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23/01/2020 | FRANCE | N°17/02286

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 2, 23 janvier 2020, 17/02286


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 2



ARRÊT DU 23/01/2020





****



N° de MINUTE :20/

N° RG 17/02286 - N° Portalis DBVT-V-B7B-QS67

et RG 17/2573 (ordonnance de jonction du 28 septembre 2017)

et RG 17/4338 (ordonnance de jonction du 19 octobre 2017)



Jugement n° 2013009094 rendu le 07 mars 2017 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Arrêt de réouverture des débats rendu le 20 décembre 2018

par la cour d'appel de Douai





APPELANTE aux dossiers RG 17/02286 et 17/02573

INTIMÉE au dossier RG 17/04338



SA Métabolic Explorer prise en la personne de son Préside...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 23/01/2020

****

N° de MINUTE :20/

N° RG 17/02286 - N° Portalis DBVT-V-B7B-QS67

et RG 17/2573 (ordonnance de jonction du 28 septembre 2017)

et RG 17/4338 (ordonnance de jonction du 19 octobre 2017)

Jugement n° 2013009094 rendu le 07 mars 2017 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Arrêt de réouverture des débats rendu le 20 décembre 2018 par la cour d'appel de Douai

APPELANTE aux dossiers RG 17/02286 et 17/02573

INTIMÉE au dossier RG 17/04338

SA Métabolic Explorer prise en la personne de son Président Directeur Général

ayant son siège social [Adresse 6]

[Localité 5]

représentée par Me Catherine Pouille-Groulez, avocat au barreau de Lille

assistée de Me Antonin Lévy et Me Monin, Antonin Levy et Associés A.A.R.P.I., avocats au barreau de Paris

APPELANTE au dossier RG 17/04338

INTIMÉE aux dossiers RG 17/02286 et 17/02573

Société Malaysian Bio-Xcell SDN BHD, société de droit Malaisien, représentée par ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège de la société

ayant son siège social [Adresse 7]

[Localité 4] - Malaisie

représentée par Me Francis Deffrennes, avocat au barreau de Lille

assistée de la société Soffal (société juridique et fiscale Franco-Allemande) représentée par Me Samson, avocat au barreau de Paris

En présence de M. [S] [H], dirigeant de la société

INTIMÉS aux dossiers RG 17/02286 - 17/02573 et 17/04338

Me [M] [X] ès qualités de mandataire judiciaire à la sauvegarde de la société Lebas Industries

demeurant [Adresse 3]

SAS Lebas Industries agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 1]

SELARL AJJIS - Me [V] ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la société Lebas Industries

ayant son siège social [Adresse 2]

représentés par Me François Deleforge, de la SCP François Deleforge-Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai

assistés de Me Didier Lebon, avocat au barreau de Lille

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Laurent Bedouet, président de chambre

Nadia Cordier, conseiller

Agnès Fallenot, conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Valérie Roelofs

DÉBATS à l'audience publique du 24 octobre 2019 après rapport oral de l'affaire par Nadia Cordier

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 janvier 2020 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Laurent Bedouet, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 11 octobre 2019

****

FAITS ET PROCEDURE

La Société Lebas Technologie, désormais Lebas Industrie, est une société d'ingénierie spécialisée dans la conception et la réalisation d'unités de production pour la chimie fine ou de spécialité.

A été créée pour les besoins de l'opération litigieuse une société filiale dénommée Lebas Technologie SDN BDH (Lebas Malaisie).

La société Métabolic Explorer, SA Metex France, est une société créée en 1999 et entrée en bourse en 2007, pionnière en matière de chimie verte et de biotechnologie industrielle. Elle a pour activité le développement de procédés biochimiques de fermentation alternatifs à la pétrochimie traditionnelle. Elle développe principalement 5 molécules dont le 1.3 Propanediol (PDO).

La société Malaysian Bio-xcell, détenue par deux sociétés publiques malaysiennes, est en charge du développement d'un parc biotechnologique en Malaisie.

Un partenariat financier a été envisagé entre la société Bio-xcell et la société Metex France visant à la construction d'une usine de PDO, sur le site du Bio-xcell park, Metex France ayant créée à cette fin une filiale en Malaisie, Métabolic Explorer Sdn Bdh (Metex Malaisie).

Le 1er novembre 2010 un contrat 'Build lease and transfer Agreement' (contrat BLT) a été conclu entre Metex Malaisie et Bio-xcell, laquelle s'engageait à construire une unité de production de PDO pour un budget total de 120 millions de ringgits, puis à donner en crédit-bail cette unité à Mextex Malaisie pour une période de 10 ans, et à l'issue de cette période, à lui transférer la propriété de cette unité.

Parallèlement étaient conclus des contrats annexes : un contrat 'Sale and Purchase Agreement' (contrat SPA) s'agissant des terrains et un contrat 'Utilities Provision Agreement', (contrat UPA) pour les utilités, les services, hors eau et électricité.

Un appel d'offre a été émis par la société Bio-xcell Malaisie, maître d'ouvrage pour confier la réalisation de l'unité de production à un tiers. La société Lebas Malaisie a été choisie comme maître d'oeuvre pour cette réalisation.

Le 21 juin 2011, la société Bio-Xcell Malaisie a conclu avec la société Lebas Malaisie le contrat 'engineering, procurement, construction and commissioning contract', l'EPCC, visant à la construction clé en main de cette unité de PDO, pour un budget total de construction de 106,7 millions de ringgits.

L'exécution du contrat BLT est soumise à l'exécution du contrat EPCC.

Des difficultés sont apparues à raison de problèmes de pollution des sols, révélés par l'étude environnementale réalisée le 29 avril 2011.

Un accord a été conclu entre Metex Malaisie et Bio-xcell le 20 juin 2011, en vue d'effectuer les travaux de décontamination des sols. L'achèvement des travaux était prévu à échéance fin 2012.

Des mises en demeure ont été adressées parallèlement à la société Lebas Malaisie par Metex Malaisie concernant l'absence de communication de la documentation technique nécessaire à la réalisation du projet mais également des règles essentielles d'hygiène et de sécurité des travailleurs.

La société Metex Malaisie a recommandé en qualité de 'project Manager' à la société Bio-xcell la résiliation de l'EPCC conclu avec la société Lebas Malaisie.

Au vu de ces différentes difficultés, une suspension des travaux de 6 mois a été convenue par lettre d'avenant le 2 mars 2012 conclue entre les sociétés Metex Malaisie et Bio-xcell.

Un communiqué du 9 mars 2012 sur ce retard était diffusé par la société Métabolic Explorer sur la conduite du projet par la société d'ingénierie. La correction de ce communiqué sur le site internet était demandée par la société Lebas France, y voyant une mise en cause injuste de son intervention.

Le 3 octobre 2012 un accord de suspension était signé entre la société Metex Malaisie et la société Bio-xcell, laquelle s'engageait à restituer immédiatement la garantie bancaire initialement accordée par la société Metex Malaisie et renonçait dès lors à toute forme de garantie pour la reprise du chantier de construction.

La date butoir des travaux était fixée au 25 avril 2013. Une nouvelle étude environnementale était remise aux parties le 28 décembre 2012 concluant à des conséquences limitées de la pollution du sol et recommandant uniquement des mesures de protection individuelles.

Un nouveau communiqué était publié conjointement par la société Métabolic Explorer et la société Bio-xcell.

Parallèlement, la question de la transmission de la documentation technique ainsi que celle des capacités financières des sociétés du groupe Lebas, une fois la difficulté de la pollution des sols réglée, devenaient prégnantes.

Deux mises en demeure en date du 6 et 21 février 2013 étaient adressées par la société Metex Malaisie à la société Lebas Malaisie sur ces questions.

Par courrier recommandé en date du 21 février 2013, la société Metex Malaisie, en tant que project Manager a recommandé à la société Bio-xcell Malaisie la résiliation de l'EPCC. Elle a également le même jour réclamé en tant que contractant du contrat BLT, que la société Bio-xcell résilie le contrat EPCC avec Lebas Malaisie.

Par courrier du 15 mars 2013, la société Bio-xcell Malaisie a procédé à la résiliation de l'EPCC conclu avec la société Lebas Malaisie.

Par addendum en date du 7 juin 2013, la société Metex Malaisie ne s'étant pas saisie de la possibilité de résilier de droit le contrat BLT, suite à la résiliation de l'EPCC, les sociétés Bio-xcell Malaisie et Metex Malaisie ont convenu d'une poursuite du projet sous plusieurs conditions suspensives.

La principale condition était la conclusion d'un nouveau contrat de construction par la société Bio-xcell avant le 30 septembre 2013, délai prolongé au

31 octobre avec acceptation de la société Metex Malaisie. L'opération était conditionnée au respect de conditions financières précises.

Le contrat EPCC était transformé en un contrat ECC, la partie Achat auprès des sous-traitants ou fournisseurs d'équipement n'étant pas incluse.

La seconde condition liée à la signature d'un nouveau contrat ECC n'ayant pas été remplie, la société Metex Malaisie, par courrier en date du 5 novembre 2013 a constaté la résiliation automatique du contrat.

La conclusion d'un nouveau contrat BLT était envisagée par la société Metex Malaisie avec l'assistance de la société Bio-xcell Malaisie conduisant à des propositions et nouveaux projets échangés entre les sociétés Bio-xcell Malaisie, Metex Malaisie et Technip.

À raison des surcoûts du projet et le besoin de conclusion rapide d'un nouveau contrat BLT, la société Metex Malaisie a signifié sa volonté de mettre un terme aux discussions commerciales le 30 juin 2014.

Le 1er juillet 2014, la société Metex Malaisie a informé de la conclusion d'un contrat de licence exclusive pour la production et la commercialisation de PDO avec la société SK Chemicals. L'usine devait être construite en Corée et la société d'ingénierie retenue était la société Technip. Le projet a échoué sur décision de SK Chemicals en novembre 2015.

D'autres procédures en lien avec le présent litige sont à prendre en compte :

' la procédure collective de la société Lebas France :

Par décision du 23 janvier 2013, la société Lebas France était placée sous procédure de sauvegarde de justice, la SELARL AJIS représentée par Me [V] étant désignée en qualité d'administrateur judiciaire et Me [X] en qualité de mandataire judiciaire.

Une déclaration de créance a été réalisée par la société Bio-xcell le 9 août 2013 à hauteur de 7 580 357,00 euros à titre chirographaire, une requête en relevé de forclusion étant déposée le même jour.

Par ordonnance du 8 janvier 2014, le juge-commissaire a rejeté le relevé de forclusion, la société Bio-xcell formant opposition le 20 mars 2014 à l'encontre de cette décision.

Le 4 mars 2014, la société Bio-xcell a déclaré une créance de

17 951 361,00 euros qui a été contestée par la société Lebas et Me [V] ès qualités.

Le plan de sauvegarde de la société Lebas a été arrêté le 11 juin 2014 par le tribunal de commerce de Lille Métropole.

' la procédure arbitrale entre les sociétés Lebas Malaisie et Bio-xcell Malaisie engagée dès le 5 avril 2016 suivant la clause 19.2 du contrat EPCC :

Par sentence du 2 juillet 2015, le tribunal de Kuala Lumpur a :

- conclu en faveur de la société Lebas Malaisie en disant que la résiliation du contrat EPCC par la société Bio-xcell est juridiquement infondée et illicite car les demandes dans les mises en demeure du project Manager (Metex Malaisie) sur lesquelles s'était fondée la société Bio-xcell étaient viciées.

- condamné la société Bio-xcell à verser à la société Lebas Malaisie les sommes de 1 212 890,00 et 5 346 550,00 ringgits.

' des procédures d'exécution mises en oeuvre par la société Bio-xcell, au titre de l'exécution de la sentence arbitrale mais également au titre du jugement déféré.

A été également appelée par la société Bio-xcell la garantie bancaire de 1er rang de sa banque, la Malaysian Bank Nerhard, celle-ci ayant actionné la contre-garantie bancaire consentie par la KBC, banque de la société Lebas Industries, pour un montant de 1279 053,00 euros, laquelle s'est exécutée.

Une assignation en responsabilité délictuelle a été délivrée, le 27 mai 2013, à la société Metex France par la société Lebas Industries assistée des organes de la procédure collective devant le tribunal de commerce de Lille Métropole.

La société Bio-xcell est intervenue volontairement en avril 2015 dans la procédure engagée par la société Lebas Industries contre Métabolic France devant le tribunal de commerce.

Par jugement réputé contradictoire et en premier ressort du 7 mars 2017, le tribunal de commerce de Lille Métropole a :

- dit la société Lebas Industries, la SELARL AJIS et Me [X], es qualité, recevables en leurs demandes

- jugé que Métabolic Explorer a aidé et activement contribué à la résiliation abusive du contrat EPCC et a commis une faute délictuelle au préjudice de la société Lebas Industries et de sa filiale Lebas Malaisie ;

- débouté la société Lebas Industries de ses demandes d'indemnisation de ce chef, la sentence du tribunal arbitral de Kuala Lumpur ayant apporté des réponses à celles-ci ;

- jugé que Métabolic Explorer a commis une faute délictuelle au préjudice de Lebas Industries du chef d'atteinte à 1'image de cette dernière et de la volonté manifeste de lui nuire ;

- condamné Métabolic Explorer à payer à Lebas Industries la somme de

300 000 €, augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance, à titre de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte à son image de marque ;

-condamné Métabolic Explorer à payer à Lebas Industries la somme de

200 000 €, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la volonté de nuire de Metex Explorer ;

- ordonné la capitalisation des intérêts ;

- débouté Lebas Industries de sa demande de publication du jugement dans

4 journaux financiers ;

- débouté Métabolic Explorer de l'ensemble de ses demandes formulées à l'encontre de Lebas Industries ;

- déclaré recevable Bio-xcell en son intervention volontaire mais seulement pour les prétentions de Bio-xcell concernant la résiliation du contrat EPCC ;

- déclaré toutes les demandes de Bio-xcell concernant le contrat BLT et son renouvellement irrecevables et invite Bio-xcell à mieux se pourvoir ;

- condamné Metex Explorer à payer à la Société Bio-xcell la somme de 7.984.921,60 ringgits (environ 2.063.000 €, à parfaire), outre intérêts au taux légal à compter du 14/04/2015 en dommages et intérêts au titre de son rôle dans la résiliation du contrat EPCC ;

- débouté Bio-xcell de ses autres demandes de dommages et intérêts ;

- débouté Métabolic Explorer de l'ensemble de ses demandes formulées à l'encontre de Bio-xcell ;

- condamné la société Metex Explorer à verser à Lebas Industries la somme de 20.000 € au de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Metex Explorer à verser à Bio-xcell la somme de

20.000 € au de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Metex Explorer aux entiers dépens de l'instance ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration d'appel en date du 5 avril 2017, la SA Métabolic Explorer a interjeté appel de la décision, procédure enrôlée sous le n° RG 17-2286.

Par jugement du 4 avril 2017, suite à la requête de la société Malaysian Bio-xcell SDN BHD, le tribunal a dit recevable et bien fondée la requête, repris le jugement en tous ses termes et rectifié cependant l'erreur matérielle commise dans le dispositif de ce jugement en disant que la société Métabolic Explorer est condamnée à payer à la société Bio-xcell la somme de 9 197 811,60 ringgits, outre intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2015 en dommages et intérêts au titre de son rôle dans la résiliation du contrat, la présente décision devant être mentionnée sur la minute du jugement.

Par déclaration d'appel en date du 18 avril 2017, la SA Métabolic Explorer a interjeté appel total de ce jugement de rectification d'erreur matérielle.

Cet appel a été enrôlé sous le n° RG17-2573.

Par déclaration d'appel en date du 7 juillet 2017, la société Malaysian Bio-xcell SDN BDH a interjeté appel à l'encontre du jugement du 7 mars 2017 et de la décision rectificative du 4 avril 2017, procédure enrôlée sous le RG n°17-5673.

Par ordonnance de jonction en date du 28 septembre 2017, a été ordonnée la jonction des procédures 17-2573 et 17-2286 sous le numéro RG n°17-2286.

Par ordonnance de jonction en date du 19 octobre 2017, a été ordonnée la jonction des procédures 17-4338 et 17-2286 sous le RG n° 17-2286.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 novembre 2018.

Par arrêt en date du 20 décembre 2018, la cour a :

- ordonné la réouverture des débats, avec rabat de l'ordonnance de clôture, pour les motifs sus-exposés,

- invité toutes les parties à :

- préciser leur bordereau de pièces en mentionnant la nature du document transmis : extrait (avec la précision de l'extrait en question) ou document produit en son intégralité ;

-produire chacune des pièces dont elle entend en se prévaloir, en son intégralité ou l'extrait spécifié dans le bordereau, sous un même numéro et en un seul exemplaire, agrafé, avec en annexe la traduction libre, elle-aussi en un seul exemplaire et agrafé,

- mettre leur bordereau de communication de pièces en conformité avec les pièces,

- transmettre un dossier de plaidoirie exploitable avec les pièces et leur traduction dans l'ordre du bordereau, sans côtes de plaidoirie,

- produire éventuellement les pièces manquantes (liste A, les n° 40, 41, 42, 43, 44 et liste B, les n° 3, 4, 5, 6, 7, 8, 11, 12, 13, 14, 17, 17 bis, 17 ter

- renvoyé à l'audience de mise en état en date du 20 mars 2019 pour permettre la vérification des diligences ;

- rappelé qu'en vue de cette audience de mise en état et pour permettre une fixation utile à une date d'audience de plaidoirie la plus proche possible les parties devront faire parvenir leur bordereau de communication de pièces ainsi que l'ensemble des pièces dont elles entendent se prévaloir sous la forme d'un dossier tel que ci-dessus défini, et ce 8 jours, délai de rigueur avant la date d'audience de mise en état ;

- réservé toutes les demandes et les dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 octobre 2019.

MOYENS ET PRETENTIONS

Par conclusions signifiées par voie électronique en date du 18 septembre 2019, la société Métabolic Explorer (ou Metex France) (appelante dans les

RG 17-2286 et 17-2573 mais intimée dans le RG 17-4338) demande à la cour, au visa des dispositions des articles 1134, 1165, 1382 et 1842 du code civil, des articles 32-1, 325, 699, 700 et 914 du code de procédure civile, de :

- se déclarer incompétente pour statuer sur les demandes d'irrecevabilité des conclusions de Metex France en ce qu'elles relèvent du conseiller de la mise en état ;

- infirmer les jugements du tribunal de commerce de Lille métropole du 7 mars et du 4 avril 2017 en ce qu'ils ont admis les demandes de Lebas France ;

- débouter en conséquence Lebas France de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- infirmer les jugements du Tribunal de commerce de Lille métropole du 7 mars et du 4 avril 2017 en ce qu'ils ont admis l'intervention volontaire de Bio-xcell Malaisie pour sa demande relative à l'EPCC ;

- déclarer la société Bio-xcell Malaisie irrecevable en son intervention volontaire et, en tout état de cause, mal fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et l'en débouter ;

- condamner solidairement les intimés à verser à la société Metex France une indemnité de 1.000.000 euros pour procédure abusive ;

- condamner solidairement les intimés aux entiers dépens, dont distraction de ceux d'appel au profit de Me Pouille-Groulez, avocat au barreau de Lille, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement les intimés à verser une indemnité de 100.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement les intimés à une amende civile d'un montant de 3.000 euros chacun au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile.

Elle revient sur :

- la spécificité des deux litiges artificiellement réunis par l'intervention de la société Bio-xcell Malaisie, et qui n'aurait pour but que d'échapper à l'omission par cette dernière de déclarer sa créance de plus de 7 millions d'euros au passif de la société Lebas France,

- les faits et les rôles spécifiques des différents intervenants, soutenant que la société Bio-xcell tronque les dispositions contractuelles liant les parties et tente de faire croire que la notion de 'project Manager' recouvre une activité de maître d'oeuvre à la société Metex Malaisie,

- la collusion entre les sociétés Lebas France et Bio-xcell Malaisie, outre le caractère abusif de cette procédure, la collusion n'ayant d'autre objectif que de faire supporter à la société Metex France les conséquences de la sentence arbitrale de Kuala Lumpur.

Elle estime que :

- les conclusions de la société Metex France du 14 juin 2018 prises dans le cadre de son appel principal et total qui n'avaient d'autre objet que de couvrir l'ensemble des éléments juridiques et factuels des appels qu'elle avait formés doivent être déclarées recevables,

- les nouvelles conclusions ne contiennent aucune référence à un appel incident.

Elle évoque l'irrecevabilité des conclusions déposées par la société Bio-xcell Malaisie pour avoir été communiquées postérieurement à l'ordonnance de clôture.

Elle critique l'usage fait par le tribunal de commerce de la théorie de l'immixtion pour engager la responsabilité délictuelle de la société Metex France et précise que :

- par principe une société mère ne peut engager sa responsabilité pour les actes de sa filiale, à raison de l'autonomie des personnalités morales,

- l'immixtion de la société Metex France dans le fonctionnement de la société Metex Malaisie qui aurait créé pour les sociétés Lebas France et Bio-xcell Malaisie une apparence trompeuse quant à l'identité de leur cocontractant n'est pas caractérisée,

- le contrat AMO, les emails antérieurs à la signature de l'EPCC et les courriers échangés démontrent l'absence de confusion entre les sociétés Metex France et Metex Malaisie lors de l'élaboration du cadre contractuel,

- la signature des communiqués par les sociétés Metex France et Bio-xcell n'est révélatrice que de la stratégie de communication d'une société mère cotée sur les activités importantes de ses filiales, répondant à des obligations réglementaires, et non d'une immixtion,

- aucune unité de direction n'existe entre les sociétés Metex France et Metex Malaisie.

' Sur les demandes de la société Bio-xcell Malaisie :

Concernant l'intervention volontaire devant le tribunal de la société Bio-xcell Malaisie, elle conclut à l'irrecevabilité de cette dernière en son intégralité aux motifs que :

- le lien suffisant n'est pas établi, lequel s'entend plus strictement lorsque l'intervenant n'évoque pas le même droit que l'une des parties originaires à l'instance,

- les prétentions des sociétés Bio-xcell Malaisie et Lebas France présentent un caractère distinct, les demandes de la société Bio-xcell Malaisie étant majoritairement relatives au contrat BLT, essentiellement sa résiliation, sa renégociation, sa violation et son exécution, lesquelles sont en outre justiciables de la clause d'arbitrage,

- la société Bio-xcell recherche de manière infondée la responsabilité extra-contractuelle de la société Metex France quant à la résiliation de l'EPCC pour tenter de justifier artificiellement la recevabilité de son intervention volontaire,

Sur la résiliation de l'EPCC, elle estime que :

- la responsabilité de la société Metex France ne peut être engagée, la double condition de l'immixtion dans le fonctionnement de la société Metex Malaisie ayant créée pour la société Bio-xcell une apparence trompeuse quant à l'identité du cocontractant n'étant pas réunie,

- de toute façon, la notion de tierce complicité ne permet pas à l'auteur de l'infraction lui-même d'engager la responsabilité délictuelle du tiers grâce auquel il aurait violé ses obligations contractuelles (principe Nemo auditur propriam turpitudinem allegans),

- le fait pour un tiers d'inciter ou de demander à un cocontractant à résilier un contrat ne saurait constituer un fait générateur de responsabilité dans la mesure où une telle recommandation ne viole pas l'obligation générale de prudence et de diligence,

- les courriers ne peuvent caractériser à l'égard de la société Bio-xcell une menace de nature à abolir son autonomie dans le cadre de ses relations contractuelles avec la société Lebas Malaisie,

- l'addendum n'admet aucune responsabilité en cas de résiliation de l'EPCC, ce dernier se contentant d'organiser la répartition des coûts du projet entre les sociétés Bio-xcell et Metex Malaisie,

- en tout état de cause, l'absence de préjudice de la société Bio-xcell ne peut qu'être constatée (frais de projet, frais de conseils juridiques, frais de consultant, frais de masse salariale, frais d'infrastructure, coût du capital pour l'usage de fonds sur une durée de deux ans).

Sur les autres demandes de la société Bio-xcell, à supposer l'immixtion caractérisée, elle fait valoir que :

- s'agissant de la résiliation du contrat BLT, l'illiciéité de la résiliation d'un contrat ne saurait être déduite de celle d'un autre contrat, la société Bio-xcell ayant librement décidé de résilier le contrat EPCC et la résiliation du contrat BLT étant due à l'absence d'accomplissement des conditions suspensives, étant précisé qu'aucune obligation de bonne foi ne figure dans le droit malaisien et que la notion de 'Partnership' ou ' d'obligation d'un fiduciaire en matière de quasi-partnership' ne trouvent pas à s'appliquer en l'espèce, et qu'aucune promesse de ne pas se prévaloir de la clause n'avait été faite,

- s'agissant de la rupture des pourparlers, aucune faute n'est établie, les faits de l'espèce révélant l'existence d'une difficulté et rendant légitime la rupture des pourparlers (problème du retraitement des eaux usées, des effluents, augmentation des coûts...),

- s'agissant des plans et dessins techniques établis par la société Lebas Malaisie, au cours de l'exécution du contrat, aucune cession de la société Metex Malaisie à la société Metex France de son droit de propriété sur les Documents de construction n'est alléguée ni prouvée par la société Bio-xcell, pas plus que n'est prouvée la transmission des plans litigieux à la société SK Chemicals ;

- s'agissant des allégations de concurrence déloyale, notamment des actes de parasitisme et d'exploitation des connaissances techniques ou du savoir-faire, ce n'est ni sans son consentement, ni sans contrepartie que la société Bio-xcell a transféré la propriété des documents qu'elle finançait et qu'aucune clause de confidentialité n'était imposée sur des documents dont la société Metex Malaisie était au demeurant propriétaire,

-s'agissant de l'enrichissement sans cause selon les règles de droit malaisien, ce droit n'a pas vocation à s'appliquer,

- pour chacun de ces fondements, l'absence de préjudice en lien avec le grief est constatée. Elle souligne l'incohérence des méthodes utilisées pour la détermination du prix des documents de construction.

' Sur les demandes de la société Lebas France :

- Quant à la résolution de l'EPCC, elle reprend ses développements relatifs à l'absence d'immixtion et l'impossibilité de retenir la tierce complicité mais souligne également que la société Lebas France recherche désormais simultanément la responsabilité de la société Metex France sur le fondement de l'inexécution contractuelle dommageable à un tiers, estimant que la société Lebas France est irrecevable pour défaut de droit à agir.

Elle ajoute que si la responsabilité de la société Metex France était reconnue sur ce point, l'indemnisation intégrale du préjudice est d'ores et déjà intervenue, à raison de la sentence arbitrale.

- Quant à la prétendue diffusion d'informations trompeuses par la société Metex France, elle souligne que :

- la société Metex France n'a aucunement diffusé d'information mensongère dans les communiqués publiés sur son site internet,

- au titre de l'obligation d'information permanente, la société cotée doit porter à la connaissance du public, dès que possible, par l'intermédiaire d'un communiqué, les informations

non publiques la concernant qui sont susceptibles d'influer sur son cours de bourse,

- la cour n'a pas compétence pour examiner la validité de la communication financière d'une société cotée et les accusations sont dénuées de tout fondement,

- le dénigrement n'est pas constitué, aucune campagne systématique de dénigrement n'ayant été orchestrée par ces soins, ni la société Metex Malaisie ni la société Metex France n'ayant intérêt à voir le projet se solder par un échec,

- les différents communiqués (21septembre 2011, 9 mars 2012, 15 mars 2013...) ne mentionnent ni la société Lebas France, ni la société Lebas Malaisie, les seuls manquements de la société d'ingénierie n'étant pas uniquement mis en exergue et les communiqués émanant tant de la société Metex France que de la société Bio-xcel,

- aucune preuve d'un préjudice d'atteinte à l'image n'est apportée.

- Quant à la volonté de nuire de la société Metex France, elle soutient que :

- s'agissant de la tentative de débauchage, aucun élément concret ne vient l'étayer, la liberté d'embauche prédominant,

-s'agissant de l'addendum conclu par les sociétés Metex Malaisie et Bio-xcell imposant à la société Bio-xcell de poursuivre la société Lebas Malaisie, ce dernier ne concerne pas la société Metex France et fait suite à la procédure arbitrale,

- s'agissant du courrier du 27 février 2012, à supposer l'immixtion de la société Metex France dans la gestion de la société Metex Malaisie constituée, la société Metex Malaisie n'était aucunement tenue à une obligation de confidentialité et s'est contentée de répondre à la demande d'une société sur les versements d'acompte qu'elle demandait à la société Lebas, le préjudice lié à la saisie conservatoire réalisée par la société FIE n'étant en outre pas démontré.

Sur la demande reconventionnelle de procédure abusive, elle plaide que :

- soulignant la stratégie mise en oeuvre par la société Lebas et révélée par l'intervention de la société Bio-xcell, l'abus est caractérisé par le refus de communiquer les pièces traduites, les demandes infondées et juridiquement dénuées de sens, le caractère superfétatoire de cette procédure en France alors que la réparation a été intégrale et envisagée par la sentence arbitrale, ce qui n'a pour but que d'optimiser les chances d'indemnisation au risque d'attraire des parties à la cause qui y sont en réalité étrangères,

- le préjudice est difficile à chiffrer mais constitué pour une société cotée en bourse qui a dû communiquer sur ce point, se défendre depuis près de 3ans.

- s'agissant de la société Bio-xcell, cette dernière ayant omis de déclarer sa créance, elle tente abusivement de le faire supporter à la société Metex France, puisqu'elle recourt à une procédure manifestement irrecevable, infondée, agissant de concert avec la société Lebas industries.

Par conclusions signifiées par voie électronique en date du 23 septembre 2019, la société Malaysian Bio-Xcell Sdn Bhd (appelante dans le RG 17-4358 et intimée dans les RG 17-2573 et 17-2286) demande à la cour, au visa du Règlement (UE) n°1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, du Règlement (CE) n°593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I), du code civil, notamment en son article 1382, du code de procédure civile, notamment en ses articles 325 et suivants et 700, de :

- la déclarer recevable en son appel incident et son appel principal,

- déclarer les conclusions et nouvelles pièces de Malaysian Bio-xcell notifiées le 12 août 2019 via RPVA ainsi que les présentes conclusions recevables et rejeter les fins de non-recevoir de Metex France,

- déclarer Metex Explorer SA irrecevable en ses conclusions en réponse sur l'appel incident de Bio-xcell et sur l'appel principal de Malaysian Bio-xcell, hormis la responsabilité au titre de la résiliation du contrat EPCC,

- confirmer le jugement du 7 mars 2017 en ce qu'il a jugé que la responsabilité délictuelle de Metabolic Explorer SA est engagée à l'égard de Malaysian Bio-xcell,

- réformer le jugement du 7 mars 2017 en ce qu'il a limité les dommages-intérêts alloués à 7.984.921,60 ringgits, outre intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2015,

- réformer le jugement du 4 avril 2017 en ce qu'il a limité les dommages-intérêts alloués à 9.197.811,60 ringgits, outre intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2015,

- réformer les jugements entrepris (RG n°2013009094 et RG n°2017004582) en ce qu'ils ont déclaré irrecevables les demandes de la société Bio-xcell en son intervention volontaire au titre du contrat BLT et son renouvellement d'autre part,

- et statuant à nouveau :

- juger que la responsabilité délictuelle de la Société Metabolic Explorer SA est engagée à l'égard de la Société Malaysian Bio-xcell Sdn Bhd au titre de :

- la résiliation fautive du contrat BLT,

- la rupture abusive des négociations en vue de la conclusion d'un nouveau contrat BLT,

- l'usage non autorisé des documents techniques « construction documents »,

- condamner la société Metabolic Explorer SA à payer à la société Malaysian Bio-xcell Sdn Bhd les dommages-intérêts suivants :

- 51.018.609 ringgits, soit 13.162.695,8 euros (taux de change au 10.04.2015), sauf à parfaire, outre intérêts au taux légal à compter du 14.04.2015, date de signification des 1ères conclusions d'intervention devant le Tribunal de commerce de Lille Métropole, au titre des multiples violations commises par la société Metex France au titre de son rôle de décisionnaire dans la résiliation fautive du contrat EPCC,

- 55.412.319 ringgits, soit 14.296.263,9 euros (taux de change au 10.04.2015), sauf à parfaire, outre intérêts au taux légal à compter du 14.04.2015, date de signification des 1ères conclusions d'intervention devant le Tribunal de commerce de Lille Métropole, au titre de la résiliation fautive du contrat BLT,

- 22.515.131 ringgits, soit 5.808.857 euros (taux de change au 10.04.2015), sauf à parfaire, outre intérêts au taux légal à compter du 14.04.2015, date de signification des 1ères conclusions d'intervention devant le Tribunal de commerce de Lille Métropole, au titre de la rupture abusive des négociations avec la société Bio-xcell après la résiliation du contrat BLT,

-1.111.500 euros, sauf à parfaire, outre intérêts au taux légal à compter du 14.04.2015, date de signification des 1ères conclusions d'intervention devant le Tribunal de commerce de Lille Métropole, au titre de l'usage non autorisé des plans et dessins (« construction documents »),

- débouter la société Metabolic Explorer SA de l'ensemble de ses demandes, exceptions, fins et conclusions,

- condamner la société Metabolic Explorer SA à payer à la société Malaysian Bio-xcell Sdn Bhd la somme de 80.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Metabolic Explorer SA aux entiers dépens avec distraction au bénéfice de Me Deffrennes.

La recevabilité de son intervention pour l'intégralité des chefs soutenus s'impose aux motifs que :

- les demandes tant de Lebas France que de Bio-xcell porte sur le projet industriel dans son ensemble, et les deux contrats ( EPCC et BLT) forment un tout qui organise le projet industriel et l'exécution du contrat BLT est conditionnée par celle du contrat EPCC,

- en excluant toute demande relative au contrat BLT, le tribunal impose que les demandes relatives à un même projet industriel soient soumises à des juridictions différentes,

- il n'existe aucune clause imposant un recours en Malaisie, Metex Malaisie n'ayant aucun actif et Metex France n'ayant accordé aucune garantie si la responsabilité de Metex Malaisie était engagée,

- Bio-xcell concernant les demandes à l'encontre de Metex France n'est pas soumise aux clauses d'arbitrage et de conciliation du contrat BLT,

- elle conteste tout détournement procédural et souligne que Metex France prenait l'intégralité des décisions du projet, justifiant la recevabilité de son intervention au titre de la résiliation de l'EPCC.

Elle soutient :

- la recevabilité des conclusions et des pièces de la société Bio-xcell signifiées le 12 août 2019 et des présentes, le document adressé le 15 mai 2019 étant un avis de fixation à l'audience et non une ordonnance de clôture,

- l'irrecevabilité de la société Metex France à conclure dans l'appel incident et l'appel principal de la société Bio-xcell.

Sur la responsabilité du tiers pour une violation contractuelle, elle fait valoir

que :

- le caractère fautif de la résiliation du contrat EPCC est établi, la sentence arbitrale qui a autorité de la chose jugée entre les parties et s'impose au tiers, le reconnaissant,

- elle a été contrainte de résilier le contrat EPCC par la société Metex, sauf à perdre le projet tout entier, n'ayant pas de connaissances techniques suffisantes pour agir en tant que project manager,

- la société Metex a admis sa responsabilité en cas de résiliation de l'EPCC (addendum qui prévoit un partage des coûts après que Bio xcell a agi contre Lebas),

- le tribunal de commerce ne s'est aucunement basé sur la théorie de l'immixtion mais sur la notion de tierce complicité,

- la société Metex France a exigé via sa filiale en Malaisie la résiliation de l'EPCC en se prévalant de sa qualité de cocontractant au BLT, comportement qui est bien plus qu'une simple facilitation visée par la cour de cassation,

- les négociations en vue d'établir les contrats, la correspondance, les communiqués, soulignent la qualité de décisionnaire de Metex, laquelle détient d'ailleurs la technologie (brevets),

- l'appréciation des manquements repris dans les mises en demeures, relatives à l'absence de preuve des capacités financières et techniques de la société Lebas, ne peut être réalisée que par la société Metex France,

- la société Metex France a décidé la résiliation fautive du BLT, décision relayée par la société Metex Malaisie,

- les conditions prévues au contrat (clauses contractuelles a et b) étant remplies, elle n'a pu intervenir qu'en raison de l'absence de conclusions d'un nouveau contrat EPCC (condition c), Bio -xcell ayant fait confiance à la société Metex laquelle proposa de reprendre les négociations pour un nouveau contrat BLT et mandata Technip pour étudier la viabilité économique du projet, étant dans l'ignorance des négociations en cours entre les sociétés Metex et SK Chemicals,

- la résiliation du BLT est fautive, suite à la résiliation jugée fautive de l'EPCC mais également au regard du droit malaisien auquel le contrat BLT est soumis,

- la résiliation du BLT a été décidée en violation de principes de Commonlaw 'Implied term to act fairly and reasonably' (Obligation d'agir de manière juste et raisonnable), à raison d'un refus de prolonger le processus de sélection d'un nouveau contractant et en ultérieurement revenant à la procédure dont la prolongation a été décidée, « partnership ou quasi partner-ship fiduciary relationship » (partenariat ou obligations d'un fiduciaire en matière de quasi-partnership), notion applicable tant aux personnes physiques qu'aux personnes morales, qui engendre une obligation d'agir de bonne foi rompue dans le cadre de la résiliation, la sélection, la rupture, et ses conséquences, 'Estoppel' ( confiance en l'information ou la promesse d'une autre partie), à raison des préselections de candidat, l'absence alléguée d'offre acceptable, 'bad faith' (mauvaise foi dans l'exécution du contrat) à raison de l'empressement de Metex à écarter Lebas conduisant à la résiliation de l'EPCC puis du BLT.

Sur le préjudice subi suite à la résiliation des deux contrats, elle fait valoir

que :

- le tribunal n'a pas retenu sa méthode de calcul par période du préjudice, estimant que seul le préjudice en conséquence directe de la résiliation de l'EPCC pouvait être pris en compte,

- l'appréciation du tribunal est erronée puisqu'il estime à tort que les travaux peuvent être réutilisés et qu'il exclut à tort les préjudices liés aux coûts de réalisation desdits travaux,

- les documents techniques ne sont pas détenus par elle mais par Metex qui en a la propriété, lesquels ont pourtant une valeur,

- il en est de même du coût du capital mobilisé et des pertes liées aux loyers qu'aurait dû payer la société Metex, la société Bio-xcell n'ayant commis aucune faute dans le problème de contamination des sols.

Elle revient sur :

- le découpage de son préjudice selon 4 périodes du projet, à savoir jusqu'à la réalisation de l'EPCC, de la réalisation de l'EPCC à celle du BLT, de la résiliation du BLT à la rupture des négociations, et enfin après la rupture des négociations.

- l'importance de ce projet pour la société Bio-xcell et l'impact de son abandon,

- le fait que le tribunal a écarté des postes, alors même que ces frais ont été exposés en pure perte (consultants, frais d'études, de plans, frais d'infrastructures, coût de capital pour l'usage de fonds,... ) ou que le chantier n'a en définitive pas été continué (frais de masse salariale...)

- les préjudices subis à raison de la résiliation du contrat BLT, en détaillant les mêmes postes, accentuant sur le poste de perte de revenus mais également d'atteinte à la réputation (affectation de la renommée et diminution de l'attractivité du parc...)

- les préjudices quant à la rupture des négociations, la société Metex ayant rompu les négociations le 30 juin après avoir conclu un accord de licence avec la société SK Chemikals fin juin 2014, le motif invoqué (surcoût pour le traitement des eaux usées) étant fallacieux.

Sur la responsabilité de la société Metex quant à l'utilisation des plans et dessins techniques établis par la société Lebas, elle souligne que :

- l'utilisation de ces documents requiert l'accord préalable de la société Bio-xcell selon l'article 16.1 BLT, puisque bien qu'ils soient la propriété de la société Metex, ils sont préparés par Lebas mais intégralement financés par la société Bio-xcell au titre du contrat EPCC,

- la société Metex a utilisé 'les constructions documents' dans le cadre du projet de la société SK Chemicals en Corée du sud, les documents portant sur la même technique, le même objet et étant remis 5 mois à peine après la fin des relations avec la société Bio-xcell,

- les arguments de la société Metex sont des arguments de mauvaise foi,

- le transfert des 'constructions documents' et de leur usage sans accord préalable de la société Bio-xcell est constitutif d'actes de concurrence déloyale : parasitisme et usage du savoir-faire,

- son préjudice doit être indemnisé sur le fondement de l'article 1382, de la concurrence déloyale ainsi que de l' 'injust enrichissement' de droit malais, applicable à raison de l'article 10 alinéa 1 du règlement Rome II,

- son préjudice est constitué du prix payé pour leur élaboration ainsi que de leur valeur commerciale.

Sur les demandes au titre de la procédure abusive et l'amende civile, elle dénie tout caractère abusif à son action et s'élève contre les affirmations mensongères de collusion, de contournement des règles de procédure collective ou de compétence.

Par conclusions signifiées par voie électronique en date du 9 octobre 2019, la SAS Lebas Industries ( ou Lebas France) demande à la cour, au visa de l'article 1382 du Code civil, de la sentence arbitrale du 2 février 2015, de :

- dire la Société Lebas Industries, la SELARL AJIS es qualité et Me [X] es- qualité, recevables et bien fondés en leurs demandes ;

- constater, dire et juger que la société Metabolic Explorer est à l'initiative et a activement contribué à la résiliation abusive du contrat EPCC par la société Bio-xcell au préjudice de la société Lebas Industries et de sa filiale Lebas Malaisie ;

- constater, dire et juger que la société Metabolic Explorer a commis des fautes et actes de dénigrements publics et déloyaux au préjudice de la société Lebas - Industries

- constater, dire et juger que la société Metabolic Explorer a mis en place une stratégie contractuelle avec la société Bio-xcell destinée à nuire à la société Lebas Industries ;

- en conséquence :

- condamner la société Metabolic Explorer à payer à la société Lebas Industries la somme de 2.544.853 €, sauf à parfaire, avec intérêts au taux légal à compter du 27 mai 2013, date de l'acte introductif d'instance, à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier ;

- condamner la société Metabolic Explorer à payer à la société Lebas Industries la somme de 500.000 €, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 27 mai 2013, de l'acte introductif d'instance, à titre de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte à son image et e-réputation ;

- condamner la société Metabolic Explorer à payer à la société Lebas Industries la somme de 500.000 € à titre de dommages et intérêts pour mise en 'uvre d'une stratégie destinée à lui nuire, avec intérêts au taux légal.

- ordonner la capitalisation des intérêts ;

- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans 4 journaux nationaux financiers et industriels de premier ordre, au choix de la société Lebas Industries et aux frais de la société Metabolic Explorer ;

- débouter la société Metabolic Explorer de ses demandes reconventionnelles, fins et conclusions ;

- condamner la société Metabolic Explorer au paiement de la somme de

50.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de l'instance.

Elle estime que la société Metex a effectué et poursuivi une stratégie de communication boursière mensongère au projet de la société Lebas et de la bonne réalisation du projet, aux motifs que :

-les communiqués dénigrent la société Lebas en raison de leur caractère mensonger, le délai d'achèvement annoncé étant dès l'origine faux, non la fin 2012 mais la fin 2013 selon l'EPCC,

- la société Lebas et sa filiale malaisiennes ne sont nullement responsables du retard, lié aux difficultés à la contamination du sol et aux nécessaires mesures à prendre.

Elle réfute l'argumentation de la société Metex relatif à ses obligations en qualité de société côtée en bourse et soumise au contrôle de l'AMF, dénuée de toute

pertinence : absence de compétence des juridictions pour évaluer une telle communication, différence de traitement entre la communication liée au retard et la communication liée à la présente procédure.

Elle soutient que :

- la société Metex est à l'origine et responsable de la résiliation abusive du contrat EPCC conclu par Bio-xcell avec Lebas Malaisie, effectuée dans un seul intérêt boursier au détriment du projet,

- elle a, pour dissimuler la réalité de la situation sur site (contamination des sols, surcoût..), mis abusivement en cause la responsabilité de la société Lebas, au préjudice de cette dernière et de la bonne exécution du contrat,

- les développements de la société Metex sur la théorie de l'immixtion sont dénués de portée, la société Metex ne pouvant se prévaloir d'un montage fictif qu'elle a elle-même mis en place,

- la société Metex ne peut se prévaloir de bonne foi de sa qualité de tiers au contrat EPCC, revenant sur le projet initial et l'intervention de Metex en qualité de maître d'ouvrage, puis la substitution dans le cadre d'un contrat EPCC de la société Metex par la société Bio-xcell, la société Metex intervenant en qualité de project manager et de mandataire du maître d'ouvrage,

- l'exercice des deux fonctions est intégralement effectué à partir du siège social de la société Metex France,

- son action est donc recevable à l'encontre de la société Metex quelle que soit sa qualité, tiers ou pas,

- la société Lebas, sous-traitant principal de sa filiale Lebas Malaisie, subit et justifie d'un préjudice propre et distinct qui l'autorise à rechercher la responsabilité de celui qui a causé ou contribué directement ou indirectement à la réalisation de ce préjudice.

Elle fait valoir que :

- la société Metex a mis en place dès 2012 une stratégie contractuelle visant à évincer la société Lebas puis à la conduire à la liquidation,

- la société Metex, en violation avec son obligation de confidentialité, a contribué à permettre à un fournisseur de la société Lebas Technologies de pratiquer de façon injustifiée une saisie-conservatoire pour un montant de

600.000 euros, laquelle n'a pu être levée qu'à la suite de différentes procédures mises en oeuvre par ses soins,

- la société Metex, poursuivant l'objectif d'évincer la société Lebas Technologies, a violé son obligation de loyauté en tentant de débaucher le responsable de projet de la société.

Elle contredit l'affirmation de la société Metex selon laquelle son préjudice financier aurait été intégralement indemnisé à l'issue de la sentence arbitrale du 2 février 2015 aux motifs que :

- la sentence arbitrale est rendue au profit de Lebas Malaisie et non de Lebas Industries,

- la société Lebas Industries, société Mère et sous traitant partiel du projet, subit un préjudice financier propre qui n'a pas été réparé : perte de la partie non exécutée de son contrat de sous traitance (3, 2Millions pour les prestations intellectuelles), la perte de marge sur les matériels et équipement de ses fournisseurs, le coût de la mise en oeuvre de la contre-garantie bancaire de la KBC bank,

- le comportement de la société Metex a contribué aux difficultés rencontrées par la société Lebas laquelle a dû demander une procédure de sauvegarde, et a d'importants litiges avec ses fournisseurs liés au projet, lesquels ont effectué des déclarations de créances pour des montants importants,

- le préjudice de la société Lebas se poursuit puisqu'elle ne retrouvera une image rassurante qu'à la fin du plan d'apurement du passif (cotations requises pour les assurances crédits ).

Sur le préjudice d'image et de 'e-réputation', elle souligne l'inquiétude des fournisseurs et des clients induite par cette communication, mais également des établissements financiers avec lesquels elle est en relations, justifiant une réévaluation du préjudice ainsi qu'une publication de la décision à intervenir dans des journaux nationaux.

Quant au préjudice de volonté de nuire, elle précise que la société Metex avait conclu avec la société Bio-xcell des accords destinés à nuire à la société Lebas Malaisie et à déstabiliser la société Lebas France, engendrant d'importants coûts et frais internes pour la gestion de ces difficultés, outre les conséquences de la saisie conservatoire, justifiant au vu de la mauvaise foi une indemnité supplémentaire de 500 000,00 euros.

Sur la demande reconventionnelle de la société Metex, elle réfute l'argumentation relative au complot ourdi avec l'intervenante volontaire, à l'absence de communication de pièces traduites, la certification des traductions n'étant pas obligatoire, et souligne plutôt la stratégie commune animant la société Metex et la société Bio-xcell à son égard pour l'évincer et le caractère astronomique des condamnations sollicitées par la société Metex, qui n'est pas justifié et procède d'un abus de droit.

MOTIVATION

Au préalable, il convient de souligner qu'il n'y a pas lieu de reprendre ni d'écarter dans le dispositif du présent arrêt les demandes tendant à 'constater que ....' ou 'dire que...', telles que figurant dans le dispositif des conclusions des parties, lorsqu'elles portent sur des moyens ou éléments de fait relevant des motifs et non des chefs de décision devant figurer dans la partie exécutoire de l'arrêt.

Il y a lieu de préciser qu'il sera fait application des dispositions du code civil dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016- 131 du

10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve de l'obligation.

Le chef du jugement relatif à l'exécution provisoire n'étant l'objet d'aucune critique par les parties est confirmé.

Sur les problèmes procéduraux

1) Sur la question de la recevabilité de la société Metex France à conclure dans l'appel principal et appel incident et de l'incompétence pour statuer sur les demandes d'irrecevabilité

En vertu des dispositions de l'article 914 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable à la présente procédure d'appel, le conseiller de la mise en état est, lorsqu'il est désigné et jusqu'à son dessaisissement, seul compétent pour prononcer la caducité de l'appel, pour déclarer l'appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel ou pour déclarer les conclusions irrecevables en application des articles 909 et 910. Les parties ne sont plus recevables à invoquer la caducité ou l'irrecevabilité après son dessaisissement, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement.

Faute d'avoir saisi le conseiller de la mise en état, avant la clôture de la présente procédure, la société Bio-xcell n'est plus habile à saisir la cour de cette fin de non-recevoir dont la cause était survenue et connue antérieurement au dessaisissement du conseiller de la mise en état.

Sans qu'il soit donc nécessaire d'examiner les développements de la société Bio-xcell Malaisie plus avant sur ce point, au vu de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état sur cette question, la cour ne peut que constater son défaut de pouvoir en la matière.

2) Sur l'irrecevabilité des conclusions de la société Bio-xcell Malaisie communiquées postérieurement à l'ordonnance de clôture

Conformément aux dispositions de l'article 783 du code de procédure civile, applicable à la procédure d'appel par renvoi de l'article 910 du code de procédure civile, après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée et aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.

Si aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et quand bien même le dispositif des conclusions de la société Metabolic Explorer ne comprend pas expressément la demande d'irrecevabilité tirée du dépôt des conclusions de la société Bio-xcell Malaisie postérieurement à l'ordonnance de clôture, la cour, devant d'office examiner cette question, en est saisie.

L'irrecevabilité opposée aux conclusions notifiées par la société Bio-xcell Malaisie en date du 9 août 2019 procède d'une confusion faite par la société Métabolic Explorer entre l'avis informant les parties de la fixation à l'audience en formation collégiale, avis daté du 15 mai 2019, et l'ordonnance de clôture elle-même.

Cette dernière a été rendue et notifiée le 11 octobre 2019, rendant inopérant ce moyen, qui ne peut qu'être rejeté, les dernières conclusions de la société Bio-xcell étant bien antérieures à l'ordonnance de clôture.

3) Sur la question des pièces et leur traduction

' Aux termes de l'article 2 alinéa 1er de la constitution du 4 octobre 1958, la langue de la République est le français'.

Cette obligation d'utiliser la langue française s'impose au juge ainsi qu'aux parties, tant pour leurs écritures que pour les actes et documents qu'elles présentent au juge.

           Si l'ordonnance de [Localité 8] du 25 août 1539 ne vise que les actes de procédure, le juge est fondé dans l'exercice de son pouvoir souverain, à écarter comme élément de preuve un document écrit en langue étrangère, faute de production d'une traduction en langue française.

           

           En l'espèce, à la suite de la réouverture des débats, les parties ont eu à coeur de transmettre les pièces traduites et un bordereau en conformité avec les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile.

Toutefois demeurent des pièces en langue anglaise qui n'ont fait l'objet d'aucune traduction, qu'il convient d'écarter :

- les pièces n° 4, 5 de la société Lebas Industries,

- les pièces n° 8-A uniquement les annexes non traduites, 24 A de la société Métabolic Explorer,

- s'agissant des pièces de la société Bio-xcell cette question sera examinée, une fois qu'il aura été statué sur la recevabilité de son intervention volontaire, en cas d'examen au fond de ses prétentions.

Sur les fins de non-recevoir

1) Sur la fin de non-recevoir pour défaut du droit d'agir opposée par la société Métabolic Explorer à la société Lebas Industries

En vertu des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut du droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L'article 125 du même code précise que les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public, notamment lorsqu'elles résultent de l'inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l'absence d'ouverture d'une voie de recours. Le juge peut relever d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir, du défaut de qualité ou de la chose jugée.

Sous le vocable défaut du droit d'agir, la société Métabolic Explorer conteste la qualité à agir sur le fondement 1382 du code civil de la société Lebas Industries.

S'agissant d'une fin de non-recevoir, la cour, qui n'a aucunement l'obligation de relever d'office cette fin de non-recevoir d'ordre privé, ne peut que constater qu'elle n'en est pas saisie par la société Métabolic Explorer aux termes de son dispositif.

2) Sur la fin de non-recevoir opposée à l'intervention volontaire de la société Bio-xcell Malaisie

En vertu des dispositions de l'article 329 du code de procédure civile, l'intervention est principale lorsqu'elle élève une prétention au profit de celui qui la forme. Elle n'est recevable que si son auteur a le droit d'agir relativement à cette prétention.

L'intervention étant une demande en justice, elle est soumise aux conditions de recevabilité de droit commun requises à ce titre et n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant, conformément aux dispositions de l'article 325 du code de procédure civile.

Susceptible de remettre en cause le principe de l'immutabilité du litige, elle ne doit pas entraîner une dilution du litige principal, dont l'objet est déterminé conformément aux dispositions de l'article 4 du code de procédure civile par les prétentions respectives des parties, issues de l'acte introductif d'instance et des conclusions en défense, sous réserve de modification par des demandes incidentes, qui doivent également se rattacher aux prétentions originaires par un lien suffisant.

En l'espèce, seul est en discussion le lien suffisant, aucune des parties ne contestant à la société Bio-xcell son droit d'agir relativement à ses prétentions à l'encontre de la société Métabolic Explorer, la clause d'arbitrage ou de conciliation du contrat BLT invoquée par le tribunal n'étant pas opposable à la société Métabolic Explorer, tiers au contrat qui lie la société Bio-xcell et la société Metex Malaisie.

L'appréciation de ce lien suffisant, relevant du pouvoir souverain des juges, est sans contestation possible lorsque l'intervenant évoque le même droit, soit qu'il en est également titulaire, soit qu'il le conteste aux parties originaires, mais s'avère plus délicate, lorsque sont évoqués des droits différents.

L'identité de partie ou de contexte factuel n'est pas suffisante pour justifier des demandes qui seraient sans rapport entre elles et qui peuvent être traitées dans le cadre de procédures distinctes, sans être affectées par le procès principal.

Il appartient à l'intervenant volontaire de démontrer la connexité matérielle, pouvant en cas de litige, même créer une connexité processuelle et le lien étroit entre deux demandes non identiques mais tel qu'il est de bonne justice de les instruire et de les juger, afin par exemple d'éviter des décisions inconciliables.

De l'examen concret des demandes originaires de la société Lebas Industries, on peut retenir que cette dernière souhaite la réparation de son préjudice, sur le fondement des dispositions de l'article 1382 au titre de fautes reprochées à la société Métabolic Explorer, relevant pour une part de faits propres de ladite société à son encontre, tel que les communiqués ou des fautes nées du manquement contractuel au contrat EPCC liant la société Lebas Malaisie à la société Bio-xcell ou dans l'exécution de ce contrat, par l'intermédiaire de cette dernière sur instigation de la société Metex France.

La demande de l'intervenant volontaire vise quant à elle à obtenir sur le même fondement de l'article 1382 la réparation de son propre préjudice, née des fautes qui auraient été commises à son encontre par la société Métabolic Explorer, à raison des résiliations fautives du contrat EPCC et du contrat BLT, de la rupture abusive des négociations post-BLT et de l'usage et transfert des 'construction documents' établis par la société Lebas.

Les deux actions visent la mise en oeuvre de la responsabilité délictuelle de la société Métabolic Explorer et font appel aux mêmes notions juridiques, notamment la tierce complicité. Toutefois cela ne crée pas, à soi seul, un lien suffisant au sens de l'article 325 précité.

L'intervenant volontaire qui se borne à indiquer que 'tant les demandes de Lebas que celles de Bio-xcell portent sur l'ensemble du projet industriel' ne démontre aucune interaction entre les demandes mais également les solutions qui pourraient y être apportées.

Le fait que le contexte de cette mise en oeuvre soit à rattacher à une opération économique impliquant l'ensemble des protagonistes, dans le cadre d'une opération économique et technique de grande envergure liant des groupes internationaux, par le biais de relations contractuelles multiples et complexes, qui pourraient, entre certains et pour seulement certains d'entre eux, éventuellement donner lieu à la reconnaissance d'un ensemble contractuel unique, ne crée pas de relations, et encore moins de dépendances entre les demandes en réparation effectuées par chacune des parties pour leur propre compte et en réparation de leur propre préjudice sur le fondement délictuel à l'encontre de cette société tierce.

Le seul fait qu'elles soient présentées contre une partie identique et porte sur des éléments de contexte commun ne crée pas pour autant un lien suffisant permettant à l'intervenant volontaire de facticement rattacher ses demandes aux demandes originaires soumises au tribunal.

Au vu de ses éléments, il convient de déclarer irrecevable l'intervention volontaire de la société Bio-xcell Malaisie, sans qu'il n'y ait lieu d'assigner une solution différente aux prétentions de la société Bio-xcell, fondée sur la faute reprochée à la société Métabolic Explorer basée sur l'exécution et la résiliation du contrat EPCC, comme l'a fait le tribunal.

La décision des premiers juges est donc confirmée en ce qu'elle a déclaré toutes les demandes de Bio-Xcell concernant le contrat BLT et son renouvellement irrecevables. Elle est cependant infirmée en ce qu'elle a déclaré recevable la société Bio-Xcell en son intervention volontaire mais seulement pour les prétentions de la société Bio-Xcell concernant la résiliation du contrat EPCC et en ce qu'elle a condamné Metex Explorer à payer à la Société Bio-Xcell la somme de 7.984.921,60 ringgits (environ 2.063.000,00 €, à parfaire), outre intérêts au taux légal à compter du 14/04/2015 en dommages et intérêts au titre de son rôle dans la résiliation du contrat EPCC et débouté la société Bio-Xcell de ses autres demandes de dommages et intérêts.

Sur les demandes de la société Lebas Industries

En vertu des dispositions de l'article 1382 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

Le préjudice doit être direct, certain et présent. La réparation du préjudice doit être intégrale.

Il appartient dès lors à celui qui s'en prévaut d'apporter la preuve d'un préjudice, d'une faute et d'un lien de causalité.

À titre liminaire, la cour observe que, dans ses écritures, la société Lebas Industries entretient une confusion entre les sociétés françaises et leurs filiales, employant ainsi indifféremment la dénomination Métabolic Explorer ou Metex pour désigner la structure française (Metex France) ou la structure malaisienne (Metex Malaisie).

Elle-même tiers aux relations contractuelles invoquées, d'une part au contrat entre la société Metex Malaisie et la société Bioxcell Malaisie, d'autre part au contrat entre la société Bioxcell Malaisie et la société Lebas Malaisie, la société Lebas Industries reproche ainsi des fautes, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, à la société Métabolic Explorer, également tiers aux relations contractuelles précitées, soit en qualité d'auteur direct (pour les actes de dénigrements notamment), soit en qualité d'auteur indirect ou complice (pour la résiliation abusive du contrat EPCC entre la société Lebas Malaisie et la société Bioxcell Malaisie par exemple).

Quand bien même la complicité du tiers complice dans la violation du contrat est le plus souvent recherchée par une des parties au contrat, rien n'interdit, au vu du principe de l'opposabilité des contrats, fondant la possibilité, d'une part, pour le tiers victime de la violation du contrat d'en solliciter réparation, d'autre part, pour la victime de la violation de rechercher la responsabilité de son auteur, de permettre au tiers victime de la violation du contrat d'agir contre le tiers complice de cette violation à condition d'arriver à démontrer la faute de ce dernier, le lien de causalité et à prouver un préjudice propre.

Cela suppose toutefois de démontrer le rôle de complice et l'implication de ce tiers complice, preuve qui pèse sur la société Lebas Industries, conformément aux dispositions des articles 6 et 9 du code de procédure civile.

1) Sur les fautes en qualité d'auteur direct

a) la rédaction des communiqués

Est reprochée à la société Métabolic Explorer sa communication qui dénigrerait la société Lebas Industries en raison de son caractère mensonger et nuisant à la bonne réalisation du projet.

Il n'appartient pas à la présente juridiction de s'ériger en juge de la validité de la communication boursière de la société Métabolic Explorer mais seulement de déterminer en quoi les communications précises, invoquées par la société Lebas Industries, portaient des affirmations malicieuses, voire des critiques déloyales de nature à jeter le discrédit et à lui nuire, peu important le caractère exact ou inexact d'ailleurs des assertions.

Les développements de la société Lebas Industries visant à démontrer l'existence d'une 'politique de communication boursière dont elle [Métabolic Explorer] savait pertinemment dès le départ qu'elle était fausse', la tentative par cette communication de contrer les interrogations de ses actionnaires, et les inquiétudes des analystes financiers et marchés sur la gestion par Métabolic Explorer de ce projet au titre des années 2014-2015 sont donc inopérants.

Parmi les 3 communiqués incriminés par la société Lebas Industries, le premier en date du 21 septembre 2011, intitulé ' Metabolic explorer communique : point sur le premier développement en propre de la société : la Malaisie' annonce l'opération, la date de fin de cette dernière ainsi que la sélection, 'après appel d'offres auquel ont répondu trois sociétés internationales' d'une 'société française, spécialisée dans le secteur des biotechnologies, qui est déjà intervenue aux côtés de Metabolic Explorer'.

Même si la société d'ingénierie n'y est pas expressément nommée, au vu de la description faite, la société Lebas Industries est facilement identifiable, contrairement à ce que soutient la société Métabolic Explorer.

Ensuite quand bien même la date de fin de construction s'avère effectivement différente de celle annoncée dans ledit communiqué et que la société en charge de la construction n'est pas la société française mais la filiale malaisienne de cette dernière, ce dernier ne comporte aucune mise en cause de la société Lebas Industries.

Les retards pris par le projet de construction sont le sujet du second communiqué, en date du 9 mars 2012, intitulé 'Metabolic explorer au sein du parc Bio-xcell (Malaisie) : léger décalage dans le calendrier de construction', lequel informe le public que 'la société d'ingénierie en charge de la construction de l'usine n'a pas, à ce jour, fourni l'ensemble des documents techniques nécessaires au respect du calendrier, ce qui engendre un ralentissement du chantier qui ne devrait pas excéder six mois. Par ailleurs, Bio-xcell effectue en parallèle des opérations complémentaires de conditionnement du sol. Cette phase devrait durer trois mois au maximum. Ce ralentissement ne devrait donc pas retarder la réception de l'usine de plus de 6 mois par rapport au calendrier prévisionnel'.

Ce communiqué se présente sous la forme d'un énoncé de deux faits distincts, imputés l'un à la société d'ingénierie, à savoir en réalité la société Lebas Malaisie, l'autre à la société Bio-xcell afin d'informer les partenaires et notamment les actionnaires d'un retard pris dans la date prévisible de réception de l'usine.

Le fait qu'ait pu être jugée injustifiée, plusieurs années après, par la sentence arbitrale rendue entre les sociétés Lebas Malaisie et Bio-xcell Malaisie, la demande de fourniture des documents, laquelle avait d'ailleurs motivé la demande de résiliation par la société Metex Malaisie de l'EPCC, tant dès mars 2012 qu'en février 2013, ne saurait suffire à démontrer l'intention malicieuse de la société Métabolic Explorer dans l'établissement de cette communication.

Si indéniablement par cette communication, la société Métabolic Explorer cherche à se dédouaner du retard pris dans l'opération, aucun dénigrement ne ressort des assertions ci-dessus rappelées, lesquelles concerne d'ailleurs la société d'ingénierie chargée de la construction à savoir la société Lebas Malaisie, et non la société Lebas Industries.

Il en est de même pour l'interview de M. [W] en date du 5 avril 2013, postérieurement à la résiliation du contrat EPCC, sur un site tradingsat.com, média dont la portée n'est même pas explicitée par la société Lebas Industries, qui reprend la thèse de la société Métabolic Explorer relative aux deux causes explicitant le retard dans le projet.

La qualification de 'manquements répétés de la société chargée de l'ingénierie [qui] ont conduit à la résiliation de son contrat', est insuffisante à établir un dénigrement de la société française, laquelle n'est pas directement mise en cause et n'est que la société mère de la société en charge de la construction de l'usine.

Quant au 3éme communiqué, en date du 15 mars 2013, intitulé : 'implantation de Metabolic Explorer en Malaisie : les deux partenaires Bio-xcell et Metabolic Explorer font le point sur le projet de construction de l'usine PDO', il a pour but d'informer de l'accord sur la reprise et la poursuite du projet, avec une nouvelle organisation en termes d'ingénierie.

Cette publication est concomitante à la résiliation immédiate de l'EPCC adressée par la société Bio-xcell à la société Lebas Malaisie par courrier du 15 mars 2013 et faisant suite à la demande en date du 21 février 2013 de la société Metex Malaisie.

Est ainsi mentionné, ' s'agissant de l'ingénierie : accord sur les principes d'une nouvelle organisation en termes d'ingénierie notamment en remplacement de la société d'ingénierie actuelle'.

Cette présentation neutre et objective, sans aucun commentaire sur la société d'ingénierie, laquelle il convient de le rappeler est en réalité la société Lebas Malaisie, et non la société française du même nom, ne comporte aucune critique même voilée de la société Lebas Industries.

Ainsi n'est il pas établi par la société Lebas Industries que par ces communications la société Métabolic Explorer ait cherché à la discréditer et avait l'intention de lui nuire, étant observé qu'aucune preuve n'est versée aux débats permettant d'accréditer l'affirmation de la société Lebas Industries que cette communication aurait eu des répercussions sur son image et aurait créé des inquiétudes chez ses différents partenaires.

Ainsi, tant la faute de la société Métabolic Explorer que le préjudice ne sont pas établis, justifiant le rejet de cette demande. La décision des premiers juges est donc infirmée de ce chef.

b) la tentative de débauchage

Pour arguer d'un défaut de loyauté de la société Métabolic Explorer et d'un débauchage d'un salarié, M. [Z], la société Lebas Industries se prévaut d'une unique pièce à la valeur probatoire insuffisante et à la teneur limitée.

En effet, cette attestation, particulièrement générale et peu circonstanciée, qui ne respecte aucunement les prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile, comme l'ont justement noté les premiers juges, ne permet pas de déterminer, si son auteur était encore dans un lien de subordination avec le groupe Lebas lorsqu'il a rédigé ladite attestation ou encore si le lien de subordination existant en 2011 était avec la société Lebas Industries ou Lebas Malaisie et enfin si ce dernier salarié a quitté l'entreprise Lebas pour rejoindre la société Métabolic Explorer.

C'est donc très justement que les premiers juges ont rejeté cette faute, qui ne permet aucunement de caractériser une volonté d'évincer la société Lebas Industries du projet.

2) Sur les fautes d'instigation, de facilitation

En vertu des dispositions des articles 6 et 9 du code de procédure civile, à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder et il leur incombe de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de ses prétentions.

Force est de constater que pour les autres fautes invoquées par la société Lebas Industries, quand bien même la société Lebas Industries les impute directement à chaque fois à la société Métabolic Explorer, société mère, il ressort des différentes pièces que les documents invoqués ont pour auteur apparent à chaque fois la filiale, la société Metex Malaisie.

Le droit des sociétés est régie par le principe de l'autonomie des personnalités, l'écran sociétal étant consubstantiel à l'existence de la personne morale.

Ainsi, la mise en cause d'une société mère du fait de sa filiale constitue donc l'exception en cas d'utilisation détournée ou abusive de la technique sociétaire et de la notion même de personne morale.

Ce n'est que dans l'hypothèse d'une immixtion de la société mère dans le fonctionnement de la filiale ou d'une fictivité de la personnalité morale de cette dernière que la responsabilité délictuelle de la société mère envers les tiers peut être retenue.

Il appartient donc à la société Lebas Industries de démontrer que contrairement aux apparences, et malgré l'écran des personnalités morales, les comportements ou faits reprochés doivent en réalité être attribués à la société Métabolic Explorer, soit que, directement, ils en émanent ou ont été dictés par cette dernière soit que l'interposition de la filiale n'était que fictive dans les opérations incriminées.

a) la résiliation abusive du contrat EPCC par la société Bio-xcell

La société Lebas Industries, sous traitante de sa filiale, la société Lebas Malaisie, se plaint de la perte d'objet de son contrat de sous-traitance et de la mise en oeuvre de la contre-garantie bancaire, à raison de la résiliation par la société Bio-xcell du contrat entre cette dernière et la société Lebas Malaisie, sur la recommandation et à l'initiative de la société Metex Malaisie, laquelle ne fait qu'un avec la société Metex France.

La société Lebas Industries ne peut pas tirer argument de la sentence arbitrale rendue le 2 février 2015 entre la société Lebas Malaisie et Bio-xcell, laquelle est certes opposable à la société Métabolic Explorer et a estimé abusive la résiliation du contrat EPCC, mais prend bien garde de n'examiner que les relations entre les sociétés filiales malaisiennes et la société Bio-xcell Malaisie.

En effet, les explications préliminaires en exergue de ladite sentence, notamment le paragraphe 2 mais aussi le paragraphe 27, précisent bien que la dénomination 'maître d'oeuvre ou Metex', au sens de ladite décision, concerne la société Métabolic Explorer SDN BHD, soit Metex Malaisie, et non la société Métabolic Explorer France comme le sous-entend la société Lebas Industries dans ses écritures.

Or, si la société Lebas Industries incrimine directement la société Métabolic Explorer dans l'obstacle mis à la bonne exécution de l'EPCC et dans la recommandation faite de résilier ledit contrat adressée à la société Bio-xcell, estimant artificiel le montage contractuel mis en place et fictive la création de filiales malaisiennes, elle ne le démontre aucunement.

Pourtant, tant les lettres de recommandations de résiliation ou de demandes de mises en conformité, comme les différentes conventions, sont établies à l'en tête des sociétés malaisiennes respectives et adressés à la société filiale malaisienne de Lebas Industries.

La constitution de filiales malaisiennes en vue de réaliser l'opération était connue de tous, et notamment de la société Lebas Industries, qui elle-même a constitué une société filiale malaisienne pour répondre à l'appel d'offre et conclure le contrat litigieux, et n'est à soi seul pas suffisant pour caractériser la fictivité même de la société Metex Malaisie.

Aucun élément de fait concret et précis n'est soutenu et encore moins justifié par la société Lebas Industries pour établir la fictivité même de Metex Malaisie et prouver ainsi qu'elle n'aurait pas d'existence autonome et indépendante sur le plan économique, organisationnel et juridique.

Il n'est pas plus apporté la preuve par la société Lebas Industries d'une immixtion de la société-mère dans les agissements de sa filiale, faisant de cette dernière une simple façade masquant en réalité les agissements d'une personne morale tierce, la société Métabolic Explorer.

En effet, par principe une filiale et la société-mère ont des liens de direction, de pouvoir et financiers qui découlent même de cette structuration d'un groupe mais ne fondent pas à soi seul une implication telle qu'elle annihilerait toute distinction entre ces deux entités.

Aucune immixtion de la société Métabolic Explorer dans la rédaction des lettres de recommandations de résiliation ou de demandes de mises en conformité, privant la société Metex Malaisie de son autonomie et de toute personnalité morale et de nature à constituer une faute imputable à la société -mère, n'est en l'espèce démontrée.

Le fait que M. [W] ait pu activement participer à la procédure d'arbitrage et ait pu, comme M. [O], disposer de fonctions, à la fois dans la société Metex Malaisie et la société Métabolic Explorer, n'est pas en soi suffisant.

Par ailleurs, aucune apparence trompeuse n'est établie, puisque la constitution des filiales malaisiennes a été envisagée entre les parties dans le cadre des pourparlers, la société Lebas Industries, qui elle-même a constitué une société filiale malaisienne pour répondre à l'appel d'offre et conclure le contrat litigieux, ne pouvant se méprendre sur l'attribution du rôle de 'Project Manager' et 'Employer représentative' à la société Metex Malaisie.

L'ensemble des documents contractuels produits et les lettres de mises en demeure, comme de recommandations en vue de la résiliation, sont bien à l'en-tête de la filiale malaisienne et non de sa mère.

Qu'un premier contrat ait pu un temps prévoir une relation contractuelle directe entre la société Métabolic Explorer et la société Lebas Industries est inopérant, s'agissant d'une relation contractuelle distincte et abandonnée par les parties. Cela est insusceptible d'établir l'absence d'indépendance tant de la filiale malaisienne de Métabolic Explorer que de la société Bio-xcell d'ailleurs.

À supposer établie la faute de la société Metex Malaisie dans la recommandation faite à la société Bio-xcell de résilier le contrat litigieux, la société Lebas Industries ne démontre pas l'implication de la société Métabolic Explorer dans la réalisation de l'éventuelle faute de sa filiale.

En conséquence, et sans qu'il y ait lieu d'examiner plus avant les liens entre la société Metex Malaisie et la société Bio-xcell, la responsabilité de la société-mère, Métabolic Explorer, qui n'a pas commis de faute civile, ou en s'immisçant dans la gestion de sa filiale, de telle sorte qu'elle perdrait tout autonomie, ou en usant abusivement d'une interposition fictive d'une filiale pour masquer ses agissements, ne peut être retenue en l'espèce.

b) la mise en place en 2012 d'une stratégie contractuelle visant à évincer la société Lebas Industrie et la conduire à la liquidation judiciaire

Là encore, les lettres et accords de suspension de travaux et l'addendum évoqués comme démontrant la 'stratégie' mis en place par la société Métabolic Explorer pour évincer la société Lebas sont à l'en-tête de sa filiale, la société Metex Malaisie.

Aucune fictivité de la société Metex Malaisie et aucune immixtion de la société Métabolic Explorer créant une apparence trompeuse dans la réalisation de ces actes n'étant démontrée, la société Lebas Industries ne peut qu'être déboutée de sa demande à l'encontre de la société Métabolic Explorer de ce chef également.

c) la violation de l'obligation de confidentialité contribuant à permettre à un fournisseur de pratiquer de façon injustifiée une saisie-conservatoire au préjudice de Lebas Industries pour 600.000,00 euros

La production de la seule lettre en date du 27 février 2012 adressée à la société Feramus Industriel Equipement à l'en-tête de la société Metex Malaisie n'est pas suffisante pour établir qu'elle l'ait été sur instigation de Métabolic Explorer, notamment à sa demande et au vu d'informations que seule cette dernière détenait.

La transmission d'informations, en violation des dispositions de l'article

1-11 (b), et non 11-b comme indiqué dans les écritures de Lebas Industries, du contrat EPCC entre les sociétés Lebas Malaisie et Bio-xcell Malaisie, ne peut donc être reprochée à la société Métabolic Explorer.

En conséquence, la décision des premiers juges est infirmée en ce qu'elle a reconnu la faute de la société Métabolic Explorer et l'a condamnée à réparer le préjudice de la société Lebas Industries.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

En vertu des dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil, l'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et nécessite que soit caractérisée une faute faisant dégénérer en abus le droit d'agir en justice pour que puissent être octroyés des dommages et intérêts à titre de réparation.

En vertu des dispositions des articles 6 et 9 du code de procédure civile, à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder et il leur incombe de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de leurs prétentions.

La société Métabolic Explorer sollicite une somme de 500.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, d'une part, à l'encontre de la société Lebas Industries, d'autre part à l'encontre de la société Bio-xcell, déplorant une stratégie ourdie entre ces deux sociétés afin de permettre, d'une part, à la société Lebas Industries d'obtenir des pièces grâce à l'intervenante volontaire pour asseoir ses prétentions, d'autre part, à la société Bio-xcell de se greffer sur l'instance introduite devant les juridictions françaises aux fins d'échapper à la clause d'arbitrage prévue dans le contrat BLT entre les sociétés Bio-xcell et Metex Malaisie et à la forclusion entachant sa déclaration de créance dans le cadre de la procédure de sauvegarde de la société Lebas Industries.

Toutefois aucune de ces assertions n'est étayée par de quelconques éléments objectifs et précis.

Il n'est pas plus démontré que la société Lebas Industries a procédé en justice dans le but de nuire à la société Métabolic Explorer ou ait encore agi avec une légèreté blâmable.

N'est pas plus établi le caractère manifestement non sérieux de l'argumentation développée au soutien des prétentions ou vouée à l'échec, aux vues de la complexité des relations économiques, commerciales et juridiques unissant les divers protagonistes dans ce dossier.

Il en est de même pour ce qui concerne l'argumentation de l'intervenante volontaire et la recevabilité de son intervention, la méprise de cette dernière sur le droit applicable et la possibilité de se joindre à la présente action ne procédant ni d'une erreur grossière ou blâmable, ni d'une intention malveillante.

Quand bien même la société Bio-xcell fait état dans ses écritures de pourparlers en cours actuellement avec la société Lebas Industries concernant l'exécution de la sentence arbitrale, la volonté de faire supporter sa carence à la société Métabolic Explorer n'est aucunement démontrée.

En conséquence, à défaut d'établir la faute ayant fait dégénérer en abus, d'une part, l'action de la société Lebas Industries, d'autre part, l'intervention volontaire de la société Bio-xcell, la demande de condamnation au titre de la procédure abusive ne peut qu'être rejetée.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande de dommages et intérêts à l'encontre de la société Lebas Industries sur ce fondement, décision qu'il convient de confirmer sur ce point, étant observé que la cour, statue en y ajoutant sur la demande de la société Métabolic Explorer au titre de la procédure abusive à l'encontre de la société Bio-xcell, laquelle a été omise par les premiers juges dans leur motivation.

Il n'y a pas lieu à prononcer une quelconque amende civile.

Sur les dépens et accessoires

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, la société Bio-xcell Malaisie et la société Lebas Industries succombant en leurs prétentions respectives, il convient de les condamner in solidum aux dépens.

Les chefs de la décision de première instance relatifs aux dépens et à l'indemnité procédurale sont donc infirmés.

Le sens du présent arrêt commande de condamner la société Bio-xcell à payer à la société Métabolic Explorer la somme de 25 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. La société Lebas Industries sera également condamnée à payer à la société Métabolic Explorer la même somme.

Les sociétés Lebas Industries et Bio-Xcell Malaisie ne peuvent qu'être déboutées de leur demande d'indemnité procédurale.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lille Métropole en date du 7 mars 2017 et rectifié par jugement du 4 avril 2017 en ce qu'a été :

- déclaré toutes les demandes de la société Malaysian Bio-Xcell SDN BHD concernant le contrat BLT et son renouvellement irrecevables,

- débouté la société Metabolic Explorer de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive à l'encontre de la société Lebas,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

INFIRME le jugement du 7 mars 2017 et rectifié par jugement du 4 avril 2017 pour le surplus ;

DEBOUTE la société Malaysian Bio-Xcell SDN BHD de ses demandes devant la cour relative à la recevabilité de Metex France à conclure dans l'appel principal et appel incident ;

REJETTE la demande d'irrecevabilité des conclusions de Bio-Xcell Malaisie présentée par la société Métabolic Explorer ;

ECARTE les pièces non traduites n° 4 et 5 de la société Lebas Industries et la pièce

n° 8-A uniquement les annexes non traduites et la pièce 24 A de la société Métabolic Explorer ;

Statuant à nouveau,

DECLARE irrecevable l'intervention volontaire de la société Malaysian Bio-Xcell SDN BHD à la présente instance ;

DEBOUTE la société Lebas Industries de ses demandes à l'encontre de la société Métabolic Explorer sur le fondement de la responsabilité délictuelle ;

Y ajoutant,

DEBOUTE la société Métabolic Explorer de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive à l'encontre de la société Malaysian Bio-Xcell SDN BHD ;

DIT n'y avoir lieu à prononcer une amende civile ;

CONDAMNE la société Malaysian Bio-Xcell SDN BHD à payer à la société Métabolic Explorer la somme de 25 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Lebas Industries à payer à la société Métabolic Explorer la somme de 25 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure

civile ;

DEBOUTE les sociétés Malaysian Bio-Xcell SDN BHD et Lebas Industries de leurs demandes respectives d'indemnité procédurale ;

CONDAMNE les sociétés Malaysian Bio-Xcell SDN BHD et Lebas Industries in solidum aux dépens de première instance, d'intervention volontaire et d'appel.

Le greffierLe président

V. RoelofsL. Bedouet


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 2
Numéro d'arrêt : 17/02286
Date de la décision : 23/01/2020

Références :

Cour d'appel de Douai 22, arrêt n°17/02286 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-23;17.02286 ?
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