ARRÊT DU
29 Mars 2019
N 469/19
No RG 17/00716 - No Portalis DBVT-V-B7B-QRO5
SM/MZ
RO
AJ
Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DUNKERQUE
en date du
13 Février 2017
(RG F 16/00263 -section )
GROSSE :
aux avocats
le 29/03/19
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-
APPELANT :
SARL Autocars Thys
[...] - [...]
Représentée par Me Laurent LESTARQUIT, avocat au barreau de DUNKERQUE
INTIMÉ :
M. K... N...
[...]
Représenté par Me Hervé JOLY, avocat au barreau de DUNKERQUE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 59178002/17/03547 du 11/04/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)
DÉBATS : à l'audience publique du 05 Mars 2019
Tenue par Sabine MARIETTE
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Maryse ZANDECKI
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Sabine MARIETTE : PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Béatrice REGNIER : CONSEILLER
Patrick REMY : CONSEILLER
ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2019,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Sabine MARIETTE, Président et par Annick GATNER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 09 Juin 2017, avec effet différé jusqu'au 05 Février 2019
EXPOSE DU LITIGE:
M. K... N... a été engagé par la société Autocars Thys en qualité de chauffeur receveur à compter du 1er octobre 2012. La convention collective applicable est celle des transports.
Le 12 août 2015, M. N... a adressé à son employeur une lettre aux termes de laquelle il a indiqué : «je vous informe de ma décision de démissionner. Je quitterai définitivement mon travail le 27 août 2015 après exécution de mon préavis qui est de 14 jours».
Par demande reçue au greffe le 13 juin 2016, M.N... a saisi le conseil de prud'hommes de Dunkerque pour obtenir paiement d'un rappel de salaire correspondant à des retenues indues, des dommages et intérêts pour perte de rémunération, pour violation des dispositions conventionnelles et réglementaires en matière de repos hebdomadaires, pour violation des dispositions en matière d'information du salarié ainsi que pour violation des dispositions de l'article L.1331-2 du code du travail, ainsi que des indemnités compensatrice de préavis, de licenciement, des dommages et intérêts pour licenciement abusif.
Par jugement du 13 février 2017, la juridiction prud'homale a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, condamné la société Autocars Thys à payer à M. N... la somme 1525,92 euros à titre de rappel de salaire et 152,59 euros au titre des congés payés y afférents, 500 euros à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions conventionnelles et 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens éventuels, et a débouté les parties du surplus de leurs demandes.
Par déclaration adressée au greffe le 20 mars 2017 via le RPVA, la société Autocars Thys a relevé appel total de cette décision.
Par ordonnance du président de chambre rendue le 9 juin 2017, l'affaire a été fixée conformément aux dispositions de l'article 905 du code de procédure civile et la clôture a été fixée avec effet différé au 5 février 2019.
La société Autocars Thys, aux termes de ses dernières conclusions déposées le 4 février 2019, demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il alloue au salarié la somme de 1525,92 euros à titre de rappel de salaire pour retenues indues ainsi que 152,59 euros au titre des congés payés y afférents, la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions conventionnelles et la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et, statuant à nouveau, de débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes et de le condamner à payer outre les entiers frais et dépens la somme de 2500 euros au titre des frais irrépétibles non compris dans les dépens.
A l'appui de ses prétentions, la société Autocars Thys expose que :
- la démission a été donnée de manière claire et non équivoque sans qu'aucune réserve ne soit formulée ; que M. N... a entendu remettre en cause sa démission dix mois après que celle-ci ait produit ses effets ; que subsidiairement, il ne démontre pas l'existence de manquements de son employeur suffisamment graves pour justifier une rupture du contrat de travail aux torts de celui-ci ;
- l'application de l'article 7.3 de la convention collective nationale du 18 avril 2002 donnait lieu, avant mars 2015, à l'inscription d'une ligne 26 « coupure régularisation TTE » figurant sur la fiche de paie et que postérieurement, cette ligne a fait l'objet d'une suppression et a été remplacée par la ligne no8 « coupure régularisation TTE » et la ligne 25 « complément heures coupures » ; que ces différentes mentions consistent en réalité à compenser le temps de travail effectif insuffisant par l'indemnisation des temps de coupure jusqu'à concurrence de la rémunération correspondant à l'horaire théorique de référence ; que dès lors, aucune retenue sur salaire n'a été effectué quand bien même M. K... N... n'aurait pas effectué les 151,57 heures mensuelles théoriques prévues par le contrat de travail ;
- la garantie de deux jours de repos hebdomadaire attribuée au personnel conducteur à temps complet prévue à l'article 10 de l'accord du 18 avril 2002 est une moyenne dans l'année, ainsi que le prévoit ledit texte ; qu'elle s'est efforcée au maximum de respecter l'intégralité de deux repos hebdomadaires en dépit des difficultés organisationnelles de l'entreprise ; qu'en outre, M. N... ne justifie pas de la réalité d'un quelconque préjudice ;
- la prime de service dont se prévaut M. N... ne peut être assimilée à un élément normal et permanent du salaire en ce que son usage n'est ni constant, ni général, ni fixe.
M. K... N..., par conclusions déposées et notifiées le au greffe le 29 janvier 2019 via le RPVA, demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société à lui verser les sommes suivantes :
- 1525,92 euros au titre des rappels de salaire fondés sur des retenues indues ainsi que 152,59 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
- 500 euros à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions conventionnelles et réglementaires en matière de repos hebdomadaires et violation des dispositions en matière d'information du salarié,
- 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
de l'infirmer pour le surplus et de condamner la société à lui payer les sommes suivantes:
- 305,95 euros au titre du rappel de salaire ou subsidiairement dommages et intérêts pour perte de rémunération ;
- 150 euros à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions de l'article L.1331-2 du code du travail,
- 1633.63 euros à titre de rappel de salaire et 163,36 euros d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
- 574,33 euros d'indemnité compensatrice de préavis,
- 157,43 euros d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
- 918,33 euros d'indemnité de licenciement,
- 12000 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif,
- 2500 euros au titre des frais irrépétibles de l'instance, outre le paiement des dépens ;
et d'ordonner la délivrance d'un bulletin de paie pour les rappels de salaires et indemnités diverses, d'une attestation d'employeur destinées à Pôle emploi conforme au dispositif de l'arrêt à intervenir.
Il fait valoir que :
- son employeur ne justifie pas des retenues opérées sur le salaire s'agissant tant de la ligne no26 intitulée « coupures régul TTE » apparaissant avant le mois de mai 2015, que de la ligne no8 intitulée « H Coup. Imputées sur TTE » créée en remplacement suite à
l'intervention de l'inspecteur du travail. Il rappelle qu'il appartient à l'employeur de fournir le temps de travail convenu, soit 151,67 heures mensuelles ; que la pratique consistant à remplacer du temps de travail effectif par une indemnisation des coupures est illégale, ainsi que l'a rappelé l'inspecteur du travail le 3 mars 2016 ; qu'il s'en est suivi un préjudice financier appelant à réparation ;
- son employeur a violé les dispositions conventionnelles et réglementaires en matières de repos hebdomadaire en ne lui octroyant pas deux jours de repos hebdomadaire, mais 1,84 jour de repos hebdomadaire en moyenne sur l'année ;
- la prime de service, qui était versée mensuellement à tous les chauffeurs receveurs, lui a été supprimée de manière illicite pour les mois de mars 2013 et juin 2015 ;
- il existe une discordance en sa défaveur entre les pointages des heures de travail effectif et les heures de travail rémunérées par l'employeur ;
- la prétendue démission, en ce qu'elle est équivoque, doit s'analyser en une prise d'acte ; qu'en effet, elle fait suite à la visite de l'inspecteur du travail qui a rappelé sans succès à l'employeur son obligation de verser l'intégralité du salaire.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la demande tendant au rappel des salaires retenus au titre des coupures :
Suivant l'article 4 de l'accord de branche sur l'aménagement, l'organisation et la réduction du temps de travail et sur la rémunération du personnel des entreprises de transport routier de voyageurs, étendu par arrêté du 22 décembre 2003, le temps de travail effectif des conducteurs comprend les temps de conduite, les temps de travaux annexes et les temps à disposition.
L'article 7.2 indique que les temps non considérés dans cette disposition inclus dans l'amplitude de la journée de travail constituent des coupures qui n'entrent pas dans le décompte du temps de travail effectif, indemnisées en fonction du lieu et suivant plusieurs modalités.
L'article 7.3 prévoit que dans le cas particulier où le salarié bénéficie d'une rémunération effective fixée sur la base d'un horaire théorique déterminé, cette rémunération effective comprend tous les éléments de rémunération y compris les sommes versées au titre de l'indemnisation des coupures visées ci-dessus, jusqu'à concurrence de la rémunération correspondant à cet horaire théorique de référence.
En l'espèce, l'article 4 du contrat de travail conclu entre M. N... et la SARL Autocars Thys, relatif à la durée du travail, stipule :
"Conformément notamment à l'accord de branche du 18 avril 2002, sera considéré comme temps de travail effectif, et selon les modalités prévues par ledit accord :
- les temps de conduite
- les temps de travaux annexes
- les temps à disposition
Ces modifications pourront conduire à une répartition de l'horaire sur tous les jours de la semaine et toutes les plages horaires imposées à la fois par les transports scolaires ou occasionnels et les tâches nécessaires en amont et en aval de ces transports.
Les horaires de travail seront communiqués à M. K... N..., par voie d'affichage dans l'entreprise (cf communication de plannings)."
L'article 5 du contrat de travail relatif à la rémunération, prévoit qu'en « contrepartie de ses fonctions, et au titre de la durée du travail indiquée dans l'article 4 ci-dessus, Monsieur K... N... percevra une rémunération mensuelle brute de base égale à 1501,84 euros pour 151h67 par mois. / Cette rémunération est versée sur douze mois. / A cette rémunération peuvent notamment s'ajouter les indemnisations des amplitudes et des coupures selon les modalités prévues par l'accord de branche précité du 18 avril 2002. »
Il ressort de ces stipulations, à défaut de toute mention contractuelle prévoyant un e rémunération fixée sur la base d'un horaire théorique, que M. N... a été engagé à temps complet, moyennant, comme précisé ci-dessus, un salaire brut de 1.501,84 euros, auquel peuvent s'ajouter les indemnisations d'amplitude et de coupures, l'employeur étant en conséquence tenu de lui fournir un travail pour la durée contractuellement prévue.
L a cour relève que l'argumentation développée par la SARL Autocars Thys, également soutenue auprès de l'inspecteur du travail, se fonde principalement sur des stipulations contenues dans le contrat de travail de certains de ses salariés, dont ne fait pas partie M. N..., rédigées en ces termes : « En contrepartie de ses fonctions, et comme prévu à l'accord de branche précité du 18 avril 2002, Monsieur [
] bénéficiera d'une rémunération effective fixée sur la base théorique de 151h67. / Cette rémunération effective comprend tous les éléments de rémunération, y compris les sommes versées au titre de l'indemnisation des coupures et les sommes versées au titre de l'indemnisation de l'amplitude jusqu'à concurrence de la rémunération correspondant à cet horaire théorique de référence. »
Il s'ensuit qu'en déduisant du salaire à temps plein de M. N... une partie des heures de coupures en « régularisation TTE », en compensation des heures de travail effectif non réalisées par défaut de fourniture de travail, et ce, malgré l'intervention du contrôleur du travail d'y remédier en mars 2012 et sa demande écrite du 8 juillet 2015, l'employeur a procédé à des retenues de salaire irrégulières pour un montant total de 1525,92 euros .
Après le mois de mai 2015, il apparaît que la société a cessé d'opérer des retenues « coupures régul.TTE » mais, lorsqu'elle n'a pas fourni au salarié le temps de travail convenu, elle a compensé l'absence de rémunération du temps de travail non effectué par l'indemnisation des temps de coupures, ces compensations étant intervenues durant les mois de juillet et août 2015, alors qu'elle était tenue de fournir au salarié la durée de travail et la rémunération convenues.
Dès lors, le jugement sera donc confirmé en ce qu'il condamne l'employeur à verser à M. N... la somme correspondante de 1525,92 euros, outre les congés payés s'y rapportant, mais sera infirmé en ce qu'il déboute M. N... de sa demande tendant au paiement d'un rappel de salaire pour les mois de juillet et août 2015 et la société Autocars Thys sera condamnée au paiement de la somme de 305,95 euros à ce titre.
Sur la demande relative au repos hebdomadaire :
Suivant l'article 8 no6 du règlement CE 561/2006 relatif à l'harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, au cours de deux semaines consécutives, un conducteur prend au moins deux temps de repos hebdomadaire normaux ou un temps de repos hebdomadaire normal et un temps hebdomadaire réduit de 24 heures. Toutefois, la réduction est compensée par une période de repos équivalente prise en bloc avant la fin de la troisième semaine suivant la semaine en question.
L'article 10 de l'accord du 18 avril 2002 prévoit l'attribution aux salariés concernés d'une garantie de deux jours de repos hebdomadaire en moyenne sur l'année, une de ces journées pouvant être fractionnée en deux demi-journées, qui, selon l'article 29 de l'accord doit figurer sur un décompte particulier remis au salarié afin de permettre le contrôle effectif de l'obtention de es deux jours de repos.
Il ressort des plannings, rapports et attestations d'activités produites aux débats que M. N... n'a pas régulièrement bénéficié de l'intégralité des jours de repos hebdomadaire.
Le manquement de l'employeur à son obligation de respecter le temps de repos du salarié, nécessaire à santé et à la sécurité des personnes transportées, a causé à ce dernier un préjudice qui sera indemnisé par le versement d'une somme de 500 euros, comme justement évalué par les premiers juges.
Sur la violation des dispositions de l'article L.1331-2 du code du travail et la suppression des primes de service :
Un usage d'entreprise est caractérisé par la réunion des critères de généralité, de fixité et de constance.
Il appartient au salarié invoquant l'existence d'un usage d'apporter la preuve de l'existence de celui-ci.
Par ailleurs, il résulte de l'article L.1331-2 du code du travail que les amendes ou autres sanctions pécuniaires sont interdites, et que la réduction ou la suppression d'une gratification en liaison avec des faites reprochées au salarié est illicite.
En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, et notamment des bulletins de paie de M. N... et de plusieurs autres salariés exerçant tout comme lui les fonctions de chauffeur-receveur, qu'une prime de service était versée mensuellement aux chauffeurs-receveurs d'un montant maximum de 60 euros jusqu'en janvier 2014 et de 90 euros à compter de cette date.
Compte tenu de la généralité, de la constance et de la fixité de cette prime dont le montant varie simplement en fonction du temps de présence du salarié dans le mois, la cour retient que son versement constitue un usage.
Par ailleurs, M. N... a été privé du paiement de cette prime au cours des mois de mars 2013 et juin 2015.
La société Autocars Thys ne fournit aucune explication sur l'absence de paiement de cette prime tandis que les éléments fournis par M. N... tendent à établir que l'employeur s'octroyait abusivement, par le biais de sanctions pécuniaires déguisées, le droit de s'abstenir de son règlement à destination des salariés qui enfreignaient des consignes et avaient un comportement fautif.
La demande de rappel des sommes dues à ce titre, soit 150 euros, sera donc accueillie, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice, et le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il n'a pas fait droit à cette demande.
Sur la demande tendant à des rappels de salaires liés au nombre d'heures accomplies :
Conformément à l'article L. 3171-4 du Code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis
par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.
En l'espèce, M. N... produit d'une part, un tableau manuscrit des heures qu'il prétend avoir effectuées révélant l'existence d'une discordance en sa défaveur entre les pointages et les heures de travail, à hauteur de 157,23 heures pour la période de décembre 2013 à août 2015 et d'autre part, les relevés de carte conducteur et saisies manuelles, pour la période de novembre 2014 à août 2015.
Ces éléments sont suffisamment précis pour étayer la demande, en sorte qu'il appartient à la société Autocars Thys de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Or sur ce point, la société se borne à soutenir que le salarié a toujours été payé à hauteur de 151 heures 67 même lorsqu'il n'accomplissait pas ce temps effectif de travail, alors qu'il existe effectivement des discordances entre les annexes des bulletins de paie et le relevé effectué par M. N... s'agissant des heures accomplies.
Par conséquent, il convient de faire droit à la demande de rappel de salaire et de condamner la société Autocars Thys à payer à M. N... la somme de 1 633,33 euros outre les congés payés.
Le jugement sera donc infirmé en ce sens.
Sur la rupture du contrat de travail :
La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.
Lorsque le salarié remet en cause sa démission en raison de faits ou manquements imputables à son employeur et s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'elle était équivoque à la date à laquelle elle a été donnée, le juge doit l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission.
Il y a lieu d'observer que si la lettre de démission de M. N... ne contient aucune indication sur les motifs de cette rupture du contrat de travail, elle fait suite à diverses lettres adressées par le contrôleur du travail à l'employeur lui rappelant son obligation de verser l'intégralité du salaire dû, à la suite des doléances exprimées par le salarié.
Dans ces circonstances, la démission litigieuse, qui est ainsi équivoque, doit s'analyser en une prise d'acte.
Les manquements de la société à son obligation principale de payer l'intégralité du salaire en procédant à des retenues injustifiée, sont suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail, en sorte que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par la perte de son emploi dans ces circonstances, M. N..., dont l'ancienneté était de 34 mois, a subi un préjudice qui, au regard de son âge et de sa situation personnelle, sera indemnisée par le versement d'une somme de 12 000 euros.
Il lui sera sera également accordé une indemnité compensatrice de préavis d'un mois de salaire, suivant l'article 13 de la convention collective ainsi que les congés payés y afférents. Il sera également fait droit à sa demande d'indemnité de licenciement.
Sur la demande de délivrance de documents sociaux :
Compte tenu de la solution donnée au litige, il est enjoint à la société Autocars Thys de délivrer à M. N... un bulletin de paie conforme au présent dispositif.
Sur les demandes accessoires :
Compte tenu de l'issu du litige, la société Autocars Thys sera condamnée au paiement des entiers dépens de l'instance, ainsi qu'à verser à M. N... la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement sauf en ce qu'il condamne la société Autocars Thys à payer à M. K... N... la somme de 1525,92 euros à titre de rappel de salaire pour retenues indues ainsi que 152,59 euros au titre des congés payés y afférents, la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions conventionnelles et la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Et statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société Autocars Thys à verser à M. K... N... les sommes suivantes :
- 305,95 euros à titre de rappels de salaires pour les mois de juillet et août 2015,
- 150 euros au titre du rappel des primes de services des mois de mars 2013 et juin 2015,
- 1 663,33 euros à titre de rappels de salaires, outre 163,36 euros au titre des congés payés,
- 1574,33 euros au titre d'une indemnité compensatrice de préavis et 157,43 euros au titre des congés payés,
- 918,33 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
- 12 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ,
- 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Rappelle que les créances de nature salariale allouées portent intérêts à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires à partir de la décision qui les prononce.
Ordonne à la société Autocars Thys de délivrer à M. K... N... un bulletin de paie et une attestation d'employeur destinée à Pôle Emploi conforme au présent dispositif.
Condamne la société Autocars Thys à supporter la charge des dépens d'appel ;
Le greffier Le président
Annick GATNER Sabine MARIETTE