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20/12/2018 | FRANCE | N°16/06769

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 20 décembre 2018, 16/06769


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 20/12/2018





***





N° de MINUTE : 18/

N° RG : 16/06769 - N° Portalis DBVT-V-B7A-QHJR



Jugement (N° 2015 00259) rendu le 19 octobre 2016 par le tribunal de commerce de Douai







APPELANTE



SARL Sydel pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social [...]


représentée par Me Jean-Noël X..., avocat au barreau de Cambrai



INTIMÉE



SARL 3R représentée par son gérant, M. Eric Y...

ayant son siège social [...]

représentée et assistée par Me Dominique Z..., av...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 20/12/2018

***

N° de MINUTE : 18/

N° RG : 16/06769 - N° Portalis DBVT-V-B7A-QHJR

Jugement (N° 2015 00259) rendu le 19 octobre 2016 par le tribunal de commerce de Douai

APPELANTE

SARL Sydel pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social [...]

représentée par Me Jean-Noël X..., avocat au barreau de Cambrai

INTIMÉE

SARL 3R représentée par son gérant, M. Eric Y...

ayant son siège social [...]

représentée et assistée par Me Dominique Z..., avocat au barreau de Douai

DÉBATS à l'audience publique du 10 octobre 2018 tenue par Anne A... magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Stéphanie Hurtrel

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Marie-Annick Prigent, président de chambre

Elisabeth Vercruysse, conseiller

Anne A..., conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 décembre 2018 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Marie-Annick Prigent, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 27 septembre 2018

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte notarié, du 26 avril 2000, la société 3 R a cédé son fonds de commerce à la société Sydel, le prix de cession s'élevant à 651 130 francs soit 92 264 euros, payable de la façon suivante :

- un prêt de 400 000 francs, soit 60979,60 euros au taux de 6,90 % l'an, remboursable en 84 mensualités sur sept ans,

- un prêt de 251 130 francs, soit 38 284,52 euros remboursable en 3 versements égaux au taux d'intérêt de 6,90 % l'an, les 1er mars 2003, 1er mars 2005 et 1er mars 2007.

La société Sydel n'a pas honoré la totalité du second prêt. Elle s'est acquittée d'une somme de 20 000 euros le 2 octobre 2014.

Par courrier, du 25 octobre 2014, la société 3R a mis en demeure la société Sydel de lui payer la somme de 80 024,71 euros. La société 3R a réitéré sa mise en demeure par l'intermédiaire de son conseil le 10 février 2015. Le 27 février 2015, la société Sydel a indiqué au conseil de la société 3R que deux versements n'avaient pas été déduits du montant réclamé, a demandé à la société 3R de revoir les modalités de calcul des intérêts et a réglé la somme de 14 284, 52 euros.

Par courrier recommandé, avec avis de réception, du 9 juillet 2015, la société 3R a indiqué à la société Sydel que le point de départ des intérêts conventionnels n'étant pas au 1er mars 2003 mais au 1er mars 2000, elle restait redevable de la somme de 65 267,91 euros au 30 juin 2015, au titre de ces intérêts capitalisés chaque année.

Par acte d'huissier, en date du 15 septembre 2015, la société 3R a fait assigner la société Sydel devant le tribunal de commerce de Douai en paiement des sommes dues.

Par jugement du 19 octobre 2016, le tribunal de commerce de Douai a notamment:

- déclaré recevable l'action de la société 3R,

- condamné la société Sydel à payer à la société 3R la somme de 65 267,91euros, arrêtée au 30 juin 2015,

- jugé que la société Sydel pourra s'acquitter de la somme de 65 267,91euros en 24 mensualités avec déchéance du terme, sans intérêts ni pénalités de retard pendant ce délai de 24 mois,

- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Sydel aux entiers frais et dépens de l'instance,

- dit n'y avoir de prononcer l'exécution provisoire,

- liquidé les dépens de l'instance à la somme de 81,12 euros TTC.

Par déclaration, du 9 novembre 2016, la SARL Sydel a interjeté appel de l'ensemble des dispositions de cette décision.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 6 février 2017, la SARL Sydel demande à la cour d'appel au visa de l'article 2224 du code civil, de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 19 octobre 2016 par le tribunal de commerce de Douai,

Statuant à nouveau,

A titre principal,

- juger que les demandes de la société 3R sont prescrites,

En conséquence,

- débouter la société 3R de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la société 3R au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire,

- lui accorder des délais de paiement, ou reporter le paiement de la dette, dans la limite de 2 ans, sur le fondement des articles 1343-5 et suivants du code civil,

- juger que pendant ce délai, les intérêts et les pénalités de retard cesseront d'être dus conformément aux mêmes articles,

- juger n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Sydel soutient que :

- l'échéance du prêt litigieux était fixée au 1er mars 2007,

- l'instance introduite le 15 septembre 2015, plus de cinq ans après l'exigibilité des intérêts, la demande de la société 3R est prescrite,

- la lettre qu'elle a adressée à la société 3R le 27 février 2015 constitue des pourparlers entre les parties avant que l'instance n'ait été engagée, non constitutifs d'une reconnaissance de responsabilité, interruptifs du délai de prescription,

- le courrier du 27 février 2015 ne vaut pas reconnaissance de dettes et n'a pas interrompu la prescription,

- au 27 février 2015, la prescription était acquise depuis le 18 juin 2013,

- les parties entretenaient des relations amicales depuis de nombreuses années, raison pour laquelle la société 3R lui avait indiqué qu'elle se contenterait du paiement du prix principal du prêt, sans exiger le paiement des intérêts,

- elle se trouve, en cas de condamnation, dans l'impossibilité de régler l'intégralité de la somme réclamée par la société 3R.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 28 février 2017, la société 3R demande à la cour d'appel au visa des articles 1103, 1104, 1194, 2 224 et 2 240 du code civil, de :

- confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a accordé à la société Sydel de pouvoir se libérer de sa dette en 24 mensualités égales sans intérêt ni pénalité durant cette période,

- condamner la société Sydel à lui payer la somme de 65 267,91 euros arrêtée au 30 juin 2015,

- la condamner à une indemnité procédurale de 3 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Sydel aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La société 3R fait valoir que :

- l'échange de lettres les 10 et 27 février 2015 est la reconnaissance non équivoque de sa dette par la société Sydel et sa renonciation au délai de prescription,

- les termes de la lettre du 27 février 2015 de la société Sydel font courir à compter de sa date un nouveau délai de prescription,

- l'appel de la société Sydel étant dilatoire, il ne doit pas lui être accordé d'échéancier de paiement.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 septembre 2018.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

Sur la demande de prescription :

En application des dispositions des articles 122 et 123 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. Les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages et intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.

Les fins de non-recevoir doivent être accueillies sans que celui qui les invoque ait à justifier d'un grief, et alors même que l'irrecevabilité ne résulterait d'aucune disposition expresse.

Selon l'article 2219 du code civil, 'La prescription extinctive est un mode d'extinction d'un droit résultant de l'inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps'.

Selon l'article 26 II. de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile, entrée en vigueur le 19 juin 2008 et applicable immédiatement aux prescriptions en cours, 'Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure'.

Selon l'article L. 110-4 I. du code de commerce dans sa version issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, 'I.-Les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes'.

Selon l'article 2224 du code civil dans sa version issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, 'Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer'.

Il résulte du paragraphe 'conditions du paiement à terme' de l'acte notarié de cession de fonds de commerce du 26 avril 2000 que l'acquéreur s'oblige à payer le prix de cession au vendeur dont notamment 'la somme de 251 130 francs, productive d'intérêt au taux de 6,90% l'an, remboursable en trois versements constants payable : le premier versement le 1er mars 2003, le deuxième versement le 1er mars 2005, et le troisième versement le 1er mars 2007'.

Ainsi en l'espèce, le délai de prescription court à compter du 2 mars 2007, en l'absence de règlement complet du prix de vente à sa dernière échéance le 1er mars 2007.

Si à cette date le délai de prescription était de 10 ans, l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 le 19 juin 2008 a fait courir, à compter de cette date, le nouveau délai de 5 ans issu de l'article L. 110-4 du code de commerce, ce nouveau délai ayant ainsi expiré le 19 juin 2013.

Par conséquent, l'action en paiement introduite par la société 3R le 15 septembre 2015 était prescrite depuis le 19 juin 2013.

Dès lors, il convient d'infirmer le jugement déféré et de déclarer irrecevable comme étant prescrite l'action en paiement de la société 3R.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

En application de l'article 696 du code de procédure civile, la société 3R, partie perdante, sera condamnée aux dépens de la première instance et de l'instance d'appel.

La société 3R sera condamnée en outre à payer à la société Sydel la somme de 2 000 euros au titre de l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevable, comme étant prescrite, l'action en paiement de la société 3R au titre de la somme de 251 130 francs, partie du prix de vente mentionné dans l'acte notarié de cession de fonds de commerce du 26 avril 2000 ;

Condamne la société 3R à payer à la société Sydel la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société 3R aux dépens de première instance ainsi qu'aux dépens de l'instance d'appel.

Le greffierLe président

Valérie RoelofsMarie-Annick Prigent


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 16/06769
Date de la décision : 20/12/2018

Références :

Cour d'appel de Douai 21, arrêt n°16/06769 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-20;16.06769 ?
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