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25/04/2019 | FRANCE | N°18/02317

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 25 avril 2019, 18/02317


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 25/04/2019





***





N° de MINUTE :

N° RG 18/02317 - N° Portalis DBVT-V-B7C-RQAX



Jugement (N° 15/02431)

rendu le 27 février 2018 par le tribunal de grande instance de Béthune







APPELANTE



Madame [Q] [G] veuve [N]

née le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 1] (62400)

demeurant [Adresse 1]

[Adres

se 2]



représentée et assistée de Me Xavier Brunet, membre de la SELARL Brunet Campagne Veniel, avocat au barreau de Béthune, substitué à l'audience par Me Valentin Guislain, avocat au barreau de Béthune





INTIMÉS



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République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 25/04/2019

***

N° de MINUTE :

N° RG 18/02317 - N° Portalis DBVT-V-B7C-RQAX

Jugement (N° 15/02431)

rendu le 27 février 2018 par le tribunal de grande instance de Béthune

APPELANTE

Madame [Q] [G] veuve [N]

née le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 1] (62400)

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 2]

représentée et assistée de Me Xavier Brunet, membre de la SELARL Brunet Campagne Veniel, avocat au barreau de Béthune, substitué à l'audience par Me Valentin Guislain, avocat au barreau de Béthune

INTIMÉS

Monsieur [O] [K]

né le [Date naissance 2] 1936 à [Localité 2] (62127)

Madame [U] [L] épouse [K]

née le [Date naissance 3] 1938 à Bruay en Artois (62700)

demeurant ensemble [Adresse 1]

[Adresse 2]

représentés et assistés de Me Brigitte Ingelaere, membre de l'association B. Ingelaere & F. Malbrancq, avocat au barreau de Béthune

DÉBATS à l'audience publique du 11 février 2019 tenue par Jean-François Le Pouliquen magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Fabienne Bonnemaison, président de chambre

Sophie Tuffreau, conseiller

Jean-François Le Pouliquen, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 25 avril 2019 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Fabienne Bonnemaison, président et Anne-Cécile Maes, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 11 janvier 2019

***

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Béthune du 27 février 2018 ;

Vu la déclaration d'appel de Mme [Q] [G] reçue au greffe de la cour d'appel de Douai le 17 avril 2018 ;

Vu les conclusions de Mme [Q] [G] déposées le 21 décembre 2018 ;

Vu les conclusions de M. [O] [K] et Mme [U] [L] épouse [K] déposées le 29 octobre 2018 ;

Vu l'ordonnance de clôture du 11 janvier 2019.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mme [G] est propriétaire de l'immeuble situé [Adresse 1].

M. et Mme [K] sont propriétaires de l'immeuble voisin situé au 460 de la même rue.

Mme [G] a fait réaliser un passage couvert et fermé entre les deux immeubles.

Une expertise extra-judiciaire a été réalisée à la demande de M. et Mme [K]. L'expert s'est rendu sur les lieux le 06 septembre 2011. Le rapport n'est pas daté.

Par acte signifié 27 mai 2015, M. et Mme [K] ont fait assigner Mme [G] devant le tribunal de grande instance de Béthune en destruction de la construction et indemnisation.

Par jugement du 27 février 2018, le tribunal de grande instance de Béthune a :

- écarté la fin de non recevoir tirée de la prescription opposée par Mme [Q] [G] à M. et Mme [K] ;

- déclaré Mme [G] responsable sur le fondement de l'article 1382 du code civil des dommages causés à M. et Mme [K] du fait de la construction qu'elle a édifiée dans le passage situé entre leur immeuble et le sien ;

- dit que Mme [G] devra démolir la construction litigieuse, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard au-delà d'un délai de 2 mois à compter de la signification du jugement, cette astreinte courant durant une année ;

- condamné Mme [G] à payer à M. et Mme [K] les sommes indemnitaires suivantes :

- 2 000 euros au titre du refus du droit de tour d'échelle opposé aux époux [K]

- 10 000 euros au titre du préjudice matériel subi par M. et Mme [K] au titre de la perte de luminosité et d'ensoleillement de leur immeuble ;

- rejeté toutes demandes plus amples ou contraires ;

- dit que Mme [G] supportera les entiers dépens ;

- laissé à la charge de Mme [G] ses frais irrépétibles

- condamné Mme [G] à payer une somme de 1 500 euros à M. et Mme [K] au titre des frais irrépétibles.

Mme [G] a formé appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions susvisées Mme [G] demande à la cour d'appel de :

- juger irrecevables les demandes formulées par M. et Mme [K] en raison de la prescription extinctive ;

- à titre subsidiaire,

- juger mal fondées les demandes formulées par M. et Mme [K] ;

- débouter M. et Mme [K] de l'ensemble de leurs demandes ;

- condamner M. et Mme [K] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Aux termes de leurs conclusions susvisées, M. et Mme [K] demandent à la cour d'appel de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Béthune le 27 février 2018,

- vu les dispositions de l'article 2227 du code civil,

- dire recevable et bien fondée l'action de M. et Mme [K],

- vu les dispositions des articles 544 et 2224 du code civil,

- dire recevable et fondée la demande d'indemnisation formulée par M. et Mme [K],

- y ajoutant,

- condamner Mme [Q] [G] au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

EXPOSE DES MOTIFS

I) Sur la recevabilité de l'action

a) Sur la recevabilité de l'action en démolition

L'action en démolition de l'ouvrage édifié par Mme [G] est fondée sur :

- le fait que l'ouvrage s'appuie sur le mur privatif de M. et Mme [K] et empiète sur le mur privatif ;

- le fait qu'en édifiant l'ouvrage en contradiction des permis de construire, Mme [G] a commis une faute

L'action en responsabilité fondée sur le non respect des dispositions des permis de construire constitue une action en responsabilité extra-contractuelle, soumise à la prescription décennale de l'article 2270-1 du code civil dans sa rédaction antérieure à son abrogation par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 puis à la prescription quinquennale de l'article 2264 du code civil dans sa rédaction issue de cette même loi.

En l'espèce, il n'est pas contesté que les travaux réalisés par Mme [G] ont été achevés au plus tard le 16 décembre 2008, date du dépôt de la déclaration d'achèvement des travaux. En conséquence le terme de la prescription quinquennale était le 16 décembre 2013. M. et Mme [K] ont fait assigner Mme [G] devant le tribunal de grande instance de Béthune le 27 mai 2015.

L'action en démolition de M. et Mme [G] fondée sur la responsabilité civile extra - contractuelle sera déclarée irrecevable.

En revanche, aux termes des dispositions de l'article 2227 du code civil :

'Le droit de propriété est imprescriptible. Sous cette réserve, les actions réelles immobilières se prescrivent par trente ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.'

L'action en démolition fondée sur le fait que l'ouvrage s'appuie sur le mur privatif de M. et Mme [K] et empiète sur le mur privatif n'est pas prescrite. Elle sera déclarée recevable.

b) sur la recevabilité de l'action en indemnisation

L'action en indemnisation est fondée sur :

- le fait que Mme [G] a refusé à M. et Mme [K] un droit de tour d'échelle ;

- le fait que l'ouvrage prive leur immeuble de lumière ce qui constitue un trouble anormal de voisinage.

L'action en réparation d'un préjudice résultant de troubles anormaux de voisinages constitue une action en responsabilité extra-contractuelle, soumise à la prescription décennale de l'article 2270-1 du code civil dans sa rédaction antérieure à son abrogation par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 puis à la prescription quinquennale de l'article 2264 du code civil dans sa rédaction issue de cette même loi.

En l'espèce, il n'est pas contesté que les travaux réalisés par Mme [G] ont été achevés au plus tard le 16 décembre 2008, date du dépôt de la déclaration d'achèvement des travaux. En conséquence le terme de la prescription quinquennale était le 16 décembre 2013. M. et Mme [K] ont fait assigner Mme [G] devant le tribunal de grande instance de Béthune le 27 mai 2015.

L'action en indemnisation résultant du trouble anormal de voisinage sera déclarée irrecevable comme prescrite.

Il résulte des pièces produites aux débats que M. et Mme [K] ont sollicité Mme [G] en 2012 puis en 2014 afin de pouvoir faire pénétrer sur sa propriété afin de pouvoir procéder à des travaux sur leur immeuble.

Ces courriers n'ont pas trouvé de réponse. L'action en indemnisation du préjudice subi par M. et Mme [K] en raison du refus par Mme [G] de pénétrer sur sa propriété pour faire procéder à des travaux sur leur immeuble n'est pas prescrite. Elle sera déclarée recevable.

II) Sur la demande de démolition

Aux termes des dispositions de l'article 544 du code civil : 'La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.'

Les photographies produites montrent que la construction de Mme [G] est contiguë au mur privatif de M. et Mme [K] et se présente sous la forme d'une toiture reposant côté [K] sur des poteaux.

Le rapport d'expertise extra-judiciaire produit aux débats est insuffisant pour démontrer que, comme le prétendent M. et Mme [K], cet ouvrage prend appui sur le mur voisin, les photographies laissant au contraire apparaître un jour entre les poteaux et ce mur. De même si ce rapport établit qu'un solin est posé sur toute la longueur de la construction réalisée par Mme [G] afin d'en garantir l'étanchéité et touche le mur de M. et Mme [K], il n' établit pas qu'un solin prend appui sur le mur voisin et/ou que celui-ci a fait l'objet d'un percement pour la fixation de ce solin.

En conséquence l'empiétement critiqué n'est pas caractérisé.

Il convient en conséquence de débouter M. et Mme [K] de leur demande de démolition.

III) Sur la demande d'indemnisation

M. et Mme [K] demandent a être indemnisés du préjudice causé par le refus de Mme [G] de les laisser accéder à leur pignon pour pouvoir y faire des travaux de peinture.

Il convient cependant de constater que si les époux [K] ont demandé la démolition de l'ouvrage édifié par Mme [G], ils n'ont pas demandé, fût- ce à titre subsidiaire, à être autorisés à pénétrer sur la propriété de cette dernière pour réaliser les travaux de peinture.

M. et Mme [G] produisent en outre des devis pour la réalisation de travaux sur la toiture sans toutefois démontrer qu'ils ne peuvent pas accéder à la toiture par la façade de leur maison.

et Mme [G] seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts.

IV) Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Succombant à l'instance, M. et Mme [K] seront condamnés aux dépens.

Il n'y a pas lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- INFIRME le jugement du tribunal de grande instance de Béthune du 27 février 2018 ;

- Statuant à nouveau et y ajoutant,

- DÉCLARE irrecevable l'action en démolition de l'ouvrage en ce qu'elle est fondée sur la responsabilité civile extra-contractuelle ;

- DÉCLARE irrecevable l'action en indemnisation fondée sur le trouble anormal de voisinage ;

- DÉCLARE recevable l'action en tant qu'elle est fondée sur l'atteinte au droit de propriété de M. et Mme [K] ;

- DÉCLARE recevable l'action en indemnisation fondée sur le refus du droit de tour d'échelle ;

- DÉBOUTE M. et Mme [K] de leur demande de démolition ;

- DÉBOUTE M. et Mme [K] de leur demande de dommages et intérêts au titre du refus du droit de tour d'échelle ;

- DÉBOUTE les parties de leurs demandes respectives sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-CONDAMNE M. et Mme [K] aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier,Le président,

Anne-Cécile Maes.Fabienne Bonnemaison.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 18/02317
Date de la décision : 25/04/2019

Références :

Cour d'appel de Douai 1B, arrêt n°18/02317 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-25;18.02317 ?
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