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28/02/2019 | FRANCE | N°16/017358

France | France, Cour d'appel de Douai, B1, 28 février 2019, 16/017358


ARRÊT DU
28 Février 2019

N 288/19

No RG 16/01735 - No Portalis DBVT-V-B7A-PYN2

MD/VG

Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE
en date du
27 Novembre 2015
(RG 14/1219 -section 4)

GROSSE

le 28/02/19

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. O... D...
[...]
Représentant : Me Bénédicte DEGRAVE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉS :

Me T... X... - Mandataire liquidateur de l'associat

ion LE CLIQUENOIS
[...]
Représentant : Me Marie-stéphanie VERVAEKE, avocat au barreau de LILLE

UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE LILLE
[...]
[...]
Représentant :...

ARRÊT DU
28 Février 2019

N 288/19

No RG 16/01735 - No Portalis DBVT-V-B7A-PYN2

MD/VG

Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE
en date du
27 Novembre 2015
(RG 14/1219 -section 4)

GROSSE

le 28/02/19

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. O... D...
[...]
Représentant : Me Bénédicte DEGRAVE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉS :

Me T... X... - Mandataire liquidateur de l'association LE CLIQUENOIS
[...]
Représentant : Me Marie-stéphanie VERVAEKE, avocat au barreau de LILLE

UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE LILLE
[...]
[...]
Représentant : Me François DELEFORGE de la SCP FRANCOIS DELEFORGE-BERNARD FRANCHI, avocat au barreau de DOUAI

DÉBATS : à l'audience publique du 11 Décembre 2018

Tenue par Monique DOUXAMI
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annick GATNER

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Monique DOUXAMI : PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Patrick SENDRAL : CONSEILLER
Caroline PACHTER-WALD : CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 28 Février 2019,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Monique DOUXAMI, Président et par Annie LESIEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Monsieur O... D... a été embauché par l'association LE CLIQUENOIS en qualité d'adjoint de direction par contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2005.

Par deux avenants successifs, il a été promu directeur adjoint à compter du 1er juillet 2005 puis directeur de l'association à compter du 1er janvier 2006.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 janvier 2014, il a été convoqué à un entretien préalable fixé au 14 janvier suivant et il s'est vu signifier une mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 janvier 2014, il s'est vu notifier son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Parallèlement, l'association LE CLIQUENOIS a été placée en redressement judiciaire en octobre 2013 puis en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Lille du 4 avril 2014 qui a également désigné Maître T... en qualité de liquidateur judiciaire.

Contestant le bien fondé de son licenciement et sollicitant la fixation de sa créance au passif de la procédure collective de l'association LE CLIQUENOIS à diverses sommes au titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire et congés payés y afférents, dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, rappel d'indemnité de licenciement, rappel de salaire sur préavis et congés payés y afférents, rappel de salaire sur mise à pied et congés payés y afférents, remboursement part mutuelle pour défaut de cotisation, rappel de salaire (RTT) et congés y afférents, rappel de repos compensateur et congés payés y afférents, il a saisi le conseil de prud'hommes de Lille qui, par jugement du 27 novembre 2015 :
-a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse ;
-a fixé sa créance au passif de la procédure collective de l'association LE CLIQUENOIS à la somme de 18 699,20 euros au titre de rappel d'indemnité de licenciement ;
-l'a débouté du surplus de ses demandes ;
-a débouté Maître T... de sa demande reconventionnelle fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
-a dit que le jugement était opposable au CGEA qui n'intervenait que dans le cadre de sa garantie légale et réglementaire ;
-a laissé à chacune des parties la charge de ses dépens.

Par déclaration transmise au greffe par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 2 mai 2016, Monsieur O... D... a relevé appel de ce jugement.

Il demande à la cour de :
-infirmer le jugement déféré ;
-dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;
-fixer sa créance au passif de la procédure collective de l'association LE CLIQUENOIS aux sommes suivantes :
-220 euros au titre de rappel de salaire sur mise à pied (prime de sujétion spéciale) et 22 euros au titre des congés payés y afférents,
-165 288 au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,
-24 060,11 euros au titre d'indemnité de licenciement,
-841,82 euros au titre de remboursement de part mutuelle pour défaut de cotisation,
-5540 euros au titre de salaire sur préavis et 554 euros au titre des congés payés y afférents,
-1374 euros au titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
-21 997,74 euros au titre de rappel de salaire ( RTT) et 2 199 euros au titre des congés payés y afférents,
-9 665,70 euros au titre du repos compensateur et 966 euros au titre des congés payés y afférents ;
-dire que les condamnations seront opposables au CGEA qui sera tenu d'en garantir le montant.

Maître T..., ès qualités, demande à la cour de :
-confirmer le jugement déféré sauf en ses dispositions sur l'indemnité de licenciement et constater que Monsieur O... D... a été rempli de ses droits de ce chef ;
-débouter Monsieur O... D... de l'ensemble de ses demandes ;
-condamner Monsieur O... D... au paiement de la somme de 1000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'Unedic délégation AGS CGEA de Lille demande à la cour de :
-confirmer le jugement déféré et débouter Monsieur O... D... de l'ensemble de ses demandes;
-lui donner acte qu'il a procédé à des avances au profit de Monsieur O... D... pour un montant de 75 096 euros ;
-en cas d'infirmation de la décision, condamner Monsieur O... D... à rembourser les sommes avancées au titre de l'exécution du jugement du conseil de prud'hommes.

Elle a également rappelé les conditions et limites de sa garantie.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement

En application des articles L 1232-1 et L 1235-1 du code du travail, tout licenciement personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. En cas de litige, il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi libellée : « Depuis près de deux ans maintenant, vous avez un comportement tout a fait inadapté en votre qualité de Directeur du CLIQUENOIS et ce à l'encontre d'une des salariées, Madame F... E....
A de nombreuses reprises, nous avons pu obtenir des entretiens avec vous-même sur ce point et ce depuis le mois de janvier 2012.
En date du 8 avril 2013, Madame E... nous a confirmé la reprise par vos soins d'envoi de mails sur sa boite personnelle, l'utilisation de photos personnelles sans son consentement sur une page Facebook.
Il s'agit de faits répétés portant atteinte à sa dignité.
Madame E... a même écrit à la médecine du travail et a été mise en arrêt maladie à de nombreuses reprises compte tenu de son traumatisme.
En date du 23 avril 2013, vous avez été convoqué à un entretien avec les membres du bureau de l'association pour solliciter toutes explications relatives à votre comportement.
Une sanction de mise à pied d'une journée vous a été infligée par le bureau le 7 mai 2013 et nous pensions sincèrement que cette sanction vous ferait prendre conscience de l'impérieuse nécessité de modifier votre comportement à l'égard de cette salariée.
Néanmoins et depuis lors, votre comportement a perduré et Madame E... a du, à nouveau, se mettre en arrêt de travail compte tenu de votre attitude à son égard.
Lors de son retour, le 6 décembre 2013, vous avez à nouveau envoyé un mail personnel à l'intention de Madame E..., lequel l'a, à nouveau déstabilisé.
C' est d' ailleurs en ce sens que le contrôleur du travail a convoqué Monsieur Franck DUBOIS, Président, à l'effet d'obtenir toute explication, mettant en cause la responsabilité de I' Association.
Vous comprendrez que de tels agissements renouvelés et répétés malgré nos mises en garde et sanctions ne sont absolument pas tolérables.
Ils caractérisent un véritable harcèlement à l'égard d'une des salariés de l'association, sur laquelle vous avez autorité en votre qualité de directeur.
A l'évidence, ces agissements altèrent sa santé physique. Ils provoquent un profond malaise au sein de l'équipe et perturbent gravement la bonne marche de l'Association.
Les explications recueillies auprès de vous lors de votre entretien, n' ont absolument pas permis de modifier cette appréciation.
Nous n'avons des lors d'autre choix que de procéder à votre licenciement pour cause réelle et sérieuse. »

Monsieur O... D... soutient que :
-l'association LE CLIQUENOIS ne produit aucun élément établissant le renouvellement des faits et le mail du 6 décembre 2013 qu'il communique lui-même n'est en rien constitutif d'un acte de harcèlement ;
-ce mail du 6 décembre 2013 a été sanctionné à deux reprises par son employeur les 13 décembre 2013 et 4 janvier 2014 de sorte qu'il ne peut être sanctionné à nouveau par un licenciement ;
-subsidiairement, dans l'hypothèse où il serait considéré que ce mail n'aurait pas été sanctionné précédemment, il ne peut pas être sanctionné par un licenciement au regard des dispositions de la convention collective alors applicables qui prévoyaient : « sauf en cas de faute grave, il ne pourra y avoir de mesure de licenciement à l'égard d'un salarié si ce dernier n'a pas fait l'objet précédemment d'au moins deux sanctions citées ci-dessus ».

Maître T... fait valoir que :
-le changement de lieu de travail notifié le 13 décembre 2013 constitue, non pas une sanction, mais une mesure urgente qui s'imposait pour faire cesser le comportement de Monsieur O... D... à l'égard de Madame E... ;
-Monsieur O... D... a fait l'objet de deux sanctions disciplinaires avant le licenciement consistant en une mise à pied effectuée le 7 mai 2013 et des observations notifiées le 13 décembre 2013.

Les éléments produits aux débats font apparaître que :
-Par courrier remis en mains propres le 3 mai 2013, Monsieur O... D... a fait l'objet d'une mise à pied disciplinaire d'une journée, qu'il a effectuée le 7 mai suivant, pour les faits suivants : « Par de nombreuses mises en garde, notamment en mars 2012, je vous avais rappelé vos obligations strictement professionnelles à l'égard d'une de vos salariées de l'association, Madame F... E....
Vous vous étiez engagé à vous garder de toute démarche inopportune à son égard et à agir dans un cadre strictement professionnel.
Or, au cours du mois de d'avril 2013, j'ai reçu un nouveau courrier de cette salariée, d'un délégué syndical, Monsieur J... mais également de la chef de service m' informant de ce que vos agissements reprenaient à son égard, à savoir: l'affichage de photographies de cette salariée dans votre bureau, la multiplication d'emails non professionnels à son encontre et l'insertion d'une photo de Madame E... prise lors d'une activité privée et insérée sur la page Facebook de l'association LE CLIQUENNOIS.
Ces agissements entrainent une angoisse chez cette salariée qui ne saurait être tolérée.
J'estime donc que vous avez commis une faute contraire à vos obligations en qualité de Directeur de I' Association ainsi qu' au règlement intérieur de l'association.
Cette conduite met en cause la bonne marche du service et les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien du 29.04.2013 n'ont plus permis de modifier notre appréciation des faits. »
-Par courrier du 17 mai 2013, Monsieur O... D... a contesté, non les faits reprochés mais la sanction, aux motifs que la multiplication d'emails personnels n'était pas de nature à porter préjudice et qu'il avait pris toute la mesure de la situation pour aménager des conditions de travail favorables à Madame F... E..., en raison des propos qu'elle avait rapportés ;
-Le 13 décembre 2013, l'association LE CLIQUENOIS a adressé le courrier suivant à Monsieur O... D... : « Par de nombreuses mises en garde, depuis mars 2012, et une sanction infligée en mai 2013, je vous avais rappelé vos obligations strictement professionnelles à l'égard d'une de vos salariées de l'association, Madame F... E....
Vous vous étiez engagé notamment à vous abstenir de tout envoi de courrier électronique à son endroit, tant à titre personnel que professionnel, et de procéder à la transmission de toute information professionnelle par l'intermédiaire de la Chef de service de notre association.
Or, j'ai reçu hier copie d'un courriel, et de mentions manuscrites de votre part sur le cahier de liaison des éducateurs à l'endroit de Madame E....
Vous le savez ces agissements portent atteinte à la santé de Madame E....
Aussi, à titre conservatoire, compte tenu de la situation juridique de notre association, j'ai décidé :
-De transférer, sans délais, le siège de votre bureau de direction au CHRS « le bon meunier », sis, à Marquette lez Lille
-De vous interdire l'accès du CHRS Michel Hanscotte pendant les heures de travail de Madame E...
-De vous rappeler l'interdiction absolue de tout envoi de courriel à l'intention de Madame E..., et la transmission de toute information professionnelle par l'intermédiaire de la Chef de Service.
J'espère que ces ultimes dispositions vous permettront enfin de prendre conscience de la gravité des incidences causées par votre attitude sur la santé de votre salariée et des risques encourus pour vous- même ».

Un seul fait ne saurait justifier successivement deux mesures disciplinaires.

Par ailleurs, selon l'article 05.03.2 de la convention collective nationale des établissement privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 décembre 1951, dans sa version alors applicable, l'observation, l'avertissement et la mise à pied dûment motivés par écrit sont prononcés conformément au règlement intérieur de l'établissement qui doit, notamment, préciser les garanties légales et conventionnelles des salariés en matière de procédure disciplinaire.
A sa demande, le salarié en cause sera entendu par l'employeur ou son représentant en présence du délégué du personnel ou d'une autre personne de son choix appartenant à l'entreprise. Toute sanction encourue par un salarié et non suivie d'une autre dans un délai maximal de 2 ans sera annulée : il n'en sera conservé aucune trace. Sauf en cas de faute grave, il ne pourra y avoir de mesure de licenciement à l'égard d'un salarié, si ce dernier n'a pas fait l'objet précédemment d'au moins 2 sanctions citées ci-dessus. En cas de licenciement, la procédure légale doit être respectée.

Le seul fait visé dans la lettre de licenciement comme caractérisant la persistance du comportement inadapté de Monsieur O... D... vis à vis de Madame F... E... est le mail du 6 décembre 2013.

A supposer ce fait établi comme tel, les éléments qui précédent font apparaître que :
-soit il a déjà été sanctionné par le changement d'affectation notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 décembre 2013, ce qui prohibe toute nouvelle sanction et partant le prononcé d'un licenciement ;
-soit il n'a pas été sanctionné par le changement d'affectation notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception qui ne constitue qu'une mesure conservatoire prise dans l'attente de l'engagement d'une procédure disciplinaire et Monsieur O... D... n'a alors pas fait l'objet des deux mesures disciplinaires constituant le préalable conventionnel nécessaire au prononcé d'un licenciement autre que pour faute grave.

Il s'ensuit qu'en toute hypothèse, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En conséquence, le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Les documents communiqués, et en particulier les bulletins de paie et l'attestation Pôle emploi, établissent que la rémunération mensuelle moyenne brute de Monsieur O... D... sur les 12 mois ayant précédé la lettre de licenciement s'est élevée à 6142,47 euros (salaire annuel brut : 69720,20 euros (non compris la somme de 10 069 euros correspondant aux rappels de permanence à domicile des années 2010 et 2011 payés en septembre 2013) + prime à la périodicité : 3 989, 46 euros = 73 709 66 : 12).

Compte tenu de l'ancienneté de Monsieur O... D... au moment du licenciement (9 ans), de son âge (55 ans) et des justificatifs fournis sur sa situation postérieure, le préjudice résultant de la perte injustifiée de son emploi sera exactement réparé par l'attribution de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 63 000 euros.

En conséquence, sa créance sera fixée à cette somme au passif de la procédure collective et le jugement déféré sera infirmé en ce sens.

La rémunération mensuelle moyenne brute de Monsieur O... D... sur les trois derniers mois s'est élevée à 6149,35 euros (5811,06 + 5811,06 + 5828,57 + 997,36 (3989,46 : 12 X 3)).

L'indemnité de licenciement, calculée sur ce fondement qui est légèrement plus avantageux que celui de la rémunération mensuelle moyenne brute sur les douze derniers mois, s'élève à 57 865,38 euros (6149,35 X 9,41).

Compte tenu de somme de 41 685 euros déjà perçue à ce titre, Monsieur O... D... reste créancier d'une somme de 16 180,38 euros.

En conséquence, sa créance sera fixée à cette somme au passif de la procédure collective et le jugement déféré sera infirmé en ce sens.

Monsieur O... D... est aussi fondé à voir fixer sa créance au passif de la procédure collective aux sommes suivantes :
-5540 euros au titre de rappel sur indemnité compensatrice de préavis, correspondant au montant qu'il sollicite de la différence sur la période de préavis entre les salaires mensuels bruts perçus de 4426 euros et ceux auxquels il aurait pu prétendre s'il avait travaillé qu'il limite à 5811 euros ;
-554 euros au titre des congés payés y afférents ;
-220 euros au titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire correspondant à la prime de sujétion spéciale non payée en janvier 2014 qui constitue un élément de salaire au regard de l'avenant no2 du contrat de travail, non modifié sur ce point par les suivants, peu important la réalisation ou non d'astreinte pendant le mois en question ;
-22 euros au titre des congés payés y afférents.

En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en ce sens.

Sur le rappel de congés payés, le remboursement de la part mutuelle, le rappel de RTT et les congés payés y afférents et le rappel de repos compensateur et les congés payés y afférents

Il résulte des explications concordantes des parties et des pièces communiquées que Monsieur O... D... a perçu une indemnité compensatrice de congés payés correspondant à 10 jours acquis et non pris lors de l'exercice du 1er juin 2013 au 30 mai 2014.

Il prétend que 5 jours supplémentaires lui seraient dus car les comptes ont été arrêtés sur la base de 25 jours acquis au mois de mars 2014.

Toutefois, le bulletin de paie du mois en question fait apparaître que les comptes ont en réalité été effectués sur la base de 30 jours acquis sur la totalité de l'exercice de sorte que Monsieur O... D... est mal fondé à revendiquer l'acquisition de 5 jours de congés supplémentaires pour les mois d'avril et mai 2014.

En conséquence, il sera débouté de sa demande et le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

* * *

Dans la lettre de licenciement, l'association LE CLIQUENOIS a indiqué que Monsieur O... D... pouvait garder le bénéfice des garanties des couvertures complémentaires santé et prévoyance pendant 9 mois au plus à compter de la cessation du contrat de travail.

Monsieur O... D... soutient qu'à défaut pour l'association LE CLIQUENOIS d'avoir réglé les cotisations mutuelle pour l'année 2013 et la suivante, il n'a pas été couvert de sorte que son ancien employeur doit prendre en charge les sommes non remboursées qui s'élèvent à 841,82 euros.

Maître T... fait valoir que les documents fournis par Monsieur O... D... ne permettent pas de prouver que l'association LE CLIQUENOIS a cessé de cotiser pour lui à la mutuelle et que les bulletins de paie de l'année 2013 et des trois premiers mois de l'année 2014 mentionnent les cotisation salariale et patronales pour la mutuelle.

Les bulletins de paie de l'année 2013 et des deux premiers mois de l'année 2014 portent effectivement mention des cotisations salariale et patronale à la mutuelle. Toutefois, ces mentions n'établissent pas leur paiement effectif et les échanges de mails, notamment avec la mutuelle, communiqués par Monsieur O... D... suffisent à démontrer qu'il n'en a rien été.

Pour autant, les autres documents produits aux débats par Monsieur O... D... ne suffisent à justifier ni de la réalité de tous les soins médicaux qu'il dit avoir acquittés pendant la période qui aurait du être couverte par la mutuelle, ni du montant de ces soins qui aurait été pris en charge par celle-ci.

En conséquence, Monsieur O... D... sera débouté de sa demande et le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

* * *
Monsieur O... D... explique que son contrat de travail a pris fin sans qu'il ait pu prendre 79,5 jours de RTT et que le président a donné son accord à la régularisation des 70 jours acquis et non pris fin décembre 2013, raison pour laquelle ils ont été reportés sur les bulletins de paie de 2014.

Maître T... répond que :
-l'accord du 2 décembre 2011 ne prévoit pas le paiement des RTT non pris ;
-en l'absence de disposition dans l'accord collectif, les jours de RTT non pris sont perdus et ne peuvent faire l'objet d'une contre partie financière.

L'absence de prise des jours de RTT n'ouvre pas droit à indemnité, sauf si cette situation est imputable à l'employeur ou si un accord collectif le prévoit.

En l'espèce, la réalité et le quantum des RTT que Monsieur O... D... n'a pas pu prendre avant son licenciement ne sont pas contestés.

Il n'est pas allégué ni a fortiori justifié que cette situation est imputable à l'association LE CLIQUENOIS.

L'accord de branche secteur sanitaire et social et médico social à but non lucratif du 1er avril 1999 et les modalités d'application du dit accord concernant l'aménagement et la réduction du temps de travail au CHRS LE CLIQUENOIS du 2 décembre 2001 ne comportent pas de dispositions prévoyant une contrepartie financière à la non prise des jours de RTT.

Dans ces conditions, Monsieur O... D... ne saurait obtenir le paiement des jours de RTT non pris avant la rupture de son contrat de travail.

En conséquence, sa demande sera rejetée et le jugement sera confirmé de ce chef.

* * *
Monsieur O... D... soutient que:
-il a effectué 330 heures supplémentaires durant l'hiver 2010-2011 qui ont été provisionnées sur un CET à hauteur d'une somme de 15 723, 19 euros, incluant les charges patronales ;
-le président de l'association a donné son accord le 5 septembre 2013 au paiement de ces heures qui n'a cependant jamais été effectué.

Maître T... fait valoir que :
-bien que Monsieur O... D... n'indique pas exactement les mois pour lesquels il revendique des heures supplémentaires, sa demande est prescrite ;
-Monsieur O... D... ne démontre pas avec précision comment se « décortique » la somme de 15 723,19 euros.

Faute d'éléments justifiant que la somme de 15 723,19 euros a été versée sur un CET, la demande constitue une demande de paiement d'heures supplémentaires.

Avant l'entrée en vigueur de la loi no 2013-504 du 14 juin 2013, l'article L. 3245-1 du code du travail applicable en matière de prescription de créance salariale renvoyait aux dispositions de l'article 2224 du code civil qui disposait : les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans, à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait du connaître les faits lui permettant de l'exercer.

L'article L. 3245-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n 2013-504 du 14 juin 2013 dispose : L 'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait du connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

L'article 21-V de la loi du 14 juin 2013 prévoit que les nouvelles dispositions s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Il résulte de ces textes que lorsque la prescription quinquennale a commencé à courir antérieurement à la date de promulgation de la loi du 14 juin 2013, les nouveaux délai de prescription s'appliquent à compter de la date de promulgation, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

En l'absence d'autre précision que l'hiver 2010-2011, la date d'exigibilité de la créance d'heures supplémentaires se situe entre le 21 décembre 2010 et le 21 mars 2011.

Monsieur O... D... ayant introduit sa demande en paiement le 14 août 2014, elle était recevable au regard des dispositions de l'article L 3245-1 du code du travail alors applicable (prescription acquise au plus tôt au 21 décembre 2015).

Elle l'est restée après la promulgation de la loi du 14 juin 2013.

En conséquence, la demande n'est pas prescrite.

Selon l'article L. 3171-4, en cas de litige relatif à l'existence du nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Ainsi, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production de tous éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en apportant le cas échéant la preuve contraire.

Monsieur O... D... produit aux débats :
- les comptes de l'association LE CLIQUENOIS pour l'exercice clos le 31 décembre 2012 qui mentionnent la somme de 15 723, 19 euros sous la rubrique « provision pour charges » sur la ligne « urgence » avec la précision suivante : « provision pour heures supplémentaires réalisées par le directeur pour le secteur urgence hivernale » ;
-la demande en paiement des heures supplémentaires en cause qu'il a adressée le 3 septembre 2013 au directeur de l'association LE CLIQUENOIS qui lui a répondu le 5 septembre suivant par un mail en ces termes « Bon pour accord pour les heures dues. Cela concerne t-il d'autres salariés? ».

Ces éléments sont suffisamment précis pour étayer sa demande.

Maître T... ne communique aucun document de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par Monsieur O... D....

A défaut pour Maître T... de satisfaire à la preuve qui lui incombe, il sera fait droit à la demande de Monsieur O... D... en paiement d'heures supplémentaires et de congés payés y afférents..

En conséquence, sa créance sera fixée aux sommes qu'il sollicite au passif de la procédure collective et le jugement déféré sera infirmé en ce sens.

Sur les autres demandes

En application des dispositions de l'article 1235-4 du code du travail, la créance des organismes concernés sera fixée au passif de la procédure collective de l'association LE CLIQUENOIS au montant des indemnités chômage versées à Monsieur O... D... depuis son licenciement dans la limite de 6 mois.

Maître T... sera débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles d'appel, le rejet de sa demande au titre des mêmes frais pour la première instance étant confirmé.

Maître T..., és qualités, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt sera déclaré opposable à l' Unedic délégation AGS CGEA de Lille qui sera tenue à garantie dans les limites et plafonds prévus aux articles L3253-6 et D3253-5 du code du travail.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire mis à disposition par les soins du greffe,

Infirme le jugement rendu le 27 novembre 2015 par le conseil de prud'hommes de Lille en ses dispositions sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse et la fixation de la créance de Monsieur O... D... au passif de la procédure collective de l'association LE CLIQUENOIS au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, rappel sur indemnité de licenciement, rappel sur indemnité de préavis et congés payés y afférents, rappel de salaire sur mise à pied conservatoire et congés payés y afférents, rappel d'heures supplémentaires et frais irrépétibles et statuant à nouveau;

Dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse;

Fixe la créance de Monsieur O... D... dans la procédure collective de l'association LE CLIQUENOIS aux sommes suivantes :
-63000 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-16180,38 euros au titre de rappel sur indemnité de licenciement;
-5540 euros au titre de rappel sur indemnité compensatrice de préavis et 554 euros au titre des congés payés y afférents ;
-220 euros au titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire et 22 euros au titre des congés payés y afférents ;
-9665,70 euros au titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires et 966 euros au titre des congés payés y afférents.

Confirme le surplus ;

Y ajoutant,

Déboute Maître T..., en qualités de liquidateur judiciaire de l'association LE CLIQUENOIS, de sa demande au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Fixe la créance des organismes concernés au passif de la procédure collective de l'association LE CLIQUENOIS au montant des indemnités chômage versées à Monsieur O... D... depuis son licenciement dans la limite de 6 mois;

Déclare le présent arrêt opposable à l' Unedic délégation AGS CGEA de Lille qui sera tenue à garantie dans les limites et plafonds prévus aux articles L3253-6 et D3253-5 du code du travail ;

Condamne Maître T..., en qualité de liquidateur judiciaire de l'association LE CLIQUENOIS , aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, Le président,

A. LESIEUR M. DOUXAMI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : B1
Numéro d'arrêt : 16/017358
Date de la décision : 28/02/2019
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2019-02-28;16.017358 ?
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