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28/02/2019 | FRANCE | N°16/016018

France | France, Cour d'appel de Douai, A3, 28 février 2019, 16/016018


ARRÊT DU
28 Février 2019

N 306/19

No RG 16/01601 - No Portalis DBVT-V-B7A-PXRZ

PR/CH

Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCIENNES
en date du
29 Mars 2016
(RG 14/00627 -section )

GROSSE

le 28/02/19

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. A... C...
[...]
Non comparant et ayant pour conseil Me Blandine OLIVIER-DENIS, avocat au barreau de VALENCIENNES

INTIMÉS :

Me B... M... - Man

dataire liquidateur de Société ASSOCIATION CONVERGENCES PLURIELLES
[...]
Non comparant non représenté
AR de convocation signé le 25 octobre 2018

UNEDIC DE...

ARRÊT DU
28 Février 2019

N 306/19

No RG 16/01601 - No Portalis DBVT-V-B7A-PXRZ

PR/CH

Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCIENNES
en date du
29 Mars 2016
(RG 14/00627 -section )

GROSSE

le 28/02/19

République Française
Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. A... C...
[...]
Non comparant et ayant pour conseil Me Blandine OLIVIER-DENIS, avocat au barreau de VALENCIENNES

INTIMÉS :

Me B... M... - Mandataire liquidateur de Société ASSOCIATION CONVERGENCES PLURIELLES
[...]
Non comparant non représenté
AR de convocation signé le 25 octobre 2018

UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE LILLE
[...]
Représenté par Me François DELEFORGE, avocat au barreau de DOUAI substitué par Me CAMUS-DEMAILLY

DÉBATS : à l'audience publique du 22 Janvier 2019

Tenue par Patrick REMY
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Valérie COCKENPOT

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Sabine MARIETTE : PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Béatrice REGNIER : CONSEILLER
Patrick REMY : CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 28 Février 2019,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Sabine MARIETTE, Président et par Annie LESIEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

M. A... C... a été embauché par l'association CONVERGENCES PLURIELLES à compter du 18 août 2014 dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée en qualité d'encadrant technique dans les métiers de la mécanique.
Le contrat de travail prévoyait en son article 1 une période d'essai d'une durée de 60 jours de travail effectif.

La relation de travail était soumise à la convention collective nationale des ateliers et chantiers d'insertion.

Par courrier en date du 3 octobre 2014, M. C... s'est vu notifier la fin de sa période d'essai.

Par courrier du 7 octobre 2014 qu'il a adressé à l'association, M. C... a contesté cette rupture et demandé les griefs qui lui étaient reprochés.

Contestant la rupture de sa période d'essai et soutenant que celle-ci était abusive, M. C... a saisi, le 27 novembre 2014, le conseil de prud'hommes de Valenciennes qui, par jugement du 29 mars 2016 l'a débouté de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné à verser à l'Association CONVERGENCES PLURIELLES la somme de 50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à payer au Trésor Public la somme de 50 euros au titre de l'amende civile par application des dispositions de l'article 32.1 du code de procédure civile.

M. C... a interjeté appel de ce jugement par déclaration enregistrée le 25 avril 2016.

Par jugement du 9 novembre 2017, le Tribunal de Grande Instance de Valenciennes a prononcé la liquidation judiciaire de l'association CONVERGENCES PLURIELLES et nommé Me M... B... en qualité de mandataire liquidateur.

Aux termes de ses conclusions et de sa note en délibéré, M. C... demande à la cour de :

Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Valenciennes dans toutes ses dispositions,

Dire la rupture de son contrat de travail intervenue le 18 octobre 2014 abusive,

Dire n'y avoir ni abus d'ester en justice, ni manoeuvres dilatoires,

En conséquence,

Fixer sa créance dans la liquidation judiciaire de l'association CONVERGENCES PLURIELLES aux sommes suivantes :

– 14 040 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,
– 3 000 euros à titre de préjudice moral,

Dire l'arrêt à intervenir opposable au mandataire et au CGEA.

Aux termes de conclusions développées oralement à l'audience et de sa réponse à la note en délibéré, l'AGS CGEA de Lille demande à la cour de :

A titre principal :

Constater alors que le jugement a été notifié, qu'aucune des parties n'a accompli de diligences pendant deux ans,

Dire et juger que l'instance est périmée.

A titre subsidiaire :

Confirmer la décision.

Débouter M. C... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

En toute hypothèse

Dire que l'arrêt à intervenir ne sera opposable à l'AGS que dans la limite de sa garantie légale telle que fixée par les articles L.3253-6 et suivants du code du travail (ancien art. L 143.11.1 et suivants du Code du Travail) et des plafonds prévus à l'article D.3253-5 du code du travail (ancien art. D 143.2 du Code du Travail), et ce toutes créances du salarié confondues.

Dire et juger que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement, conformément aux dispositions de l'article L.3253-20 du Code du Travail.

Par courrier recommandé avec AR qu'il a reçu le 25 octobre 2018, Me B... M... a été convoqué, es qualité de mandataire liquidateur de l'association CONVERGENCES PLURIELLES, à l'audience du 22 janvier 2019, mais n'a ni conclu, ni comparu le 22 janvier 2019.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la péremption d'instance :

L'AGS CGEA de Lille fait valoir que le jugement rendu le 29 mars 2016 par le conseil de prud'hommes a été frappé d'appel le 25 avril 2016 et que faute pour M. C... de justifier de l'existence de diligences entre le 25 avril 2016 et le 25 avril 2018, par le dépôt de conclusions, l'instance apparaît périmée.

Aux termes de l'article R.1452-8 du code du travail, en matière prud'homale, l'instance n'est périmée que lorsque les parties s'abstiennent d'accomplir, pendant le délai de deux ans mentionné à l'article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction.

La cour relève d'abord que l'AGS CGEA ne fait état d'aucune diligence qui aurait été expressément mise à la charge des parties par la juridiction, de telle sorte que la péremption ne peut être encourue.

La cour ajoute ensuite que l'intimée ne saurait en tout état de cause se fonder, pour invoquer la péremption, sur l'ordonnance du 25 avril 2016 invitant les parties à respecter un calendrier de procédure.

En effet, ce document qui se présente comme une ordonnance prononcée par le magistrat chargé d'instruire l'affaire et prise sous couvert des dispositions de l'article 940 du code de procédure civile, ne comporte nullement l'identification et la signature du magistrat qui en serait l'auteur. Elle ne peut en conséquence être considérée comme une décision émanant de la juridiction.

Il s'agit d'un simple calendrier de procédure adressé par le greffe avant la convocation des parties devant la cour, destiné à faciliter les échanges entre les parties et la cour et qui, faute d'émaner de la juridiction ne répond pas aux exigences de l'article R 1452-9 et ne fait pas courir le délai de péremption.

Il convient en conséquence d'écarter cette exception de procédure tirée de la péremption.

Sur la rupture de la période d'essai :

M. C... soutient que la rupture de la période d'essai est abusive dès lors qu'il a été embauché suite à la demande de l'association CONVERGENCES PLURIELLES qui est même venue chez lui faire des reportages et l'inciter à venir travailler pour eux comme le confirme l'attestation de son épouse. En outre, M. C... précise qu'il n'a jamais reçu aucun reproche de l'Association qui était même satisfaite de son travail, de sorte qu'il ne comprend pas la motivation de ce licenciement, la rupture s'avérant du coup sans cause réelle et sérieuse et abusive.

L'AGS CGEA de Lille soutient au contraire que la rupture de l'essai n'est en rien abusive et que M. C..., qui confond licenciement et rupture de l'essai, n'apporte la preuve qui lui incombe de l'abus de la rupture, le courrier de son épouse n'étant ni probant, ni significatif. En outre, l'essai ayant été rompu près de deux mois après le début du contrat de travail, la rupture n'a pas été précipitée, l'association ayant eu le temps d'apprécier les capacités professionnelles de M. C.... Ce dernier doit d'autant plus être débouté qu'il ne prouve pas le préjudice qu'il aurait subi.

Aux termes de l'article L.1231-1 al. 2 du code du travail, les règles relatives à la résiliation du contrat de travail à durée indéterminée ne sont pas applicables pendant la période d'essai, de sorte que l'employeur a le droit de rompre l'essai sans donner de motif.

Le salarié qui soutient que la rupture est abusive doit apporter la preuve de l'abus, la charge de la preuve étant allégée quand il invoque une rupture discriminatoire.

En outre, la période d'essai étant destinée à permettre à l'employeur d'apprécier la valeur professionnelle du salarié, sa rupture est abusive lorsqu'est motivée par un motif étranger à la personne du salarié.
De même, les circonstances de la rupture, par exemple son caractère précipité par rapport aux capacités du salarié à apprécier, peuvent révéler une attitude fautive de l'employeur et donc un abus.

En l'espèce, la cour relève d'abord que M. C... ne conteste ni l'existence de la période d'essai, ni le respect par l'employeur du délai légal de prévenance, mais seulement la rupture elle-même dont il soutient qu'elle est abusive.
A cet égard, le courrier du 3 octobre 2014 qui a mis fin à la période d'essai de M. C... était libellé de la façon suivante :
«Le contrat à durée indéterminée qui nous lie stipule une période d'essai de 60 jours qui a débuté le 18 août 2014. Nous avons décidé de mettre n à cette période d'essai. En application des dispositions légales, vous bénéficiez d'un délai de prévenance de 2 semaines entre 1 et 3 mois de présence. Vous cesserez de faire partie de nos effectifs le 18 octobre 2014. A cette date, nous vous remettrons votre certificat de travail, l'imprimé Assedic et votre reçu pour solde de tout compte. Veuillez agréer, Monsieur, mes salutations distinguées››.

La cour relève d'abord que la rupture de la période d'essai par l'employeur n'étant pas un licenciement et n'ayant pas à être motivée, cette lettre de rupture est conforme aux exigences légales.
C'est ainsi à tort et de façon inopérante que M. C... affirme que ne s'étant jamais vu adresser aucun reproche par la société, il ne comprend toujours pas la motivation de ce licenciement, si bien que sa rupture est dénuée de cause réelle et sérieuse.

La cour relève ensuite que pour prouver l'abus, M. C... produit une attestation de son épouse, datée du 5 janvier 2015 par laquelle celle-ci certifie que «M. H..., directeur du garage solidaire est venu plusieurs fois voir mon époux sur son lieu de travail afin qu'il accepte sa proposition d'emploi et ceci avec différentes personnes tout d'abord plusieurs fois seul, puis avec un salarié de convergences pluriels, puis avec un cameraman qui faisait un reportage, puis avec de futurs associés, selon ses dires la place était définitive et les deux mois d'essais n'étaient que formalité».

La cour considère que cette attestation n'est pas probante et qu'à supposer même qu'elle le soit, elle ne fait état que de conditions dans lesquelles M. C... a été embauché par l'association.

Or, il ne ressort de ces conditions aucun abus de la rupture de la période d'essai, d'autant moins que cet abus doit être apprécié au moment de la rupture.

A cet égard, la cour précise que la rupture de l'essai étant intervenue plus de 6 semaines après la conclusion du contrat de travail, elle ne peut être considérée comme précipitée, l'association ayant eu le temps d'évaluer les compétences du salarié.

La cour en conclut que M. C..., qui n'allègue aucune discrimination, n'apporte pas la preuve de l'abus de la rupture de sa période d'essai, ni du point de vue des circonstances de la rupture, ni du point de vue de ses motifs étrangers à sa personne, de telle sorte que la rupture de la période d'essai est valable.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. C... de toutes ses demandes par rapport à la rupture de sa période d'essai, aussi bien celle de dommages et intérêts pour rupture abusive que celle en réparation du préjudice moral qu'il aurait subi du fait de cet abus.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Le jugement sera confirmé sur les dépens, mais infirmé sur l'article 700 du code de procédure civile.
La cour juge qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles qu'elles ont engagés en première instance, ainsi qu'en cause d'appel.
En outre, M. C... sera condamné aux entiers dépens d'appel.

Sur l'amende civile :

La cour considère que même si M. C... avait une parfaite connaissance non seulement de la période d'essai qui était conclue dans son contrat, mais aussi de la possibilité que son employeur avait de rompre son contrat pendant cette période d'essai sans se justifier, il conservait malgré tout le droit de contester cette rupture, notamment en prouvant son caractère abusif.
Le fait que M. C... ne soit pas parvenu à prouver cet abus ne suffit pas à considérer qu'il a agi en justice de manière dilatoire ou abusive au sens de l'article 32-1 du code de procédure civile.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné M. C... à une amende civile.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement,

Rejette l'exception de procédure tirée de la péremption,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Valenciennes du 29 mars 2016, sauf en ce qu'il condamne M. A... C... à verser à l'Association CONVERGENCES PLURIELLES la somme de 50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à verser au Trésor Public une amende civile de 50 euros,

Statuant à nouveau de ces chefs infirmés et Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en cause d'appel,
Dit n'y avoir lieu à amende civile,

Déboute M. A... C... de l'ensemble de ses demandes,

Condamne M. A... C... aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

A. LESIEUR S. MARIETTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : A3
Numéro d'arrêt : 16/016018
Date de la décision : 28/02/2019
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2019-02-28;16.016018 ?
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