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23/01/2020 | FRANCE | N°17/03740

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 23 janvier 2020, 17/03740


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 23/01/2020





****





N° de MINUTE : 20/

N° RG 17/03740 - N° Portalis DBVT-V-B7B-QYRG



Jugement (N° 2016012731) rendu le 01 juin 2017 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Ordonnance d'incident rendue le 23 novembre 2017 par la cour d'appel de Douai

Ordonnance d'incident rendue le 25 octobre 2018 par la cour d'appel de Douai




r>APPELANTS



M. [D] [J]

né le [Date naissance 3] 1953 à [Localité 11], de nationalité française

Et

Mme [C] [O] épouse [J]

née le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 15], de nationali...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 23/01/2020

****

N° de MINUTE : 20/

N° RG 17/03740 - N° Portalis DBVT-V-B7B-QYRG

Jugement (N° 2016012731) rendu le 01 juin 2017 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Ordonnance d'incident rendue le 23 novembre 2017 par la cour d'appel de Douai

Ordonnance d'incident rendue le 25 octobre 2018 par la cour d'appel de Douai

APPELANTS

M. [D] [J]

né le [Date naissance 3] 1953 à [Localité 11], de nationalité française

Et

Mme [C] [O] épouse [J]

née le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 15], de nationalité française

demeurant ensemble [Adresse 6]

[Localité 11]

M. [S] [J]

né le [Date naissance 4] 1984 à [Localité 16], de nationalité française

demeurant [Adresse 7]

[Localité 9]

M. [G] [J]

né le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 14], de nationalité française

demeurant [Adresse 6]

[Localité 11]

représentés et assistés par Me David Lacroix, avocat au barreau de Douai

INTIMÉES

SARL KFPLM prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 5]

[Localité 12]

SARL société [S] [J] prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 5]

[Localité 12]

représentées et assistées par Me Eric Delfly, avocat au barreau de Lille

INTERVENANTS VOLONTAIRES

SELARL R&D représentée par Me [R] [X], pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société [S] [J] désigné à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole du 22 juillet 2019

ayant son siège social [Adresse 8]

[Localité 9]

SELAS M.J.S. Partners pris en sa qualité de mandataire judiciaire

ayant son siège social [Adresse 13]

[Localité 10]

représentées et assistées par Me Eric Delfly, avocat au barreau de Lille

DÉBATS à l'audience publique du 25 septembre 2019 tenue par Véronique Renard magistrat chargée d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Stéphanie Hurtrel

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Véronique Renard, présidente de chambre

Anne Molina, conseiller

Geneviève Créon, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 janvier 2020 après prorogation du délibéré initialement prévu le 12 décembre 2019 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Véronique Renard, présidente et Stéphanie Hurtrel, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 25 septembre 2019

****

Vu le jugement contradictoire rendu le1er juin 2017 par le tribunal de commerce de Lille Métropole qui a :

- débouté les consorts [J] de leur demande de sursis à statuer,

- débouté les consorts [J] de toutes leurs conclusions au fond,

- condamné l'ensemble des défendeurs solidairement à payer à la société [S] [J] la somme de 67.520,56 euros correspondant aux manquements aux obligations déclaratives faites dans la garantie d'actif et de passif,

- condamné l'ensemble des défendeurs solidairement à payer à la société KFPLM la somme de 82.524,41 euros au titre de la diminution du prix et en réparation du préjudice consécutif à la présentation de comptes de référence falsifiés à l'origine de la surévaluation de la société [S] [J],

- condamné madame [O] épouse [J], à payer à la SARL [S] [J] la somme de 6.065,70 euros correspondant à un excédent de facturation (et de paiement) commis au préjudice de la SARL [S] [J] avec la complicité de son époux et ancien gérant, monsieur [S] [J],

- condamné les défendeurs solidairement à payer à la société [S] [J] une somme de 4.269,22 euros correspondant au temps nécessaire à reconstituer la comptabilité, identifier les malversations, corriger les écritures comptables et soutenir les demandes devant l'expert [L],

- dit que le point de départ des intérêts moratoires serait fixé à la date de l'acte introductif d'instance,

- dit que les intérêts se capitaliseraient d'une année sur l'autre,

- condamné solidairement madame [C] [O], messieurs [D], [S] et

[G] [J] à payer à la société [S] [J] la somme de 25.000 euros et à la société KFPLM la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement afférent à la garantie d'actif et de passif, à savoir la somme de 67.520,56 euros,

- condamné solidairement madame [C] [O], messieurs [D] et [S]

[J] aux entiers frais et dépens,

Vu l'appel interjeté le 14 juin 2017 par M. [D] [J], Mme [C] [O] épouse [J], M. [S] [J] et M. [G] [J],

Vu l'ordonnance rendue le 23 novembre 2017 par le conseiller de la mise en état qui

a :

- débouté M. [D] [J], Mme [C] [O] épouse [J], M. [S] [J] et M. [G] [J] de leur demande de sursis à statuer jusqu'à ce qu'une décision pénale définitive intervienne à la suite de la plainte déposée par la société [S] [J] pour des fraudes comptables commises sur la période 2009 à 2014 pour un montant total de 192.941,12 euros,

- condamné in solidum M. [D] [J], Mme [C] [O] épouse [J], M. [S] [J] et M. [G] [J] aux dépens de l'incident,

- dit que les parties conserveront la charge de leurs frais irrépétibles afférents à

l'incident,

Vu l'ordonnance rendue le 25 octobre 2018 par le conseiller de la mise en état qui a, pour l'essentiel :

- débouté M. [D] [J], Mme [K] [O] épouse [J],

M. [J] et M. [G] [J] de leur demande de complément d'expertise,

- condamné M. [D] [J], Mme [K] [O] épouse [J],

M. [S] [J] et M. [G] [J] in solidum aux dépens de la procédure d'incident,

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le

14 août 2019 par les consorts [J] qui demandent à la cour de :

- les accueillir en leur appel,

- réformer intégralement le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lille Métropole,

- juger que la garantie d'actif et de passif doit être limitée au plafond de 50.000 euros prévu à l'acte,

- à défaut, juger que la condamnation ne saurait dépasser la somme de 61.328,48 euros,

- juger que l'établissement de la situation intermédiaire n'avait plus pour vocation que de constituer les comptes de référence pour l'application de la garantie d'actif et de passif,

- juger que la réduction de prix ne peut être la conséquence, contrairement à ce qu'avance l'expert judiciaire aux termes de son rapport, de la baisse du chiffre d'affaires au 30 septembre 2013 dans la mesure où celle-ci était mentionnée en page 5 du nouveau compromis du 23 janvier 2014, sans que cela ait conduit les parties à décider à ce moment là d'une baisse de prix,

- juger qu'il ne peut être retenu qu'il y a dol,

- juger en tout état de cause que la créance que détient la société [S] [J] sur

M. [V], ancien comptable salarié de la société, à raison de détournements opérés pour un montant de 139.704,94 euros au minimum, non comptabilisé dans la situation comptable de référence, augmente d'autant la valeur de l'entreprise de telle sorte qu'il ne saurait être question d'un excès dans la fixation du prix,

- de chef très subsidiaire, juger que le préjudice susceptible d'être invoqué ne saurait excéder la somme de 8.938,15 euros correspondant aux problèmes sur les stocks et ce pour tenir compte de la condamnation au bénéfice de la société [S] [J] dans le cadre de la garantie d'actif et de passif et de la condamnation de madame [K] [J] à payer la somme de 6.065,70 euros,

- débouter la société [S] [J] de sa demande formulée à hauteur de

4.269,22 euros d'une part à raison du plafonnement de la clause de garantie d'actif et de passif et d'autre part dans la mesure où les parties n'ont pas spécifiquement prévu que les cessionnaires seraient indemnisés du temps passé à reconstituer la comptabilité,

- réduire à de plus justes proportions la condamnation prononcée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- juger que le coût des procès-verbaux de constat de maître [U] des 15 septembre 2014 et 15 janvier 2015 ne doit pas être intégré aux dépens car il n'était pas nécessaire au succès des prétentions de la société [S] [J],

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le

4 février 2019, les sociétés KFPLM et [S] [J] qui demandent à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- condamner solidairement les demandeurs à payer à chacun des intimées une somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- les condamner en tous les frais et dépens d'appel,

Vu les conclusions d'intervention volontaire remises au greffe et notifiées par voie électronique le 23 septembre 2019 par les sociétés KFPLM et [S] [J] et la SELARL R&D représentée par maître [X] ès qualités d'administrateur judiciaire de la société [S] [J] et de la SELAS MJS Partners représentée par maître [A] [W] ès qualités de mandataire judiciaire, qui demandent à la cour de constater l'intervention volontaire de la SARL R&D (en réalité de la SELARL R&D) et de la SELAS MJS Partners dans le cadre de la présente procédure et de leur donner acte de ce qu'ils s'associent aux faits, moyens et dispositif développés par la société KFPLM et [S] [J],

Vu l'ordonnance de clôture du 25 septembre 2019 ;

SUR CE,

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

Il sera simplement rappelé que par acte sous seing privé du 3 juin 2014, M. [D] [J], Mme [C] [O] épouse [J], M. [S] [J] et

M. [G] [J] (ci-après les consorts [J]) ont cédé à la société KFPLM la totalité des parts qu'ils détenaient dans le capital de la société [S] [J].

Cette convention faisait suite à un premier compromis de vente sous condition suspensive signé le 19 novembre 2013, puis à un second du 23 janvier 2014.

À la convention était intégré un ensemble de déclarations auquel était attachée une garantie d'actif et de passif.

Une première partie de la comptabilité a été remise sous constat d'huissier du

15 septembre 2014 et l'ensemble des documents comptables a été transmis aux cessionnaires le 15 janvier 2015.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 novembre 2014, la société [S] [J] a sollicité la mise en 'uvre de la garantie d'actif et passif à hauteur de 30.984,08 euros.

Par ordonnance du 20 octobre 2015 et sur requête de la société KFPLM, le président du tribunal de commerce de Lille Métropole a désigné M. [B] [L] en qualité d'expert aux fins notamment de rechercher, sur la base des déclarations de la demanderesse, les manquements aux déclarations commises par les défendeurs au titre de la garantie d'actif et passif.

L'expert a déposé son rapport le 14 juin 2016.

Par acte d'huissier en date du 27 juillet 2016, la société KFPLM et la société [S] [J] ont fait assigner les consorts [J] en paiement de la garantie d'actif et de passif ainsi qu'en paiement de dommages et intérêts.

Par jugement du 20 mars 2017, le tribunal de commerce de Lille Métropole a ouvert une procédure de sauvegarde à l'encontre de la société KFPLM et la SELAS [F] & [A] [W] a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 28 février 2018, le tribunal de commerce de Lille métropole a adopté le plan de sauvegarde proposé par la société KFPLM pour une durée de huit ans, maintenu la SELAS [W] représentée par maître [A] [W] en qualité de mandataire jusqu'à l'arrêté définitif de l'état des créances et nommé la SELAS [W] représentée par maître [A] [W] en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

Les appelants sollicitent l'infirmation du jugement du 1er juin 2017 en ce qu'il les a condamnés à payer diverses sommes au titre de la garantie d'actif et de passif, à titre de diminution de prix, à titre d'excédent de facturation et correspondant au temps nécessaire à constituer la comptabilité, outre les frais de procédure.

Ils font valoir en substance que les demandes des sociétés [S] [J] et KFPLM sont incompatibles entre elles, sur la demande de la société [S] [J] au titre de la garantie d'actif et de passif, à titre principal que la condamnation doit être limitée à la somme de 50.000 euros dès lors qu'aucun élément ne permet de retenir une intention dolosive de leur part, et à titre subsidiaire, que la condamnation ne peut en tout état de cause dépasser 61.328,48 euros compte tenu de l'augmentation de l'actif résultant de la créance détenue par la société [S] [J] sur M. [V], comptable salarié de la société au moment de la cession qui a reconnu avoir commis des détournements ; sur la demande d'indemnisation de la société KFPLM, ils indiquent de la même façon que l'élément intentionnel du dol n'existe pas et que l'erreur résultant pour les acheteurs du caractère erroné de la situation intermédiaire au 31 mai 2014 n'a pas été déterminante de leur consentement, enfin que le dol allégué n'a eu aucune conséquence préjudiciable.

Les intimés répliquent, également en substance, que les détournements commis par

M. [V] sont sans incidence sur le litige entre les parties, que l'expert judiciaire a caractérisé les fautes et admis les préjudices en considération d'un dol ; ils sollicitent ainsi la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.

Sur la garantie d'actif et de passif

Les compromis de cession de parts de la société [S] [J] des 19 novembre 2013 et 23 janvier 2014 fixent le prix de cession des titres à 600.000 euros avec une clause de révision de prix en fonction de l'évolution des capitaux propres entre le 30 septembre 2012 puis le 30 septembre 2013 et la date de la situation comptable arrêtée au jour de la date effective des cessions des titres.

L'acte de cession des parts sociales du 3 juin 2014 fixe le prix de cession des titres à 420.000 euros sans clause de révision de prix mais 'connaissance prise par l'acquéreur de l'évaluation des capitaux propres réalisés par l'expert comptable à la date du 31 mai 2014 soit 380.998 euros'.

La cession de titres a fait l'objet d'une garantie d'actif et de passif donnée par les cédants en ces termes selon l'article 4.1 de l'acte :

' Dans le cas où un passif, notamment d'origine fiscale ou sociale, ne figurant pas dans la situation comptable qui sera arrêtée au jour de la cession, ayant une cause ou une origine antérieure à cette dernière date viendrait à se révéler,

Comme dans le cas où la société SOCIETE [S] [J] serait appelée à exécuter des engagements de caution, aval ou garantie contractés par elle avant ce jour, mais non comptabilisés ou non indiqués au cessionnaire,

Les cédants seraient tenus de combler ledit passif et, à première réquisition du cessionnaire ou de tout tiers substitué, de verser dans la caisse sociale, à fonds perdus, la somme correspondante à titre de complément de passif.

Il en sera de même dans le cas où une insuffisance d'actif se révélerait par rapport à la situation arrêtée au jour de la cession ayant une cause ou une origine antérieure à cette date.

Les sommes dues au titre de la présente garantie seront payables immédiatement.

Les parties conviennent de limiter la garantie d'actif et de passif en fixant des seuils.

La garantie ne trouvera à s'appliquer qu'au-delà de 10.000 euros et en deçà de

50.000 euros.

Enfin cette garantie d'actif et passif est donnée pour une durée de 3 ans outre l'année en cours de telle sorte qu'elle ne concernera que les augmentations de passif ou les diminutions d'actif dont la manifestation interviendrait d'ici au 31 décembre 2016'.

Cette garantie porte sur les états financiers visés au paragraphe 2.3 de l'acte de cession, soit sur 'les comptes annuels complets de l'exercice clos le 30 septembre 2013, ainsi que (sur) une situation comptable complète arrêtée à la même date', de sorte que les appelants ne peuvent soutenir devant la cour que la situation intermédiaire ne devrait pas être prise en compte pour apprécier la garantie qui est actionnée ou le dol qui est invoqué.

La société [S] [J] sollicite paiement à son profit d'une somme de

67.520,56 euros en application de la garantie d'actif et de passif, et ce sans plafonnement en raison du dol qu'auraient commis les cédants.

L'expert M. [B] [L] indique en conclusion de son rapport que l'expertise a mis en évidence de nombreuses irrégularités dans l'arrêté de la situation comptable au 31 mai 2014 auxquelles s'ajoutent des dettes non comptabilisées apparues avant le 3 juin 2014 mais trouvant leur origine antérieurement à la date de cession des titres, et chiffre l'impact sur le résultat au 31/05/2014 à 67.520,56 euros tenant compte de l'impact des irrégularités comptables évaluées à 63.555, 65 euros et des dettes apparues après la cession des titres évaluées à - 10.030, 61 euros, soit un total de - 73.586,26 euros.

Il ajoute que les irrégularités comptables suffisent à elles seules à absorber la totalité de la garantie d'actif et de passif donnée par les cédants, que la question se pose dès lors quant à la validité de la limitation de cette clause de garantie, 'qu'à son avis' une telle limitation ne peut être raisonnablement admise que dans la mesure où la situation comptable de référence a été établie en application des principes de régularité et de sincérité des comptes, ce qui n'est manifestement pas le cas.

Il résulte des éléments du dossier que postérieurement à la cession des parts sociales intervenue entre les parties, la société [S] [J] a déposé plainte entre les mains de M. Le Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Douai et que les enquêteurs ont identifié des flux financiers à son détriment à hauteur de

139 704,94 euros.

Par ailleurs, par jugement du 27 février 2018 le tribunal correctionnel de Douai a condamné M. [V], prévenu du chef d'abus de confiance, à payer à la SARL [S] [J] la somme principale de 192.941,22 euros en réparation de son préjudice matériel pour tous les faits commis à son encontre, M. [V] ayant reconnu lui-même avoir détourné des fonds à hauteur de 67.534,66 euros.

La procédure serait actuellement pendante devant la chambre des appels correctionnels de la cour de Douai.

En l'état, force est donc de constater qu'aucune condamnation définitive de l'ancien comptable de la société n'est justifiée et que la société [S] [J] n'a recouvré à ce jour aucune somme à ce titre. Par ailleurs la créance ne pouvant résulter que de l'infraction pénale poursuivie, les appelants ne peuvent utilement soutenir qu'à la date de la cession, la société détenait une créance sur M. [V], qui aurait dû être comptabilisée à l'actif du bilan.

Par lettre recommandée du 5 novembre 2014, la société [S] [J] a sollicité la mise en oeuvre de la garantie d'actif et de passif à hauteur de 30.984, 08 euros en visant un problème lié à un véhicule, le coût du licenciement d'un salarié et un problème concernant un autre salarié.

Selon la convention, la garantie ne trouve à s'appliquer que dans la limite de

50.000 euros et les cédants sont tenus de combler ledit passif, et à première réquisition du cessionnaire ou de tout tiers substitué, de verser dans la caisse sociale, à fonds perdus, la somme correspondante à titre de complément de passif.

La société [S] [J] se prévaut ainsi d'une stipulation pour autrui pour solliciter la garantie d'actif et de passif à son profit, sans que les appelants ne lui contestent cette qualité à agir directement à leur encontre au titre de cette garantie. Elle sollicite paiement de la somme de 67.520,56 euros à ce titre en se prévalant d'un déplafonnement pour dol.

La convention ne prévoit pas un tel déplafonnement mais les appelants, qui contestent simplement la caractérisation du dol, n'en contestent pas le principe.

Sont invoqués au titre du dol les griefs retenus par le tribunal à savoir l'historique de la comptabilité effacé, des archives conservées par les époux [J], une amende pénale ayant fait l'objet d'un procès-verbal de transaction, des augmentations de salaires faites en période de négociations, la présence de litiges sociaux, des stocks faux à l'aide de fausses pièces, des annulations comptables et de factures ainsi que la falsification des soldes de banque, outre la comptabilisation des stocks en valeur TTC gonflant artificiellement les actifs.

Pour autant, il y a lieu de relever que :

- l'effacement de l'historique de la comptabilité, au demeurant nécessairement intervenu postérieurement à la cession, n'est établi par aucun élément et n'a pas été constaté par l'expert,

- les archives de la société se trouvaient au domicile des époux [J] et ont été remises aux acquéreurs postérieurement à la cession,

- l'amende pénale, dont le montant est limité à 1.150 euros n'a pas été portée en comptabilité par le comptable de la société, lequel travaillait sous le contrôle d'un expert- comptable (le cabinet Pruvost) qui était aussi celui de l'acquéreur M. [N] et au demeurant employeur de son épouse Mme [N],

- les augmentations de salaire contestées correspondent à des augmentations du minimum conventionnel,

- les litiges sociaux sont postérieurs à la cession,

- aucun élément n'établit l'établissement de stocks à l'aide de fausses pièces,

- aucune annulation de factures ni falsification des soldes de banque n'a été relevée par l'expert,

- si la comptabilisation des stocks en valeur TTC n'est pas contestée par les appelants, ils expliquent sans être contredits sur ce point qu'il s'agissait d'une pratique dans la société et les mêmes observations s'agissant du comptable et de l'expert-comptable s'imposent ici.

Il résulte de ces éléments qu'aucune manoeuvre destinée à tromper les acquéreurs et à les conduire à accepter une limitation de la garantie d'actif et de passif n'est établie et que cette garantie ne peut être déplafonnée pour dol.

En conséquence, les consorts [J] seront condamnés à payer à la société [S] [J] la somme de 50.000 euros au titre de la garantie d'actif et de passif, et ce avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 27 juillet 2016, qui se capitaliseront en outre dans les conditions de l'article 1343-2 du Code civil.

Le jugement sera en conséquence infirmé de ce chef.

Sur la diminution du prix et la réparation du préjudice consécutif à la présentation de comptes de référence falsifiés à l'origine de la surévaluation de la société [S] [J]

Les appelants font grief aux premiers juges de les avoir condamnés à payer à la société KFPLM la somme de 82.524,41 euros au titre de la diminution du prix et en réparation du préjudice consécutif à la présentation de comptes de référence falsifiés à l'origine de la surévaluation de la société [S] [J], au motif que cette demande serait incompatible avec la demande formée par la société [S] [J].

La demande de la société KFPLM vise à obtenir une indemnisation en raison du dol commis par les cédants à son détriment, à raison de la présentation d'une comptabilité fausse et étant indiqué que si le cessionnaire avait connu le défaut de rentabilité de la société, il aurait pu, soit renoncer à son offre, soit faire une offre moindre.

Cependant, même si elle a l'a transférée par stipulation pour autrui à la société [S] [J], la société KFPLM était déjà bénéficiaire de la garantie d'actif et de passif qui sont les deux éléments déterminants de la valorisation de la société et la garantie détermine à hauteur de 50.000 euros le préjudice pouvant être réclamé à ce titre. Il s'agit donc en réalité d'un préjudice déjà indemnisé par la mise en oeuvre de la garantie contractuelle que la société KFPLM ne peut à nouveau solliciter sur un autre fondement.

La demande sera en conséquence rejetée et le jugement également infirmé de ce chef.

Sur l'excédent de facturation et de paiement commis au préjudice de la SARL [S] [J]

L'expert indique dans son rapport qu'une facture du 30 mai 2014 émise par Mme [C] [J], dirigeante de droit de la société [J], a été majorée d'une somme de 6.065, 70 euros correspondant à la facturation d'une bête qui a été saisie par les services vétérinaires comme étant impropre à la consommation, à la facturation d'une bête inexistante dans les registres vétérinaires et les livres de la société et à la surfacturation d'une vache allaitante.

Le fondement de la demande n'est pas expliqué par les intimées mais n'est pas contesté par Mme [C] [J] qui n'invoque aucun moyen contre cette prétention malgré sa demande d'infirmation du jugement, étant précisé en tout état de cause que cette demande n'est pas comprise dans la garantie d'actif et de passif.

Le jugement sera donc également confirmé en ce qu'il a condamné Mme [C] [J] à payer la somme de 6.065,70 euros à la SARL [S] [J].

Sur le préjudice lié au temps consacré à l'instruction du dossier et à l'expertise

Ce préjudice, qui n'entre pas plus dans celui déjà indemnisé au titre de la garantie d'actif et de passif, et qui est distinct des frais de procédure, correspond selon l'expert à 257 heures, soit à la somme de 4.269, 22 euros selon décompte produit qui n'est pas contesté.

Le jugement sera en conséquence également confirmé en ce qu'il a condamné solidairement les consorts [J] à payer cette somme à la société [S] [J].

Sur les autres demandes

Les appelants qui succombent en partie seront condamnés aux entiers dépens, qui comprendront en outre le coût des constats d'huissier des 15 septembre 2014 et

15 janvier 2015 établis à l'occasion de la restitution des chiffres comptables, en cause dans le cadre du présent litige.

Enfin les intimées ont dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à leur charge ; il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

Donne acte à la SELARL R&D et à la SELAS MJS Partners de leur intervention volontaire à la procédure.

Confirme le jugement rendu le 1er juin 2017 par le tribunal de commerce de Lille Métropole en ce qu'il a :

- condamné madame [O] épouse [J], à payer à la SARL [S] [J] la somme de 6.065,70 euros correspondant à un excédent de facturation,

- condamné solidairement les consorts [J] à payer à la société [S] [J] une somme de 4.269,22 euros correspondant au temps nécessaire à reconstituer la comptabilité et soutenir les demandes devant l'expert [L],

- dit que le point de départ des intérêts moratoires serait fixé à la date de l'acte

introductif d'instance,

- dit que les intérêts se capitaliseraient d'une année sur l'autre.

L'infirme pour le surplus.

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant,

Condamne solidairement M. [D] [J], Mme [C] [O] épouse [J], M. [S] [J] et M. [G] [J] à payer à la société [S] [J] la somme de 50.000 euros au titre de la garantie d'actif et de passif.

Déboute la société KFPLM de sa demande relative à la diminution du prix de cession des parts sociales de la société [S] [J].

Condamne solidairement M. [D] [J], Mme [C] [O] épouse [J], M. [S] [J] et M. [G] [J] à payer aux sociétés KFPLM et [S] [J], ensemble, la somme totale de 4.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamne M.[D] [J], Mme [C] [O] épouse [J],

M. [S] [J] et M. [G] [J] en tous les frais et dépens d'appel qui comprendront notamment le coût des constats d'huissier des 15 septembre 2014 et

15 janvier 2015.

Le greffierLa présidente

Stéphanie HurtrelVéronique Renard


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 17/03740
Date de la décision : 23/01/2020

Références :

Cour d'appel de Douai 21, arrêt n°17/03740 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-23;17.03740 ?
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