République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 1
ARRÊT DU 22/03/2018
***
N° de MINUTE :18/
N° RG : 16/06085
Jugement rendu le 23 mai 2016 par le tribunal de grande instance de Lille
APPELANTE
SARL Foncière des Arts Patrimoine prise en le personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège
ayant son siège social [Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Yves Marchal, de la SCP Yves-Marchal-Natacha Marchal-Florence Mas-Isabelle Collinet-Marchal-Anne-Sophie Vérité, avocat au barreau de Lille, substitué à l'audience par Me Anne-Sophie Vérité, avocat au barreau de Lille
INTIMÉE
Mme [K] [B] épouse [N]
de nationalité française
demeurant [Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Me François Deleforge, de la SCP François Deleforge-Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai
assistée de Me Bérengère Lecaille, avocat au barreau de Lille
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Marie-Annick Prigent, président de chambre
Elisabeth Vercruysse, conseiller
Marie-Laure Aldigé, conseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Laure Brulin (greffier en pré-affectation)
DÉBATS à l'audience publique du 23 novembre 2017 après rapport oral de l'affaire par Marie-Annick Prigent
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 mars 2018 après prorogation du délibéré initialement prévu le 25 janvier 2018 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Marie-Annick Prigent, président et Stéphanie Hurtrel, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 16 novembre 2017
Par acte du 28 février 2002, la société Foncière des Arts Patrimoine a donné à bail à Mme [N], venant aux droits des époux [J] un immeuble à usage commercial sis à [Adresse 2]. Ce bail a été consenti pour une durée de neuf années entières et consécutives commençant à courir le 1er août 2001 pour s'achever le 31 juillet 2010, moyennant un loyer annuel de 15 550 euros hors taxes.
Le bail s' est poursuivi par tacite reconduction.
Par acte extrajudiciaire du 27 mai 2010, Mme [N] a notifié à la bailleresse une demande de renouvellement du bail à compter du premier août 2010 aux mêmes charges et conditions que le bail expiré. .
Par mémoire notifié le 18 mai 2012, la bailleresse informait son locataire de son accord sur le renouvellement à compter du 1er août 2010 mais sollicitait un loyer d'un montant annuel de 100 000 euros hors taxes et hors charges.
Par acte en date du 17 octobre 2012, la SARL Foncière Des Arts Patrimoine a assigné Mme [N] aux fins d' obtenir la fixation du loyer renouvelé à la somme de 100 000 euros annuels hors taxes et hors charges.
Par jugement avant-dire droit du 2 décembre 2014, le juge des loyers commerciaux près le tribunal de grande instance de Lille a ordonné une expertise confiée à M. [L].
L' expert a déposé son rapport le 19 décembre 2014. Il conclut que le commerce étudié est susceptible, au vu de la destination contractuelle, d'avoir bénéficié de l'évolution des facteurs locaux de commercialité, ce qui n' est pas le cas au regard de l'activité effectivement exploitée de commerce de proximité. Il propose également, dans l'hypothèse d'un déplafonnement, une valeur locative de 35 000 euros/an.
Par jugement du 23 Mai 2016, le juge des loyers commerciaux a dit que le renouvellement du bail s'est effectué le 1er août 2010 moyennant un loyer tel que fixé au bail à renouveler soit la somme de 20 819,40 euros hors taxes et hors charges par an.
La S.A.R.L. Foncière des Arts a interjeté appel de la décision, le 7 Octobre 2016.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 2 novembre 2017, la S.A.R.L. Foncière des Arts demande à la cour d'appel de :
-infirmer le jugement déféré, excepté en ce qu'il reconnaît l'existence d'une
modification notable des facteurs locaux de commercialité,
-dire que la modification notable des facteurs locaux de commercialité a eu un intérêt
pour le commerce considéré,
-débouter Mme [N] de ses demandes,
-juger que le renouvellement interviendra pour une durée de 9 années à compter du 1er Août 2010, moyennant un loyer de renouvellement à compter du jour du renouvellement s'établissant à un montant de 53 775 euros hors taxes et hors charges par an,
- juger que le loyer fixé portera intérêt au taux légal conformément aux dispositions de l'article 1155 du Code Civil, de plein droit à compter de l'exploit introductif d'instance, avec capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil.
-condamner Mme [K] [N] au paiement respectivement en première instance et en appel d'une somme de 7500 euros correspondant aux frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamner Mme [K] [N], en cas de recouvrement forcé des condamnations mises à sa charge par la décision à intervenir, au paiement du droit proportionnel de l'huissier en application de l'article 10 du décret n°96-1080 du 12/12/1996 modifié par le décret n°2011-212 en date du 08 mars 2001.
La S.A.R.L. Foncière des Arts expose que :
-la modification notable des facteurs locaux de commercialité résulte des éléments suivants :
la suppression de la dent creuse du [Adresse 3] présentant un linéaire de façade de plus de 20 mètres
l'implantation de nouvelles enseignes et la création d'un passage « LE PASSAGE DE WEPPES » reliant la [Adresse 3]e et la [Adresse 4] et facilitant davantage l'accès piéton à la [Adresse 5]
la suppression de la friche au début de la [Adresse 5] par la reconstruction de l'immeuble du numéro 38
la reconversion de la première partie de la [Adresse 5] en un lieu branché et dynamique avec l'implantation de nombreux bars à thèmes et de nuit, l'animation de la première partie de la [Adresse 5] lors du déjeuner, redémarrant dans le courant de l'après-midi pour s'achever tard en soirée
l'essor nouveau et tendance de la rue Esquermoise avec ses nouvelles enseignes, de même que pour la rue Basse
l'augmentation de la fréquentation touristique notamment du [Localité 2]
-L'analyse de l'impact n'est pas affectée par la modalité d'exercice du commerce
considéré :
-L'intérêt pour le commerce considéré doit donc s'analyser au regard tant des activités permises au bail que de l'activité exercée
-le choix du preneur de limiter son commerce à un certain type d'exploitation, ne peut priver de portée la modification notable des facteurs locaux de commercialité, ni être opposé au bailleur pour tenter de limiter l'intérêt naturel de ces facteurs
-l' évolution des facteurs locaux de commercialité a créé un impact favorable pour l' exercice de l' activité commerciale du locataire en augmentant le flux de chalands dans la [Adresse 5]
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 18 octobre 2017, Mme [N] demande à la cour d'appel de :
-débouter la SARL Foncière des Arts Patrimoine de son appel principal,
-la recevoir en son appel incident,
- en conséquence,
-débouter la SARL Foncière des Arts Patrimoine de sa demande de fixation d'un loyer du bail renouvelé déplafonné et plus généralement de l'ensemble des demandes formulées au titre de loyer et des condamnations annexes ;
- juger que le renouvellement du bail s'est effectué au 1er août 2010 pour le loyer tel que fixé au bail à renouveler, soit la somme de 20 479,85 euros hors charges par an ;
- A titre subsidiaire, juger que la valeur locative ne saurait dépasser la somme annuelle de 17 500 euros HT/an ;
- A titre reconventionnel, condamner la SARL Foncière des Arts Patrimoine au paiement de la somme de 7 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [N] réplique que :
-la modification notable des facteurs locaux de commercialité n'a pas d'influence sur le flux de chalands dans la [Adresse 5] au regard de la situation du commerce au sein de celle-ci,
-le commerce est éloigné des centres névralgiques d'activités économiques de restauration, d'hôtellerie, évoqués par le bailleur.
-le commerce est situé dans cette partie du [Localité 2]e qui n'est pas touristique de sorte que les éléments fournis par le bailleur et qui portent sur le secteur touristique du [Localité 2], sont totalement hors débats et ne sauraient être pris en compte,
-le bailleur est dans l'incapacité d'établir ni en volume ni en date le principe de cette spécialisation de la [Adresse 5] ou encore en quoi la spécialisation serait plus importante, et enfin qu'elle serait devenue caractéristique au cours du bail renouvelé c'est-à-dire entre 2001 et 2010,
-à supposer qu'il y ait une évolution des facteurs locaux de commercialité, ceux-ci doivent avoir un intérêt pour l'activité effectivement exploitée et non les activités autorisées par le bail
- le bailleur ne rapporte pas la preuve que cette évolution aurait une incidence favorable sur le commerce exploité.
MOTIFS DE LA DECISION
L'article L.145-34 du code de commerce énonce qu'à moins d'une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler, si sa durée n'est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l'indice national trimestriel mesurant le coût de la construction ou, s'il est applicable, de l'indice trimestriel des loyers commerciaux mentionné au premier alinéa de l'article L. 112-2 du code monétaire et financier, publiés par l'Institut national de la statistique et des études économiques.
En cas de renouvellement postérieur à la date initialement prévue d'expiration du bail, cette variation est calculée à partir du dernier indice publié, pour une période d'une durée égale à celle qui s'est écoulée entre la date initiale du bail et la date de son renouvellement effectif.
Aux termes de l'article L.145-33 1° à 4°, le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative :
A défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après :
1- Les caractéristiques du local considéré ;
2- La destination des lieux ;
3- Les obligations respectives des parties ;
4- Les facteurs locaux de commercialité ;
Aux termes de l'article R.145-6 du code de commerce, 'les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l'intérêt que présente, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son importance, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d'une manière durable ou provisoire.'
Les demandes des parties seront examinées en tenant compte des constatations énoncées dans le rapport d'expertise et des pièces versées pas les parties.
L'immeuble est à usage commercial et d'habitation élevé sur sous-sol, rez-de-chaussée, trois étages droits et combles. Il est constitué d'un local commercial implanté en sous-sol et rez-de-chaussée et d'un appartement de fonction situé aux étages. L'immeuble étudié est d'époque de construction ancienne et comporte une façade typique du [Localité 2].
Le bien étudié est situé dans un quartier de forte commercialité caractérisée par la présence de nombreux commerces en pied d' immeubles. Ce secteur comprend principalement la [Adresse 6], la [Adresse 7] et la [Adresse 3], spécialisée dans le commerce haut de gamme et plus précisément dans le prêt-à-porter et l'équipement de la maison haut de gamme.
La destination des lieux a été définie par le bail de la manière suivante :
« Les locaux présentement loués sont exclusivement destinés, savoir :
- à l'exploitation d'un fonds de débit de boissons 4 ème catégorie,
- à l'exploitation d'un débit de tabacs,
- dépôt de presse,
- bimbeloterie,
- petite brasserie et tickets restaurant
- vente de jeux Francaise des jeux
- vente de billets Transpole »
Le relevé de surface utile effectué le 22 septembre 2014 par un géomètre-expert est le suivant : rez de chaussée : 47 m²
- premier étage : 30,2 m²
-deuxième étage : 28,6 m²
-troisième étage : 27,5 m²
-4 ème étage : 29 m²
La surface totale est de 198,70 m²
L'expert conclut qu'il s'agit d'un bon secteur pour l'exploitation commerciale. En effet, la [Adresse 5] est située dans le prolongement de l'une des artères principales du [Localité 2] (la [Adresse 3]). Toutefois, l'implantation de l'immeuble étudié sur ce secteur est moyenne puisqu'il est situé à l'extrémité du tronçon commerçant de la rue.
L'activité exploitée par le preneur en place consiste en un commerce de proximité et un bistrot de quartier ouvert de 7h à 20h, soit lorsque les autres commerces implantés à proximité sont majoritairement fermés. L'activité effectivement exploitée par le preneur est en inadéquation avec la commercialité du secteur constituée principalement de bars à thèmes et de nuit. Les flux de chalandise présents sur le tronçon sont plus conformes à la chalandise de quartier observée sur le 2 ème tronçon de la [Adresse 5].
La discussion porte sur la modification des facteurs locaux de commercialité ayant eu une incidence sur l'activité exercée durant la période du bail écoulé soit du 1er août 2001 au 31 juillet 2010 :
Au titre de la modification des facteurs locaux de commercialité sont invoqués les éléments suivants :
- la suppression de la dent creuse du [Adresse 3] présentant un linéaire de façade de plus de 20 mètres
-la reconversion de la première partie de la [Adresse 5] en un lieu branché et dynamique avec l'implantation de nombreux bars à thèmes et de nuit, l'animation de la première partie de la [Adresse 5] lors du déjeuner, redémarrant dans le courant de l'après-midi pour s'achever tard en soirée.
-l'essor nouveau et tendance de la rue Esquermoise avec ses nouvelles enseignes, de même que pour la rue Basse
-l'augmentation de la fréquentation touristique notamment du [Localité 2]
La suppression de la dent creuse du [Adresse 3]
La [Adresse 3] qui débute sur la grand-place de [Localité 1] permet de rejoindre la [Adresse 5];
L'expert a considéré qu'empiriquement la réhabilitation de la dent creuse ([Adresse 3]oise) constituait une évolution notable.
Contrairement à ce qu'allègue Mme [N], le bailleur démontre par la production d'un article de la voix du Nord paru le 16 janvier 2003, l' historique de la [Adresse 3].
Il en ressort que les travaux de réhabilitation des immeubles ont été achevés au début de l'année 2003. Le bailleur verse aux débats des extraits Kbis des sociétés qui se sont installées dans ces immeubles à compter du mois de mars 2003 et durant l'année 2004, durant la période considérée. IL y a lieu d'en conclure que tant la rénovation des immeubles que l'installation de nouveaux commerces ont entraîné une augmentation du flux de chalandise.
En revanche, le passage de Weppes qui permet de relier la [Adresse 3] et la [Adresse 4], apparaissant sur les photographies produites par le bailleur n'offre pas une grande visibilité et a pour but de permettre l'accès au centre du [Localité 2].
Il n'est cependant pas contestable qu'est ainsi caractérisée une modification notable des facteurs locaux de commercialité.
La suppression de la friche au début de la [Adresse 5] par la reconstruction de l'immeuble du numéro 38
Le bailleur verse des pièces établissant que l'immeuble situé au [Adresse 8] a été reconstruit. Un permis de construire a été déposé le 21 mai 2008, modifié les 23 janvier 2009 et 11 février 2010 ; l'ouverture du chantier date de juin 2009 et une déclaration d'attestation d'achèvement et de conformité des travaux en date du 27 juillet 2010 a été déposée en mairie le 28 juillet 2010.
Cet immeuble est implanté à l'angle de la [Adresse 5] et de la rue d'Angleterre, soit quasiment en face de l'immeuble étudié. Si au cours du bail à renouveler, l'immeuble n'était pas encore exploité commercialement, sa construction a modifié l'aspect du quartier et doit être associé à la spécialisation de ce tronçon de la [Adresse 5] où sont implantés des bars à thèmes et de nuit, attirant une chalandise de passage jeune et dynamique.
L'immeuble étudié est implanté à l'extrémité du premier tronçon de la [Adresse 5], il bénéficie donc de plus faibles flux de chalandise que ceux présents à proximité de la [Adresse 3].
Il y a lieu de retenir une modification notable des facteurs locaux de commercialité.
L'essor touristique au sein de la ville de [Localité 1]
Il a été relevé une évolution très favorable du tourisme dans la ville de [Localité 1]. Les manifestations culturelles qu'a connu la ville durant la période de 2004 à 2010 et les statistiques de l'office du tourisme ou des gares TGV démontrent un afflux important de touristes chaque année. Ce flux de chalands supplémentaires fréquente les lieux touristiques du [Localité 2] et le tronçon de la [Adresse 5] étudiée ne bénéficie pas d'un attrait historique permettant de les attirer.
Mme [N] produit une attestation en date du 16 juillet 2012 de M. [U], directeur de l'office du tourisme et des congrès de [Localité 1], lequel indique que le numéro 43, de la [Adresse 5] ne figure pas parmi les parcours touristiques et il n'est pas constaté de flux touristiques majeurs dans cette rue.
La construction de nouveaux logements
Le quartier du [Localité 2] a connu une augmentation du nombre de logements au cours de la période du bail écoulé puisque plus de 2000 logements ont été créés constituant un nouveau quartier d'habitation située à environ 800 m des locaux étudiés, ce qui génère une augmentation de la population de 4000 habitants et donc une augmentation du flux de chalandise.
S'il a été constaté l'existence de plusieurs éléments contribuant à une modification notable des facteurs locaux de commercialité, pour entraîner le déplafonnement du loyer, ceux-ci doivent avoir un intérêt pour le commerce considéré.
La réhabilitation de plusieurs immeubles dans la [Adresse 3], constitue une modification notable des facteurs locaux de commercialité. L'expert en nuance toutefois l'impact en précisant que ces flux de chalandise de passage se réduisent progressivement entre l'intersection [Adresse 3]/[Adresse 5] et l'intersection [Adresse 5]/[Adresse 9]. Le deuxième tronçon de la [Adresse 5] est caractérisé par une chalandise de quartier et non de passage.
Il faut donc tenir compte d'une déperdition des chalands tout au long de la [Adresse 3] et l'existence de commerce similaires plus proches de ce flux de chalandise au sein même de la rue. La [Adresse 3] est orienté vers le commerce de l'ameublement et de la décoration de la maison ainsi que les enseignes de prêt-à-porter ; les passants qui se promènent en quête de magasins ne poursuivent pas systématiquement vers la [Adresse 5] qui a une autre destination. Il a été suffisamment développé que cette rue était destinée aux bars à thème et de nuit et particulièrement animée le soir et attire donc une autre clientèle.
De même si la spécialisation du tronçon de la [Adresse 5] dans le secteur des bars à thèmes et de nuit ainsi que la construction d'un nouvel immeuble constituent une modification notable des facteurs locaux de commercialité en prolongeant les flux de chalands de passage et en attirant une nouvelle clientèle, il y a lieu de prendre en compte l'activité effectivement exploitée dans les locaux pour apprécier si ce flux de chalands constitue un intérêt.
L'activité autorisée par le bail est une activité de débit de boissons-licence IV-débit de tabacs et dépôt presse semblant a priori en adéquation avec les autres commerces implantés sur le secteur considéré. Toutefois, l'activité exploitée par le preneur en place consiste en un commerce de proximité et un bistrot de quartier ouvert de 7h à 20h, soit lorsque les autres commerces implantés à proximité sont majoritairement fermés s'adresse à une clientèle de quartier. Le local offre 16 places assises. Les consommateurs sont constitués essentiellement de clients venant acheter du tabac, des journaux ou des tickets de jeux de loterie.
L'activité exercée dans les locaux ne peut manifestement pas capter la chalandise supplémentaire en raison de la configuration des locaux et de l'activité exercée.
Mme [N] a fait le choix d'exercer une activité plurielle dans un espace restreint. Son fonds de commerce correspond aux besoins du quartier qui a cependant évolué. Compte tenu de la configuration du local et de sa superficie, Mme [N] devrait renoncer à certaines activités pour pouvoir adapter son local et l'orienter vers l'activité du secteur dans lequel il est implanté.
Le jugement a développé de manière précise et argumenté les motifs pour lesquels les exigences d'adaptation opposées par le bailleur au locataire étaient excessives au vu des caractéristiques du commerce et du secteur d'implantation. La cour d'appel adopte ces motifs exacts et pertinents.
L'expert a constaté que le nouveau quartier d'habitation comporte également de nombreux commerces de proximité et une dizaine de cafés a été dénombrée jusqu'au tronçon de la [Adresse 5] étudiée. Bien que l'activité exploitée dans les lieux loués attire une clientèle de quartier, l'éloignement et la présence de nombreux concurrents implantés à proximité excluent que le commerce exploité par Mme [N] en retire un intérêt.
L'expert relève à juste titre que les habitants du quartier ne vont pas parcourir 800 m pour obtenir une prestation qu'ils trouvent au bas de leur immeuble.
Cette modification notable des facteurs locaux de commercialité n'est pas susceptible d'avoir un impact sur le commerce exploité.
Au vu de ces éléments, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de déplafonnement du loyer au motif qu'il n'était pas démontré l'existence d'une modification notable des facteurs de commercialité ayant un intérêt pour le commerce exercé.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé le montant du loyer à compter du 1er août 2010 à la somme de 20'819,40 euros par an.
Sur les frais irrépétibles
Il y a lieu de condamner la SARL Foncière des Arts Patrimoine à verser à Mme [N] la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ; l'appelante sera déboutée de sa demande ce chef.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la SARL Foncière des Arts Patrimoine à payer à Mme [N] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande,
Condamne la SARL Foncière des Arts Patrimoine aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le GreffierLe Président
S. HurtrelM.A.Prigent