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08/02/2018 | FRANCE | N°17/03300

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 08 février 2018, 17/03300


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 08/02/2018



***



N° de MINUTE :18/

N° RG : 17/03300



Ordonnance (N° 2017001144) rendue le 27 avril 2017 par le tribunal mixte de commerce de Lille Métropole



APPELANTS



M. [G] [R]

né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1]

de nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 1]



SA CERP Group prise en la perso

nne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 2]



représentés par Me Dominique Bellengier, avocat au barreau de Lille, substitué à l'audie...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 08/02/2018

***

N° de MINUTE :18/

N° RG : 17/03300

Ordonnance (N° 2017001144) rendue le 27 avril 2017 par le tribunal mixte de commerce de Lille Métropole

APPELANTS

M. [G] [R]

né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1]

de nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 1]

SA CERP Group prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 2]

représentés par Me Dominique Bellengier, avocat au barreau de Lille, substitué à l'audience par Me Laurent Calonne, avocat au barreau de Lille

ayants pour conseil Me Marc Villefayot, avocat au barreau de Paris

INTIMÉE

SAS Finorpa SCR prise en la personne de son directeur général M. [E] [N]

ayant son siège social [Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Aymeric Druesne, avocat au barreau de Lille, substitué à l'audience par Me Mélissa Debara, avocat au barreau de Lille

DÉBATS à l'audience publique du 06 décembre 2017 tenue par Marie-Laure Aldigé magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Laure Brulin (greffier en pré-affectation)

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Marie-Annick Prigent, président de chambre

Elisabeth Vercruysse, conseiller

Marie-Laure Aldigé, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 08 février 2018 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Marie-Annick Prigent, président et Stéphanie Hurtrel, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 5 décembre 2017

***

La SA [Adresse 4] ( ci-après CERP), créée en 1996 par M. [G] [R] et ayant pour activité le recueil d'informations dans les points de vente des enseignes de la grande distribution et du hard-discount et le traitement et l'analyse de ces données, a été mise en procédure de redressement judiciaire le 20 novembre 2002 par le tribunal de commerce de Versailles et a bénéficié le 25 septembre 2003 d'un plan de continuation sur une durée de 7 années. Le CERP est détenue à 100% par la SA CERP Group, anciennement Marketing.Dock, qui exerce une activité de holding.

Le 2 mars 2007, un protocole d'investissement et un pacte d'actionnaires était signé entre les M. [G] [R], M.[W] [R] et Mme [Q] [V] épouse [R] M. [A] [J] et des investisseurs financiers dont la SAS Finorpa SCR, qui a pour objet l'accompagnement financier des entreprises, en présence de la société Marketing.Dock. Ce protocole portait à la fois sur la SA CERP Group et sur la SA CERP et avait pour objet la recapitalisation financière de la SA CERP. La société Finorpa SCR a participé à une augmentation de capital et est devenue à compter du 2 mars 2007 actionnaire de la SA CERP Group. L'article 9 du pacte prévoyait la remise par les actionnaires dirigeants aux investisseurs financiers de divers documents d'information économique et financière.

Par jugement en date du 3 mars 2011, le tribunal de commerce de Versailles a ouvert une procédure de sauvegarde au profit de Cerp Group convertie en redressement judiciaire par jugement du 30 juin 2011. Un plan de redressement a été adopté le 21 février 2013 et clôturé le 13 novembre 2014.

Alléguant d'une violation de son droit à information et d'une inexécution du pacte d'actionnaires, la SAS Finorpa SCR a assigné M. [G] [R] et à SA CERP Group par exploit d'huissier en date du 31 mars 2015 devant le tribunal de commerce de Lille Métropole aux fins d'obtenir leur condamnation à communiquer divers documents sous peine d'astreinte de 500 euros par jour de retard.

Par ordonnance de référé en date du 10 décembre 2015, le juge des référés de Lille Métropole :

- a condamné M. [G] [R] et la SA CERP Group à communiquer, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de 30 jours après la signification de la présente ordonnance, les documents suivants :

* le reporting de trésorerie au 28 février 2015,

* le budget glissant accompagné d'un plan de trésorerie prévisionnel et comptes annuels consolidés au 31 décembre 2014,

* le reporting mensuel au 28 février 2015 sous forme de comptes de résultat et ratios de gestion, et sous forme de bilan au 31 décembre 2014,

* les copies des déclarations fiscales des résultats, avec leurs annexes, adressées à l'administration fiscale pour 2012 et 2013,

* la copie des rapports généraux et spéciaux établis par le commissaire aux comptes pour les exercices clos au 31 décembre 2012 et 31 décembre 2013,

* la copie des procès-verbaux des assemblées de la société CERP Group et de la société CERP du 30 septembre 2013 au 31 mars 2015,

* l'état des relations bancaires,

- s'est réservé le droit de liquider l'astreinte,

- a condamné M. [G] [R] et la SA CERP Group au paiement de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance a été signifiée le 12 janvier 2016.

Sur appel interjeté par M. [G] [R] et la SA CERP Group, par un arrêt du 24 novembre 2016, la cour d'appel de Douai a :

- confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance du 10 décembre 2015 sauf en ce qu'elle a ordonné la production de la copie des procès-verbaux des assemblées de la SA CEPR Group et de la société CERP du 30 septembre 2013 au 31 mars 2015 et de l'état des relations bancaires,

- débouté la SA CERP Group de l'ensemble de ses demandes,

- condamné M. [G] [R] à régler à la SAS Finorpa SCR la somme de 3 000 euros au titre e l'article 700 du code de procédure civile.

Par acte en date du 12 janvier 2017, la SAS Finorpa SCR a assigné la SA CERP Group et M. [G] [R] devant le juge des référés du tribunal de commerce de Lille Métropole aux fins d'obtenir :

- la liquidation de l'astreinte provisoire fixée dans l'ordonnance du tribunal de commerce du 10 décembre 2015 à la somme de 60 200 euros,

- la condamnation solidaire de la SA CERP Group et M. [G] [R] à lui payer la somme de 60 200 euros,

- la condamnation solidaire de la SA CERP Group et M. [G] [R] aux frais et dépens d'instance et à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Estimant que la SA CERP Group et M. [G] [R] ne démontraient pas l'imprévisibilité et l'irrésistibilité des évènements ayant prétendument justifié l'absence d'exécution de l'ordonnance rendue le 10 décembre 2015 ayant force exécutoire, que l'absence d'activité d'une société anonyme ne l'exemptait pas de l'obligation de tenir des assemblées annuelles et d'établir ses comptes, et que le chiffre d'affaires de la SA CERP Group justifiait une réduction du montant de l'astreinte, le juge des référés, par ordonnance contradictoire en date du 27 avril 2017, a au principal renvoyé les parties à mieux de pourvoir  et a au provisoire, au visa des articles 872 et 873 du code de procédure civile :

- réduit l'astreinte provisoire fixée dans l'ordonnance du 10 décembre 2015 à la somme de 30 000 euros,

- condamné solidairement la SA CERP Group et M. [G] [R] à verser à la SAS Finorpa SCR la somme de 30 000 euros laquelle équivaut au temps de retard pour la communication des pièces,

- jugé que la SA CERP Group et M. [G] [R] pourront s'acquitter de leur dette en trois mensualités égales, la première étant fixée 15 jours après la signification de la présente ordonnance, les deux suivantes à la même date les deux mois suivants,

- jugé que le non-paiement d'une échéance à bonne date rendra le solde immédiatement et intégralement exigible,

- condamné solidairement la SA CERP Group à M. [G] [R] à payer à la SAS Finorpa SCR la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.

Cette décision a été signifiée le 11 mai 2017 et la société CERP Group et M. [G] [R] en ont formé appel par déclaration du 23 mai 2017.

Par assignation du 16 août 2017, les appelants ont saisi le premier président d'une demande de suspension de l'exécution provisoire qui a été rejetée par ordonnance en date du 19 octobre 2017.

Aux termes de leurs dernières conclusions en date du 28 novembre 2017, M. [G] [R] et la SA CERP Group demandent à la cour d'appel au visa des articles L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution et 1343-5 nouveau du code civil d'infirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, de :

A titre principal,

- constater que la SA CERP Group est dans l'impossibilité matérielle de produire certains documents sollicités comme le reporting de trésorerie au 28 février 2015 et le budget glissant et reporting mensuel,

- constater que le retard dans l'approbation des comptes 2012, 2013, 2014 et 2015 a été causé par des difficultés totalement étrangères à la SA CERP Group,

- constater que les revenus de la SA CERP Group et de M. [G] [R] ne permettent pas de faire face à l'astreinte disproportionnée décidée par l'ordonnance déférée,

- constater que M. [G] [R] ne s'est pas personnellement obligé à la communication des informations selon l'article 9 du pacte d'actionnaires du 2 mars 2007 ;

- constater que ledit pacte d'actionnaires ne prévoit aucune clause de solidarité expresse entre la SA CERP Group et M. [G] [R] ;

- constater irrecevabilité de l'appel incident de la SAS Finorpa SCR en ce qu'il en sollicite ni la confirmation ni l'infirmation de l'ordonnance entreprise ;

Par conséquent,

- débouter la SAS Finorpa SCR de toutes ses demandes,

- réduire le montant de l'astreinte à la somme globale et forfaitaire de 1 euro symbolique ou à tout montant proportionné qui ne saurait excéder la somme globale et forfaitaire de 1 000 euros au regard de l'absence d'activité et donc de revenus de la SA CERP Group et de l'absence de revenu de M. [G] [R],

A titre subsidiaire

- réduire le montant de l'astreinte à un juste montant qui ne saurait excéder la somme globale et forfaitaire de 1 000 euros au regard de l'absence d'activité et donc de revenus de la SA CERP Group et de l'absence de revenu de M. [G] [R],

- accorder à la SA CERP Group et M. [G] [R] un délai de deux années à compter de la décision à intervenir pour payer l'astreinte liquidée au montant proportionnellement choisi par le tribunal.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 30 novembre 2017, la SAS Finorpa SCR demande à la cour d'appel au visa des articles L131-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, 696 et suivants du code de procédure civile de :

- confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a prononcé la liquidation de l'astreinte provisoire ;

- réformer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a réduit l'astreinte provisoire à la somme de 30 000 euros :

- condamner solidairement la SA CERP Group et M. [G] [R] à lui payer la somme de 60 200 euros laquelle équivaut au temps de retard pour la communication des pièces,

- débouter en tout état de cause M. [R] et la société CERP Group de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner solidairement la SA CERP Group et M. [G] [R] à lui payer une somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer les frais et dépens de première instance et d'appel.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des moyens, il est renvoyé aux dernières écritures des parties.

Pour la clarté des débats, il sera seulement indiqué que les appelants soutiennent essentiellement que :

- l'appel incident des intimés est irrecevable faute de solliciter la réformation de la décision déférée,

- la CERP Group se trouvait dans l'impossibilité de produire le reporting de trésorerie, budget glissant et reporting mensuels, ces documents n'ayant aucune réalité comptable compte tenu de l'absence d'activité de la société ; et si la communication de tels documents avait été envisagée dans le protocole d'investissement signé en 2007, cette clause s'apparente à une clause type insérée parfaitement inapplicable en l'espèce du fait de l'absence d'activité de la société ;

- le retard dans la communication des comptes 2012, 2013, 2014 et 2015 ne leur est pas imputable :

* le retard dans l'approbation des comptes 2012, 2013, 2014 et 2015 a été causé par les incertitudes de la procédure de redressement judiciaire dont la SA CERP Group a fait l'objet qui l'a conduite à surseoir à l'établissement des liasses fiscales pour les exercices 2012 et 2013 ;

* les bilans 2012 et 2013 ont ainsi été envoyés par l'expert-comptable au commissaire aux comptes pour validation le 20 mai 2014 et le délai pris pour organiser une assemblée générale ordinaire le 21 novembre 2016 d'approbation des comptes clos le 31 décembre 2012, 2013, 2014 et 2015 est imputable à la démission du commissaire au compte et de son suppléant aux mois de février et mars 2015 et au temps nécessaire pour organiser une assemblée générale de désignation d'un nouveau commissaire aux comptes;

- dans le temps de l'instance devant le tribunal de commerce de Lille Métropole, la SA CERP Group avait communiqué à la partie adverse les liasses fiscales et les bilans pour les années 2012 et 2013 ;

- elle a communiqué les documents dès le 16 novembre 2016 et non pas le 9 décembre 2016 comme l'a retenu à tort le premier juge;

- la solidarité ne se présumant pas, et l'obligation ne concernant M. [G] [R] qu'en qualité d'associé, la liquidation de l'astreinte doit être limitée à la SA CERP Group ;

- leurs capacités financières qui ne permettent pas de faire face à cette astreinte et leur bonne foi justifient sa réduction à un montant symbolique ou a tout du moins proportionné à leur situation économique.

Pour sa part, l'intimée fait essentiellement valoir que :

- les appelants ne justifient d'aucune cause étrangère au sens de l'article L 131'4 du code des procédures civiles d'exécution à la non-communication des reportings de trésorerie, des budgets glissants et reporting mensuels ni au retard d'une année qu'elles ont mis à communiquer les autres documents, la démission du commissaire aux comptes étant imputable au comportement de la SA CERP Group ;

- les appelants font valoir des moyens qui ont déjà été rejetés par le juge des référés et la cour d'appel et qui sont dénués de toute pertinence au stade de la liquidation de l'astreinte ;

- leur comportement qui doit s'apprécier à compter de l'ordonnance prononçant l'injonction ne justifie aucune réduction de l'astreinte

- leur mauvaise foi exclut des délais de paiement ;

- l'obligation de la SA CERP Group et de M. [G] [R] étant personnelle et identique, les appelants doivent être condamnés solidairement.

MOTIVATION

Sur l'irrecevabilité de l'appel incident formé par l'intimée

L'article 548 du code de procédure civile dispose : « L'appel peut être incidemment relevé par l'intimé tant contre l'appelant que contre les autres intimés. »

En application de l'article 550, sous réserve des articles 905-2,909 et 910, l'appel incident ou l'appel provoqué peut être formé, en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos pour agir à titre principal. Dans ce dernier cas, il ne sera toutefois pas reçu si l'appel principal n'est pas lui-même recevable ou s'il est caduc.

En l'espèce, aux termes de ses dernières conclusions, l'intimé sollicite bien aux termes de son dispositif l'infirmation partielle de l'ordonnance déférée, et son appel incident est recevable.

En conséquence, il y lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par les appelants.

Sur la liquidation de l'astreinte

En application des dispositions de l'article L131-4 du code des procédures civiles d'exécution, le montant de l'astreinte provisoire, laquelle est indépendante des dommages-intérêts, est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter. Le comportement du débiteur doit s'apprécier à compter du prononcé du jugement fixant l'injonction.

L'astreinte est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère.

Il incombe au débiteur qui réclame la suppression de l'astreinte de faire la démonstration qu'il a été empêché d'exécuter la décision de justice et au juge de caractériser l'imprévisibilité et l'irrésistibilité de l'événement

L'article R. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution précise que l'astreinte prend effet à la date fixée par le juge.

Sur ce

En l'espèce, il est constant que la SA CERP Group et M. [G] [R] n'ont pas exécuté l'obligation qui leur avait été faite sous astreinte aux termes de l'ordonnance en date du 10 décembre 2015 confirmée par l'arrêt de la cour d'appel en date du 24 novembre 2016 de délivrer le reporting de trésorerie au 28 février 2015, le budget glissant et le reporting mensuel au 28 février 2015.

Le moyen que les appelants soulèvent tiré de l'absence d'activité de la SA CERP Group qui selon eux caractériseraient une impossibilité d'exécuter l'obligation de communication de pièces ordonnée sous astreinte avait déjà été soulevé pour s'opposer à la communication de ces pièces devant le juge des référés et la cour d'appel. La cour d'appel avait écarté ce moyen et estimé que la société CERP Group et M. [G] [R] ne justifiait d'aucun moyen légitime pour s'opposer à la demande de communication de pièce formée par la SAS Finorpa SCR en exécution de l'article 9 du protocole du pacte d'actionnaires en date du 2 mars 2007 après avoir notamment retenu qu'en absence de procédure de mise en sommeil la société anonyme demeurait assujettie à un certains nombres d'obligations, notamment relatives à la transmission d'éléments comptables. Dans ces conditions, le moyen soulevé par les appelants ne tend en réalité qu'à revenir sur l'autorité de la chose jugée attachée à la décision ordonnant la communication de pièces sous astreinte. En tout état de cause, les appelants ne caractérisent aucunement avoir été empêchés d'exécuter la décision de justice ni ne caractérisent un événement imprévisible ou irrésistible alors même que c'est à juste titre que le premier juge a rappelé que l'absence d'activité d'une société anonyme ne l'exemptait pas de l'obligation de tenir des assemblées annuelles et d'établir ses comptes.

Par ailleurs, il est démontré que les autres documents objet de l'obligation de communication sous astreinte ont été communiqués avec du retard. En effet, l'intégralité de ces documents n'avait pas été communiquée aux termes des conclusions en date du 23 mars 2016 devant la cour d'appel mais seulement un bilan 2013 et un projet de bilan 2014. Puis, par mail du 16 novembre 2016, la SA CERP Group et M. [G] [R] ont transmis les comptes 2012, 2013, 2014 et 2015 à la SAS Finorpa SCR. Enfin par courrier officiel du 9 décembre 2016, le conseil des appelants a transmis les copies des déclarations fiscales des résultats, avec leurs annexes, adressées à l'administration fiscale pour 2012 et 2013, et la copie des rapports généraux et spéciaux établis par le commissaire aux comptes pour les exercices clos au 31 décembre 2012 et au 31 décembre 2013.

Dans ces circonstances, c'est de manière pertinente que le premier juge a retenu que la communication de l'intégralité des documents (à l'exception du reporting de trésorerie au 28 février 2015) n'était intervenue que le 9 décembre 2016 soit près d'un an après l'ordonnance du juge de l'exécution.

Force est de constater que la procédure collective dont la SA CERP Group avait fait l'objet le 3 mars 2011 a été clôturée le 13 novembre 2014, soit avant la décision du juge des référés intervenue le 10 décembre 2015. Les particularités de cette situation, qui avait conduit le président du tribunal de commerce de Versailles à accorder une prolongation du délai jusqu'au 31 juillet 2015 pour la réunion de l'assemblée générale ordinaire appelée à statuer sur les comptes annuels des exercices clos le 31 décembre 2012 et le 31 décembre 2013, étaient ainsi déjà connues du juge des référés lorsque celui-ci a décidé d'enjoindre la communication des documents, notamment des comptes annuels consolidés. Pareillement, les démissions du commissaire au compte et de son suppléant intervenues aux mois de février et mars 2015 sont aussi antérieures à l'ordonnance du juge des référés et ne sauraient en tout état de cause constituer des événements extérieurs à la SA CERP Group alors même que par courrier recommandé avec accusé de réception du 20 février 2015, le commissaire aux comptes a justifié sa démission par l'impossibilité d'accomplir sa mission. Dans ces conditions, les appelants ne peuvent, sans méconnaître l'autorité de la chose jugée, arguer d'une situation antérieure à la décision ordonnant la communication de pièces assortie de l'astreinte pour tenter de justifier le retard dans l'exécution intervenu postérieurement à cette décision.

Au surplus, les appelants ne justifient aucunement de l'importance du délai pris pour remplacer le commissaire aux comptes ' l'assemblée générale de désignation d'un nouveau commissaire aux comptes n'est intervenue que le 12 janvier 2016 soit près de 10 mois après la démission ' et pour organiser une assemblée générale d'approbation des comptes clos le 31 décembre 2012, 2013, 2014 et 2015 ' laquelle n'est intervenue que le 21 novembre 2016 ' et ce alors même qu'ils étaient déjà tenus d'une obligation de communication de pièces sous astreinte journalière, laquelle ne faisait que consacrer son obligation contractuelle.

Ce faisant, les appelants échouent à démontrer que l'inexécution et le retard dans l'exécution de l'injonction de communication de pièce provient en tout ou partie d'une cause étrangère. C'est donc par une exacte analyse des faits et une bonne application du droit que le juge des référés n'a pas supprimé l'astreinte.

En revanche, c'est à tort que le premier juge a retenu la situation financière actuelle de la SA CERP Group pour réduire le montant de l'astreinte. En effet, pour modérer le montant d'une astreinte, le juge doit tenir compte du comportement du débiteur récalcitrant, des moyens qu'il aura mis en 'uvre pour se conformer à l'injonction qui lui a été faite et des éventuelles difficultés qu'il aura rencontrées pour y parvenir sans prendre en considération la valeur du préjudice qu'il cause ni sa capacité financière à payer l'astreinte, éléments indifférents à la liquidation de l'astreinte. Or, en l'espèce, aucun élément n'est de nature à justifier le retard d'une année pris par la SA CERP Group et M. [G] [R] pour exécuter partiellement l'obligation de communication de pièces, les difficultés alléguées leur étant entièrement imputables et leur comportement dilatoire caractérisant une mauvaise foi

Dans ces circonstances, ni le comportement des appelants ni les difficultés qu'ils allèguent vainement ne sont de nature à justifier une réduction du montant de l'astreinte.

L'intimée demande de faire courir le délai d'astreinte sur 301 jours jusqu'au 9 décembre 2016. En l'espèce, l'ordonnance a été signifiée le mardi 12 janvier 2016. Le délai de 30 jours qui court à compter du 13 janvier 2016 se termine le jeudi 11 février de sorte que l'astreinte a pris effet à compter du vendredi 12 février 2016 jusqu'au 8 décembre 2016, soit 300 jours.

En conséquence, il y a lieu de fixer le montant de l'astreinte à hauteur de 60 000 euros.

L'ordonnance en date du 10 décembre 2015 confirmée par l'arrêt de la cour d'appel en date du 24 novembre 2016 qui a condamné la SA CERP Group et M. [G] [R] à communiquer sous astreinte un certain nombre de pièces a acquis autorité de la chose jugé sur le principe de l'obligation de M. [G] [R] à communiquer ces pièces. Dès lors, les moyens soulevés au stade de la liquidation pour soutenir qu'il ne serait pas redevable de cette obligation de communication de pièces ne sont pas pertinents, et la demande des appelants tendant à voir limiter la condamnation de paiement de l'astreinte à la seule SA CERP Group sera nécessairement rejetée.

En revanche, la solidarité ne se présumant pas, c'est à tort que le juge des référés a condamné solidairement les appelants au paiement de l'astreinte liquidée. Néanmoins, dans la mesure où la SA CERP Group et M. [G] [R] ont été tenus d'exécuter la même obligation de faire, laquelle est par nature indivisible et ne saurait donner lieu à une condamnation conjointe, il y a lieu de condamner les appelants in solidum au paiement de l'astreinte liquidée.

En définitive, il y a lieu de réformer de ce chef l'ordonnance déférée, et, statuant à nouveau, de condamner à titre provisionnel in solidum la SA CERP Group et M. [G] [R] à payer à la SAS Finorpa SCR la somme de 60 000 euros.

Sur la demande de délais de paiement

Aux termes de l'article 1244-1 du code civil ' dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve de l'obligation conformément à l'article 9 de cette ordonnance ' le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues ; par décision spéciale et motivée, il peut prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital ; en outre, il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement, par le débiteur, d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

En l'espèce, si M. [G] [R] justifie avoir déclaré un revenu imposable annuel de 4 956 euros annuel pour l'année 2016, il ne produit aucun justificatif afférent à sa situation patrimoniale. Quant à la SA CERP Group, elle n'a pas cru utile de justifier précisément de sa situation comptable mais de contente de produire un procès-verbal des délibérations du 21 novembre 2016 qui ne concerne que les exercices 2012 à 2015 et ne fait apparaître que les résultats de l'exercice.

En tout état de cause, les appelants qui n'ont pas procédé au moindre paiement en dépit du rejet de leur demande de suspension de l'exécution provisoire par le premier président ne formulent aucune proposition concrète de paiement. Dans ces circonstances, un échelonnement de la dette n'apparaît pas envisageable.

En conséquence, il y a lieu de réformer la décision déférée en ce qu'elle avait accordé des délais de paiement et de débouter les appelantes de leur demande de délais de paiement.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la partie perdante est, sauf décision contraire motivée par l'équité ou la situation économique de la partie succombante, condamnée aux dépens, et à payer à l'autre partie la somme que le tribunal détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Il y a lieu de confirmer la décision déférée du chef des dépens et des frais irrépétibles, et y ajoutant de condamner la SA CERP Group et M. [G] [R] au paiement des entiers dépens de l'appel et à payer à la SAS Finorpa SCR la somme de 1 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevable l'appel incident formé par la SAS Finorpa SCR ;

Confirme l'ordonnance déférée en ce qu'il a retenu le principe d'une condamnation au paiement d'une astreinte et du chef des dépens et de frais irrépétibles ;

L'infirme pour le surplus de ses dispositions et, statuant à nouveau :

- déboute la SA CERP Group et M. [G] [R] de leur demande de réduction du montant de l'astreinte ;

- condamne à titre provisionnel in solidum la SA CERP Group et M. [G] [R] à payer à la SAS Finorpa SCR la somme de 60 000 euros en exécution de l'astreinte ;

- déboute la SA CERP Group et M. [G] [R] de leur demande de délais de paiement ;

- condamne la SA CERP Group et M. [G] [R] au paiement des entiers dépens de l'appel et à payer à la SAS Finorpa SCR la somme de 1 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

Le GreffierLe Président

S. HurtrelM.A.Prigent


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 17/03300
Date de la décision : 08/02/2018

Références :

Cour d'appel de Douai 21, arrêt n°17/03300 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-08;17.03300 ?
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