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17/05/2018 | FRANCE | N°17/01994

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 17 mai 2018, 17/01994


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 17/05/2018





***





N° de MINUTE : 18/

N° RG : 17/01994



Jugement (N° 2015/1552) rendu le 08 février 2017 par le tribunal de commerce d'Arras





APPELANTE



Société Caisse régionale de crédit agricole Mutuel Nord de France prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité

1]

représentée par Me Eric Devaux, avocat au barreau de Béthune



INTIMÉ



M. [C] [A]

né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 2] (62750)

de nationalité française

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]
...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 17/05/2018

***

N° de MINUTE : 18/

N° RG : 17/01994

Jugement (N° 2015/1552) rendu le 08 février 2017 par le tribunal de commerce d'Arras

APPELANTE

Société Caisse régionale de crédit agricole Mutuel Nord de France prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Eric Devaux, avocat au barreau de Béthune

INTIMÉ

M. [C] [A]

né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 2] (62750)

de nationalité française

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]

représenté et assisté par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 59178002/17/04550 du 25/04/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Douai)

DÉBATS à l'audience publique du 21 février 2018 tenue par Elisabeth Vercruysse magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Stéphanie Hurtrel

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Marie-Annick Prigent, président de chambre

Elisabeth Vercruysse, conseiller

Marie-Laure Aldigé, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 17 mai 2018 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Marie-Annick Prigent, président et Stéphanie Hurtrel, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 1er février 2018

***

FAITS ET PROCÉDURE

LA SARL Garage de la piscine, dont M. [C] [A] était le gérant, a, auprès de la société Caisse Régionale Crédit Agricole Mutuel Nord de France :

- par acte sous seing privé du 26 février 2010, obtenu une ouverture de crédit sur son compte courant en souscrivant un emprunt portant le n° 991 4615 2267, d'un montant de 20 000 euros remboursable avec application d'un taux d'intérêt conventionnel de 6,50 % l'an, pour lequel Mme [V] [A] et M. [C] [A] se sont portés caution à hauteur de la somme de 26 000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard, pour une durée de 120 mois ;

- par acte sous seing privé en date du 12 octobre 2012, souscrit un emprunt portant le n° 991 4924 4022 garantissant une ouverture de crédit de trésorerie d'un montant de 50 000 euros pour une durée de 24 mois aux termes de laquelle l'emprunteur s'engageait à souscrire au bénéfice du prêteur des billets à ordre d'un montant égal aux sommes dont il demandait la mise à disposition, et pour lequel Mme [H] [J] et M. [C] [A] se sont portés chacun caution solidaire de la SARL Garage de la Piscine dans la limite de la somme de 65 000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard pour une durée de 48 mois ;

- par acte sous seing privé en date du 12 octobre 2012, souscrit un emprunt portant le n° 991 4924 1627 d'un montant de 50 000 euros remboursable en 60 échéances avec application d'un taux d'intérêt conventionnel de 3,25 % l'an, et pour lequel Mme [H] [J] et M. [C] [A] se sont portés chacun caution solidaire de la SARL Garage de la Piscine dans la limite de la somme de 65 000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard pour une durée de 48 mois.

Par jugement en date du 25 mars 2015, le tribunal de commerce d'Arras a placé la SARL Garage de la piscine en liquidation judiciaire et a nommé Me [W] en qualité de liquidateur judiciaire.

Par courrier recommandé en date du 1er avril 2015, la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France a déclaré le montant de ses créances entre les mains de Me [W] pour la somme totale de 164 945,70 euros outre intérêts, à titre privilégié, soit :

- au titre du prêt n° 991 4924 1627 : la somme de 27 760,76 euros outre intérêts de retard à compter du 25 mars 2015 au taux de 3,25 %, majoré de 4 points jusqu'à complet paiement,

- au titre de l'ouverture de crédit en compte courant n° 991 4615 2267 : la somme de 102 184,94 euros,

- au titre du plafond court terme n° 991 4924 4022 : la somme de 35 000 euros.

Ces trois créances ont été admises à titre privilégié pour leurs montants déclarés, par ordonnances du juge-commissaire du tribunal de commerce d'Arras en date du 11 octobre 2016.

Par acte du 21 mai 2015 la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France a assigné M. [C] [A] pour le voir condamner à payer en sa qualité de caution solidaire les sommes de :

- 26 000 euros augmentés des intérêts courus et à courir au taux de 6,50% l'an à compter du 31 mars 2015 jusqu'à parfait paiement,

- 35 000 euros augmentés des intérêts courus et à courir au taux de 6% l'an à compter du 31 mars 2015 jusqu'à parfait paiement,

- 27 760,76 euros augmentés des intérêts courus et à courir au taux de 3,25% l'an à compter du 31 mars 2015 jusqu'à parfait paiement, outre une indemnité procédurale.

Par jugement contradictoire en date du 08 février 2017, le tribunal de commerce d'Arras a, constatant que la banque ne justifiait pas avoir déclaré sa créance dans les délais légaux  :

- débouté la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France à supporter les entiers frais et dépens de l'instance.

Par déclaration en date du 24 mars 2017, la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France a interjeté appel de cette décision.

PRÉTENTIONS

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 04 octobre 2017, la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France demande à la cour d'appel au visa des articles 1146 et suivants (anciens), 1184 (ancien), et 2284 et suivants du code civil et de l'article L.622-28 du code de commerce de :

- réformer le jugement déféré,

- condamner en sa qualité de caution solidaire, M. [C] [A] au paiement de :

26 000 euros augmentés des intérêts courus et à courir au taux de 6,50% l'an à compter du 31 mars 2015 jusqu'à parfait paiement,

35 000 euros augmentés des intérêts courus et à courir au taux de 6% l'an à compter du 31 mars 2015 jusqu'à parfait paiement,

27 760,76 euros au titre du solde du prêt du 18 octobre 2012 augmentés des intérêts courus et à courir au taux de 3,25 % l'an à compter du 31 mars 2015 jusqu'à parfait paiement,

- condamner M. [C] [A] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Au soutien de ses demandes, elle fait principalement valoir :

- qu'elle justifie avoir régulièrement déclaré sa créance au titre des trois prêts, que ces créances ont d'ailleurs été admises par ordonnance du juge-commissaire,

- sur l'ouverture de crédit en compte courant :

- que jusqu'à début mars 2015 le compte a fonctionné de manière à peu près normale, atteignant une position créditrice le 6 mars 2015,

- que dans les jours qui ont suivi le débit du compte a connu un accroissement extraordinaire suite à la remise de chèques qui se sont avérés sans provision, qu'elle n'est en rien responsable de ce débit, que seul M. [C] [A] est à même d'expliquer,

- sur le crédit de trésorerie :

- que deux billets à ordre ont été souscrits pendant la durée de validité du contrat, pour un montant total de 35 000 euros,

- qu'aucune disposition légale interdit à une caution de souscrire un engagement pour une durée supérieure à celle du concours garanti,

- sur le prêt professionnel :

- que la fiche de solvabilité signée par M. [C] [A] porte mention d'un immeuble commun valorisé à hauteur de 450 000 euros, sans mention de passif, que la banque ne saurait être tenue pour responsable des mentions incomplètes ou erronées relatives à la fiche de solvabilité, qu'elle ne pouvait pas avoir connaissance des autres engagements de caution souscrits,

- qu'au regard de la fiche de solvabilité, aucune disproportion n'existe à la date de souscription de l'engagement de caution.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 27 novembre 2017, M. [C] [A] demande à la cour d'appel au visa de l'article L.341-4 du code de la consommation de :

- confirmer le jugement déféré,

- débouter la Société Coopérative Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France de l'intégralité de ses demandes,

- constater qu'il dénie son écriture,

Subsidiairement

- juger que la société Coopérative Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France a engagé sa responsabilité,

- condamner la société Coopérative Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France à payer un montant équivalent à l'éventuelle condamnation du concluant,

- condamner la société Coopérative Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France aux entiers dépens d'instance et d'appel.

À l'appui de ses prétentions, il argue essentiellement :

- que la banque qui justifie désormais de sa déclaration de créances devra néanmoins être déboutée de ses demandes,

- s'agissant du découvert autorisé, que le montant fut régulièrement dépassé jusqu'à plus de 50 000 euros et que l'augmentation du débit fut causée par des virements et non par des chèques,

- s'agissant des billets à ordre, qu'il n'est pas le signataire de ces billets,

- s'agissant du prêt de 50 000 euros, que la déclaration de patrimoine n'a pas été entièrement remplie de la main de M. [C] [A] et que le chargé d'affaires n'a pas tenu compte de 4 autres engagements de caution,

- que les époux [A] étaient clients depuis 1996 du Crédit Agricole qui avait connaissance de tous leurs comptes professionnels et personnels et qui était informé des problèmes de trésorerie,

- qu'il y avait une énorme disproportion entre les engagements de caution pris par M. [C] [A] et le patrimoine constitué uniquement de leur maison d'habitation,

- subsidiairement :

- que la banque a engagé sa responsabilité en accordant à la société des crédits alors que le bilan faisait apparaître qu'à l'époque les dettes de la société étaient d'un montant de 327 004,62 euros, qu'elle a ainsi engagé sa responsabilité en accordant ce crédit imprudemment,

- qu'en cas de condamnation il conviendra de condamner la banque à payer au concluant le montant équivalent et d'ordonner la compensation.

La cour d'appel renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il sera tout d'abord relevé la récurrence de la même erreur matérielle dans les écritures des parties qui se réfèrent à un prêt souscrit le 18 octobre 2012, alors que les deux contrats litigieux n° 991 4924 1627 et n° 991 4924 4022 ont tous deux été souscrits le 12 octobre 2012, date qui sera donc reprise dans la présente décision.

Sur la disproportion des engagements de caution

Aux termes de l'article L. 332-1 du code de la consommation dans sa version codifiée à droit constant de l'ancien article L. 341-4 par l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation entrée en vigueur le 1er juillet 2016, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Le caractère averti ou non du dirigeant est indifférent pour l'application de l'article L. 341-4 du code de la consommation.

Selon ce texte, la proportionnalité de l'engagement de la caution au regard de ses facultés contributives est évaluée en deux temps : au jour de la conclusion du contrat de cautionnement et, à supposer l'existence d'une disproportion à cette date, au jour de son exécution, la caution pouvant revenir à meilleure fortune.

S'il appartient à la caution de rapporter la preuve du caractère disproportionné de son engagement par rapport à ses biens et revenus au jour de celui-ci, c'est au créancier professionnel d'établir qu'au moment où il l'appelle le patrimoine de la caution lui permet de faire face à son obligation.

La disproportion s'apprécie lors de la conclusion du contrat de cautionnement au regard du montant de l'engagement souscrit et des biens et revenus de chaque caution, et en prenant en considération son endettement global, y compris celui résultant d'engagements de caution. C'est la situation financière globale de la caution, c'est-à-dire ses 'facultés contributives' qui doit être appréhendée au jour de l'engagement. La proportionnalité de l'engagement de la caution ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés de l'opération garantie.

Au sens de ce texte et de la jurisprudence subséquente, une disproportion manifeste au regard des facultés contributives de la caution, est une « disproportion flagrante et évidente pour un professionnel normalement diligent » entre, d'une part, les engagements de la caution, et d'autre part ses biens et revenus.

L'exigence de proportionnalité impose au créancier de s'informer sur la situation patrimoniale de la caution, c'est-à-dire l'état de ses ressources, de son endettement, et de son patrimoine, ainsi que de sa situation personnelle (régime matrimonial).

Le contrôle de l'établissement de crédit repose sur les informations communiquées par les cautions sur une fiche de renseignement. L'établissement bancaire n'est pas tenu de vérifier, en l'absence d'anomalies apparentes, l'exactitude des informations contenues dans la fiche de renseignement. La communication des informations repose sur le principe de bonne foi, à charge pour les cautions de supporter les conséquences d'un comportement déloyal.

Sur ce,

À titre liminaire la cour d'appel relève qu'alors qu'il ne développe de moyens en ce sens que s'agissant du prêt de 50 000 euros souscrit le 12 octobre 2012, M. [C] [A] conclut ce paragraphe par la phrase suivante : « Il y avait une énorme disproportion entre les engagements de caution pris par le concluant et le patrimoine constitué uniquement de leur maison d'habitation. »

Cette phrase doit s'interpréter comme une demande tendant à voir constater la disproportion des trois engagements de caution litigieux.

Il convient en l'espèce de distinguer l'appréciation de la disproportion de l'engagement pris le 26 février 2010 d'une part, de ceux pris le 12 octobre 2012 d'autre part.

S'agissant de l'engagement de caution du 26 février 2010

La société Caisse Régionale Crédit Agricole Mutuel Nord de France ne produit pas de fiche patrimoniale par laquelle elle démontrerait s'être renseignée sur la situation de la caution lors de la souscription de cet engagement.

M. [C] [A] produit la déclaration de revenus du couple selon laquelle au cours de l'année 2010 il n'a pas perçu de revenus, son épouse percevant 16 889 euros de revenus annuels.

Les pièces produites ne permettent pas d'établir la consistance de son patrimoine à cette date.

Les analyses financières réalisées par la banque les 19 octobre 2011 et 18 septembre 2012 montrent qu'en 2010 la SARL Garage de la piscine était une entreprise en bonne santé financière.

Cependant M. [C] [A] justifie par ailleurs qu'à cette date il s'était porté caution de la SARL Garage de la piscine à plusieurs titres, engagements toujours en cours le 26 février 2010 :

- le 31 mars 2004 auprès du Crédit du nord pour un montant de 95 250 euros,

- le 13 septembre 2006 auprès de la société Sofinco pour un montant de 152 000 euros,

- le 7 avril 2008 au titre du bail commercial de la SARL Garage de la piscine pour un montant de 231 120 euros,

- le 4 décembre 2009 auprès de la société Fuchs lubrifiant pour un montant maximal de 70 795,75 euros,

soit un total de 549 165,75 euros.

Le contrat de cautionnement qu'il produit en pièce 5 comporte une date illisible, de sorte qu'il ne peut être retenu à ce titre.

Au vu des éléments produits néanmoins, force est de constater la disproportion entre les capacités contributives de M. [C] [A] et cet engagement de caution au moment de sa souscription.

Il convient donc d'examiner si, au jour de son exécution, c'est-à-dire au jour de l'assignation, l'engagement de M. [C] [A] était ou non proportionné à ses facultés contributives.

La société Caisse Régionale Crédit Agricole Mutuel Nord de France a assigné M. [C] [A] en paiement en qualité de caution le 21 mai 2015.

Il lui revient donc de démontrer qu'à cette date, M. [C] [A] était revenu à meilleure fortune.

Elle ne fait valoir aucun moyen sur ce point.

Elle ne produit sur ce point que trois estimations de la résidence principale des époux [A], à une valeur de 300 000 euros net vendeur. Ce bien étant commun aux époux, la valeur de la part de M. [C] [A] ne peut à elle seule suffire à caractériser des capacités contributives suffisantes pour la caution, étant précisé qu'à cette date la SARL Garage de la piscine, dont il était gérant, venait d'être placée en liquidation judiciaire.

Force est de constater que la banque échoue à démontrer que M. [C] [A] soit revenu à meilleure fortune au jour de l'assignation.

Il sera donc constaté que la société Caisse Régionale Crédit Agricole Mutuel Nord de France ne peut se prévaloir de cet engagement, et elle sera donc déboutée de sa demande en paiement.

S'agissant des engagements de caution du 12 octobre 2012

En l'espèce, M. [C] [A] a signé le 12 octobre 2012 une fiche patrimoniale, déclarant notamment ne pas avoir à ce jour d'autres engagements en cours ou en instance que ceux mentionnés.

Cette fiche fait état des renseignements suivants :

- au titre de la situation personnelle : marié sous le régime de communauté sans enfant à charge  ;

- au titre de ses ressources :

- une rémunération salariée annuelle pour le couple de 25 000 euros, soit 2 083,33 euros par mois en moyenne,

- au titre de ses charges fixes : aucune

- au titre de son endettement :

- un prêt dont le capital restant dû était de 3 640 euros, expirant en avril 2013, et dont la charge annuelle était de 520 euros, soit 43,33 euros par mois,

- au titre de son patrimoine :

- la propriété de sa résidence principale (commune avec son épouse), d'une valeur de 450 000 euros,

- une assurance décès Crédit agricole pour 320 000 euros.

Il n'a pas fait état des cautionnements déjà consentis.

La proportion de l'engagement de caution aux capacités financières de celui qui le souscrit s'apprécie au jour de sa souscription, au regard des renseignements fournis par l'intéressé.

En l'espèce, cette fiche de renseignement était dépourvue d'anomalies apparentes. La banque n'avait donc pas à vérifier l'exactitude et l'exhaustivité de son contenu.

M. [C] [A] qui, selon les justificatifs produits en appel, avait déjà souscrit de nombreux engagements de caution pour des montants totaux au moins équivalents à la valeur de son patrimoine propre, mais qui n'a pas rempli la fiche patrimoniale de façon exhaustive et exacte est mal fondé à se prévaloir de ces éléments pour contester l'adéquation entre les engagements pris et sa situation financière au moment de la signature des actes de caution.

Des éléments figurant dans la fiche patrimoniale remplie auprès de la banque ne ressort ainsi aucune disproportion entre l'engagement de M. [C] [A] et sa situation financière lui permettant de remplir ses obligations à hauteur de 130 000 euros au total, de sorte que la banque est bien fondée à se prévaloir de ces engagements.

Sur le montant de la créance de la société Caisse Régionale Crédit Agricole Mutuel Nord de France

S'agissant du prêt n° 991 4924 1627, la banque justifie par la production des contrats de prêt et tableaux d'amortissement, et de sa déclaration de créance, du montant de la dette de la SARL Garage de la piscine.

Elle justifie de la même façon par la production de l'acte de cautionnement du montant de l'engagement de M. [C] [A].

Il convient donc de condamner M. [C] [A] à régler à la banque la somme de 27 760,76 euros, somme assortie des intérêts au taux de 3,25 % à compter du 31 mars 2015, date de la mise en demeure.

S'agissant du prêt n° 991 4924 4022, M. [C] [A] affirme ne pas être le signataire des deux billets à ordre demeurés impayés.

Il convient sur ce point de relever que le billet émis le 23 octobre 2014 pour une somme de 10 000 euros et celui émis le 02 octobre 2014 pour une somme de 25 000 euros sont tous deux, conformément aux dispositions de l'article L.512-1 du code de commerce, revêtus du cachet de la SARL Garage de la piscine et d'une signature manuscrite.

Il sera remarqué quant à cette signature, qu'elle ne présente vis-à-vis des autres exemplaires de signature de M. [C] [A] produits aux débats, et qui ne sont pas déniées, aucune différence notable dans les traits et boucles la composant, de sorte qu'il sera constaté que l'intimé en a bien été signataire.

Il convient donc à ce titre de condamner M. [C] [A] à régler à la banque la somme de 35 000 euros, somme assortie des intérêts au taux de 6 % à compter du 31 mars 2015, date de la mise en demeure.

Sur la demande de dommages et intérêts

Selon les articles 6 et 9 du code de procédure civile, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à fonder leurs prétentions et il leur incombe de prouver conformément à la loi les faits nécessaires à leur succès.

En l'espèce, sans en indiquer ne serait-ce que succinctement le fondement juridique, M. [C] [A] recherche la responsabilité de la banque, faisant simplement valoir que « la banque a engagé sa responsabilité en accordant à la société garage de la piscine des crédits alors que le bilan faisait apparaître qu'à l'époque les dettes de la sociétés étaient d'un montant de 327 004,62 euros (pièce 13).

Elle a ainsi engagé sa responsabilité en accordant ce crédit imprudemment. »

Or il ne produit au soutien de cette demande qu'un extrait de son bilan pour l'exercice clos le 31 mars 2011 qui est tout à fait insuffisant à démontrer une quelconque faute de la banque, n'est contemporain d'aucun des engagements litigieux et dont rien ne prouve que la banque en avait connaissance.

M. [C] [A] ne démontre la commission d'aucune faute de la société Caisse Régionale Crédit Agricole Mutuel Nord de France, et sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts qui demeurait d'ailleurs indéterminée faute d'être chiffrée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la partie perdante est, sauf décision contraire motivée par l'équité ou la situation économique de la partie succombante, condamnée aux dépens, et à payer à l'autre partie la somme que le tribunal détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Il y a lieu de réformer a décision déférée du chef des dépens et des frais irrépétibles.

Les deux parties succombant partiellement en leurs prétentions, il convient de les condamner aux dépens de première instance et d'appel, chacune à hauteur de la moitié.

Elles seront donc déboutées de leurs demandes au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

- Infirme la décision déférée en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

- Dit que la société Caisse Régionale Crédit Agricole Mutuel Nord de France ne peut se prévaloir de l'engagement de caution de M. [C] [A] en date du 26 février 2010 en garantie de l'emprunt portant le n° 991 4615 2267, d'un montant de 20 000 euros remboursable avec application d'un taux d'intérêt conventionnel de 6,50 % l'an, souscrit par la SARL Garage de la piscine,

- Déboute la société Caisse Régionale Crédit Agricole Mutuel Nord de France de sa demande en paiement à ce titre,

- Condamne M. [C] [A] au titre de son engagement de caution en garantie du prêt n° 991 4924 1627 souscrit par la SARL Garage de la piscine à régler à la société Caisse Régionale Crédit Agricole Mutuel Nord de France la somme de 27 760,76 euros, somme assortie des intérêts au taux de 3,25 % à compter du 31 mars 2015, date de la mise en demeure,

- Condamne M. [C] [A] au titre de son engagement de caution en garantie du prêt n° 991 4924 4022 souscrit par la SARL Garage de la piscine à régler à la société Caisse Régionale Crédit Agricole Mutuel Nord de France la somme de 35 000 euros, somme assortie des intérêts au taux de 6 % à compter du 31 mars 2015, date de la mise en demeure,

- Déboute M. [C] [A] de sa demande de dommages et intérêts,

- Condamne la société Caisse Régionale Crédit Agricole Mutuel Nord de France et M. [C] [A] aux dépens de première instance et d'appel, chacun à hauteur de la moitié,

- Déboute la société Caisse Régionale Crédit Agricole Mutuel Nord de France et M. [C] [A] de leurs demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le GreffierLe Président

S. HurtrelM.A.Prigent


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 17/01994
Date de la décision : 17/05/2018

Références :

Cour d'appel de Douai 21, arrêt n°17/01994 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-17;17.01994 ?
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