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06/09/2018 | FRANCE | N°18/00598

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 3, 06 septembre 2018, 18/00598


République Française


Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI


CHAMBRE 8 SECTION 3


ARRÊT DU 06/09/2018


N° de MINUTE :


N° RG 18/00598 - N° Portalis DBVT-V-B7C-RKIY


Jugement (N° 16/00156) - Jonction avec 18/2589


rendu le 20 Décembre 2017


par le juge de l'exécution de Lille


APPELANTE





Sci 85 rue Nationale


ayant son siège social : [...]





Représentée par Me Christian X..., avocat au barreau de Lille






INTIMÉES





Sa Banque Palatine agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux


domiciliés en cette qualité audit siège.


ayant son siège social : [...]





Représentée par Me Bernar...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 3

ARRÊT DU 06/09/2018

N° de MINUTE :

N° RG 18/00598 - N° Portalis DBVT-V-B7C-RKIY

Jugement (N° 16/00156) - Jonction avec 18/2589

rendu le 20 Décembre 2017

par le juge de l'exécution de Lille

APPELANTE

Sci 85 rue Nationale

ayant son siège social : [...]

Représentée par Me Christian X..., avocat au barreau de Lille

INTIMÉES

Sa Banque Palatine agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

domiciliés en cette qualité audit siège.

ayant son siège social : [...]

Représentée par Me Bernard Y..., avocat au barreau de Douai et Me Z..., avocat au barreau de Paris

Etablissement Public Service des Impots des Particuliers

ayant son siège social : [...]

Auquel l'assignation à jour fixe a été délivrée à personne habilitée le 24 mai 2018, n'a pas constitué avocat

DÉBATS à l'audience publique du 21 Juin 2018 tenue par Bénédicte A... magistrate chargée d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Elisabeth F...

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Hélène G..., première présidente de chambre

Bénédicte A..., conseillère

Emilie Pecqueur, conseillère

ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 06 Septembre 2018 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Hélène G..., présidente et Elisabeth F..., greffière, auquel la minute a été remise par la magistrate signataire.

Par acte notarié en date 13 février 2009, la société anonyme banque Palatine ci-après dénommée la SA banque Palatine a consenti à la société civile immobilière [...] ci-après dénommée la SCI 85 Rue Nationale un prêt d'un montant de 963 000 euros d'une durée de 180 mois dont 3 mois de différé en capital, remboursable en une trimestrialité en intérêts de 14 083,88 euros suivie de 59 trimestrialités en capital et intérêts de 24 467,34 euros au taux fixe de 5,85% l'an et destiné à financer l'acquisition d'un ensemble immobilier sis [...] .

En garantie de sa créance, la SA banque Palatine bénéficie d'un privilège de prêteurs de deniers et d'une hypothèque conventionnelle publiée le 31 mars 2009 au service de la publicité foncière de Lille, 3ème bureau sous les références volume 2009 V n°862.

Suite à des impayés, la SA banque Palatine a fait délivrer à la SCI 85 Rue Nationale, le 11 avril 2016, un commandement de payer valant saisie immobilière, commandement qui a été publié au service de la publicité foncière de Lille 3, le 6 juin 2016 sous les références volume 2016 S n°35.

Par assignation en date du 26 juillet 2016, la SA banque Palatine a attrait la SCI 85 Rue Nationale devant le juge de l'exécution chargé des saisie immobilières du tribunal de grande instance de Lille. Le cahier des conditions de vente a été déposé au greffe du tribunal de grande instance de Lille le 27 juillet 2016.

La décision frappée d'appel

Par jugement rendu le 20 décembre 2017, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lille a :

- mentionné le montant retenu pour la créance de la SA banque Palatine comme s'élevant à la somme totale de 1 105 967,06 euros en principal, intérêts de retard, accessoires selon décompte arrêté au 11 mars 2016, outre les intérêts de retard au taux de 5,85 % majoré de 3% soit 8,85 % à compter du 12 mars 2016 jusqu'à parfait paiement (et ce, sans préjudice de l'imputation de tout encaissement effectué postérieurement à l'arrêté de compte sus-visé)

- autorisé la vente amiable du bien saisi pour un prix qui ne pourra être inférieur à 1 200.000 euros (net vendeur)

- taxé les frais de poursuites à la somme de 16 255,26 euros

- rappelé qu'en application des dispositions de l'article R.322-23 du code des procédures civiles d'exécution, le prix de vente de l'immeuble ainsi que toute somme acquittée par l'acquéreur à quelque titre que ce soit sont consignés auprès de la caisse des dépôts et consignations ;

- rappelé que les frais taxés doivent être versés directement par l'acquéreur en sus du prix de vente ;

- dit que l'affaire sera rappelée à l'audience du mercredi 18 avril 2018 à 9h00 (palais de justice de Lille, [...] ) afin que soient vérifiées la conclusion de la vente, la conformité de celle-ci aux conditions fixées et la consignation du prix ;

- dit que les dépens inhérents à la présente décision sont compris dans les frais de vente soumis à taxe ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes dont celles formulées en application des articles 700 du code de procédure civile.

La procédure d'appel

Par déclaration au greffe en date du 25 janvier 2018, la SCI 85 Rue Nationale a interjeté appel de ce jugement.

Le 30 janvier 2018, la SCI 85 Rue Nationale, par la voie de son conseil, a adressé au président de la cour d'appel de Douai une requête aux fins d'être autorisée à assigner à jour fixe la SA banque Palatine.

Par ordonnance du 31 janvier 2018, la présidente de la 8ème chambre de la cour d'appel de Douai agissant par délégation du premier président a autorisé la SCI 85 Rue Nationale à assigner à jour fixe la SA banque Palatine à l'audience de la 8ème chambre section 3 du 17 avril 2018.

Par acte d'huissier en date du 2 février 2018, la SCI 85 Rue Nationale a fait assigner à jour fixe pour l'audience du17 avril 2018 la SA banque Palatine.

L'affaire a été enrôlée sous la référence RG 18/00598.

Par déclaration au greffe en date du 2 mai 2018, la SCI 85 Rue Nationale a une nouvelle fois interjeté appel du jugement sus-mentionné mais cette fois à l'encontre du service des impôts des particuliers de Tourcoing Sud en sa qualité de créancier inscrit.

Le 2 mai 2018, la SCI 85 Rue Nationale, par la voie de son conseil, a adressé au président de la cour d'appel de Douai une requête aux fins d'être autorisée à assigner à jour fixe le service des impôts des particuliers de Tourcoing sud en sa qualité de créancier inscrit.

Par ordonnance du 16 mai 2018, la présidente de la 8ème chambre de la cour d'appel de Douai agissant par délégation du premier président a autorisé la SCI 85 Rue Nationale à assigner à jour fixe le service des impôts des particuliers de Tourcoing sud à l'audience de la 8ème chambre section 3 du 21 juin 2018.

Par acte d'huissier en date du 24 mai 2018, la SCI 85 Rue Nationale a fait assigner à jour fixe pour l'audience du 21 juin 2018 le service des impôts des particuliers de Tourcoing sud .

L'affaire a été enrôlée sous la référence RG 18/02589.

Bien qu'ayant été enjoint de constituer avocat, le service des impôts des particuliers de Tourcoing sud n'a ni constitué avocat, ni conclu.

Dans ses conclusions signifiées le 19 juin 2018, la SCI 85 Rue Nationale demande à la cour de prononcer la jonction avec l'affaire RG 18/02589, infirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a autorisé la vente amiable et de :

à titre principal

- annuler la procédure de saisie immobilière initiée par la SA banque Palatine et ordonner la mainlevée du commandement et de tous les actes subséquents,

- condamner la SA banque Palatine à lui payer une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

- la condamner aux entiers frais et dépens,

à titre subsidiaire,

- constater que la SA banque Palatine ne justifie pas du quantum du taux effectif global, prononcer sa nullité et enjoindre la SA banque Palatine à produire un décompte actualisé avec mention de l'intérêt légal,

- réduire l'indemnité contractuelle à la somme de 100 euros

- fixer la majoration d'intérêt à 0.5 %

Au soutien de ses prétentions, elle explique que son appel est recevable, ayant également interjeté appel à l'encontre du service des impôts des particuliers de Tourcoing sud et ayant délivré à cette fin une assignation, raison pour laquelle la jonction des deux affaires est justifiée.

Elle affirme que lors de la signature de l'acte notarié le 13 février 2009, la SA banque Palatine était représentée par M. Alexandre B... mais que dans la procuration, ce nom, ni la qualité du représentant n'étaient indiqués.

Elle précise qu'elle n'était pas non plus correctement représentée lors de la signature de l'acte notarié, ayant donné pouvoir à M. H... à cette fin et non à M. Cédric C..., ce qui justifie que cet acte notarié ne peut être considéré comme un titre exécutoire mais comme un simple acte sous seing privé au en vertu de l'article 1318 du code civil.

Elle estime que sa contestation relative au taux effectif global n'est pas prescrite, et ce d'autant que cette exception de nullité est perpétuelle. Elle affirme que l'intimée ne justifie pas des éléments composant ce taux effectif global et que tant l'indemnité contractuelle que la majoration du taux d'intérêts de trois points s'analysent comme des clauses pénales qui doivent être réduites à de plus justes proportions.

Elle soutient enfin que l'opposition de la SA banque Palatine à la vente amiable est incompréhensible au regard du fait que cet immeuble est difficilement vendable aux enchères de Lille comme il s'agit d'un immeuble de rapport et que le premier juge a fixé un prix plancher bien en deçà de l'évaluation dont se prévaut l'intimée.

En réplique, dans ses conclusions signifiées par voie électronique le 30 mars 2018, la SA banque Palatine demande à la cour de déclarer irrecevable l'appel interjeté par la SCI 85 Rue Nationale et de :

- condamner la SCI 85 Rue Nationale à payer à la SA banque Palatine la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens ;

à titre subsidiaire ;

- confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a autorisé la vente amiable du bien saisi pour un prix qui ne pourra être inférieur à 1 200 000 euros,

- débouter la SCI 85 Rue Nationale de sa demande de vente amiable du bien saisi,

- ordonner la vente forcée de l'immeuble appartenant à la SCI 85 Rue Nationale sur la mise à prix de 500 000 euros,

- fixer la date d'adjudication de l'immeuble ;

- fixer les modalités de visite de l'immeuble saisi en autorisant l'intervention de la SCP Waterlot, Huissiers de justice associés à Lille, qui a établi le procès-verbal de description des biens saisis pour assurer la visite des biens saisis en se faisant assister si besoin est de toute personne nécessaire ;

Au soutien de ses prétentions, la SA banque Palatine fait valoir que l'appel de la SCI 85 Rue Nationale est irrecevable comme en matière de saisie immobilière, l'appel est indivisible et que l'appelante n' a pas intimé le service des impôts des particuliers de Tourcoing sud en sa qualité de créancier inscrit.

Elle explique que les irrégularités affectant la représentation conventionnelle d'une partie à un acte notarié ne relèvent pas des défauts de forme prévus à l'article 1318 du code civil mais sont sanctionnés par la nullité relative de l'acte, que la partie représentée peut seule demander sauf s'il y a une ratification qui peut être tacite et résulter de l'exécution volontaire du contrat. Elle souligne que la contestation du taux effectif global par l'appelante est prescrite et ce comme ayant contracté ce prêt à titre professionnel, elle ne saurait se prévaloir des dispositions protectrices de l'article L.313-10 du code de la consommation. Elle soutient que l'action en nullité de ce taux effectif global ne relève pas du régime des exceptions de nullité à caractère perpétuel, étant observé au surplus que le caractère erroné de taux effectif global n'est nullement démontré.

Elle souligne enfin que faute de la part du juge de caractériser une disproportion particulièrement évidente en ce qui concerne la clause pénale, il ne peut la réduire en raison de son caractère intangible et que malgré une mise en vente du bien saisi depuis le 16 janvier 2016, la SCI 85 Rue Nationale ne justifie d'aucune offre d'achat et encore moins d'un compromis signé.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

L'affaire a été plaidée à l'audience du 21 juin 2018 et mise en délibéré au 6 septembre 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel

L'article R. 322-19 du code des procédures civiles d'exécution prévoit que l'appel contre le jugement d'orientation est formé, instruit et jugé selon la procédure à jour fixe sans que l'appelant ait à se prévaloir dans sa requête d'un péril.

En application des dispositions des articles 917 et suivants du code de procédure civile et en particulier de l'article 922, l'appelant autorisé par ordonnance du premier président assigne la partie intimée pour le jour fixé par la remise d'une copie de l'assignation au greffe avant la date fixée pour l'audience.

Aux termes de l'article 552 du code de procédure civile, en cas de solidarité ou d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel formé par l'une conserve le droit d'appel des autres, sauf à ces dernières à se joindre à l'instance. Dans les mêmes cas, l'appel dirigé contre l'une des parties réserve à l'appelant la faculté d'appeler les autres à l'instance.

Il est constant que l'appel en matière de saisie immobilière est indivisible à l'égard tant des débiteurs que du créancier poursuivant et de tous les créanciers inscrits, dès lors que les différentes étapes de la procédure affectent l'ensemble des parties et que tout jugement rendu au cours de cette procédure aura effet à l'égard de toutes, tout créancier inscrit pouvant notamment se subroger à l'audience d'adjudication dans les droits du poursuivant, et tous participant à la distribution du prix.

En l'espèce, la SCI 85 Rue Nationale a interjeté une première fois appel du jugement entrepris le 20 décembre 2017 mais seulement à l'encontre de la SA banque Palatine et a été autorisée, selon une ordonnance de la présidente de la 8ème chambre civile de cette cour a assigné à jour fixe cette même banque à l'audience du 17 avril 2018 qui a été renvoyée à celle du 21 juin 2018.

Puis, par déclaration d'appel en date du 2 mai 2018, la SCI 85 Rue Nationale a de nouveau interjeté appel de cette même décision mais cette fois a intimé le service des impôts des particuliers de Tourcoing sud en sa qualité de créancier inscrit, étant observé qu'elle a reçu l'autorisation de l'assigner à jour fixe pour l'audience du 21 juin 2018 selon une ordonnance du 16 mai 2018

Or, lorsque la matière est indivisible, l'appel interjeté en temps utile contre l'une des parties conserve le droit de l'appelant vis-à-vis des autres et couvre l'irrégularité ou la tardiveté d'intimation tant que le juge n'a pas statué, encore faut-il que tous les intéressés aient été mis en cause devant la juridiction d'appel, ce qui est le cas en l'espèce. Dès lors et au regard de ces éléments, il convient de rejeter l'irrecevabilité de l'appel soulevée par la SA banque Palatine et d'ordonner la jonction des affaires RG 18/00598 et RG 18/02589 sous le numéro RG 18/00598.

Sur le titre exécutoire

Il ressort de l'acte notarié conclu le 13 février 2009 que lors la signature de cet acte, la SA banque Palatine était représentée par M. Alexandre B..., clerc de notaire et que la SCI 85 Rue Nationale était, quant à elle, représentée par M. Cédric C..., clerc de notaire également.

Selon la procuration annexée à cet acte notarié, la SA banque Palatine avait donné pouvoir aux clercs de notaires de l'étude de Maîtres D..., I... , E... et Lievre sans qu'il soit précisé le nom de M. Alexandre B... et sa qualité.

Toutefois, compte tenu que la nullité d'un contrat pour absence de pouvoir ne peut être demandée que par la partie représentée au sens de l'article 1984 du code civil, l'irrégularité de l'acte notariée soulevée par l'appelante à raison de cette absence de pouvoir concernant la SA banque Palatine ne peut prospérer.

Pa ailleurs, il est incontestable que la SCI 85 Rue Nationale a donné procuration à M. H... , clerc de notaire pour la représenter à la signature de l'acte notarié et que ledit acte authentique a été signé en son nom par M. Alexandre B... en sa qualité de clerc de notaire.

Toutefois et malgré ce qu'affirme l'appelante, les irrégularités affectant la représentation conventionnelle d'une partie à un acte notarié ne relèvent pas des défauts de forme que l'article 1318 du code civil sanctionne par la perte du caractère authentique et donc exécutoire de cet acte, défauts qui s'entendent de l'inobservation des formalités requises pour l'authentification par l'article 41 du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971, dans sa rédaction issue de celui n° 2005-973 du 10 août 2005 applicable en la cause.

En effet, ces irrégularités relatives à une absence de pouvoir sont sanctionnées par la nullité relative de l'acte accompli pour le compte de la partie représentée, qui peut seule la demander, à moins qu'elle ratifie ce qui a été fait pour elle hors ou sans mandat, dans les conditions de l'article 1998, alinéa 2, du code civil.

Cette ratification peut être tacite et résulter de l'exécution volontaire du contrat par la partie qui y est régulièrement représentée, ce qui est le cas en la présente affaire, dès lors que la SCI 85 Rue Nationale a employé les fonds versés conformément à leur destination à savoir l'acquisition de l'immeuble sis [...] et s'est acquitté des échéances du prêt selon les termes convenus aux échéanciers annexés à l'acte notarié sur la période allant du 13 février 2009 au 13 mai 2012. Cette exécution volontaire du contrat de prêt témoigne donc sans équivoque de sa ratification par la SCI 85 Rue Nationale, raison pour laquelle la demande de l'appelante visant à ordonner la mainlevée du commandement de payer valant saisie immobilière en l'absence de titre exécutoire doit être rejetée.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

Sur la prescription de la contestation du taux effectif global

Si, aux termes de l'article 1907, alinéa 2, du code civil, le taux de l'intérêt conventionnel doit être fixé par écrit, il résulte de ce texte et de l'article 1304 du même code que la prescription de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel engagée par un emprunteur qui a obtenu un concours financier pour les besoins de son activité professionnelle court à compter du jour où il a connu ou aurait dû connaître le vice affectant le taux effectif global et que le point de départ de cette prescription, quand il s'agit d'un prêt, est la date de la convention.

En l'espèce, il ressort des statuts de la SCI 85 Rue Nationale qu'il est indéniable que cette dernière est un emprunteur professionnel, son objet social étant défini comme "l'acquisition de biens immobiliers. La propriété, la gestion, l'administration de biens dont elle pourrait devenir propriétaire par la suite, par la voie d'acquisition, échange, apport ou autrement.../...".

Le taux effectif global étant bien mentionné dans le contrat de prêt au paragraphe "caractéristique du prêt", la SCI 85 Rue National en a eu connaissance lors de la signature du prêt à savoir le 13 février 2009.

Dès lors, dès lors que la sanction de la méconnaissance des dispositions sus-mentionnées édictées dans le seul intérêt de l'emprunteur est la nullité de la clause portant intérêts, cette sanction ne peut être encourue si elle n'a pas été demandée dans un délai de cinq ans suivant la signature de l'acte de prêt ; la SCI 85 Rue Nationale est donc irrecevable en raison de la prescription au sens de l'article 122 du code de procédure civile à agir en contestation du taux effectif global, faute d'avoir introduit son action avant le 13 février 2014 et étant observé que l'exécution du contrat de prêt pendant plus de trois années fait échec au caractère perpétuel de l'exception de nullité soulevée.

Le jugement du juge de l'exécution sera donc confirmé sur ce point.

Sur l'indemnité de résiliation et la majoration du taux d'intérêt

Aux termes de l'article 1231-5 du code civil, lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre. Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.

C'est par des motifs pertinents que le premier juge a décidé que l'appelante n'établissait pas le caractère manifestement excessif tant de l'indemnité contractuelle et que de la majoration des taux d'intérêts en ce que cette indemnité ne représentait que 2% du capital restant dû et que la majoration de trois points permettait de compenser la perte des intérêts conventionnels du fait de la déchéance du terme, intervenue après plus de 5 ans d'amortissement s'agissant d'un prêt à long terme amortissable sur 15 ans. La demande de la SCI 85 Rue Nationale visant à réduire tant l'indemnité contractuelle que la majoration des intérêts sera donc rejetée et le jugement entrepris confirmé de ce chef mais également en ce qu'il a fixé la créance de la SA banque palatine à la somme de 1 105 967,05 euros.

Sur la demande de vente amiable

L'article R.322-15 du code des procédures civiles d'exécution prévoit qu'à l'audience d'orientation, le juge de l'exécution, après avoir entendu les parties présentes ou représentées, vérifie que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 sont réunies, statue sur les éventuelles contestations et demandes incidentes et détermine les modalités de poursuite de la procédure, en autorisant la vente amiable à la demande du débiteur ou en ordonnant la vente forcée. Lorsqu'il autorise la vente amiable, le juge s'assure qu'elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur.

Selon l'article R.322-21 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution qui autorise la vente amiable fixe le montant du prix en deçà duquel l'immeuble ne peut être vendu eu égard aux conditions économiques du marché ainsi que, le cas échéant, les conditions particulières de la vente. Le juge taxe les frais de poursuite à la demande du créancier poursuivant. Il fixe la date de l'audience à laquelle l'affaire sera rappelée dans un délai qui ne peut excéder quatre mois. A cette audience, le juge ne peut accorder un délai supplémentaire que si le demandeur justifie d'un engagement écrit d'acquisition et qu'à fin de permettre la rédaction et la conclusion de l'acte authentique de vente. Ce délai ne peut excéder trois mois.

La SCI 85 Rue Nationale produit aux débats deux mandats de vente sans exclusivité dont le premier en date du 16 janvier 2016 est en partie illisible et dont le second a été conclu le 20 septembre 2017 ainsi qu'un rapport d'expertise de valeur du bien saisi en date du 24 mai 2016 mais aucune offre d'achat, ni même de comptes rendus de visite permettant de justifier que la vente pourrait être conclue dans des conditions et délais satisfaisants alors même que cela fait plus de deux ans que l'immeuble a été mis sur le marché de l'immobilier, le fait que le gérant de la SCI 85 Rue Nationale dirige des société ayant une activité de marchand de biens n'ayant manifestement pas contribué à une vente rapide de l'immeuble.

Dès lors, il est patent que les conditions des articles sus-mentionnés ne sont pas réunies, raison pour laquelle il convient d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a autorisé la vente amiable du bien saisi et d'en ordonner la vente aux enchères publiques sur la mise à prix et aux conditions fixées dans le cahier des conditions de vente fixée par le créancier.

Sur les demandes accessoires

Les frais inhérents à la présente décision seront compris dans les frais privilégiés de vente soumis à taxe.

L'équité commande de faire droit à la demande formulée par la banque SA banque Palatine au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de la somme de 2 500 euros.

PAR CES MOTIFS

Rejette l'irrecevabilité de l'appel soulevée par la SA banque Palatine,

Ordonne la jonction des affaires RG 18/00598 et RG 18/02589 sous le numéro RG 18/00598,

Confirme le jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lille en date du 20 décembre 2017 sauf en ce qu'il a autorisé la vente amiable du bien saisi, objet du commandement de payer valant saisie immobilière,

Statuant à nouveau

Ordonne la vente forcée du bien immobilier saisi figurant au commandement de payer valant saisie immobilière en date du 11 avril 2016, sur la mise à prix et aux conditions fixées dans le cahier des conditions de vente,

Renvoie l'affaire devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lille aux fins de fixation de la date de l'audience d'adjudication et des modalités de visite des lieux,

Y ajoutant

Condamne la SCI 85 Rue Nationale à verser à la SA banque Palatine la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les frais inhérents à la présente décision seront compris dans les frais privilégiés de vente soumis à taxe.

La greffière, La présidente,

E. F... H. G...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 3
Numéro d'arrêt : 18/00598
Date de la décision : 06/09/2018

Références :

Cour d'appel de Douai 83, arrêt n°18/00598 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-09-06;18.00598 ?
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