'invalidité.
M. [U] s'oppose à la demande de sursis à statuer formulée, selon lui, à titre dilatoire, faisant valoir que :
- seule la CPAM est compétente pour attribuer et liquider les pensions d'invalidité conformément aux dispositions de l'article L. 341-7 du code de la sécurité sociale ;
- il n'a déposé aucune demande de pension d'invalidité auprès de la CPAM du Hainaut ;
- l'état des débours de la CPAM du Hainaut du 8 décembre 2016 est un état de débours définitifs, qui a été adressé au tribunal de grande instance de Cambrai par lettre du 17 août 2017, puis réitéré par envoi à la cour par lettre du 3 juillet 2019 ;
- il perçoit, suivant attestation de la caisse d'allocations familiales du 11 septembre 2019, une allocation adulte handicapé mensuelle de 860 euros, ce qui démontre qu'aucune pension d'invalidité n'est déduite de son allocation.
Sur ce,
Il s'observe que suivant relevé des débours définitifs du 8 décembre 2016, adressé à la cour par lettre du 3 juillet 2019, la CPAM du Hainaut fixe à la somme de 116 796,59 euros le montant de ses débours au titre des frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques, d'appareillage, de transport et des indemnités journalières, suite à l'accident de la circulation du 4 septembre 2013 dont M. [U] a été victime.
Il s'ensuit que cette créance est donc parfaitement actualisée jusqu'au 8 décembre 2016 au regard de la date de consolidation, des frais médicaux et des indemnités journalières effectivement versées, et qu'il n'y a pas de frais futurs à prévoir.
Suivant notification de la Maison départementale des personnes handicapées du Nord, M. [U] perçoit pour trois ans à compter du 1er décembre 2018 une allocation adulte handicapé, dont le montant mensuel s'élève à 860 euros suivant attestation de paiement de la caisse d'allocations familiales du Nord du 11 septembre 2019, étant d'ailleurs précisé que l'allocation adulte handicapé, pas plus que l'allocation d'aide au retour à l'emploi versée par Pôle emploi, toutes deux dépourvues de caractère indemnitaire, ne sauraient être prises en compte pour évaluer la perte de gains professionnels futurs.
De l'ensemble des pièces versées au débat, il résulte que M. [U] ne perçoit aucune pension d'invalidité de la CPAM du Hainaut.
Il s'ensuit que les appelants seront purement et simplement déboutés de leur demande de sursis à statuer dans l'attente de la production de pièces complémentaires par l'intimé.
B - Sur le mode de règlement des préjudices futurs
Le premier juge a opté pour la réparation des préjudices patrimoniaux permanents sous forme de capital.
La société Axa France Iard et M. [X] proposent de procéder à une réparation des préjudices au titre des pertes de gains professionnels futurs et de l'assistance par une tierce personne à échoir sous forme de rente viagère, afin de sécuriser dans le temps les versements entre les mains de la victime.
M. [U] s'oppose à la proposition de l'assureur, arguant de ce que sa reconstruction et son projet de vie nécessitent des investissements immédiats, afin notamment d'acquérir un bien immobilier adapté à son handicap, et de lui permettre d'aménager son environnement personnel.
Sur ce, il appartient au juge du fond, dans le cadre de son pouvoir souverain d'appréciation, de choisir le mode de réparation du dommage, sous forme de rente ou de capital.
La cour considère que la réparation en capital présente le double avantage pour la victime de disposer d'un capital qu'elle peut librement investir ou placer pour en retirer les revenus qui lui sont nécessaires, et pour l'assureur de clôturer son dossier et d'apurer ses comptes.
Aucun élément de l'espèce ne vient justifier que soit écarté le choix de la victime de recevoir l'intégralité de l'indemnisation qui lui est due sous forme de capital.
Comme l'a exactement rappelé le premier juge, un débiteur ne peut fixer unilatéralement les modalités d'exécution de ses obligations.
En conséquence, la cour retiendra le versement de l'indemnisation des postes patrimoniaux permanents futurs sous forme de capital.
C - Sur le barème de capitalisation applicable
Il est rappelé que le choix du barème de capitalisation, support de l'évaluation des préjudices futurs, relève du pouvoir souverain du juge du fond.
Le parties ne contestent pas le choix du premier juge lequel a opté pour l'application du barème de capitalisation édité pour 2018 par la Gazette du palais (publié le 29 novembre 2017), qui est fondé sur une espérance de vie issue des tables de mortalité 2010-2012, un taux d'intérêt de 0,5% corrigé de l'inflation, permettant ainsi de protéger la victime contre les effets de l'érosion monétaire, et constituant le référentiel le mieux adapté à l'espèce.
D - Sur l'évaluation des préjudices
1 - Sur l'évaluation des préjudices patrimoniaux
a - Sur les préjudices patrimoniaux temporaires
1° - Sur les dépenses de santés actuelles
Le premier juge a fixé la créance de M. [U] une somme de 57,57 euros à ce titre.
Les appelants ne contestent pas ce poste de préjudice.
M. [U] sollicite de ce chef la confirmation du jugement querellé.
La CPAM du Hainaut n'entend pas intervenir à l'instance. Dans un relevé en date du 8 décembre 2016, la caisse chiffre ses débours, avant consolidation fixée au 25 janvier 2016, aux sommes suivantes':
77 315,31 euros au titre des frais d'hospitalisation entre le 4 septembre 2013 et le 11 juin 2015,
2 325,72 euros au titre des frais médicaux,
732,41 euros au titre des frais pharmaceutiques,
906,56 euros au titre des frais d'appareillage,
14 523,49 euros au titre des frais de transport
soit un total de 95 803,49 euros.
Sur ce,
Les dépenses de santé actuelles correspondent à l'ensemble des frais médicaux, hospitaliers, pharmaceutiques, et paramédicaux exposés par la victime ou pris en charge par les organismes sociaux durant la phase temporaire d'évolution de la pathologie traumatique jusqu'à la date de la consolidation.
Les créances alléguées par la caisse sont imputables à l'accident corporel.
Les factures produites par M. [U] ne sont pas contestées.
Il y a lieu de fixer le poste des dépenses de santé actuelles en lien avec le fait dommageable à la somme de 95 861,06 euros (soit 57,57 euros + 95 803,49 euros).
Compte tendu de la limitation du droit à indemnisation de la victime à hauteur de 75%, l'indemnité à la charge du tiers responsable s'élève à la somme de 71 895,80 euros (soit 95861,06 euros x 75%).
En application de l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985, il convient d'allouer à la victime ce qui lui reste dû après déduction des prestations ayant partiellement réparé ce poste mais dans la limite de l'indemnité mise à la charge du tiers responsable, puis d'accorder le solde au tiers payeur.
En conséquence, il convient de condamner in solidum M. [X] et la société Axa France Iard à payer à M. [U] la somme de 57,57 euros au titre des dépenses de santé actuelles restées à charge, et de fixer la créance de la CPAM du Hainaut à la somme de 71838,23 euros (soit 71 895,80 ' 57,57) au titre des dépenses de santé actuelles.
2° - Sur les pertes de gains professionnels actuels
Le premier juge a fixé la créance de M. [U] à ce titre à la somme de 3 660,78 euros.
Les appelants offrent une indemnisation de 5 067,31 euros avant limitation du droit à réparation, arguant de ce qu'il convient de déduire de la rémunération nette moyenne de M. [U], égale à 1 142,57 euros pendant 28 mois, les indemnités journalières et les indemnités de prévoyance versées par son employeur.
M. [U] sollicite une indemnisation de 12 016,82 euros sur la base d'une rémunération mensuelle brute de 1 441 euros, indiquant que les indemnités journalières versées sont brutes, puisque intégrant la CSG et la CRDS.
Sur ce, la cour rappelle que les pertes de gains professionnels actuels correspondent aux pertes de gains liées à l'incapacité provisoire de travail et tendent à la réparation exclusive du préjudice patrimonial temporaire subi par la victime du fait de l'acte dommageable, c'est à dire aux pertes actuelles de revenus éprouvées par cette victime du fait de son dommage jusqu'à sa date de consolidation.
La cour rappelle encore que l'indemnisation des pertes de gains professionnels étant égale au coût économique du dommage pour la victime, la perte de revenus se calcule en net et hors incidence fiscale.
Avant l'accident, M. [U] percevait un salaire mensuel net moyen de 1 142,57 euros.
Du 4 septembre 2013, date de l'accident, au 25 janvier 2016, date de consolidation, il a perçu des indemnités journalières de la CPAM du Hainaut d'un montant brut de 20 993,10 euros, étant ici précisé que les parties s'accordent pour retenir une perte de gains pendant une durée de 28 mois.
Les indemnités journalières nettes perçues, après déduction de la CRDS au taux réduit de 6,20% et de la CSG au taux de 0,50% (soit 20 993,10 x 6,70% = 1 406,53 euros), s'élèvent à la somme de 19 586,57 euros.
M. [U] ayant un salaire mensuel net moyen de 1 142,57 euros a subi un arrêt de travail pendant vingt-huit mois. L'état des débours de la CPAM du Hainaut mentionne le versement d'indemnités journalières mensuelles brutes de 20 993,10 euros, soit 19 586,57 euros nets et 1 406,53 euros constituant la CSG et la CRDS précomptées sur les indemnités journalières.
Le préjudice au titre des pertes de gains professionnels actuels doit être calculé comme suit :
31 991,96 euros (correspondant au salaire net, soit 1 142,57 x 28 mois) + 1 406,53 euros (correspondant aux charges sociales précomptées sur les indemnités journalières), soit un total de 33 398,49 euros.
Pour liquider le préjudice, il convient de répartir cette indemnité selon les modalités suivantes :
- M. [U] perçoit la différence entre son salaire net et les indemnités journalières nettes, 31 991,96 - 19 586,57 = 12 405,39 euros ;
- la CPAM du Hainaut perçoit, au titre de son recours subrogatoire, le montant brut des indemnités journalières payées, soit 20 993,10 euros.
De la part revenant à la victime, il convient également de déduire le montant des salaires maintenus par l'employeur sur la période considérée, étant observé que la somme de 7338,08 euros au titre de la prévoyance employeur n'est pas contestée par les parties.
Il en résulte que la créance de M. [U] au titre des pertes de gains professionnels actuels doit être fixée à la somme de 5 067,31 euros (soit 12 405,39 ' 7 338,08).
Compte tendu de la limitation du droit à indemnisation de la victime à hauteur de 75%, l'indemnité à la charge du tiers responsable s'élève à la somme de 19 545,31 euros (soit (20993,10 + 5 067,31) x 75%).
En application de l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985, il convient d'allouer à la victime ce qui lui reste dû après déduction des prestations ayant partiellement réparé ce poste mais dans la limite de l'indemnité mise à la charge du tiers responsable, puis d'accorder le solde au tiers payeur.
Il convient de condamner in solidum M. [X] et la société Axa France Iard à payer à M. [U] la somme de 5 067,31 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels restées à sa charge, et de fixer la créance de la CPAM du Hainaut à la somme de 14 478 euros (soit 19 545,31 ' 5 067,31) au titre des pertes de gains professionnels actuels.
3 ° - Sur les frais divers
- Les frais divers hors tierce personne temporaire
Le premier juge a fixé à ce titre la créance de M. [U] à la somme de 10 629,62 euros, en ce compris les sommes de 179,25 euros en remboursement des frais de télévision lors de l'hospitalisation, de 7 458 euros au titre des frais de déplacement de la victime et de ses proches, de 2 160 euros en remboursement des frais d'assistance par un médecin conseil, et de 832,37 euros en remboursement de matériel de rééducation.
Les parties ne contestent pas ce poste dans leurs écritures.
Ce poste sera évalué à la somme de 10 629,62 euros.
- L'assistance tierce personne temporaire
Le premier juge a indemnisé l'assistance tierce personne temporaire par l'allocation d'une somme de 8 704 euros sur la base d'un coût horaire de 17 euros incluant les charges sociales.
Les appelants offrent de fixer ce poste à la somme de 6 144 euros correspondant à un coût horaire de 16 euros pour un besoin de 512 heures d'assistance par une tierce personne.
S'appuyant sur les conclusions de l'expert, M. [U] demande à la cour de retenir un coût horaire de 19 euros pour couvrir son besoin de 512 heures d'assistance par un tiers.
Sur ce, il s'agit d'indemniser les dépenses liées à la réduction d'autonomie, qui peuvent être temporaires entre le dommage et la consolidation ; l'évaluation doit se faire au regard de l'expertise médicale et de la justification des besoins, et non au regard de la justification de la dépense, afin d'indemniser la solidarité familiale.
Dans son rapport d'expertise médicale, le docteur [T] a indiqué que l'assistance par une tierce personne avait été nécessaire à raison de deux heures par jour pour les périodes du 12 au 26 février 2014, du 27 mai au 8 juin 2015, et du 12 juin 2015 au 25 janvier 2016.
Les parties s'accordent sur la base de ce rapport pour évaluer à 512 heures le besoin en assistance par une tierce personne de la victime.
Conformément à la demande, il convient d'évaluer le poste de préjudice assistance tierce personne temporaire sur une base horaire de 19 euros pour une aide active, et de calculer le coût de l'aide quotidienne sur 512 jours.
Ce poste de préjudice sera donc calculé de la manière suivante : 512 heures x 19 euros = 9728 euros.
Au total, il convient de fixer la créance de M. [U] en remboursement des frais divers à la somme de 20 357,62 euros (soit 10 629,62 + 9 728).
Compte tendu de la limitation du droit à indemnisation de la victime à hauteur de 75%, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnés in solidum à payer à M. [U] la somme de 15 268,22 euros (soit 20 357,62 x 75%) au titre des frais divers.
b - Sur les préjudices patrimoniaux permanents
1° - Sur les frais divers après consolidation
Le premier juge a rejeté la demande de M. [U] tendant au remboursement d'un banc de musculation acquis après la date de consolidation.
M. [U] sollicite le remboursement d'une somme de 249,99 euros correspondant à l'acquisition d'un banc de musculation.
Les appelants sollicitent le rejet de la demande adverse.
Sur ce, il s'observe que l'expert ne retient dans son expertise aucune dépense d'équipement rendue nécessaire après consolidation par l'état pathologique de la victime.
M. [U] produit une facture du 22 mars 2016 pour l'acquisition d'un banc de musculation au prix de 249,99 euros, sans justifier d'un quelconque lien de causalité direct et certain existant entre l'achat et le fait dommageable.
Il sera purement et simplement débouté de sa demande de ce chef.
2° - Sur les pertes de gains professionnels futurs
Le premier juge a fixé la créance de M. [U] à la somme de 330 596,58 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs, retenant un revenu mensuel net moyen de 918,91 euros avant l'accident, son inaptitude à reprendre un emploi après son licenciement survenu en novembre 2016, et un âge prévisible de départ à la retraite à 57 ans et 9 mois compte- tenu de son entrée anticipée sur le marché du travail dès septembre 2007.
Les appelants concluent, à titre principal, à un débouté de la demande au titre des pertes de gains professionnels futurs, et offrent à titre subsidiaire, après réduction du droit à indemnisation, le règlement d'une somme de 30 361,92 euros au titre des pertes échues, et d'une rente de 375 euros indexée chaque année selon les dispositions de l'article 43 de la loi du 5 juillet 1985 au titre des pertes à échoir.
Ils font valoir que M. [U] a obtenu un BEP de maintenance des véhicules et matériels, et un baccalauréat professionnel de maintenance automobile en juillet 2011, qu'il peut suivre toute formation relative à un poste de type administratif aux fins de reclassement, et reprendre dans l'avenir une activité professionnelle sédentaire distincte de son activité professionnelle antérieure de mécanicien automobile. Ils font observer que M. [U] a décliné l'offre d'accompagnement à la reconversion professionnelle proposée par la société Axa France Iard, et qu'il ne justifie d'aucune recherche d'emploi aménagé.
Ils offrent à titre subsidiaire une compensation entre le salaire moyen qu'aurait perçu M. [U] et le montant d'un SMIC, ce qui correspond à une différence mensuelle de l'ordre de 500 euros (soit 375 euros après limitation du droit à indemnisation).
M. [U] sollicite un capital de 423 094,96 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs échus et à échoir.
Il indique qu'il subit une perte totale de gains professionnels en ce que ses graves séquelles ont amené la médecine du travail à déclarer son inaptitude à reprendre son emploi.
Il estime que l'indemnisation de ce poste de préjudice doit être intégrale dès lors que son inaptitude à exercer son activité professionnelle de mécanicien automobile est en lien de causalité directe avec l'accident et qu'il présente une réelle et durable restriction à occuper un emploi, ajoutant que le responsable de l'accident ne peut exiger qu'il limite son préjudice.
Il retient comme revenu de référence son revenu annuel net de l'année 2012 précédant l'accident à hauteur de 11 027 euros, et considère qu'il pourra prétendre à une retraite à taux plein à l'âge de 67 ans.
Il fait valoir que compte tenu des restrictions que lui impose son handicap, de son niveau scolaire, et du contexte économique difficile et du taux de chômage de son bassin d'emploi dans l'Avesnois et le Cambrésis, se pose la question de savoir à quelle activité sédentaire avec manipulation restreinte il pourrait prétendre.
Il expose qu'il n'a perçu aucune rémunération en 2016 et 2017 hormis des allocations de retour à l'emploi, qu'il est inscrit à Pôle emploi qui lui a versé une allocation journalière de 28,74 euros jusqu'au 19 janvier 2019, et qu'il est actuellement bénéficiaire de l'allocation adulte handicapé pour une période allant du 1er décembre 2018 au 30 novembre 2021.
Sur ce, il est rappelé que les pertes de gains professionnels futurs résultent de la perte de l'emploi ou du changement d'emploi directement imputable au dommage ; ce poste de préjudice correspond à la perte où à la diminution des revenus consécutive à l'incapacité permanente, et est évalué à partir des revenus antérieurs afin de déterminer la perte annuelle à compter de la date de consolidation.
L'expert [T], constatant que M. [U] ne pouvait qu'utiliser son membre supérieur gauche, estime nécessaire un reclassement avec reconnaissance comme travailleur handicapé, et précise que M. [U] est susceptible de réaliser un travail sédentaire avec une manipulation restreinte, à adapter en fonction de son niveau scolaire. La victime présente, selon lui, un déficit fonctionnel séquellaire de 45% tenant compte de la non fonctionnalité du bras droit, des raideurs persistantes sur la mobilité en pronosupination du bras gauche, des séquelles de raideur au niveau de la cheville gauche et de la jambe droite.
Au moment de l'accident, M. [U] était embauché comme mécanicien échelon 3 par la société Garage Lefever, en contrat à durée indéterminée depuis le 3 septembre 2007. Licencié pour inaptitude le 14 novembre 2016, il s'est inscrit à Pôle emploi qui a ouvert ses droits à compter du 19 décembre 2016.
Des pièces versées au débat, il apparaît que M. [U] ne perçoit pas de pension d'invalidité, étant en outre précisé que tant les indemnités chômage versées par Pôle emploi que l'allocation adulte handicapé sont dépourvues de caractère indemnitaire et ne donnent pas lieu à recours subrogatoire, de sorte qu'il n'y pas lieu à déduction de celles-ci de l'indemnité allouée à la victime pour évaluer sa perte de gains professionnels.
Son état séquellaire lui interdit totalement et définitivement la reprise de son activité professionnelle antérieure de mécanicien automobile, étant constaté qu'il n'a pas retravaillé depuis son licenciement pour inaptitude le 15 novembre 2016
Alors que M. [U] avait choisi les métiers de la maintenance automobile pour lesquels il s'était spécialement formé de façon précoce, et montrait une réelle appétence, les éléments de la procédure démontrent qu'il ne pourra pas reprendre son emploi de mécanicien automobile, et que sa reconversion professionnelle vers un métier sédentaire dans le secteur tertiaire, et sans qualification adaptée en fonction de ses capacités d'apprentissage, s'avère incertaine, d'autant que ses séquelles lourdes liées à des difficultés de fonctionnalité des quatre membres, notamment des deux bras, ne favorisent pas l'acquisition de nouvelles compétences dans un domaine plus sédentaire et administratif, et que les conditions posées pour son retour à l'emploi, à savoir un emploi avec restriction des manipulations, apparaissent restrictives.
En l'espèce, alors que l'inaptitude de M. [U], consécutive à l'accident, est seule à l'origine de son licenciement, il n'est pas apte à reprendre ses activités dans les conditions antérieures, sans qu'il lui soit nécessaire de justifier de démarches de reconversion professionnelle ni de la recherche d'un nouvel emploi compatible avec les préconisations de l'expert.
Il en résulte que la perte de revenus futurs en lien de causalité avec le fait dommageable est bien directe et certaine pour la victime.
- Sur les pertes de gains professionnels futurs échus
Les parties s'accordent pour retenir un revenu annuel net de référence de 11027 euros au titre de l'année 2012.
La cour retient la période du 25 janvier 2016, date de consolidation, au 25 avril 2020, date la plus proche de l'arrêt, soit quatre ans et trois mois.
Contrairement aux allégations des appelants, l'examen du relevé de débours définitifs arrêté au 8 décembre 2016 n'établit pas que M. [U] ait perçu de la CPAM du Hainaut des indemnités journalières postérieurement au 25 janvier 2016.
Le préjudice de la victime peut être liquidé comme suit : (11 027 / 12) x 51 mois = 46864,75 euros.
- Sur les pertes de gains professionnels futurs à échoir
Il y a lieu de capitaliser le préjudice annuel à la date la plus proche de l'arrêt au regard de la table de capitalisation 2018 publiée à la Gazette du palais, et de retenir le calcul jusqu'à l'âge prévisible de départ à la retraite de M. [U] à l'âge de 65 ans, compte tenu de son année de naissance et de la date du premier emploi, et non à l'âge de 57 ans ou de 67 ans comme le retiennent les parties dans leurs calculs.
Les arrérages à échoir pour un homme de 27 ans (né le [Date naissance 1] 1992) suivant barème de capitalisation actualisé de la Gazette du palais 2018 retenu à la date la plus proche de l'arrêt, et coefficient de capitalisation de 33,013 (prix de l'euro de rente temporaire jusqu'à 65 ans, âge prévisible de la retraite) s'élève à la somme de 364 034,35 euros (11 027 x 33,013).
En conséquence, la cour évalue à 410 899,10 euros la somme due au titre de la perte de gains professionnels futurs échus et à échoir (soit 46 864,75 + 364 034,35).
Compte tendu de la limitation du droit à indemnisation de la victime à hauteur de 75%, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnés in solidum à payer à M. [U] la somme de 308 174,33 euros (soit 410 899,10 x 75%) au titre des pertes de gains professionnels futurs échus et à échoir.
3° - Sur l'incidence professionnelle
Le premier juge a fixé la créance de M. [U] à la somme de 310 388,82 euros en réparation de l'incidence professionnelle.
Les appelants offrent une indemnisation de 40 000 euros réparant la seule dévalorisation de M. [U] sur le marché du travail.
Ils font valoir que le tribunal indemnise en réalité deux fois le même préjudice lorsque, retenant la perte de l'emploi du métier choisi, il indemnise totalement le préjudice en découlant au titre des pertes de gains professionnels futurs et indemnise parallèlement un préjudice d'inactivité totale à hauteur de 40 000 euros.
Ils relèvent que M. [U] ne présente pas une impossibilité absolue de reprendre toute activité professionnelle.
Ils concluent au débouté de la demande au titre du préjudice de carrière, considérant que la victime n'apportait pas la preuve des éléments permettant de reconstituer sa carrière. En tenant compte de son niveau scolaire, de la formation initiale, de son environnement socio-économique et familial.
S'agissant de l'évaluation de la perte de droits à la retraite, ils exposent que l'âge prévisible de départ à la retraite de M. [U] avec une retraite au taux plein est bien de 57 ans compte tenu de son entrée sur le marché du travail à 17 ans, et que son âge de départ à la retraite est indifférent dans la mesure où l'assureur propose d'indemniser sous forme de rente viagère les pertes de gains professionnels futurs.
M. [U] sollicite une indemnisation globale de 464 956,35 euros au titre de l'incidence professionnelle, décomposant sa demande en trois postes :
- il évalue à la somme de 100 000 euros le préjudice lié à son état d'inactivité totale résultant de son exclusion du monde du travail et de son degré de frustration généré par ses tentatives inopérantes pour s'intégrer dans le milieu du travail ;
- il estime que les pertes de gains professionnels futurs ne prennent pas en compte la progression attendue de ses revenus liée à l'ancienneté et à un déroulement optimal de carrière, qui lui permettait d'espérer un revenu maximal mensuel net de 1 500 euros selon les minima salariaux garantis par la convention collective nationale du commerce et de la réparation automobile. Il évalue à 90% sa perte de chance d'obtenir la progression salariale attendue jusqu'à l'âge de sa retraite estimé à 67 ans, et demande réparation de son préjudice de carrière à hauteur de 215 689,53 euros ;
- il réclame l'indemnisation de ses pertes de droits à la retraite à la somme de 124 164,02 euros en capitalisant ses revenus de façon viagère et en extrayant du résultat ainsi obtenu une pension de l'ordre du quart, les trois quarts restants ayant été sollicités au titre des pertes de gains professionnels futurs.
Sur ce, la cour rappelle que l'incidence professionnelle correspond aux conséquences patrimoniales de l'incapacité ou de l'invalidité permanente subie par la victime dans la sphère professionnelle du fait des séquelles dont elle demeure atteinte après consolidation, autres que celles directement liées à une perte ou diminution de revenus. Ce poste tend, notamment, à réparer les difficultés futures d'insertion ou de réinsertion professionnelle de la victime résultant d'une dévalorisation sur le marché du travail, d'une perte de chance professionnelle, de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi ou du changement d'emploi ou de poste. Il comprend également la perte de droits à la retraite que la victime va devoir supporter en raison de ses séquelles, c'est à dire le déficit de revenus futurs imputable à l'accident, qui va avoir une incidence sur le montant de la pension de retraite à laquelle elle pourra prétendre.
S'agissant du préjudice allégué lié à l'état d'inactivité totale, il n'est nullement établi pour M. [U] l'impossibilité absolue d'un retour à l'emploi, alors que l'expert retient qu'il peut exercer un travail sédentaire sous réserve de manipulation restreinte, et qu'âgé de 27 ans, il ne démontre pas avoir échoué dans des démarches de formation ou de reconversion professionnelle, ni de recherche d'un nouvel emploi.
Les éléments versés au débat caractérisent néanmoins une dévalorisation significative de M. [U] sur le marché du travail, compte tenu de ses compétences techniques et manuelles qu'il ne peut plus exploiter, et des limites importantes dans lesquelles un retour à l'emploi peut s'envisager en raison de ses multiples séquelles physiques. Il est en effet exposé à une gêne à la mobilité de ses membres supérieurs et inférieurs, à une plus grande fatigue et pénibilité dans l'exercice de tout métier.
L'incidence professionnelle s'entend également du dés'uvrement et de la désocialisation subie et non choisie par la victime du fait de son absence d'emploi. En effet, il n'est pas sérieusement contestable que l'exercice d'une activité professionnelle contribue à la constitution du lien social et à l'estime de soi de par la reconnaissance de son utilité sociale.
L'indemnisation des pertes de gains professionnels futurs est bien distincte de l'indemnisation du préjudice d'inactivité et de dévalorisation sociale subi, qui a été justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 40 000 euros.
S'agissant du préjudice de carrière, rien ne vient démontrer avec certitude que M. [U] aurait pu prétendre au parcours optimal qu'il allègue grâce à son ancienneté et à la progression de sa carrière de mécanicien automobile, alors que les promotions professionnelles et les évolutions de carrière dépendent de nombreux aléas, tels la conjoncture économique, l'ancienneté, les postes disponibles, et la concurrence entre collègues.
Ainsi comme l'a apprécié le premier juge, M. [U] ne peut faire valoir qu'une perte de chance de ne pas avoir poursuivi sa carrière de façon optimale, étant ici précisé que, s'il était rémunéré au troisième échelon au moment de l'accident, il n'apporte pas la preuve, avec le seul extrait produit de la convention collective du commerce et la réparation de l'automobile suivant avenant n°78 du 6 juillet 2016 relatif aux salaires minima, du temps nécessaire à passer dans chaque échelon ni de la date à laquelle il pouvait espérer accéder à l'échelon maximal.
Sa demande sera écartée s'agissant de la réparation d'un préjudice de carrière échu, qu'il ne démontre pas, lié à une absence d'évolution professionnelle durant la seule période écoulée entre la date de consolidation et l'arrêt.
Il convient de retenir une perte de chance d'un tiers de ne pas avoir poursuivi sa carrière de façon optimale, et de ne pas avoir perçu une rémunération mensuelle nette à hauteur de 1500 euros (soit 18 000 euros par an) jusqu'à l'âge prévisible de la retraite, précédemment retenu à 65 ans.
Il en résulte un préjudice de carrière qui peut être calculé de la façon suivante :
(18 000 ' 11 027) x 1/3 x 33,013 (correspondant au prix de l'euro de rente temporaire d'un homme de 27 ans jusqu'à 65 ans) = 76 733,22 euros.
Sur l'évaluation de la perte des droits à la retraite, comme l'a justement apprécié le premier juge, s'il eût été préférable de disposer d'une simulation du montant de rachat des trimestres perdus en raison de l'accident, il y a lieu de retenir le calcul proposé par la victime fondé sur un pourcentage de la capitalisation viagère de la perte annuelle des gains professionnels futurs.
Il en résulte un préjudice de perte de droits à la retraite qui peut être calculé de la façon suivante en retenant, conformément à la demande, une pension de l'ordre d'un quart du revenu annuel de référence de 11027 euros, et un départ prévisible à la retraite à l'âge de 65 ans :
11 027 x 45,040 ( prix d'un euro de rente viager pour un homme de 27 ans) x 1/4 = 124164,02 euros.
En conséquence, l'ensemble de ces éléments justifient l'indemnisation de l'incidence professionnelle inhérente aux conséquences du fait dommageable du 4 septembre 2013 à la somme de 240 897,24 euros (soit 40 000 + 76 733,22 + 124 164,02).
Compte tendu de la limitation du droit à indemnisation de la victime à hauteur de 75%, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnés in solidum à payer à M. [U] la somme de 180 672,93 euros (soit 240 897,24 x 75%) au titre de l'incidence professionnelle.
4° - Sur les frais de logement adapté
Le premier juge a fixé la créance de M. [U] à la somme de 3 414,02 euros, retenant la nécessité d'aménager la douche et les toilettes du logement.
Les parties ne contestent pas la fixation de ce poste dans leurs écritures.
Sur ce, la cour rappelle que les frais de logement adapté concernent les frais que doit débourser la victime directe à la suite du dommage pour adapter son logement à son handicap et bénéficier ainsi d'un habitat en adéquation avec ce handicap ; l'indemnisation intervient sur la base de factures, de devis ou même des conclusions du rapport de l'expert sur la consistance et le montant des travaux nécessaires à la victime pour vivre dans son logement'; il s'ensuit que ce poste d'indemnisation concerne le remboursement des frais que doit exposer la victime à la suite de sa consolidation, de sorte qu'il y a lieu d'indemniser ce poste de préjudice en fonction des besoins de la victime même si elle ne produit pas de factures mais uniquement des devis.
L'expert [T] retient la nécessité d'adapter la douche et les toilettes du logement au handicap de M. [U].
M. [U] verse au débat une facture d'aménagement de douche du 15 février 2014 d'un montant de 2 862,92 euros et un devis d'aménagement d'une rampe et des toilettes d'un montant de 551,10 euros.
Au total, il convient de fixer la créance de M. [U] en remboursement des frais d'aménagement du logement à la somme de 3 414,02 euros (soit 2 862,92 + 551,10).
Compte tendu de la limitation du droit à indemnisation de la victime à hauteur de 75%, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnés in solidum à payer à M. [U] la somme de 2 560,52 euros (soit 3 414,02 x 75%) au titre des frais de logement adapté.
5° - Sur les frais de véhicule adapté
Le premier juge a fixé l'indemnisation de M. [U] à ce titre à la somme de 10 695,69 euros, retenant avec capitalisation un renouvellement des équipements nécessaires à la conduite d'un véhicule automobile tous les sept ans.
Les appelants sollicitent la confirmation de ce poste de préjudice.
M. [U] sollicite la fixation de ce poste à la somme de 12 866,86 euros arguant de ce qu'il aura besoin de financer tous les six ans le surcoût d'une boîte de vitesse automatique à hauteur de 1 500 euros et l'achat d'une boule amovible au volant pour un montant de 109,90 euros.
Sur ce, la cour rappelle que l'indemnisation ne consiste pas dans la valeur totale du véhicule adapté, mais seulement dans la différence de prix entre le prix du véhicule adapté nécessaire et le prix du véhicule dont se satisfaisait la victime.
L'expert [T] relève que M. [U] est apte à conduire un véhicule automobile automatique avec boule au volant.
En l'espèce, il convient d'indemniser le surcoût lié à l'équipement du véhicule avec une boîte de vitesse automatique à hauteur de 1 500 euros et une boule amovible au volant d'un coût de 109,90 euros avec un renouvellement de ces équipements tous les sept ans.
L'indemnisation des frais de véhicule adapté se calcule de la façon suivante':
(1 609,90 euros / 7 ans) x 45,040 (prix d'un euro de rente viagère pour un homme âgé de 27 ans à la date de l'arrêt), soit 10 358,56 euros.
Compte tenu de l'offre de l'assureur dans ses écritures, la créance de M. [U] au titre des frais de véhicule adapté ne sera pas inférieure à la somme de 10 695,69 euros.
Compte tendu de la limitation du droit à indemnisation de la victime à hauteur de 75%, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnés in solidum à payer à M. [U] la somme de 8 021,76 euros (soit 10 695,69 x 75%) au titre des frais de véhicule adapté.
6° - Sur l'assistance permanente par une tierce personne
Le premier juge a fixé la créance de M. [U] à la somme de 458 811,17 euros, retenant un taux horaire moyen de 17 euros.
Les appelants demandent à la cour de fixer la créance au titre de l'assistance par une tierce personne permanente à la somme de 431 822,28 euros, offrant un taux horaire de 16 euros et proposant le versement d'une rente dans l'intérêt de la victime.
S'appuyant sur les conclusions de l'expert, M. [U] demande à la cour de retenir un coût horaire de 19 euros pour couvrir son besoin viager en assistance par un tiers.
Sur ce, il est rappelé que le poste assistance tierce personne comprend les dépenses liées à la réduction d'autonomie de la victime, laquelle rend nécessaire, de manière définitive, l'assistance d'une tierce personne pour aider la victime à effectuer les démarches et les actes de la vie quotidienne.
L'indemnisation au titre de l'assistance tierce personne doit se faire en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée, de sorte que l'indemnité allouée au titre de ce poste de préjudice ne doit pas être réduite en cas d'assistance bénévole par un proche de la victime.
Après consolidation, l'expert [T] retient à titre viager un besoin en aide humaine d'une heure trente minutes par jour en raison des difficultés liées à l'habillage, aux gestes de la vie courante, à l'alimentation, aux déplacements et à la toilette, étant ici rappelé la non fonctionnalité du membre supérieur droit.
- L'assistance tierce personne échue
L'indemnisation doit être calculée de la façon suivante du 25 janvier 2016, date de consolidation, au 25 avril 2020, date de l'arrêt, ce qui correspond à 1558 jours :
1,5 heure x 19 euros x 1 558 jours = 44 403 euros.
Il convient d'évaluer le poste de préjudice assistance tierce personne permanente échue à la somme de 44 403 euros.
- L'assistance tierce personne à échoir
Étant ici rappelé que la cour a retenu le principe de versement de l'indemnisation des postes patrimoniaux permanents futurs sous forme de capital, les besoins annuels de M. [U] en aide humaine s'élèvent à la somme de 10 402,50 euros, soit 1,5 heure x 365 jours x 19 euros.
Il convient d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 468 528,60 euros correspondant à 10 402,50 x 45,040 (prix d'un euro de rente viagère pour un jeune homme âgé de 27 ans à la date de l'arrêt).
Considérant la demande de la victime dans ses écritures, son préjudice au titre de l'assistance par une tierce personne permanente sera fixé à la somme globale réclamée à hauteur de 510 167,10 euros.
Compte tendu de la limitation du droit à indemnisation de la victime à hauteur de 75%, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnés in solidum à payer à M. [U] la somme de 382 625,33 euros (soit 510 167,10 x 75%) au titre de l'assistance par une tierce personne permanente échue et à échoir.
2 - Sur l'évaluation des préjudices extra-patrimoniaux
a - Sur les préjudices extra patrimoniaux temporaires
1° - Sur le déficit fonctionnel temporaire
Le premier juge a fixé la créance de M. [U] à la somme de 18 365 euros à ce titre, retenant une indemnisation sur la base de la moitié du revenu minimum, soit 25 euros par jour.
Les appelants sollicitent la confirmation de ce chef.
M. [U] demande une indemnisation de 19 319,98 euros correspondant à 26,30 euros par jour de déficit fonctionnel total.
Sur ce, la cour rappelle que le déficit fonctionnel temporaire inclut pour la période antérieure à la consolidation la perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante, en ce compris le préjudice d'agrément temporaire et le préjudice sexuel temporaire ; le déficit fonctionnel temporaire peut être total ou partiel.
De l'examen du rapport d'expertise, il apparaît que le docteur [T] a retenu un déficit fonctionnel temporaire total pendant 618 jours, un déficit fonctionnel temporaire partiel de 50% pendant 28 jours, et un déficit fonctionnel temporaire partiel de 45% pendant 228 jours, étant ici précisé que les parties s'accordent sur la détermination du nombre de jours suivant les périodes relevées par l'expert.
Sur une base journalière de 25 euros par jour, qui répare intégralement le préjudice de la victime et non de 26,30 euros comme le propose la victime, il convient d'évaluer ce préjudice comme suit':
- au titre du déficit fonctionnel temporaire total : 25 x 618 = 15 450 euros
- au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel de 50% : 25 x 50% x 28 = 350 euros
- au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel de 45% : 25 x 45% x 228 = 2 565 euros
soit un total de 18 365 euros.
Compte tendu de la limitation du droit à indemnisation de la victime à hauteur de 75%, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnés in solidum à payer à M. [U] la somme de 13 773,75 euros (soit 18 365 x 75%) au titre du déficit fonctionnel temporaire total et partiel.
2° - Sur les souffrances endurées
La fixation de l'indemnisation des souffrances endurées, quantifiées à 5 sur une échelle de 7, à la somme de 35 000 euros par le premier juge n'est pas contestée par les parties.
Compte tendu de la limitation du droit à indemnisation, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnés in solidum à payer à M. [U] la somme de 26 250 euros (soit 35 000 x 75%) en réparation des souffrances endurées.
3° - Sur le préjudice esthétique temporaire
La fixation de l'indemnisation du préjudice esthétique temporaire, quantifié par l'expert à 3,5 sur une échelle de 7, à la somme de 3 000 euros par le premier juge n'est pas contestée par les parties.
Compte tendu de la limitation du droit à indemnisation, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnés in solidum à payer à M. [U] la somme de 2 250 euros (soit 3 000 x 75%) en réparation du préjudice esthétique temporaire.
b - Sur les préjudices extra patrimoniaux permanents
1° - Sur le déficit fonctionnel permanent
La fixation de ce poste, évalué par l'expert à 45%, à la somme de 144 000 euros par le premier juge n'est pas contestée par les parties.
Compte tendu de la limitation du droit à indemnisation, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnées in solidum à payer à M. [U] la somme de 108 000 euros (soit 144 000 x 75%) en réparation du déficit fonctionnel permanent.
2° - Sur le préjudice esthétique permanent
La fixation de l'indemnisation du préjudice esthétique permanent, quantifié par l'expert à 3 sur une échelle de 7, à la somme de 6 000 euros par le premier juge n'est pas contestée par les parties.
Considérant la limitation du droit à indemnisation, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnés in solidum à payer à M. [U] la somme de 4 500 euros (soit 6 000 x 75%) en réparation du préjudice esthétique permanent.
3° - Sur le préjudice sexuel
Le premier juge a fixé la créance de M. [U] à la somme de 9 000 euros à ce titre.
Les appelants offrent une indemnisation à hauteur de 8 000 euros avant limitation de responsabilité, arguant de ce qu'il n'existe pas de lésions physiologiques.
M. [U] sollicite une somme de 15 000 euros de ce chef, dès lors que sa fonction sexuelle est atteinte dans sa notion de plaisir.
Sur ce, ce préjudice s'apprécie, en fonction de l'âge et de la situation de la victime, eu égard à l'atteinte à la morphologie des organes sexuels, à la libido et à la fonction procréatrice.
L'expert [T] relève que, s'il n'existe pas de lésion physiologique, il existe des troubles psychologiques avec trouble de l'image corporelle du fait du déficit du membre supérieur droit et des difficultés positionnelles ; il note d'ailleurs que M. [U] s'est séparé de sa compagne.
S'il n'existe pas pour M. [U] d'atteinte à la morphologie de ses organes sexuels ni à sa fonction reproductrice, il demeure qu'au regard de l'importance des séquelles corporelles présentées et des troubles de la libido qui y sont associés, l'impact de l'accident pour M. [U] est caractérisé chez un jeune homme âgé de 27 ans, limité dans l'exercice de sa vie sexuelle par l'impotence de son bras droit, et affecté sur le plan psychologique par la modification de son aspect physique.
Au regard de ces éléments, la cour évalue l'indemnisation intégrale de ce préjudice sexuel à 12 000 euros.
Considérant la limitation du droit à indemnisation de la victime, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnés in solidum à payer à M. [U] la somme de 9 000 euros (soit 12 000 x 75%) en réparation du préjudice sexuel.
4° - Sur le préjudice d'agrément
La fixation de ce poste à la somme de 20 000 euros par le premier juge n'est pas contestée par les parties, étant précisé que l'expert avait retenu que M. [U] était privé, des suites de l'accident, de la pratique de ses activités sportives favorites qu'étaient le football en club, la moto, la chasse et la pêche.
Considérant la limitation du droit à indemnisation, M. [X] et la société Axa France Iard seront condamnés in solidum à payer à M. [U] la somme de 15 000 euros (soit 20000 x 75%) en réparation du préjudice d'agrément.
E - Sur la liquidation des préjudices
Au vu de l'ensemble des éléments énoncés, après limitation du droit à indemnisation à hauteur de 75%, il revient à M. [U] et à la CPAM du Hainaut, sauf à déduire les provisions d'un montant total de 112 500 euros déjà versées à la victime, les sommes suivantes':
71 895,80 euros au titre des dépenses de santé actuelles,
dont la somme de 71 838,23 euros revenant à la CPAM du Hainaut,
dont la somme de 57,57 euros revenant à la victime,
19 545,31 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels,
dont la somme de 14 478 euros revenant à la CPAM du Hainaut,
dont la somme de 5 067,31 euros revenant à la victime,
15 268,22 euros au titre des frais divers, en ce compris l'assistance temporaire par une tierce personne,
308 174,33 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs,
180 672,93 euros au titre de l'incidence professionnelle,
2 560,52 euros au titre des frais d'aménagement du logement,
8 021,76 euros au titre des frais de véhicule adapté,
382 625,33 euros au titre de l'assistance par une tierce personne permanente,
13 773,75 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,
26 250 euros au titre des souffrances endurées,
2 250 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,
108 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,
4 500 euros au titre du préjudice esthétique permanent,
15 000 euros au titre du préjudice d'agrément,
9 000 euros au titre du préjudice sexuel.
La créance de débours définitifs de la CPAM du Hainaut sera fixée à la somme de 86 316,23 euros.
Dans un souci de clarification et de simplification de l'arrêt, il convient d'infirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions.
III - Sur les autres demandes
A - Sur le doublement des intérêts au taux légal
Le premier juge a ordonné le doublement des intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2014 jusqu'au jour du jugement devenu définitif, au motif que la société Axa France Iard ne justifiait pas avoir déposé d'offre indemnitaire consécutivement à l'accident du 4 septembre 2013.
A titre principal, les appelants demandent à la cour de fixer la sanction du doublement des intérêts sur le montant de l'offre provisionnelle de 7 500 euros du 4 mai au 9 septembre 2014. Subsidiairement, ils lui demandent de constater que la société Axa France Iard a présenté une offre par courrier recommandé du 7 juin 2017 portant des propositions complètes et suffisantes, et de juger que le doublement des intérêts au taux légal interviendra sur la somme offerte de 218 381,87 euros avant déduction des provisions sur la période écoulée entre le 6 novembre 2016 et le 7 juin 2017.
Ils soutiennent que l'offre d'indemnisation provisionnelle du 9 septembre 2014 d'un montant de 7 500 euros est tardive mais suffisante, puisque entérinée par le juge des référés du tribunal de grande instance de Nanterre ;
Ils relèvent que le rapport définitif de l'expert [T] n'est pas daté, de sorte que le délai imparti à l'assureur pour présenter son offre définitive n'a pas couru.
Ils considèrent que la société Axa France Iard a présenté une offre complète et suffisante par courrier recommandé du 7 juin 2017, de sorte qu'il n'y a pas lieu à sanction en application de l'article L. 211-9 du code des assurances.
M. [U] demande à la cour de dire que toutes les condamnations porteront intérêts au double du taux de l'intérêt légal à compter du 5 mai 2014.
Il fait remarquer que, même s'il est exact que le rapport d'expertise définitif est daté du 11 avril 2016, celui-ci a été adressé le 18 mai 2016 à l'ensemble des parties, notamment au conseil de la société Axa France Iard.
Aucune offre n'ayant été formulée dans le délai de huit mois à compter de l'accident, il considère que le doublement des intérêts au taux légal, qui s'applique sans déduction des provisions et avant imputation de la créance du tiers payeur, court à compter du 4 mai 2014 jusqu'au prononcé de l'arrêt sur la somme de 1 053 974,73 euros.
Il ajoute que l'offre manifestement insuffisante, présentée le 7 juin 2017 par la société Axa France Iard, s'assimile à une absence d'offre.
Sur ce, il résulte de l'article L. 211-9 du code des assurances :
'tout d'abord, que quelle que soit la nature du dommage, dans le cas où la responsabilité n'est pas contestée et où le dommage a été entièrement quantifié, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter à la victime une offre d'indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée ; lorsque la responsabilité est rejetée ou n'est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n'a pas été entièrement quantifié, l'assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande,
'ensuite, qu'une offre d'indemnité doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans le délai maximum de huit mois à compter de l'accident ; en cas de décès de la victime, l'offre est faite à ses héritiers et, s'il y a lieu, à son conjoint ; l'offre comprend alors tous les éléments indemnisables du préjudice, y compris les éléments relatifs aux dommages aux biens lorsqu'ils n'ont pas fait l'objet d'un règlement préalable,
'enfin, que cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime ; l'offre définitive d'indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation,
'en tout état de cause, le délai le plus favorable à la victime s'applique.
Il résulte aussi de l'article L. 211-13 du code des assurances que lorsque l'offre n'a pas été faite dans les délais impartis à l'article L. 211-9, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif ; cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur.
- Sur le point de départ des intérêts au double du taux légal
La société Axa France Iard verse au débat la copie de trois versements provisionnels de 7500 euros, 45 000 euros, 30 000 euros, acceptés par M. [U] le 12 septembre 2016 et le 21 mai 2018.
La cour rappelle toutefois que le versement d'une simple provision ne vaut pas offre d'indemnisation au sens de l'article L.211-9 précité.
Si M. [U] n'est pas resté sans provision, cela ne dispensait pas la société Axa France Iard, en l'absence de connaissance de la date de consolidation de la victime dans les trois mois de l'accident, de son obligation de formuler une offre provisionnelle dans le délai de huit mois à compter de l'accident, soit avant le 4 mai 2014.
L'assureur ne s'est exécuté que suivant offre tardive du 9 septembre 2014 en dehors du délai légal imparti.
Il s'ensuit que l'accident de la circulation s'étant produit le 4 septembre 2013, l'indemnité allouée produira intérêts au double du taux légal à compter du 4 mai 2014.
- Sur le point d'arrivée des intérêts au double du taux légal
Il ressort de la combinaison des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances que :
- une fois la date de consolidation fixée, une offre d'indemnisation définitive doit être formulée dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de la consolidation,
- une offre manifestement insuffisante équivaut à une absence d'offre,
- une offre incomplète, qui ne comprend pas tous les éléments indemnisables du préjudice, équivaut à une absence d'offre.
Il importe peu que le rapport définitif de l'expert [T] porte de façon erronée la même date que le pré-rapport, à savoir le 11 avril 2016, dès lors qu'il est suffisamment établi qu'il a été effectivement adressé aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 mai 2016, fixant la date de consolidation de M. [U] au 25 janvier 2016.
Il s'ensuit que la société Axa France Iard devait formuler une offre dans le délai de 5 mois prévu par l'article L. 211-9 du code précité, soit avant le 18 octobre 2016.
La société GMF ne conteste pas n'avoir présenté une offre d'indemnisation que le 7 juin 2017, soit en dehors du délai imparti.
Si cette offre d'indemnisation, faite sur les bases du rapport du professeur [T], comprend tous les éléments indemnisables du préjudice tel que retenus par ce dernier, il convient de remarquer, au vu des sommes proposées pour chaque poste de préjudice, du total de 218 381,87 euros avant déduction des provisions et hors créances du tiers payeur, que l'offre d'indemnisation de la société Axa France Iard en date du 7 juin 2017 est manifestement insuffisante au regard de l'indemnisation totale arbitrée par la cour à la somme de 1 081 221,70 euros.
Par conséquent, cette offre n'apparaît pas de nature à interrompre le cours de la pénalité.
Il s'ensuit que la sanction du doublement de l'intérêt au taux légal s'appliquera à compter du 4 mai 2014 jusqu'à la date du présent arrêt.
- Sur l'assiette du doublement de l'intérêt légal
La cour rappelle qu'en cas d'offre d'indemnisation de l'assureur, l'assiette des intérêts majorés porte en principe sur les sommes offertes par l'assureur, de sorte que la sanction prévue par l'article L. 211-13 du code des assurances a pour assiette l'indemnité offerte par l'assureur avant imputation des créances des organismes sociaux déclarées à l'assureur et avant déduction des provisions éventuellement versées.
Cependant, l'offre du 7 juin 2017 ayant été jugée manifestement insuffisante, l'assiette des intérêts majorés portera sur les sommes allouées par le juge avant imputation des créances des organismes sociaux déclarées à l'assureur et avant déduction des provisions éventuellement versées.
En conséquence, au vu de la présente décision et du relevé de débours définitifs de la CPAM du Hainaut, le doublement de l'intérêt au taux légal s'appliquera du 4 mai 2014 jusqu'au 30 avril 2020 sur la somme de 1 167 537,93 euros (soit 1 081 221,70 euros correspondant à la liquidation du préjudice telle que retenue par la cour + 86 316,23 euros correspondant à la créance de l'organisme social après limitation du droit à indemnisation).
B - Sur la capitalisation des intérêts
La capitalisation des intérêts étant de droit quand elle est demandée, elle sera ordonnée dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.
C - Sur les dépens et les frais non répétibles
Le sens de l'arrêt conduit à infirmer le jugement critiqué sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [X] et la société Axa France Iard qui succombent seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris le coût de la procédure de référé expertise.
En application de l'article 699 du code de procédure civile, la cour autorisera Me Foutry avocat à recouvrer directement contre les personnes condamnées les dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision.
L'équité commande de condamner in solidum M. [X] et la société Axa France Iard à payer à M. [U] une somme de 8 000 euros pour les frais non répétibles de première instance et d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 8 novembre 2018 par le tribunal de grande instance de Cambrai,
Statuant à nouveau,
Rejette la demande de M. [X] et de la société Axa France Iard tendant à voir ordonner le sursis à statuer sur les postes de préjudice soumis à recours de l'organisme social dans l'attente de production de pièces complémentaires par la victime,
Dit que M. [U] a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son propre préjudice de nature à limiter son droit à indemnisation à 75%,
Condamne in solidum M. [X] et la société Axa France Iard à payer à M. [U] en réparation du préjudice subi suite à l'accident de la circulation routière survenu le 4 septembre 2013 les sommes suivantes, dont à déduire les provisions de 112 500 euros déjà versées :
57,57 euros au titre des dépenses de santé actuelles,
5 067,31 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels,
15 268,22 euros au titre des frais divers,
308 174,33 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs,
180 672,93 euros au titre de l'incidence professionnelle,
2 560,52 euros au titre des frais d'aménagement du logement,
8 021,76 euros au titre des frais de véhicule adapté,
382 625,33 euros au titre de l'assistance par une tierce personne permanente,
13 773,75 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,
26 250 euros au titre des souffrances endurées,
2 250 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,
108 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,
4 500 euros au titre du préjudice esthétique permanent,
15 000 euros au titre du préjudice d'agrément,
9 000 euros au titre du préjudice sexuel,
Déboute M. [U] de sa demande au titre des frais divers après consolidation,
Dit que les sommes allouées porteront intérêts au double du taux légal à compter du 4 mai 2014 sur le capital de 1 167 537,93 euros, et ce jusqu'à la date du présent arrêt,
Ordonne la capitalisation des intérêts en application de l'article 1343-2 du code civil,
Fixe la créance de débours définitifs de la CPAM du Hainaut en lien avec le fait dommageable à la somme de 86 316,23 euros,
Déclare l'arrêt commun à la caisse primaire d'assurance maladie du Hainaut,
Déboute les parties de leurs plus amples prétentions,
Condamne in solidum M. [X] et la société Axa France Iard aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris le coût de la procédure de référé expertise,
Dit qu'en application de l'article 699 du code de procédure civile, Me Foutry avocat recouvrera directement contre M. [X] et la société Axa France Iard les dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision,
Condamne in solidum M. [X] et la société Axa France Iard à payer à M. [U] la somme de 8 000 euros pour les frais non répétibles de première instance et d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente
Véronique Cailliez Hélène Château