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22/11/2018 | FRANCE | N°15/07490

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 22 novembre 2018, 15/07490


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 22/11/2018





***





N° de MINUTE : 18/

N° RG : 15/07490 - N° Portalis DBVT-V-B67-PNQ5



Jugement (N° 14/04782) rendu le 04 décembre 2015 par le tribunal de grande instance de Lille

Ordonnance rendue le 11 mai 2017 par la cour d'appel de Douai

Ordonnance rendue le 1er février 2018 par la cour d'appel de Douai





APPELANTE


r>SCI Des Toits en Shed représentée par son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 2]

représentée par Me Véronique Vitse-Boeuf, avocat au ba...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 22/11/2018

***

N° de MINUTE : 18/

N° RG : 15/07490 - N° Portalis DBVT-V-B67-PNQ5

Jugement (N° 14/04782) rendu le 04 décembre 2015 par le tribunal de grande instance de Lille

Ordonnance rendue le 11 mai 2017 par la cour d'appel de Douai

Ordonnance rendue le 1er février 2018 par la cour d'appel de Douai

APPELANTE

SCI Des Toits en Shed représentée par son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 2]

représentée par Me Véronique Vitse-Boeuf, avocat au barreau de Lille, substituée à l'audience par Me Olivier Playoust, avocat au barreau de Lille

INTIMÉE

Association CFAI agissant poursuites et diligences de son représentant légal

domicilié en cette qualité audit siège.

ayant son siège social [Adresse 3]

[Adresse 4]

[Adresse 5]

représentée et assistée par Me François Deleforge, de la SCP François Deleforge-Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai

ayant pour conseil Me Caroline Losfeld-Pinceel, avocat au barreau de Lille

DÉBATS à l'audience publique du 19 septembre 2018 tenue par Elisabeth Vercruysse magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Stéphanie Hurtrel

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Marie-Annick Prigent, président de chambre

Elisabeth Vercruysse, conseiller

Anne Molina, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2018 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Marie-Annick Prigent, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 16 novembre 2017

***

FAITS ET PROCÉDURE

Les associations CFAI et AFPI ACM Formation ( ci-après AFPI) avaient pris à bail commercial en 1999 des locaux situés à [Adresse 6] pour y implanter un centre de formation professionnelle et un centre d'apprentissage, baux qui ont été renouvelés à compter du 1er octobre 2005 auprès du nouveau propriétaire des locaux, la SCI Cassel, par deux actes sous seing privé en date du 28 janvier 2006 moyennant un loyer trimestriel de 29 704,97 euros HT pour CFAI et de 16 9765,42 euros HT pour AFPI.

Par actes en date du 27 mars 2012, les preneuses, ayant fait l'acquisition d'un immeuble dans lequel elles comptaient s'installer, ont donné congé au bailleur ' devenu la SCI des Toits en Shed ' pour le 30 septembre 2012. Les travaux ayant pris du retard, deux conventions d'occupation précaire ont été régularisées le 27 novembre 2012 pour une durée de trois mois commençant à courir à partir du 1er octobre 2012 pour se terminer le 31 décembre 2012. Ces deux conventions précisent que le bailleur donne à titre de convention précaire à CFAI et AFPI une partie des locaux situés [Adresse 7] à savoir 1 117, 40 m² de bureaux, 930 m² de salles de cours et 5 339 m² d'ateliers en contrepartie d'une redevance mensuelle de 15 921,05 euros, outre une provision sur charges de 7 600 euros pour l'association CFAI et de 3 500 euros pour l'association AFPI. Les conventions précisent que les locaux sont occupés en communs par CFAI et AFPI, CFAI occupant 32 % des surfaces louées et AFPI occupant 68 % des surfaces louées.

Au départ des locataires, des désaccords sont intervenus entre les parties concernant la restitution du dépôt de garantie, l'existence de travaux à effectuer et le paiement des charges.

Le 2 mai 2013, la SCI des Toits en Shed a assigné les deux associations devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Lille qui a, par ordonnances en date du 10 décembre 2013, condamné les associations CFAI et AFPI à payer à la SCI des Toits en Shed par provision respectivement les sommes de 27 268,78 euros et de 12 558 euros.

Le 16 mai 2014, la SCI des Toits en Shed a assigné l'association CFAI devant le tribunal de grande instance de Lille en paiement des charges locatives. Par acte en date du même jour, l'association CFAI a assigné la SCI des Toits en Shed aux fins d'obtenir notamment sa condamnation à lui payer la somme de 38 770,84 euros au titre du dépôt de garantie. Ces deux instances ont été jointes.

Par acte, en date du 14 mai 2014, l'association AFPI a assigné la SCI des Toits en Shed en restitution de la somme de 22 497,27 euros au titre du dépôt de garantie. Par acte, en date du 16 mai 2014, la SCI des Toits en Shed a assigné l'association AFPI en paiement des charges locatives. Ces deux instances ont été jointes.

Concernant l'instance opposant la SCI des Toits en Shed et l'association CFAI, le tribunal de grande instance a rendu un jugement le 4 décembre 2015.

Concernant l'instance opposant la SCI des Toits en Shed et l'association AFPI, par jugement en date du 4 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Lille a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- condamné l'association AFPI à payer à la SCI des Toits en Shed la somme de 14 465,24 euros au titre des charges restant dues au titre de la convention d'occupation précaire,

- débouté la SCI des Toits en Shed de sa demande en paiement des charges dues au titre du bail commercial

- condamné la SCI des Toits en Shed à restituer la garantie à hauteur de 13 497 euros,

- ordonné la compensation des sommes dues au titre de la restitution de la garantie et du paiement des charges dues au titre de la convention d'occupation précaire

- débouté l'association AFPI de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.

La SCI des Toits en Shed a interjeté appel de ces jugements.

Concernant l'instance opposant la SCI des Toits en Shed et l'association AFPI, la cour d'appel de Douai, par arrêt en date du 4 mai 2017, a :

- infirmé le jugement déféré sauf en ce qu'il avait débouté l'association AFPI de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

statuant à nouveau :

- débouté la SCI des Toits en Shed de sa demande en paiement de la somme de 2 225,05 euros,

- condamné l'association AFPI à payer à la SCI des Toits en Shed la somme de 9 230,88 euros au titre des charges demeurées impayées ;

- condamné la SCI des Toits en Shed à payer à l'association AFPI la somme de 7 497 euros au titre de la restitution des dépôts de garantie ;

- rejeté toute autre demande,

- dit que les parties conserveraient la charge de leurs dépens de première instance et d'appel.

Parallèlement, par acte en date du 17 novembre 2015, la SCI des Toits en Shed a fait assigner les associations CFAI et AFPI aux fins d'obtenir leur condamnation à lui payer la somme de 1 472 465,04 euros au titre des travaux de remise en état et la somme de 815 000 euros au titre du préjudice financier.

Dans cette instance, par arrêt en date du 19 avril 2018, la cour d'appel de Douai a infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Lille du 16 janvier 2017 qui lui était déféré, et, statuant à nouveau, a :

déclaré recevables les demandes formulées par la SCI des Toits en Shed à l'encontre des associations CFAI et AFPI ACM Formation,

condamné in solidum les associations CFAI et AFPI ACM Formation à payer à la SCI des Toits en Shed au titre des réparations locatives la somme de 280 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

condamné in solidum les associations CFAI et AFPI ACM Formation à payer à la SCI des Toits en Shed au titre de son préjudice de perte de loyers la somme de 122 100 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

condamné in solidum les associations CFAI et AFPI ACM Formation au paiement des entiers dépens du premier degré et d'appel et à payer à la SCI des Toits en Shed la somme de 4 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens,

débouté les parties de leurs demandes non-présentement satisfaites.

La cour d'appel de Douai est dans le présent litige, saisie de l'appel interjeté à l'encontre de la décision rendue par le tribunal de grande instance de Lille le 4 décembre 2015 dans l'instance opposant la SCI des Toits en Shed et l'association CFAI, qui a :

condamné l'association CFAI à payer à la SCI des Toits en Shed la somme de 30 272,05 euros au titre des charges restant dues au titre de la convention d'occupation précaire,

débouté la SCI des Toits en Shed de sa demande de paiement des charges dues au titre du bail commercial,

condamné la SCI des Toits en Shed à restituer la garantie à hauteur de 18 770,84 euros,

ordonné la compensation des sommes dues au titre de la restitution de la garantie et du paiement des charges dues au titre de la convention d'occupation précaire,

débouté l'association CFAI de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,

ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,

dit qu'il serait fait masse des dépens et ordonné le partage par moitié,

débouté les deux parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 23 décembre 2015, la SCI des Toits en Shed a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance d'incident en date du 11 mai 2017, le conseiller de la mise en état a, sur le fondement de l'article 909 du code de procédure civile :

déclaré irrecevables les conclusions de l'intimée déposées au greffe de la cour le 12 mai 2016 et notifiées à l'appelante le 30 mai 2016,

condamné l'association CFAI au paiement des dépens de l'incident,

débouté la SCI des Toits en Shed de sa demande au titre des frais irrépétibles

Par ordonnance d'incident en date du 1er février 2018, le conseiller de la mise en état a, sur le fondement de l'article 909 du code de procédure civile :

déclaré irrecevables les conclusions signifiées par l'association CFAI le 15 novembre 2017,

rappelé que l'ordonnance de clôture des débats avait été rendue le 16 novembre 2017,

dit que l'affaire serait jugée au fond à l'audience de plaidoirie du 21 mars 2018,

condamné l'association CFAI aux dépens de l'incident,

condamné l'association CFAI à verser à la SCI des Toits en Shed la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PRÉTENTIONS

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 10 novembre 2017, la SCI des Toits en Shed demande à la cour d'appel au visa de l'article 1134 du code civil, de :

Sur la demande de condamnation au paiement des charges dues par l'association CFAI

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de condamnation de l'association CFAI au paiement de la somme de 4 785,81 euros dues au titre de l'exécution des termes du bail commercial,

- en conséquence, condamner l'association CFAI à lui régler la somme de 4 785,81 euros au titre des charges dues en exécution du contrat de bail commercial,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné l'association CFAI à lui régler la somme de 30 272,05 euros au titre des charges restant dues en exécution de la convention d'occupation précaire,

Sur la demande de restitution du dépôt de garantie

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à restituer la garantie à hauteur de 18 770,84 euros,

- en conséquence, rejeter les conclusions de l'Association CFAI, l'en débouter,

Dans tous les cas

- condamner l'association CFAI au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'association CFAI aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, elle argue essentiellement :

que l'association CFAI n'a jamais contesté le montant restant dû au titre des loyers et charges relatifs à l'exécution du contrat de bail commercial,

que le bail prévoyait des intérêts de retard sur ces sommes fixés à une fois et demie le taux d'intérêt légal par mois de retard jusqu'à complet paiement,

que l'association CFAI en a reçu les justificatifs,

qu'au titre de la convention d'occupation précaire, l'association CFAI est redevable de la somme totale de 30 272,05 euros au titre des charges et des frais d'entretien des trappes de désenfumage, que cette créance est justifiée,

qu'en vertu du bail le dépôt de garantie ne doit être rendu au locataire qu'après entière exécution de ses obligations, que compte tenu des sommes dues par l'association CFAI au titre des réparations locatives dans les lieux loués, l'association CFAI doit être déboutée de sa demande de restitution du dépôt de garantie,

qu'au surplus les premiers juges en statuant sur le quantum des travaux de remise en état ont statué ultra petita, sur un point qui n'a fait l'objet d'aucun débat contradictoire.

L'association CFAI a conclu au fond les 12 mai 2016 et 15 novembre 2017. Ces conclusions ont été déclarées irrecevables.

Le 19 septembre 2018 à l'issue de l'audience de plaidoirie, le conseiller rapporteur a adressé la note en délibéré suivante aux parties : ' Suite à l'arrêt rendu par la chambre commerciale de la cour d'appel de Douai le 19 avril 2018, dans une affaire opposant la SCI Les Toits en Shed  (appelante), à l'AFPI et à l'association CFAI (intimées),  la cour sollicite les parties pour qu'elles précisent :

- si cet arrêt a été signifié, et si oui, à quelle date,

- si un pourvoi a été interjeté à son encontre.

Cet arrêt qui a condamné in solidum les associations CFAI et AFPI à payer à la SCI Les Toits en Shed la somme de 280 000 euros en principal à titre de réparations locatives et celle de 122 100 euros en réparation de son préjudice de perte de loyers, peut en effet avoir une incidence sur le litige dont la cour est présentement saisie.

La cour sollicite donc les parties pour qu'elles lui fassent parvenir toutes observations sur l'incidence de cet arrêt sur le présent litige.'

La SCI des Toits en Shed a répondu le 21 septembre 2018 que l'arrêt rendu par la cour d'appel de Douai le 19 avril 2018 entre les parties avait fait l'objet d'un pourvoi actuellement pendant devant la cour de cassation. Elle estimait que les demandes formées dans les deux procédures étaient distinctes l'une de l'autre, et que d'ailleurs la demande de restitution du dépôt de garantie formulée par l'association CFAI en première instance n'était plus formulée en appel du fait de l'irrecevabilité des conclusions de l'intimée.

L'association CFAI a répliqué le 11 octobre 2018, confirmant le pourvoi en cassation.

La cour d'appel renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande en paiement des charges

À titre liminaire, il y a lieu de préciser qu'il sera fait application des dispositions du code civil dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve de l'obligation.

En application de l'article 1134 code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Il est constant que cette règle est générale et absolue et régit les contrats dont l'exécution s'étend à des périodes successives de même que ceux de toute autre nature. Dans aucun cas il n'appartient aux tribunaux, quelque équitable que puisse leur paraître leur décision, de prendre en considération le temps et les circonstances pour modifier les conventions des parties et substituer des clauses nouvelles à celles qui ont été librement acceptées par les contractants.

Par ailleurs, selon les articles 6 et 9 du code de procédure civile, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à fonder leurs prétentions et il leur incombe de prouver conformément à la loi les faits nécessaires à leur succès.

En vertu de l'article 1315 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le payement ou ce qui a produit l'extinction de son obligation.

L'article L.110-3 du code de commerce consacre le principe de la liberté de la preuve des actes de commerce à l'égard des commerçants.

Dans ce cadre chacune des parties dispose de la liberté de produire toute pièce au soutien de ses demandes, et notamment un constat d'huissier.

Sur ce,

Il appartient ainsi à la SCI des Toits en Shed de démontrer le principe et le montant de la créance qu'elle prétend détenir à l'encontre de l'association CFAI.

Elle demande le paiement à deux titres :

sur le fondement du contrat de bail commercial : la somme de 4 785,81 euros au titre des intérêts de retard sur les loyers et charges demeurés impayés ;

sur le fondement de la convention d'occupation précaire : la somme de 30 272,05 euros au titre des charges incombant au preneur et frais d'entretien des trappes de désenfumage.

* Sur la première somme, il convient de relever que la SCI des Toits en Shed produit divers décomptes adressés à l'association CFAI les 28 septembre 2012, 21 février 2013 et 18 mars 2013. Elle produit un dernier décompte actualisé au 26 avril 2013.

Contrairement à ce que soutient la bailleresse, le preneur a contesté cette dette par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 février 2013 puis au cours des instances ultérieures. Il ne saurait donc être considéré que l'association CFAI ait reconnu en être débitrice.

Le contrat de bail qui fait la loi entre les parties prévoit que « toute somme due à titre de loyers, charges ou accessoires et non payée à son échéance sera de plein droit et à dater de ladite échéance productive au profit du bailleur d'un intérêt conventionnellement fixé à une fois et demie le taux d'intérêt légal appliqué prorata temporis par mois de retard jusqu'à complet paiement. »

La convention ne prévoit pas que les éventuelles sommes dues par le preneur produisent des intérêts à un taux particulier.

Le bailleur ne saurait donc demander à l'association CFAI des intérêts de retard majorés à une fois et demie le taux d'intérêt légal sur les sommes dues en application de la convention d'occupation précaire.

Il ressort des décomptes produits qu'à l'expiration du contrat de bail, l'association CFAI était redevable envers la SCI des Toits en Shed de sommes au titre des loyers et charges échus mais demeurés impayés. Au 28 septembre 2012, les intérêts de retard sur ces sommes étaient de 1 672,19 euros.

Selon ces pièces, les intérêts de retard sur ces sommes étaient de :

1 672,19 euros le 28 septembre 2012,

1 727,80 euros le 1er octobre 2012, date d'entrée en vigueur de la convention d'occupation précaire.

L'association CFAI a réglé une somme de 50 346,61 euros le 11 octobre 2012.

Ce paiement était inférieur aux sommes dues au titre du contrat de bail, d'un montant de 52 212,40 euros en principal, outre 1 727,80 euros d'intérêts.

Néanmoins, dans les décomptes suivants, la SCI des Toits en Shed a considéré sa créance comme un tout et calculé des intérêts au taux contractuellement majoré pour la totalité de la somme restant due, pourtant déjà composée en partie d'intérêts. Faisant ainsi produire des intérêts majorés à des intérêts majorés.

Elle a ensuite facturé des intérêts de retard au même taux contractuellement majoré concernant les sommes restant dues en exécution de la convention d'occupation précaire, alors que celle-ci ne le prévoyait pas.

Ce faisant, la bailleresse a agi en-dehors de toute prévision contractuelle ou légale.

L'association CFAI sera donc condamnée à verser à la SCI des Toits en Shed la somme de 1 727,80 euros au titre des intérêts de retard portant sur les sommes dues en application du contrat de bail commercial.

La décision déférée sera infirmée sur ce point.

* Selon la SCI des Toits en Shed, la seconde somme est ainsi composée :

au titre des charges dues en vertu de la convention d'occupation : 28 767,32 euros,

au titre des frais d'entretien des trappes de désenfumage : 1 504,73 euros.

Elle soutient ainsi que pour la durée de la convention d'occupation, les charges incombant au preneur ont représenté une somme de 56 036,12 euros, et que la preneuse ayant versé à titre de provisions sur charges la somme de 27 268,80 euros, elle est redevable d'une somme de 28 767,32 euros au titre de la consommation d'eau, d'électricité, de l'assurance, de la facture de nettoyage des descentes d'eau, de la facture d'AMS Sécurité, de la facture de la société Aid'Acte, et des frais d'avocat.

Si elle justifie avoir sollicité l'association CFAI pour obtenir le règlement de cette somme à plusieurs reprises, y compris par mise en demeure du 15 février 2013, c'est à tort qu'elle argue que la preneuse n'a jamais contesté ces sommes.

Il ressort en effet des motifs du jugement déféré qu'elle avait conclu au débouté de ces demandes, au motif qu'elles n'étaient pas justifiées.

La SCI des Toits en Shed ne produit aucun document justifiant du montant des charges effectivement engagées pour la durée de la convention d'occupation précaire et incombant au preneur en application de cette dernière.

Le montant global demandé n'est d'ailleurs pas détaillé poste par poste.

Dans ces conditions, faute pour elle de justifier du montant de sa créance, et du fait que les provisions versées aient été insuffisantes, elle sera déboutée de cette demande.

La décision déférée sera également infirmée de ce chef.

Sur la restitution du dépôt de garantie

Les articles 378 et 379 du code de procédure civile disposent que la décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine.

Le sursis à statuer ne dessaisit pas le juge. À l'expiration du sursis, l'instance est poursuivie à l'initiative des parties ou à la diligence du juge, sauf la faculté d'ordonner, s'il y a lieu, un nouveau sursis. Le juge peut, suivant les circonstances, révoquer le sursis ou en abréger le délai.

La demande de sursis à statuer doit être soulevée avant toute défense au fond ou toute fin de non-recevoir.

Hors les cas où cette mesure est prévue par la loi, les juges du fond apprécient discrétionnairement l'opportunité du sursis à statuer dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice.

Par ailleurs aux termes de l'article 954, alinéa 2 du code de procédure civile, les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif ; la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Sur ce,

En l'espèce, les conclusions de l'association CFAI ayant été déclarées irrecevables, la cour d'appel n'est plus saisie de la demande en restitution du dépôt de garantie formulée en première instance, à laquelle il avait été partiellement fait droit.

Néanmoins, la cour est saisie par l'appelante d'une demande d'infirmation du jugement sur ce point.

Par arrêt du 19 avril 2018, la cour d'appel de Douai a condamné in solidum les deux associations preneuses à verser à la SCI des Toits en Shed la somme de 280 000 euros au titre des réparations locatives, ainsi que la somme de 122 100 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice de perte de loyers.

Cet arrêt, frappé de pourvoi en cassation, n'est pas revêtu de l'autorité de la chose jugée, quand bien même ce recours n'est pas suspensif.

La cour d'appel relève cependant que si l'objet du présent litige n'est pas de statuer sur le principe et le montant des travaux de reprise incombant au preneur, la restitution du dépôt de garantie ne saurait intervenir, conformément aux dispositions contractuelles, avant que le preneur ait rempli ses obligations.

Elle ne saurait donc intervenir tant qu'un litige est pendant concernant les obligations de l'association CFAI envers la SCI des Toits en Shed.

Il convient donc, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, de surseoir à statuer sur la demande d'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a ordonné une restitution partielle du dépôt de garantie, jusqu'à ce qu'une décision définitive soit intervenue, tranchant le principe et le montant de l'indemnisation due par le preneur au bailleur au titre des travaux de reprise.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Il sera également et dans les mêmes conditions sursis à statuer sur la demande de la SCI des Toits en Shed au titre des dépens et des frais irrépétibles non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

- Confirme la décision déférée en ce qu'elle a :

débouté l'association CFAI de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;

- Infirme la décision déférée en ce qu'elle a :

condamné l'association CFAI à payer à la SCI des Toits en Shed la somme de 30 272,05 euros au titre des charges restant dues au titre de la convention d'occupation précaire ;

débouté la SCI des Toits en Shed de sa demande de paiement des charges dues au titre du bail commercial ;

Statuant à nouveau :

- Condamne l'association CFAI à verser à la SCI des Toits en Shed la somme de 1 727,80 euros au titre des intérêts de retard portant sur les sommes dues en application du contrat de bail commercial ;

- Déboute la SCI des Toits en Shed du surplus de ses demandes à ce titre ;

- Déboute la SCI des Toits en Shed de sa demande en paiement au titre des charges dues en vertu de la convention d'occupation et de l'entretien des trappes de désenfumage ;

Y ajoutant :

- Sursoit à statuer sur la demande de la SCI des Toits en Shed tendant à l'infirmation de la décision déférée en ce qu'elle a condamné la SCI des Toits en Shed à restituer la garantie à hauteur de 18 770,84 euros, et ordonné la compensation des sommes dues au titre de la restitution de la garantie et du paiement des charges dues au titre de la convention d'occupation précaire, et ce jusqu'à ce qu'une décision définitive soit intervenue, tranchant le principe et le montant de l'indemnisation due par le preneur au bailleur au titre des travaux de reprise ;

- Sursoit à statuer sur les demandes de la SCI des Toits en Shed s'agissant des dépens et frais irrépétibles, jusqu'à ce qu'une décision définitive soit intervenue, tranchant le principe et le montant de l'indemnisation due par le preneur au bailleur au titre des travaux de reprise.

Le greffierLe président

Valérie RoelofsMarie-Annick Prigent


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 15/07490
Date de la décision : 22/11/2018

Références :

Cour d'appel de Douai 21, arrêt n°15/07490 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-22;15.07490 ?
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