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28/02/2019 | FRANCE | N°17/001718

France | France, Cour d'appel de Douai, A2, 28 février 2019, 17/001718


ARRÊT DU
28 Février 2019

N 355/19

No RG 17/00171 - No Portalis DBVT-V-B7B-QM6N

BR/VCO

RO

Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAMBRAI
en date du
19 Décembre 2016
(RG 15/00213 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 28/02/19

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-

APPELANTE :

SAS LA PYRENEENNE
[...]
Représentée par Me Valérie BIERNACKI, avocat au barreau de DOUAI , substitué par Me PERREZ - assis

té de Me Mourad BRIHI, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

INTIMÉ :

M. C... W...
[...]
Représenté par Me Patrick LEDIEU, avocat au barreau de CAMBRAI

...

ARRÊT DU
28 Février 2019

N 355/19

No RG 17/00171 - No Portalis DBVT-V-B7B-QM6N

BR/VCO

RO

Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAMBRAI
en date du
19 Décembre 2016
(RG 15/00213 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 28/02/19

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-

APPELANTE :

SAS LA PYRENEENNE
[...]
Représentée par Me Valérie BIERNACKI, avocat au barreau de DOUAI , substitué par Me PERREZ - assisté de Me Mourad BRIHI, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

INTIMÉ :

M. C... W...
[...]
Représenté par Me Patrick LEDIEU, avocat au barreau de CAMBRAI

DÉBATS : à l'audience publique du 04 Décembre 2018

Tenue par Béatrice REGNIER
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Véronique MAGRO

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Sabine MARIETTE : PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Béatrice REGNIER : CONSEILLER
Patrick REMY : CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 28 Février 2019,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Sabine MARIETTE, Président et par Annie LESIEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 03 avril 2017, avec effet différé jusqu'au 05 novembre 2018
M. C... W... a été engagé dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée le 7 décembre 2009 par la société ISS Propreté en qualité de nettoyeur ferroviaire.

Son contrat de travail a été transféré le 1er février 2012 à la SAS La Pyrénéenne qui a repris le marché du nettoyage du matériel roulant de la gare de Cambrai.

Il a fait l'objet de six sanctions disciplinaires (trois avertissements et trois mises à pied) entre 2012 et 2014.

Après avoir été convoqué le 29 juin 2015 à un entretien préalable fixé au 29 juillet suivant, il a été licencié pour motif disciplinaire le 3 août 2015.

Contestant notamment le bien-fondé de cette mesure, il a saisi le 21 septembre 2015 le cph de Cambrai qui, par jugement du 19 décembre 2016, a :

- dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamné la SAS La Pyrénéenne à payer au salarié les sommes de 10 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ces montants produisant intérêts au taux légal à compter de la décision ;

- ordonné le remboursement par la SAS La Pyrénéenne des indemnités chômage éventuellement versées par Pôle Emploi à M. W... postérieurement à son licenciement, dans la limite de trois mois,

- débouté M. W... du surplus de ses prétentions.

Par déclaration du 20 janvier 2017, la SAS La Pyrénéenne a interjeté appel du jugement.

Par conclusions enregistrées le 13 avril 2017, la SAS La Pyrénéenne demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement déféré, de dire que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, de débouter M. W... de l'ensemble de ses réclamations et de le condamner à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient que les faits reprochés dans le cadre des six sanctions et du licenciement sont établis et justifient les mesures prises.

Par conclusions enregistrées le 5 décembre 2017, M. W..., qui a formé appel incident, demande à la cour d'annuler les mises à pied des 20 mars, 2 juillet et 26 novembre 2014, de dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et de condamner la SAS La Pyrénéenne à lui régler les sommes de :

- 1 600 euros à titre de dommages et intérêts pour chaque mise à pied annulée,

- 19 200 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir que les conditions du contrôle opéré le 24 juin 2015 ne sont pas conformes puisqu'une seule personne est intervenue et que l'ensemble des griefs formulés dans le cadre des mises à pied et du licenciement sont inexacts.

SUR CE :

1) Sur les mises à pied disciplinaires :

Attendu que l'article L. 1333-1 du code du travail relatif au contrôle juridictionnel des sanctions prononcées dispose que : "En cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. / L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. / Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié." ;

- S'agissant de la mise à pied du 20 mars 2014 :

Attendu que M. W... a été sanctionné d'une mise à pied de quatre jours pour avoir été absent de son poste de travail le 22 février 2014 à 21 heures et avoir fait un travail d'une qualité déplorable, faits constatés lors d'un contrôle qualité ;

Attendu que la matérialité de ces deux manquements est établie par le courriel de Mme Rosy D..., agent au sein du service qualité et sécurité de la SAS La Pyrénéenne, en date du 23 février 2014 qui a procédé au contrôle du 22 février 2014 ; que l'intéressée précise que le taux de non-conformité de la rame nettoyée était de 18,89 % ; que ce taux est largement supérieur à celui toléré, lequel s'élève à 5 % ainsi que Mme P..., contrôleur qualité, le précise dans un mail du 10 juin 2014 ;

Attendu que, si M. W..., qui ne conteste pas que son absence a pu être constatée lors du contrôle effectué dans la gare, prétend qu'il était aux toilettes, il ne l'établit pas ; qu'une telle explication est peu crédible dans la mesure où le contrôle a nécessairement duré plus longtemps que celui d'un simple passage aux toilettes ;

Attendu que la faute disciplinaire commise par M. W... le 22 février 2014 est donc constituée et que la sanction prononcée, dont le salarié ne conteste pas la proportionnalité par rapport aux faits commis, n'est pas annulée ;

- S'agissant de la mise à pied du 2 juillet 2014 :

Attendu que M. W... a été sanctionné d'une mise à pied de huit jours en raison de son absence de son poste de travail le 5 juin 2014 à 23 heures et de la qualité de nettoyage déplorable constatée le même jour ;

Attendu que la réalité du second grief formulé est démontrée par la note manuscrite du contrôleur qualité en date du 5 juin 2014, qui qualifie l'état des rames à 23h55 de catastrophique, ainsi que par la fiche de contrôle des deux trains concernés faisant état des taux de non-conformité de 18,10 et 18,97 % ; que le salarié ne peut valablement excuser la mauvaise qualité de son travail par le manque d'éclairage - l'utilisation d'une lampe frontale étant selon lui insuffisante - dans la mesure où la prestation en cause a été réalisée en grande partie de jour et où l'ensemble des employés - contrôleurs compris - travaillent à la lampe frontale lorsqu'il fait nuit et ne s'en sont jamais plaints ; que ces faits sont donc fautifs ;

Attendu que, si la matérialité de l'absence du salarié à l'heure fixée dans la lettre du 2 juillet 2014 n'est quant à elle pas établie - le contrôle ayant été réalisé à 23h55, le seul grief portant sur la très mauvaise qualité du travail accompli, et donc à a négligence du salarié dans l‘exécution des prestations, justifiait la mise à pied prononcée ; que la demande tendant à son annulation est donc rejetée ;

- S'agissant de la mise à pied du 25 novembre 2014 :

Attendu que M. W... a été sanctionné d'une mise à pied de cinq jours pour avoir, le 29 octobre 2014, contrevenu aux règles de sécurité en montant dans un train pour procéder à son nettoyage alors que celui-ci n'avait pas encore été mis sous protection ;

Attendu que l'employeur justifie de la matérialité de ce grief par la production d'un courriel de Mme D... qui précise avoir vu monter M. W... dans la rame alors que celle-ci n'était pas à la disposition du service nettoyage, et donc non sécurisée, et ajoute que le salarié n'a mis un drapeau, destiné à signaliser sa présence, qu'à une extrémité de la rame et non aux deux comme les règles de sécurité le requièrent ; que la fiche de contrôle et une photographie confirment les dires de l'agent de contrôle ; que, si M. W... affirme être monté dans le train ensuite de l'autorisation d'un agent SNCF en raison de la pluie, il en l'établit pas ; que la faute du salarié est donc démontrée et sa demande tendant à l'annulation de la sanction litigieuse, dont la proportionnalité par rapport aux faits commis n'est pas remise en cause, rejetée ;

2) Sur le licenciement :

Attendu que, selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que, si un doute subsiste, il profite au salarié ; qu'ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables ;

Attendu que par ailleurs la lettre de licenciement fixe les limites du litige ;

Attendu qu'en l'espèce M. W... a été licencié par courrier recommandé du 3 août 2015 pour avoir, le 24 juin 2015, omis de respecter les règles de sécurité en utilisant des produits chimiques sans mettre de gants et effectué un travail non satisfaisant car présentant un taux de non-conformité de 18,37 % ;

Attendu que la SAS La Pyrénéenne justifie de la réalité des deux griefs par la production du courriel de Mme T... en date du 25 juin 2015 à 00h59 qui indique avoir constaté, lors du contrôle opéré la veille au soir, que M. W... n'avait pas mis ses gants de protection contre les chimiques et que le train sur lequel l'intéressé était intervenu présentait un taux de non-conformité de 18,37 %, les imperfections étant précisément détaillées ; que M. W..., qui n'invoque aucune disposition particulière qui exigerait la présence de deux agents pour effectuer un contrôle, ne peut valablement arguer de l'irrégularité du constat dressé par Mme D... ; qu'il ne peut davantage excuser ses manquements par des circonstances familiales particulières, alors même que celles-ci ne sont pas démontrées et que des précédents contrôles avaient déjà révélé la mauvaise qualité de son travail ;

Attendu que les manquements commis par M. W... le 24 juin 2015 justifiaient, compte tenu des nombreux précédents disciplinaires du salarié pour des faits de même nature, la rupture de son contrat de travail ; que la demande de l'intéressé tendant à voir déclarer son licenciement comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, de même que celle subséquente de dommages et intérêts pour licenciement abusif, sont rejetées ;

3) Sur les frais irrépétibles :

Attendu qu'il convient pour des raisons tenant à l'équité de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS,
LA COUR,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. C... W... de ses demandes d'annulation des mises à pied disciplinaires des 20 mars, 2 juillet et 26 novembre 2014 et de dommages et intérêts subséquents,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs réformés et ajoutant,

Dit que le licenciement de M. C... W... est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Déboute M. C... W... de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en cause d'appel,

Condamne M. C... W... aux dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier, LePrésident,

A. LESIEUR S. MARIETTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : A2
Numéro d'arrêt : 17/001718
Date de la décision : 28/02/2019
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2019-02-28;17.001718 ?
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