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23/01/2020 | FRANCE | N°19/02785

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 3, 23 janvier 2020, 19/02785


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 3

ARRÊT DU 23/01/2020

N° de MINUTE : 20/116

N° RG 19/02785 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SLBX

Jugement (N° 18/822) rendu le 29 avril 2019

par le juge de l'exécution de Lille







APPELANT



Monsieur [S] [G] [P] [J]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 36] - de nationalité française

[Adresse 2]



Représenté par Me Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai et Me G

uizard, avocat au barreau de Paris



INTIMÉES



Madame [D] [B] [C] [Y]

née le [Date naissance 14] 1969 à [Localité 38] - de nationalité française

[Adresse 21]



A laquelle ...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 3

ARRÊT DU 23/01/2020

N° de MINUTE : 20/116

N° RG 19/02785 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SLBX

Jugement (N° 18/822) rendu le 29 avril 2019

par le juge de l'exécution de Lille

APPELANT

Monsieur [S] [G] [P] [J]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 36] - de nationalité française

[Adresse 2]

Représenté par Me Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai et Me Guizard, avocat au barreau de Paris

INTIMÉES

Madame [D] [B] [C] [Y]

née le [Date naissance 14] 1969 à [Localité 38] - de nationalité française

[Adresse 21]

A laquelle la déclaration d'appel a été signifiée par acte remis à étude le 19 juin 2019, n'a pas constitué avocat

Sa Cic Nord Ouest prise en la personne de son directeur général domicilié es qualité audit siège

[Adresse 23]

Représentée par Me Ghislain Hanicotte, avocat au barreau de Lille substitué par Me Playoust, avocat au barreau de Lille

DÉBATS à l'audience publique du 19 décembre 2019 tenue par Sylvie Collière magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Ismérie Capiez

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Sylvie Collière, président de chambre

Bénédicte Royer, conseiller

Catherine Convain, conseiller

ARRÊT PAR DÉFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 janvier 2020 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Sylvie Collière, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 19 novembre 2019

EXPOSE DU LITIGE

Par acte notarié en date du 8 février 2006, la banque Scalbert Dupont, désormais dénommée CIC Nord-Ouest, a accordé à M. [S] [J] et à son épouse, Mme [D] [Y], un prêt immobilier

d'un montant de 323 299 euros à taux variable, remboursable par 180 mensualités de 2 304,86 euros, destiné à financer la construction d'une maison individuelle sur un terrain situé à [Adresse 42], cadastré section CV n°[Cadastre 3] appartenant en propre à M. [J].

Ce prêt était garanti par une hypothèque conventionnelle consentie sur le terrain susvisé et les bâtiments qui pourraient y être implantés par la suite, cette sûreté ayant fait l'objet d'une publication le 29 mars 2006, rectifiée le 20 avril suivant.

Par acte notarié du 6 novembre 2006, la même banque a consenti à M. [J], lotisseur, marchand de bien, un prêt sous forme d'une ouverture de crédit en compte spécial de 400 000 euros, portant intérêt au taux Euribor trois mois majoré de

2,5 % l'an sur les sommes réellement utilisées, destinée à financer partiellement des opérations immobilières indifférenciées de marchand de biens.

Ce prêt était garanti par une hypothèque conventionnelle consentie sur l'immeuble susvisé avec l'accord de Mme [Y], cette sûreté ayant fait l'objet d'une publication le 20 décembre 2006, rectifiée le 15 janvier 2007.

Par acte notarié du 7 mars 2013, consécutif à leur divorce, M. [J] et Mme [Y] ont procédé au partage de leurs biens indivis.

En raison de la défaillance des emprunteurs, la Sa Cic Nord Ouest a prononcé le 3 juillet 2014 la déchéance des deux prêts.

Le 28 juillet 2015, la banque CIC Nord-Ouest, agissant en vertu de l'acte notarié du 8 février 2006, et pour garantir une créance s'élevant à 324 230,50 euros, a fait inscrire des hypothèques judiciaires provisoires sur trois immeubles appartenant à Mme [Y] :

- les lots 115 et 425 dépendant d'un immeuble situé à [Localité 39] cadastré section AY n°[Cadastre 32],[Cadastre 33],[Cadastre 4] et [Cadastre 5] ;

- le lot 6009 dépendant d'un immeuble situé à [Localité 35] cadastré section BH n°[Cadastre 12],[Cadastre 13],[Cadastre 15],[Cadastre 16],[Cadastre 17],[Cadastre 18],[Cadastre 19],[Cadastre 20] et [Cadastre 31] ;

- un immeuble situé à [Localité 41] cadastré section C n°[Cadastre 10].

Par actes du 31 juillet 2015, la banque CIC Nord-Ouest, agissant en vertu des deux actes notariés de prêt et de l'acte notarié de partage, a fait dénoncer à

M. [J] :

- le dépôt le 28 juillet 2015 d'une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire au service de la publicité foncière de [Localité 36] 2 sur un immeuble situé à [Localité 40], cadastré section AL n°[Cadastre 24], pour sûreté de la somme de 400 000 euros ;

- le dépôt le 28 juillet 2015 au service de la publicité foncière de [Localité 36] 3 d'inscriptions d'hypothèque judiciaire provisoire sur des immeubles situés à :

* [Localité 34], cadastré section AV n°[Cadastre 11],

* [Localité 34], cadastrés AC n°[Cadastre 27], [Cadastre 28], [Cadastre 29], [Cadastre 30], [Cadastre 25] et [Cadastre 26],

* [Localité 37], cadastrés section B n°[Cadastre 22],[Cadastre 6], [Cadastre 7],

* [Localité 37], cadastrés section B n°[Cadastre 8] et [Cadastre 9],

pour sûreté de la somme de 400 000 euros.

Par actes des 25 août 2015 et du 31 août 2015, Mme [Y] et M. [J] ont fait assigner la banque CIC Nord-Ouest devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lille aux fins de voir ordonner la mainlevée des hypothèques conventionnelles et des hypothèques judiciaires provisoires prises sur leurs immeubles.

Par jugement du 29 avril 2019, le juge de l'exécution a :

- débouté M. [J] de sa demande de mainlevée des hypothèques conventionnelles régularisées le 29 mars 2006 et le 20 décembre 2006 sur l'immeuble situé à [Localité 41], cadastré section C n°[Cadastre 3] ;

- constaté que la demande de mainlevée des hypothèques judiciaires provisoires sur l'immeuble situé à [Localité 34] cadastrée section AC n°[Cadastre 27] à [Cadastre 30], [Cadastre 25] et [Cadastre 26], était sans objet ;

- écarté le moyen tiré de la nullité des inscriptions d'hypothèque judiciaire provisoire prises sur les biens appartenant à Mme [Y] ;

- débouté M. [J] et Mme [Y] de leurs demandes de cantonnement des inscriptions d'hypothèque judiciaire provisoire à certains biens ;

- débouté M. [J] et Mme [Y] de leurs demandes de mainlevée des hypothèques judiciaires provisoires inscrites par la banque CIC Nord-Ouest ;

- dit n'y avoir lieu à cantonner les sommes garanties par les inscriptions prises contre M. [J] et contre Mme [Y] ou à ordonner la rectification des bordereaux d'inscriptions d'hypothèque judiciaire provisoire ;

- débouté M. [J] de sa demande de délai de paiement ;

- débouté la banque CIC Nord-Ouest de sa demande de dommages et intérêts ;

- condamné M. [J] aux dépens ;

- condamné M. [J] à payer à la banque CIC Nord-Ouest la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté M. [J] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration adressée par la voie électronique le 15 mai 2019, M. [J] a interjeté appel de la décision en énonçant les chefs du jugement expressément critiqués auxquels il limitait son appel.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 15 novembre 2019, il demande à la cour au visa des articles 1165 et 1240 du code civil, L.111-2, L. 111-4, L.111-7, R. 121-1, R.512-2, R.532-6 et R.532-9 du code des procédures civiles d'exécution, 1343-5 du code civil, 415 et suivants, 695 et suivants du code de procédure civile de :

infirmer le jugement déféré en ce qu'il :

- l'a débouté de sa demande de mainlevée des hypothèques conventionnelles régularisées le 29 mars 2006 et le 20 décembre 2006 sur l'immeuble situé à [Localité 41], cadastré section C n° [Cadastre 3] ;

- l'a débouté, ainsi que Mme [Y] de leurs demandes de cantonnement des inscriptions d'hypothèque judiciaire provisoire à certains biens ;

- l'a débouté, ainsi que Mme [Y] de leurs demandes de mainlevée des hypothèques judiciaires provisoires inscrites par la banque CIC Nord-Ouest ;

- a dit n'y avoir lieu à cantonner les sommes garanties par les inscriptions prises à son encontre et à l'encontre de Mme [Y] ou à ordonner la rectification des bordereaux d'inscriptions d'hypothèque judiciaire provisoire ;

- l'a débouté de sa demande de délai de paiement ;

- l'a condamné aux dépens ;

- l'a condamné à payer à la banque CIC Nord-Ouest la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- l'a débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés de :

- ordonner la mainlevée des inscriptions d'hypothèques judiciaires provisoires régularisées le 28 juillet 2015 au service de la publicité foncière de [Localité 36] 3 et au service de la publicité foncière de [Localité 36] 2, par le CIC Nord-Ouest à son encontre ;

- subsidiairement :

* cantonner le montant garanti pour les 2 inscriptions, chacune à hauteur

de :

.la somme principale de 264 202,20 euros et 60 028,30 euros au titre des intérêts et accessoires au titre du prêt du 8 février 2006 selon décompte arrêté au 21 octobre 2014 et conformément au jugement du 1er février 2017 ;

.la somme principale de 75 769,95 euros (400 000 euros - 324 230,50 euros) au titre du prêt du 6 novembre 2006 ;

et ordonner la rectification des bordereaux publiés ;

* cantonner l'inscription prise le 28 juillet 2015 au service de la publicité foncière de [Localité 36] 3ème bureau et au service de la publicité foncière de [Localité 36] 2ème bureau, par le CIC Nord-Ouest à la seule parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 11] à [Localité 34]

et ordonner la mainlevée des inscriptions d'hypothèques judiciaires provisoires régularisées le 28 juillet 2015 au service de la publicité foncière de [Localité 36] 3ème bureau et au service de la publicité foncière de [Localité 36] 2ème bureau, par le CIC Nord-Ouest à son encontre, sur les parcelles cadastrées section B n°[Cadastre 8]- [Cadastre 9] sises à [Localité 37], section B n°[Cadastre 22], [Cadastre 6], [Cadastre 7] sises à [Localité 37], section AC n°[Cadastre 27] et [Cadastre 25] sises à [Localité 34] et section AL n°[Cadastre 24] à [Localité 40] ;

* lui accorder 24 mois de délai pour régler les sommes fixées par jugement du 1 er février 2017 qui seront réglées de la façon suivante : un premier règlement de 15 000 euros dans le mois suivant la signification de l'arrêt, versement d'une somme de 57 000 euros fin février 2020 ; 22 autres versements mensuels de 1 000 euros ; le solde lors du 24ème versement et dire que les règlements s'imputeront par priorité sur le principal.

Il demande sur le surplus la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a débouté la banque Cic Nord-Ouest de sa demande de dommages et intérêts et la condamnation de cette dernière à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens dont distraction au profit de son avocat par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 21 octobre 2019, la Sa CIC Nord-Ouest demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts et en conséquence de :

- condamner M. [J] à titre de dommages et intérêts au paiement de la somme de 8 000 euros ;

- condamner M. [J] à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Mme [D] [Y], à qui la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant ont été signifiées à l'étude et à domicile les 19 juin et 16 juillet 2019 et les conclusions de la banque Cic Nord-Ouest le 24 octobre 2019 à l'étude, ne comparaît pas.

MOTIFS

Si M. [J] a interjeté appel du chef du jugement qui l'a débouté de sa demande de mainlevée des hypothèques conventionnelles régularisées le 29 mars 2006 et le 20 décembre 2006 sur l'immeuble situé à [Localité 41], cadastré section C n°[Cadastre 3], il n'élève aucune critique contre ces dispositions qu'il convient donc d'ores et déjà de confirmer.

Sur la demande de mainlevée des inscriptions d'hypothèque judiciaire provisoire

- sur les conditions de l'article L. 511-1 du code des procédures civiles d'exécution

Selon l'article L. 511-1 du code des procédures civiles d'exécution, 'toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement'.

Selon l'article L. 512-1 du même code, 'même lorsqu'une autorisation préalable n'est pas requise, le juge peut donner mainlevée de la mesure conservatoire s'il apparaît que les conditions prescrites par l'article L. 511-1 ne sont pas réunies.'

Il n'est pas contesté que la banque justifie de créances fondées en leur principe en vertu des actes notariés des 8 février 2006 et 6 novembre 2006, ces créances ayant été fixées, dans le cadre de la procédure de saisie immobilière du terrain situé à [Adresse 42], cadastré section CV n°[Cadastre 3], par un jugement du juge de l'exécution de Lille du 1er février 2017 confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Douai du 27 septembre 2018, à la somme totale de 778 679,91 euros se décomposant comme suit :

- 324 230,50 euros en principal, intérêts et frais, au titre du prêt de 323 299 euros, selon décompte arrêté au 21 octobre 2014, sans préjudice des intérêts conventionnels à compter du 22 octobre 2014 ;

- 454 449,41 euros au titre du prêt sous forme d'ouverture de crédit de 400 000 euros sous réserve des intérêts conventionnels à compter du 3 juillet 2014.

Sur les circonstances de nature à menacer le recouvrement de la créance, le premier juge a estimé que l'importance de la créance évaluée dans le jugement d'orientation ordonnant la vente forcée de l'immeuble de [Localité 41] à 778 679,91 euros au titre des deux prêts et selon décompte actualisé au 13 décembre 2018 à plus de 860 000 euros, l'absence de tout paiement de la part du débiteur alors que la dette était exigible depuis quatre ans et qu'il avait perçu des sommes dans le cadre de la liquidation de son régime matrimonial destinées au remboursement de l'un des prêts caractérisaient la menace sur le recouvrement des créances et, ce même après la vente de l'immeuble de [Localité 41] intervenue dans le cadre de la saisie immobilière pour le prix de 151 000 euros.

M. [J] fait valoir que, soulevant dans le cadre de la procédure de saisie immobilière la prescription des créances, il aurait été contraire à son argumentation et préjudiciable à sa thèse de procéder à des règlements et réaffirme que la vente par adjudication du terrain de [Localité 41] va permettre de diminuer la créance de 151 000 euros ;

Or, force est de constater que :

- alors même que le rejet du moyen tiré de la prescription par le juge de l'exécution dans son jugement du 1er février 2017 a été confirmé par l'arrêt du 27 septembre 2018, M. [J] n'a procédé à aucun règlement et a laissé s'effectuer la vente forcée de l'immeuble qu'il avait abandonné à Mme [Y] dans le cadre du partage et qui a été vendu par adjudication le 19 décembre 2018 pour un prix de 151 000 euros ;

- même si l'on déduit de la somme de 868 796,29 correspondant au montant actualisé au 13 décembre 2018 des créances de la banque, celle de 151 000 euros correspondant au prix d'adjudication consigné sur un compte Carpa, la créance reste d'un montant élevé puisqu'elle s'établit à 717 796,29 euros.

M. [J] tire argument de la valeur du patrimoine de Mme [Y] évalué à 1 005 000 euros.

Or d'abord cette évaluation inclut la parcelle de [Localité 41] qui a été adjugée pour la somme de 151 000 euros de sorte que déduction faite de cette somme, la valeur du patrimoine immobilier de Mme [Y] est ramenée à 854 000 euros ; surtout, les inscriptions prises sur les immeubles de Mme [Y] l'ont été en garantie de la créance du CIC Nord-Ouest au titre du prêt immobilier du 8 février 2006, évaluée à 324 230,50 euros. La créance au titre de ce prêt s'élevait au 13 décembre 2018 à la somme de 358 656,30 euros et, même si l'on en déduit le prix d'adjudication de la parcelle de [Localité 41] pour 151 000 euros, la banque est encore créancière au minimum de 207 656,30 euros. A supposer même qu'il faille considérer que la sûreté prise sur les immeubles de Mme [Y] offre des garanties suffisantes à la banque pour obtenir le paiement du solde de sa créance au titre du prêt du 8 février 2006, Mme [Y] n'ayant d'ailleurs pas formé appel du jugement du 29 avril 2019 rejetant ses contestations, il demeure que M. [J] reste seul débiteur envers le CIC Nord-Ouest d'une somme actualisée au 13 décembre 2018 de 510 139,99 euros au titre de l'ouverture de crédit du 6 novembre 2006 de sorte qu'il ne peut être considéré que les inscriptions prises sur les immeubles de Mme [Y] font disparaître la menace sur le recouvrement de la créance de la banque au titre de ce prêt.

M. [J] argue de ce que les biens constituant son patrimoine y sont entrés en raison de donations qui lui ont été faites par ses parents, ces actes stipulant une clause de non aliénation par le donataire. Il semble qu'il faille en déduire que la Sa Cic Nord Ouest aurait ainsi la certitude que les biens grevés de cette interdiction ne puissent sortir du patrimoine de son débiteur.

M. [J] produit l'acte de donation du 27 décembre 2011 portant sur les immeubles situés à [Localité 37] cadastrés section B n°[Cadastre 22], [Cadastre 6] et [Cadastre 7] qui stipule effectivement une interdiction faite au donataire d'aliéner et d'hypothéquer mais réserve la possibilité d'un accord exprès préalable et écrit du donataire de sorte que cette clause ne garantit aucunement aux créanciers de [S] [J] que les biens concernés ne pourront être aliénés ou hypothéqués par ce dernier.

Cette observation vaut nécessairement pour les autres immeubles de [Localité 37] cadastrés section B n°[Cadastre 8] et [Cadastre 9], donnés à M. [J] par acte du 8 juin 2011 et pour le bien situé à [Localité 34] cadastré section AV n°[Cadastre 11] qui lui a été donné par acte du 13 avril 2012, actes qui ne sont pas produits mais sont mentionnés sur le relevé des formalités publiées au service de la publicité foncière de [Localité 36] 3 ainsi que les clauses d'interdiction et d'aliénation qu'ils contenaient (formalités n°83 et 91).

Il ressort de l'état des formalités émanant du service de la publicité foncière de [Localité 36] 2 que l'immeuble de [Localité 40] cadastré section AL n°[Cadastre 24] n'est pas entré dans le patrimoine de M. [J] par donation.

L'argument est donc inopérant pour l'ensemble des immeubles.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de considérer que les conditions d'inscription d'une hypothèque judiciaire provisoire sur les immeubles de M. [J] restent réunies, la valeur de ce patrimoine immobilier étant le cas échéant à prendre en considération dans le cadre de l'examen de la demande de cantonnement.

- sur les inscriptions prises sur des biens reçus par donation :

M. [J] soutient que les clauses d'interdiction d'aliéner et d'hypothéquer insérées dans les actes de donation aux termes desquels il a recueilli les biens de [Localité 37] et de [Localité 34] doivent conduire à ordonner mainlevée des inscriptions prises par le Cic Nord Ouest.

Or, s'il a été précisé ci-dessus que les biens de [Localité 37] et [Localité 34] étaient effectivement concernés par une clause d'interdiction d'aliéner et d'hypothéquer, le premier juge a relevé à juste titre qu'une telle clause ne s'impose qu'au donataire et ne fait pas obstacle à l'inscription d'une hypothèque judiciaire.

- sur la détermination du montant des inscriptions :

Il résulte des bordereaux d'inscription du 28 juillet 2018 que les créances garanties sont portées pour la somme de 400 000 euros.

Selon l'article R. 532-1 du code des procédures civiles d'exécution, l'inscription provisoire d'hypothèque doit contenir l'indication du capital de la créance et de ses accessoires.

M. [J] fait observer que les inscriptions ne respectent pas ces dispositions car elles ont été prises pour un montant indéterminé.

Or, les dispositions susvisées ne sont pas prescrites à peine de nullité de la mesure et en tout état de cause la somme portée sur chaque bordereau à savoir 400 000 euros (montant total auquel la banque a limité sa créance, le fait que la somme de 400 000 euros soit mentionnée sur chaque bordereau étant simplement dû au fait que les immeubles relevaient de deux bureaux différents) était à la date des inscriptions largement inférieure aux capitaux restant dus des deux créances soit 264 202,20 euros au titre du prêt du 8 février 2006 et 411 940,67 euros au titre du prêt du 6 novembre 2006.

Il en résulte que c'est à juste titre que le jugement déféré a rejeté tant la demande de mainlevée pour ce motif que celle tendant pour le même motif à voir cantonner le montant garanti pour les deux inscriptions.

Sur la demande de cantonnement

Selon l'article R. 532-9 du code des procédures civiles d'exécution, 'lorsque la valeur des biens grevés est manifestement supérieure au montant des sommes garanties, le débiteur peut faire limiter par le juge les effets de la sûreté provisoire s'il justifie que les biens demeurant grevés ont une valeur double du montant de ces sommes.'

M. [J] demande que les effets de l'inscription soient cantonnés à la seule parcelle située à [Localité 34] cadastrée section AV n°[Cadastre 11].

Or, la valeur de cet immeuble, soit 450 000 euros selon l'évaluation produite par M. [J] représente moins du double de la créance garantie, à savoir 400 000 euros.

C'est donc à juste titre que le premier juge a rejeté la demande de cantonnement.

Sur la demande de délais de paiement

Pas plus que devant le premier juge, M. [J] ne justifie de ce que sa situation financière le met en mesure de respecter les propositions de règlement qu'il fait, dont il a augmenté les montants devant la cour puisqu'il offre désormais après deux premiers versements de 15 000 euros et 57 000 euros de procéder à 22 versements mensuels de 1 000 euros, le solde étant réglé lors du 24ème versement.

C'est donc à juste titre que le jugement déféré a rejeté la demande de délais de paiement de M. [J].

Sur la demande en dommages et intérêts de la Sa Cic Nord Ouest

Pas plus qu'en première instance, la banque ne démontre le préjudice, autre que celui consistant à avoir engagé des frais irrépétibles qui sera indemnisé par ailleurs, qui lui serait causé par le comportement à le supposer fautif de M. [J].

Il convient de confirmer le jugement déféré qui l'a déboutée de sa demande indemnitaire pour procédure abusive.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La solution du litige conduit à confirmer le jugement dans ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles ainsi qu'à condamner M. [J] aux dépens d'appel et à verser à la banque Cic Nord Ouest la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne M. [S] [J] à payer à la Sa Cic Nord Ouest la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [S] [J] aux dépens d'appel.

Le greffier,Le président,

I. CapiezS. Collière


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 3
Numéro d'arrêt : 19/02785
Date de la décision : 23/01/2020

Références :

Cour d'appel de Douai 83, arrêt n°19/02785 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-23;19.02785 ?
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