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20/12/2018 | FRANCE | N°17/04500

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 20 décembre 2018, 17/04500


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 20/12/2018



***





N° de MINUTE :18/

N° RG : 17/04500 - N° Portalis DBVT-V-B7B-Q35F



Jugement (N° 2016002853) rendu le 13 juin 2017 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Ordonnance rendue le 22 février 2018 par la cour d'appel de Douai



APPELANTS



Me [N] [K] commissaire à l'exécution du plan de la SARL Cobra en vertu d'une déci

sion rendue le 11 octobre 2016

demeurant [Adresse 3]

[Localité 4]



SARL Cobra agissant poursuites et diligences de son gérant, M. [T] [D], domicilié en cette qualité audit siège

aya...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 20/12/2018

***

N° de MINUTE :18/

N° RG : 17/04500 - N° Portalis DBVT-V-B7B-Q35F

Jugement (N° 2016002853) rendu le 13 juin 2017 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Ordonnance rendue le 22 février 2018 par la cour d'appel de Douai

APPELANTS

Me [N] [K] commissaire à l'exécution du plan de la SARL Cobra en vertu d'une décision rendue le 11 octobre 2016

demeurant [Adresse 3]

[Localité 4]

SARL Cobra agissant poursuites et diligences de son gérant, M. [T] [D], domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social CRT[Adresse 1]

[Localité 6]

représentés et assistés par Me Rodolphe Piret, avocat au barreau de Douai, constitué aux lieu et place de Me Guy Dragon, avocat au barreau de Douai

INTIMÉE

SARL Amethys

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 5]

représentée et assistée par Me Arnaud Fasquelle, avocat au barreau de Béthune

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Marie-Annick Prigent, président de chambre

Elisabeth Vercruysse, conseiller

Anne Molina, conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Stéphanie Hurtrel

DÉBATS à l'audience publique du 18 octobre 2018 après rapport oral de l'affaire par Elisabeth Vercruysse

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 décembre 2018 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Marie-Annick Prigent, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 15 octobre 2018

***

La SARL Cobra est spécialisée dans le matériel de distribution-traitement des eaux, production d'eau chaude sanitaire, protection des réseaux, gestion des rejets, contrôle de qualité des eaux, chauffage, climatisation, et ventilation. Son gérant est M. [T] [D].

La SARL Cobra Services a été constituée par M. [B] [Y] en vue de la reprise d'une partie du fonds de commerce de la société Cobra.

Par acte sous-seing privé, fait à [Localité 6] le 24 novembre 2014, la société Cobra a conclu avec la société Cobra Services un acte de cession d'une de ses branches d'activité, sous conditions suspensives.

Les conditions suspensives ayant été levées, par acte sous-seing privé du 22 janvier 2015, la société Cobra a vendu à la société Cobra Services sa branche d'activité de maintenance, dépannage, entretien et service après-vente de matériel de distribution et traitement des eaux, de production d'eau chaude sanitaire, de protection des réseaux, de gestion des rejets, de contrôle de la qualité des eaux, de chauffage, climatisation et ventilation.

La vente a été conclue au prix de 372 000 euros pour le fonds de commerce, et 28 000 euros pour le stock, prix séquestré sur le compte CARPA de la Selarl Legisconseil, rédactrice de l'acte.

Il était payable selon les conditions suivantes :

- à l'issue du délai d'opposition de 10 jours, à hauteur de la somme de 150 000 euros,

- le solde, lorsque le vendeur aurait régulièrement justifié au séquestre :

- que le fonds n'était grevé d'aucune inscription de privilège quelconque, notamment au Trésor Public, de la sécurité sociale ou autres organismes assimilés,

- qu'il n'avait été fait, dans les délais légaux, aucune opposition sur le prix de cession,

- que le vendeur s'était libéré du montant des impôts et taxes afférents au bénéfice ou aux revenus réalisés par lui jusqu'au jour de la cessation de son exploitation.

Le même jour a également été signée une convention d'accompagnement entre le cédant, M. [D], et Cobra Services, aux termes de laquelle le prestataire s'engageait auprès du cessionnaire à lui fournir sur une durée de trois années commençant à courir le 1er février 2015, les services et l'assistance nécessaire pour faciliter la transmission de l'activité cédée, moyennant une rémunération composée d'une partie fixe et d'une partie variable.

Le lendemain, la société Cobra a consenti à la société Cobra Services une convention d'occupation précaire d'une partie de ses locaux situés [Adresse 1], pour une durée s'achevant de plein droit le 30 juin 2015 moyennant une redevance d'occupation mensuelle de 3 000 euros HT et hors charges.

La cession a été publiée au BODACC le 22 février 2015.

De multiples tensions sont rapidement apparues entre les parties :

- au sujet de la communication faite par la société Cobra Services aux clients, qui ne convenait pas à la société Cobra,

- au sujet de la somme versée par la société Cobra Services le jour de la vente, mais restée séquestrée,

- au sujet de régularisations financières prévues dans l'acte de cession qui n'avaient pas été acquittées, chaque partie retenant des sommes au nom de celles que l'autre lui devait,

- au sujet de nombreux conflits liés au chevauchement des deux activités,

- au sujet du transfert des lignes téléphoniques.

Les 5 et 13 mars 2015, la société Cobra Services a payé 75 000 euros sur la somme séquestrée, soit 150 000 euros au total.

222 000 euros sur les 372 000 euros dus par la société Cobra Services restaient donc sous séquestre.

Le 15 juin 2015, la société Cobra a déclaré son état de cessation de paiement.

Par jugement du 22 juin 2015, le tribunal de commerce de Lille métropole a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Cobra, et désigné Me [K] en qualité de mandataire judiciaire.

Le 29 juin 2015, la société Cobra Services a débloqué le solde du prix de vente.

Le 23 juillet 2015, la société Cobra Services a déclaré auprès de Me [K] mandataire judiciaire de la société Cobra, une créance totale de 188 785,81 euros TTC décomposée comme suit :

-130 876,78 euros TTC au titre de factures dues en application du protocole de cession,

-19 627,68 euros TTC au titre de factures de sous-traitance pour le compte de la société Cobra ,

- 38 281,35 euros TTC au titre de règlements clients indûment perçus par la société Cobra .

Il était précisé que 107 311,71 euros de créances réciproques étaient à compenser sur ce montant, soit un solde dû par la société Cobra de 81 474,11 euros.

Par assignation, délivrée le 12 février 2016, la société Cobra, M. [D] en qualité de gérant de la société Cobra et Me [K] en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra ont assigné la société Cobra Services devant le tribunal de commerce de Lille Métropole sur le fondement de sa responsabilité contractuelle.

Par jugement du 13 juin 2017, le tribunal de commerce de Lille métropole a :

- débouté la société Cobra de l'intégralité de ses demandes,

- fixé la créance de la société Cobra Services, au passif de la société Cobra, à la somme de 59 847,36 euros TTC après compensation,

- condamné reconventionnellement la société Cobra et Me [K] en qualité de mandataire judiciaire au paiement de la somme de 11 731,10 euros TTC en application des sommes perçues indûment,

- condamné Me [K] en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts liés à la perte des numéros de téléphone,

- mis les frais irrépétibles et les dépens à la charge de chacune des parties par moitié,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La société Cobra et Me [K] en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra ont interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 8 octobre 2018, la société Cobra et Me [K] en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Cobra demandent à la cour d'appel, vu les articles 1193 et suivants, 1231-1 et suivants du code civil, de :

- donner acte à Maître Rodolphe Piret de sa constitution aux lieu et place de Maître Guy Dragon ;

- recevant la société Cobra, Me [K] ès qualité et M. [D] en leur appel, les déclarant bien fondés et y faisant droit ;

- émendant, réformant le jugement rendu entre les parties par le tribunal de commerce de Lille métropole en date du 13 juin 2017 ;

- dire et juger que la société Amethys (anciennement Cobra Services) venant aux droits de la société Cobra Services n'a pas exécuté les conventions légalement formées entre les parties et n'a pas davantage été loyale dans les relations souscrites entre cédant et cessionnaire, contractualisées par convention en date des 22 et 23 janvier 2015 ;

- condamner en conséquence la société Cobra Services à payer :

- à Me [K], mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société Cobra et à la société Cobra, la somme de 775 030,44 euros, avec intérêts judiciaires au taux légal à compter de la date du présent exploit valant mise en demeure, outre celle de 15 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- à M. [D] la somme de 55 833,26 euros, outre celle de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonner la capitalisation des intérêts judiciaires pour chaque année entière et consécutive conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

- condamner la société Amethys (anciennement Cobra Services) en tous les frais et dépens de première instance et d'appel.

Elle fait principalement valoir :

- que la société Amethys (anciennement Cobra Services) a commis plusieurs fautes dans l'exécution de l'acte de cession,

- que la société Amethys (anciennement Cobra Services) a commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme à l'encontre de la société Cobra,

- que le préjudice de la société Cobra résulte de l'ensemble de ces éléments,

- que M. [D] est bien fondé à solliciter paiement du prix prévu à la convention d'accompagnement,

- que la société Amethys (anciennement Cobra Services) doit être déboutée de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour faute dans le transfert des lignes téléphoniques.

La société Cobra Services est désormais dénommée Amethys.

Par ordonnance, en date du 22 février 2018, le magistrat de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions de la société Amethys notifiées par le RPVA le 19 décembre 2017.

La cour d'appel renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la saisine de la cour d'appel

À titre préliminaire, la cour d'appel rappelle qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières écritures des parties et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Or, en l'espèce, les conclusions de la société Amethys ayant été déclarées irrecevables, la cour d'appel n'est plus saisie d'aucune demande de sa part.

La saisine de la cour d'appel étant limitée aux demandes en paiement et en dommages et intérêts formulées par la société Cobra à l'encontre de la société Amethys, et la compensation n'étant pas envisageable à défaut de condamnation de la société Cobra en paiement, la décision déférée, qui a ordonné une compensation entre les sommes dues par la société Cobra et celles dues par la société Amethys (anciennement Cobra Services), sera ainsi nécessairement infirmée.

Il convient, néanmoins, de rappeler, qu'aux termes de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur les textes applicables au litige

L'ensemble des faits et des conventions sur lesquels la société Cobra, M. [D] et Me [K] en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra s'appuient pour fonder leurs demandes sont antérieurs au 1er octobre 2016.

Il y a donc lieu de préciser qu'il sera fait application des dispositions du code civil dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve de l'obligation.

Sur les demandes de la société Cobra au titre de la convention de cession

En application de l'article 1134 code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Il est constant que cette règle est générale et absolue et régit les contrats dont l'exécution s'étend à des périodes successives de même que ceux de toute autre nature. Dans aucun cas, il n'appartient aux tribunaux, quelque équitable que puisse leur paraître leur décision, de prendre en considération le temps et les circonstances pour modifier les conventions des parties et substituer des clauses nouvelles à celles qui ont été librement acceptées par les contractants.

Les articles 6 et 9 du code de procédure civile, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à fonder leurs prétentions et il leur incombe de prouver conformément à la loi les faits nécessaires à leur succès.

Par ailleurs, en vertu de l'article 1315 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le payement ou ce qui a produit l'extinction de son obligation.

Sur ce,

En l'espèce, la société Cobra formule trois demandes sur le fondement du non-respect de la convention de cession, qu'il convient d'examiner tour à tour.

Sur la demande au titre du défaut de paiement du stock

Le contrat de cession de branche d'activité, qui fait la loi entre les parties, prévoit la vente du stock par la société Cobra à la société Cobra Services (devenue Amethys) au prix de 28 000 euros HT, payable dans les trente jours du contrat, le vendeur devant établir une facture comportant le montant hors taxes du stock ainsi que la TVA à laquelle il serait assujetti.

La société Cobra produit une facture, datée du 31 mars 2015, afférente au stock, reprenant les clauses du contrat et le montant convenu, à savoir 28 000 euros HT, soit 33 600 euros TTC.

Elle démontre ainsi l'existence de sa créance, que la société Amethys (anciennement Cobra Services) ne contestait pas en première instance.

La société Amethys (anciennement Cobra Services) sera ainsi condamnée à verser à la société Cobra la somme de 33 600 euros TTC au titre du paiement du stock.

Sur la demande de dommages et intérêts pour retard de paiement du prix de cession

Comme prévu dans l'acte, le prix de cession a été réglé le 22 janvier 2015 mais la somme a ensuite été séquestrée sur le compte Carpa de la société Legisconseil, rédactrice de l'acte.

Le contrat prévoyait, par ailleurs, que le prix de vente, à savoir 372 000 euros, soit libérable selon les conditions suivantes :

« à titre de convention particulière, le séquestre est autorisé à remettre à l'acheteur à l'issue du délai d'opposition de dix jours, une somme maximale de cent cinquante mille (150 000) euros à la condition que les oppositions reçues à l'issue du délai d'opposition de dix jours soient inférieures à la somme de cent trente mille (130 000 euros) » ;

« Le solde du prix de la présente ne sera remis au Vendeur que lorsqu'il aura régulièrement justifié au séquestre

1°) Que le fonds vendu n'est grevé d'aucune inscription de privilège quelconque notamment au Trésor Public, de la Sécurité Sociale ou autres organismes assimilés ;

2°) Qu'il n'a été fait dans les délais légaux, aucune opposition sur le prix de cession ;

3°) Que le Vendeur s'est libéré du montant des impôts et taxes afférents aux bénéfices ou aux revenus réalisés par lui jusqu'au jour de la cessation de son exploitation. »

Il rappelait enfin à l'attention du vendeur :

« - que tous les créanciers disposent d'un délai de dix jours à compter de la dernière en date des publications légales (soit celle du BODAC) pour faire opposition sur le prix de vente et que tout créancier ayant régulièrement formé opposition, peut demander la revente du fonds en justice sur surenchère.

- que le Trésor Public dispose, en vertu de l'article 1684 du Code Général des Impôts, d'un délai de trois mois à compter de la déclaration de la vente pour former opposition. »

Le contrat de cession a été publié au Bodacc le 22 février 2015.

Les 5 et 13 mars, soit à l'expiration du délai de dix jours, une somme de 150 000 euros a été libérée.

La société Cobra ne pouvait obtenir la libération du solde de 372 000 euros qu'en remplissant les conditions énumérées au contrat, notamment en justifiant de l'absence d'opposition dans les délais légaux.

Or, c'est par des motifs pertinents, que la cour adopte, que les premiers juges ont relevé qu'il ressort de l'application combinée des articles 201 et 1684 du code général des impôts qu'en absence de déclaration de la cession à l'administration fiscale par le vendeur, elle bénéficie d'un délai de 3 mois et 45 jours pour former opposition.

En l'espèce, la société Cobra n'a pas procédé à cette déclaration, de sorte que le délai d'opposition de l'administration fiscale expirait le 6 juillet 2015.

Les moyens de la société Cobra tendant à voir reporter la responsabilité de l'absence de déclaration de la cession sur la société Legisconseil sont inopérants, cette dernière n'étant pas partie à l'instance à titre personnel. En tout état de cause, ils ne sont pas de nature à exonérer le vendeur de son obligation légale et des conséquences qui en découlent.

C'est ainsi, à juste titre, que les premiers juges ont estimé qu'il ne peut être reproché à la société Amethys (anciennement Cobra Services) d'avoir retenu le solde du prix de vente sous séquestre jusqu'au 29 juin 2015.

La société Cobra sera donc déboutée de sa demande à ce titre.

Sur la demande de dommages et intérêts pour violation de la clause d'exclusivité

Avant la cession, l'activité de la société Cobra était la suivante :

négoce et installation de matériel de distribution et traitement des eaux, de production d'eau chaude sanitaire, de protection des réseaux, de gestion des rejets, de contrôle de la qualité des eaux, de chauffage, climatisation et ventilation,

maintenance, dépannage, entretien et service après-vente des matériels liés à l'activité ci-dessus.

C'est cette dernière qui a été cédée à la société Amethys (anciennement Cobra Services) (anciennement Cobra Services), la société Cobra conservant son activité de négoce et installation des matériels cités.

Au titre des engagements réciproques, le contrat de cession comportait une clause d'exclusivité :

« Le Vendeur s'engage à confier à titre exclusif à l'Acheteur toutes prestations relevant de la branche d'activité cédée et des compétences que l'Acheteur sera amené à développer.

Réciproquement, l'Acheteur s'engage à confier à titre exclusif au Vendeur toutes prestations relevant des activités conservées par ce dernier.

Cette obligation d'exclusivité s'imposera à condition que les prix pratiqués et la qualité de prestation soient équivalents à ceux pratiqués sur le marché. »

La société Cobra reproche à la société Cobra Services (devenue Amethys) d'avoir violé cette clause d'exclusivité en s'emparant d'affaires qui auraient du lui échoir, et en omettant de la consulter en sous-traitance ou en fourniture de composants.

Il lui appartient, en application des dispositions sus-visées, de rapporter la preuve des violations qu'elle allègue.

Or, la convention de cession de branche du fonds de commerce était complétée par une annexe I, à maintes reprises citée dans le contrat, définissant précisément les champs d'action de chacune des sociétés à la suite de la cession, et le sort des différents contrats en cours.

Cette pièce n'est pas produite par la société Cobra, de sorte que faute pour elle de démontrer les règles de répartition des clients et des contrats dont elle allègue la violation, elle ne saurait obtenir la reconnaissance d'une faute imputable à la société Cobra Services (devenue Amethys) et donc réparation de ce chef.

De la même façon, elle ne fait qu'alléguer la violation de la convention par la société Amethys (anciennement Cobra Services) au titre des consultations en sous-traitance ou en fourniture de composants, sans produire de pièces au soutien de ses prétentions.

Elle sera donc également déboutée de sa demande à ce titre.

Sur les demandes de la société Cobra au titre des encaissements indus

La société Cobra justifie que la société Amethys (anciennement Cobra Services) a perçu le règlement de prestations réalisées par le vendeur, pour un montant total de 30 111,19 euros.

Elle démontre ainsi l'existence de sa créance, que la société Amethys (anciennement Cobra Services) ne contestait pas en première instance, sauf à demander qu'elle soit compensée avec la sienne.

La société Amethys (anciennement Cobra Services) qui ne démontre pas s'être acquittée de sa dette sera ainsi condamnée à verser à la société Cobra la somme de 30 111,19 euros au titre des encaissements qu'elle a indûment perçus.

Sur les demandes de la société Cobra au titre du défaut de paiement de marchandises

La société Cobra produit quarante-trois factures émises entre le 18 mars 2015 et le 5 mai 2015 à l'attention de la société Cobra Services (devenue Amethys) pour un montant total de 19 516,98 euros TTC.

Elle justifie ainsi de sa créance, que la société Amethys (anciennement Cobra Services) n'a pas contestée en première instance, sauf à demander qu'elle soit compensée avec la sienne.

La société Amethys (anciennement Cobra Services) qui ne démontre pas s'être acquittée de sa dette sera ainsi condamnée à verser à la société Cobra la somme de 19 516,88 euros à ce titre.

Sur le parasitisme

Il résulte de la liberté du commerce et de l'industrie, principe constitutionnel issu des lois des 2 et 17 mars 1791, que les entreprises sont libres de rivaliser entre elles pour conquérir et retenir une clientèle.

Aux termes des dispositions de l'article 1382 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

L'article 1383 du code civil dispose que chacun est responsable du dommage qu'il a causé, non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

L'action en concurrence déloyale a pour fondement non une présomption de responsabilité reposant sur l'article 1384 du code civil, mais une faute engageant la responsabilité délictuelle de son auteur supposant l'accomplissement d'un acte positif dont la preuve incombe à celui qui se déclare victime.

Il appartient dès lors à celui qui s'en prévaut d'apporter la preuve d'une faute, d'un préjudice, et d'un lien de causalité.

Si la preuve d'une faute s'avère nécessaire pour le succès de l'action en concurrence déloyale, peu importe, en revanche, la nature de la faute, c'est-à-dire qu'elle soit intentionnelle ou non intentionnelle.

Plus spécifiquement, le parasitisme économique peut être défini comme « l'ensemble des comportements par lesquels un agent économique s'immisce dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire. 

La concurrence parasitaire entre entreprises concurrentes est une forme de concurrence déloyale qui se développe à travers toute une série de comportements qui ont souvent pour trait commun de provoquer une confusion ou un risque de confusion et où le parasite entend bénéficier de la notoriété d'autrui ou utiliser son travail pour réaliser des économies injustifiées.

Sur ce,

En l'espèce, la société Cobra reproche à la société Cobra Services (devenue Amethys):

d'avoir volontairement semé la confusion dans l'esprit de la clientèle pour tirer profit, pour son seul compte, de l'ensemble des activités exercées par la société Cobra dont elle ne reprenait pourtant qu'une seule branche, en adressant des courriers aux clients les 23 janvier et 1er juillet 2015 laissant entendre que la société Cobra n'existait plus et était remplacée par la société Cobra Services (devenue Amethys),

d'avoir détourné des paiements pour des prestations réalisées avant la cession,

d'avoir détourné des commandes initialement passées auprès d'elle.

Il ressort des échanges de courriels, entre M. [D] et M. [Y], produits aux débats que le 26 janvier 2015, ce dernier a proposé au premier un courrier circulaire à destination de la clientèle pour les aviser de la cession, le courrier devant être signé par les deux dirigeants.

M. [D] a souhaité que soit précisée la coexistence des deux branches exploitées par les deux sociétés, malgré la mutualisation des locaux, indiquant « ta lettre laisse entendre que mon entité n'existe plus.. ».

En réponse, M. [Y] a soumis à l'approbation du vendeur une nouvelle rédaction du courrier.

Néanmoins, la société Cobra démontre que c'est le courrier, dans sa version initiale, daté du 23 janvier 2015, et signé uniquement par M. [Y], qui a été adressé à l'ensemble des clients.

Il est rédigé de la façon suivante, sous l'objet « Acquisition par COBRA SERVICES des activités exploitation de la SARL COBRA » :

« Vous êtes actuellement Client de la SARL COBRA, sise [Adresse 1], immatriculée au RCS de Lille Métropole sous le numéro 324 959 063, pour l'exploitation de vos équipements de traitement d'eau, de piscine ou de chauffage.

Nous vous informons que l'ensemble des activités exploitation de la SARL COBRA ont été cédées le 22 Janvier 2015 et reprises par la société COBRA SERVICES, sise [Adresse 1], immatriculée au RCS de Lille Métropole sous le numéro 808 581 854 et dont [B] [Y] en est le Gérant.

Au terme de cette opération, tous les droits et obligations de la SARL COBRA, y compris les commandes et contrats en cours, sont transférés et assurés par la société COBRA SERVICES.

En pratique :

Les règlements des factures émises par la SARL COBRA avant le 22 janvier 2015 sont à adresser à la SARL COBRA.

Les commandes passées jusqu'au 22 janvier 2015 à la SARL COBRA et non honorées au 22 Janvier 2015, seront reprises et assurées par COBRA SERVICES à compter de cette date.

Les règlements à adresser à la société COBRA SERVICES pourront l'être par virement selon le RIB joint à ce courrier.

L'ensemble du personnel local avec lequel vous avez l'habitude d'être en relation dans le cadre de nos activités reste inchangé et bien entendu à votre disposition pour continuer à vous apporter le service attendu (...) »

Suivaient les nom et coordonnées des personnels visés, dont leurs adresses mail se terminant par « @cobra-france.fr »

Ainsi, ce courrier, qui se borne à faire état de la cession de « l'ensemble des activités exploitation de la société Cobra » avant de dire que tous les contrats en cours seront repris par la société Cobra Services, omet de préciser que la société Cobra a conservé une branche de son activité, auprès des mêmes clients, et que les deux parties ont convenu de la répartition entre-elles des contrats et devis en cours, et de leurs champs d'application respectifs.

Plus encore, par cette omission et sa rédaction imprécise, il occulte complètement le maintien de la société Cobra dans son activité et laisse clairement entendre aux clients qu'à l'avenir c'est à la société Cobra Services qu'ils auront affaire.

Ces éléments ne pouvaient lui être inconnus, ayant été soulignés par M. [D], sans qu'elle en ait tenu compte.

Par ce courrier la société Cobra Services (devenue Amethys) a ainsi volontairement créé chez les clients une confusion dans le but de les amener à contracter avec elle et de leur faire croire qu'ils n'étaient désormais plus liés avec la société Cobra.

Cette confusion a été entretenue par le courrier adressé à nouveau à l'ensemble des clients le 1er juillet 2015, rédigé dans les mêmes termes ambigus, le seul changement étant relatif à la nouvelle adresse et aux nouvelles adresses mail des personnels, s'achevant désormais par « @cobra-services.fr ».

Ces agissements sont évidemment fautifs de la part de la société Cobra Services (devenue Amethys), leur caractère délibéré étant accentué par l'apparence de consultation de la société Cobra.

Le seul fait que la société Cobra n'ait pas envoyé de courrier rectificatif aux clients ne saurait exonérer la société Cobra Services (devenue Amethys) de sa faute, mais est tout au plus de nature à influer dans le cadre de l'évaluation du préjudice.

Il ressort, par ailleurs, des pièces produites, factures et échanges avec les clients, que la société Cobra Services (devenue Amethys) a émis des factures pour des travaux réalisés par la société Cobra avant la cession, pour un montant total de 46 738,84 euros TTC.

Elle a ainsi non seulement perçu indûment le fruit de prestations qu'elle n'avait pas exécutées, mais entretenu encore la confusion chez ces clients qui ne pouvaient qu'en conclure que l'ensemble des activités de la société Cobra avait été repris par la société Cobra Services (devenue Amethys).

S'agissant, enfin, du détournement de commandes, il convient de relever que la définition des champs d'action des deux sociétés, de même que le sort des contrats en cours et devis réalisés avant la cession, qu'ils aient été acceptés ou non, ressort du contrat de cession, complété par l'annexe I.

Cette annexe n'étant pas produite, la cour d'appel ne peut constater de violation par la société Cobra Services (devenue Amethys) des règles de répartition établies par les parties.

En réparation des fautes qu'elle allègue, la société Cobra demande des dommages et intérêts à hauteur de 160 000 euros.

La confusion causée chez les clients par les agissements fautifs de la société Cobra Services (devenue Amethys) est parfaitement caractérisée.

Il convient, néanmoins, de relever sur ce point que cette confusion a également été causée par l'utilisation du nom « Cobra », le partage des locaux, la mutualisation du personnel et des lignes téléphoniques, tous éléments ressortant de l'application de la convention de cession et donc souhaités par les deux parties.

Il ne peut être nié que ces éléments aient participé à la confusion, et donc au préjudice causé à la société Cobra qui n'a pas non plus engagé d'action en vue d'éclaircir auprès des clients la répartition des rôles entre les deux sociétés.

La société Cobra, qui a ainsi participé à son propre préjudice percevra en réparation une somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les demandes de la société Cobra au titre de la convention d'occupation précaire

La convention d'occupation précaire prévoyait une redevance d'occupation de 3 000 euros HT par mois, outre la refacturation par le bailleur de 50% de la consommation d'eau et d'électricité.

L'acte de cession stipulait, en outre, que la société Amethys (anciennement Cobra Services) (anciennement Cobra Services) bénéficie contre rémunération de différents contrats souscrits par le vendeur : location de la benne à ordures, location et entretien des tapis aux entrées des locaux, géolocalisation des véhicules, entretien du bâtiment, maintenance des serveurs et fourniture de l'antivirus, licence Sage, maintenance du site internet, accès à la plateforme Vecteur Plus, sauvegarde des données informatiques par Netcom.

La société Cobra produit onze factures de refacturation de frais généraux, accompagnées d'un décompte, pour les mois de janvier à juillet 2015, pour une somme totale de 49 310,27 euros TTC.

Les frais refacturés sont tous compris dans les clauses ci-dessus rappelées.

Elle justifie ainsi de sa créance, de sorte que la société Amethys (anciennement Cobra Services) qui ne justifie pas s'en être acquittée sera condamnée à ce titre à lui verser une somme de 49 310,27 euros.

Sur la demande de M. [D] en application de la convention d'accompagnement

Aux termes de la convention d'accompagnement, signée entre les parties, le 22 janvier 2015, M. [D] s'engageait à fournir à la société Cobra Services (devenue Amethys), pendant trois ans, divers services et assistances afin de faciliter la transmission de la branche cédée au repreneur.

La convention prévoyait une rémunération en contre-partie de ces services.

C'est à nouveau par des motifs pertinents, que la cour adopte, que le tribunal de commerce a relevé qu'il appartient à M. [D] qui demande paiement de sa rémunération de démontrer qu'il a fourni les services et l'assistance mentionnés au contrat.

Or, il ne démontre pas d'avantage en appel qu'en première instance qu'il ait rempli les missions définies à cette convention.

Les pièces produites et les débats démontrent la dégradation rapide des relations entre les parties dès les jours qui ont suivi la signature des conventions en cause. Il est certain que dans ces conditions, la collaboration mutuellement bénéfique prévue dans la convention d'accompagnement ne pouvait avoir lieu.

Néanmoins, contrairement aux affirmations de M. [D], aucun élément du dossier ne prouve que cette dégradation soit uniquement imputable à la société Cobra Services (devenue Amethys), de sorte que les moyens qu'il développe en ce sens pour obtenir paiement de sa rémunération sur le fondement de la perte de chance sont inopérants.

Il sera débouté de cette demande.

Sur les intérêts

Conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil, ces condamnations en paiement porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

De la même façon il convient en application de l'article 1343-2 du code civil d'ordonner la capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière à compter du présent arrêt.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la partie perdante est, sauf décision contraire motivée par l'équité ou la situation économique de la partie succombante, condamnée aux dépens, et à payer à l'autre partie la somme que le tribunal détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Il y a lieu de réformer la décision déférée du chef des dépens et des frais irrépétibles.

La société Amethys (anciennement Cobra Services), partie perdante, sera condamnée au paiement des entiers dépens du premier degré et d'appel et à payer à Me [K] en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra la somme de 3 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

M. [D] qui succombe sera débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

- Infirme la décision déférée en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

- Condamne la société Amethys (anciennement Cobra Services) à verser à Me [K], en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra, la somme de 33 600 euros en paiement du stock ;

- Déboute la société Cobra et Me [K], en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra, de leur demande de dommages et intérêts pour retard de paiement du prix de cession ;

- Déboute la société Cobra et Me [K], en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra, de leur demande de dommages et intérêts pour violation de la clause d'exclusivité ;

- Condamne la société Amethys (anciennement Cobra Services) à verser à Me [K], en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra, la somme de 30 111,19 euros en remboursement des encaissements qu'elle a indûment perçus ;

- Condamne la société Amethys (anciennement Cobra Services) à verser à Me [K] en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra la somme de 19 516,98 euros en paiement des marchandises ;

- Condamne la société Amethys (anciennement Cobra Services) à verser à Me [K], en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra, la somme de 100 000 euros de dommages et intérêts pour parasitisme ;

- Condamne la société Amethys (anciennement Cobra Services) à verser à Me [K], en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra, la somme de 49 310,27 euros au titre des charges liées à l'occupation des locaux ;

- Déboute M. [D] de sa demande de rémunération au titre de la convention d'accompagnement ;

- Dit que ces condamnations en paiement porteront intérêt au taux légal à compter du présent arrêt ;

- Ordonne la capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière à compter du présent arrêt conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

- Condamne la société Amethys (anciennement Cobra Services) aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

- Condamne la société Amethys (anciennement Cobra Services) à payer à Me [K] en qualité de mandataire judiciaire de la société Cobra la somme de 3 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

Le greffierLe président

Valérie RoelofsMarie-Annick Prigent


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 17/04500
Date de la décision : 20/12/2018

Références :

Cour d'appel de Douai 21, arrêt n°17/04500 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-20;17.04500 ?
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