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14/12/2017 | FRANCE | N°16/04927

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 2, 14 décembre 2017, 16/04927


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 2



ARRÊT DU 14/12/2017





***



N° de MINUTE :17/

N° RG : 16/04927



Jugement (N° 14/11073) rendu le 12 juillet 2016 par le tribunal de grande instance de Lille



APPELANTE



SCI du Bibrou agissant poursuites et diligences de ses réprésentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]
>représenté par Me François Deleforge, SCP François Deleforge-Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai

assisté de Me Pierre Soulier, avocat au barreau de Lille



INTIMÉE



SAS Hôtel des Tours

a...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 14/12/2017

***

N° de MINUTE :17/

N° RG : 16/04927

Jugement (N° 14/11073) rendu le 12 juillet 2016 par le tribunal de grande instance de Lille

APPELANTE

SCI du Bibrou agissant poursuites et diligences de ses réprésentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par Me François Deleforge, SCP François Deleforge-Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai

assisté de Me Pierre Soulier, avocat au barreau de Lille

INTIMÉE

SAS Hôtel des Tours

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Virginie Coleman-Lecerf, avocat au barreau de Lille

assistée de Me Vincent Brochet, avocat au barreau de Paris, substitué à l'audience par Me Chloé Toussaint, avocat au barreau de Paris

DÉBATS à l'audience publique du 10 octobre 2017 tenue par Isabelle Roques magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Valérie Roelofs

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Marie-Laure Dallery, président de chambre

Nadia Cordier, conseiller

Isabelle Roques, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2017 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Marie-Laure Dallery, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 3 octobre 2017

FAITS ET PROCEDURE

Par acte sous seing privé en date du 28 septembre 2009, la SCI du Bibrou, dont le gérant est M. [E] [J], a donné à bail à la SARL Hôtel des Tours, représentée par son gérant, M. [F] [A], un ensemble immobilier situé [Adresse 2], à usage exclusif d'hôtel-restaurant, salons d'accueil et de réception, pour une durée de 9 ans et moyennant un loyer mensuel de 18 750 euros HT.

Par acte en date du 26 mars 2014, tous les titres de la société Hôtel des Tours ont été acquis par la société Oletis.

Par acte en date du 27 octobre 2014, la société du Bibrou a fait délivrer à la société Hôtel des Tours un commandement visant la clause résolutoire contenue dans le bail commercial.

Aux termes de cet acte, la société du Bibrou mettait en demeure la société Hôtel des Tours de cesser les travaux entrepris par elle dans les locaux loués et de les remettre en état dans un délai d'un mois.

Par acte en date du 26 novembre 2014, la société Hôtel des Tours a fait assigner son bailleur, la société du Bibrou, devant le tribunal de grande instance de Lille aux fins de contestation de ce commandement.

De son côté, la société du Bibrou sollicitait, notamment, le constat du manquement de son locataire aux obligations du bail et le prononcé de son expulsion des lieux.

Dans un jugement contradictoire rendu le 12 juillet 2016, ce tribunal a :

- dit nul et de nul effet le commandement visant la clause résolutoire signifié par la société du Bibrou à la société Hôtel des Tours le 27 octobre 2014,

- débouté, en conséquence, la société du Bibrou de sa demande reconventionnelle tendant à voire constater la résiliation du bail commercial la liant à la société Hôtel des Tours,

- débouté la société du Bibrou de ses demandes reconventionnelles en prononcé de la résiliation du bail commercial,

- débouté les parties de leurs demandes au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens,

- rejeté la demande de recouvrement direct des dépens présentée par les conseils des parties,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.

Par déclaration au greffe en date du 3 août 2016, la société du Bibrou a interjeté appel de cette décision.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 octobre 2017, l'affaire étant plaidée le 10 octobre puis mise en délibéré.

PRETENTION DES PARTIES

Vu les conclusions en date du 3 octobre 2017 dans lesquelles la société du Bibrou demande à la cour de :

- la recevoir en son appel,

- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- à titre principal :

- constater que la société Hôtel des Tours n'a pas déféré dans le délai d'un mois au commandement visant la clause résolutoire qui lui a été délivré le 27 octobre 2014,

- constater la résiliation du bail commercial,

- ordonner l'expulsion de la société Hôtel des Tours et de tous occupants de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique,

- fixer l'indemnité d'occupation due par la société Hôtel des Tours jusqu'à son départ ou son expulsion effective au double du loyer actuel, majoré des charges,

- à titre subsidiaire :

- dire qu'en entreprenant les travaux constatés par procès-verbal d'huissier dressé le 6 octobre 2014, et notamment la création de chambres, sans obtenir les autorisations administratives pour y procéder, la société Hôtel des Tours a commis un manquement grave à ses obligations contractuelles,

- prononcer la résiliation du bail commercial,

- ordonner l'expulsion de la société Hôtel des Tours et de tous occupants de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique,

- fixer l'indemnité d'occupation due par la société Hôtel des Tours jusqu'à son départ ou son expulsion effective au double du loyer actuel, majoré des charges,

- en tout état de cause :

- débouter la société Hôtel des Tours de ses demandes,

- et la condamner aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à lui verser une somme de 20 000 euros au titre de ses frais irrépétibles.

Vu les conclusions de la société Hôtel des Tours en date du 2 octobre 2017 dans lesquelles elle sollicite de la cour que :

- elle déboute la société du Bibrou de l'ensemble de ses demandes,

- à titre principal :

- elle confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles et en ce qu'il a prévu que chaque partie supporterait les dépens qu'elle avait engagés,

- elle condamne la société du Bibrou aux dépens de première instance ainsi qu'à lui régler une somme de 10 000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance,

- à titre subsidiaire :

- elle suspende les effets de la clause résolutoire,

- elle lui accorde un délai d'un an pour se conformer au commandement visant la clause résolutoire,

- en tout état de cause, elle condamne la société du Bibrou aux dépens d'appel ainsi qu'à lui verser une somme de 20 000 euros au titre de ses frais irrépétibles en cause d'appel.

SUR CE,

Sur les demandes tendant au constat ou au prononcé de la résiliation du bail commercial

La société du Bibrou soutient que la société Hôtel des Tours a manqué gravement à ses obligations contractuelles en procédant à des travaux de modification des locaux loués sans obtenir son accord préalable et sans, de surcroît, obtenir les autorisations administratives requises avant d'y procéder.

Le bailleur ajoute que ces modifications n'étaient en rien imposées par les normes en vigueur et qu'elles n'apportent aucune plus-value aux locaux mais les dénature.

Il estime, enfin, que son locataire a fait preuve de mauvaise foi et n'a même pas essayé de régulariser sa situation après délivrance du commandement visant la clause résolutoire.

La société du Bibrou estime donc que ces manquements justifient que soit constatée la résiliation du bail commercial ou, à tout le moins, que soit prononcée sa résiliation.

En réplique, la société Hôtel des Tours s'oppose à ces demandes et soutient que son bailleur invoque sa clause résolutoire de mauvaise foi car il avait parfaitement connaissance des travaux qu'elle avait entrepris et de leur ampleur, qu'il lui a imparti un délai trop court pour remettre les locaux et que les travaux réalisés ne causent aucun préjudice à ses locaux, voire ont permis de les mettre aux normes en vigueur.

Par ailleurs, elle ajoute qu'elle a désormais obtenu toutes les autorisations administratives requises.

Enfin, elle soutient que le prononcé de la résiliation du bail serait disproportionné eu égard aux manquements qui lui sont reprochés par son bailleur.

sur la demande tendant au constat de l'acquisition de la clause résolutoire

Aux termes de l'article L145-41 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

L'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016, dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Le contrat de bail commercial liant les parties stipule, dans son article 3, ce qui suit :

- 'le preneur doit effectuer à ses frais les travaux qui pourraient être prescrits par les autorités administratives quelle qu'en soit la nature, tant lors de l'entrée dans les lieux que durant l'exécution du présent contrat, sans pouvoir prétendre à sa sortie à aucune indemnité quelconque.'

- 'le preneur ne pourra faire dans les lieux loués aucun changement de distribution, aucune démolition, aucun percement de mur ou de voûte, aucune construction ou addition, sans l'autorisation écrite et expresse du bailleur, et dans les conditions définies par lui.

Dans le cas où l'autorisation serait accordée, les travaux seront exécutés sous la direction de l'architecte ou du technicien du bailleur, dont les honoraires seront à la charge du preneur.'

Et, à l'article 9 relatif à la 'clause résolutoire', il est prévu qu'à 'défaut par le preneur d'exécuter une seule des charges et conditions du présent bail, lesquelles sont toutes de rigueur, [....] le présent bail sera résilié de plein droit si bon semble au bailleur et sans aucune formalité judiciaire, un mois après simple commandement ou une simple sommation rappelant expressément la présente clause résolutoire restée sans effet durant ce délai.'

Il doit être rappelé à titre liminaire que les parties ne peuvent au gré de leur argumentation, et pour l'asseoir, jouer sur la date à laquelle les travaux auraient débuté.

Et, sur ce point, aucun aveu judiciaire ne peut être constaté, comme le demande la société du Bibrou qui, elle aussi dans ses conclusions, invoque tantôt un début des travaux en juillet 2014, tantôt en septembre, lorsque cela sert son argumentation.

En effet, en l'espèce, les parties produisent diverses pièces permettant de fixer la date du début des travaux litigieux (cf. Notamment Procès-verbal de constat d'huissier dressé à la demande de la société du Bibrou, échange de mails entre la société Hôtel des Tours et la société All Time Network chargée de réaliser une campagne publicitaire relative à la création de nouvelles chambres dans l'hôtel et attestations produites par la société Hôtel des Tours).

Et, ces pièces établissent comme inexact le prétendu 'aveu judiciaire' de la société Hôtel des Tours dont se prévaut la société du Bibrou.

Cette dernière ne peut donc être suivie dans son argumentation sur ce point.

A la lecture de ce procès-verbal de constat d'huissier dressé le 6 octobre 2014 et dénoncé le 27 octobre 2014, en même temps qu'était délivré le commandement visant la clause résolutoire, il apparaît qu'à cette date :

- la société Hôtel des Tours faisait réaliser des travaux ayant notamment pour but de créer de nouvelles chambres et d'aménager des bureaux ;

- des travaux en vue de la création de deux chambres dites PMR étaient en cours et avaient nécessité le percement d'une cloison,

- des chambres d'hôtel avaient été réalisées dans des espaces anciennement affectés au bureau de direction et à la salle de petit déjeuner ; ces chambres étaient déjà exploitées ;

- une zone affectée à des bureaux avait été créée en espace mezzanine ;

- une cage d'escalier avait été supprimée,

- des travaux d'embellissement avaient également été réalisés dans les chambres déjà existantes.

La directrice de l'hôtel avait déclaré à l'huissier de justice que les travaux avaient débuté en juillet 2014 et que ceux relatifs aux chambres déjà exploités s'étaient achevés en août de la même année.

Ainsi, il résulte de ces constatations que l'ampleur des travaux réalisés nécessitait bien l'autorisation préalable du bailleur, ce que ne conteste pas la société Hôtel des Tours.

Par courrier en date du 12 décembre 2013, M. [J], en sa qualité de gérant de la société Bibrou, avait répondu à une sollicitation de la société Oletis en indiquant que, dès lors que cette dernière aurait la propriété de la société Hôtel des Tours, la société du Bibrou donnait son autorisation pour la création de chambres supplémentaires 'sous réserves d'acceptation des demandes de travaux auprès de la municipalité ainsi que de l'accord préfectoral' , les plans de ces transformations devant lui être soumis pour acceptation, une fois l'accord de 'la mairie de [Localité 1]' obtenu.

La société du Bibrou n'a pas formalisé par la suite un autre accord au sujet des travaux entrepris et n'a été destinataire des plans relatifs aux transformation des locaux qu'en octobre 2014, après qu'a été délivré le commandement de payer visant la clause résolutoire.

Toutefois, comme l'ont justement relevé les premiers juges, la société du Bibrou était parfaitement informée de l'ampleur et de la réalisation de ces travaux.

En effet, il est établi par trois attestations produites par la société Hôtel des Tours (pièces 43, 44 et 45 de son dossier), rédigées par le chef de chantier et deux dirigeants de sociétés qui sont intervenues sur ce chantier, que le projet de travaux a été présenté à M. [J] le 8 juillet 2014, date de début du chantier, et que ce dernier s'est présenté, par la suite, à l'hôtel alors que les travaux étaient en cours de réalisation.

Le fait que le dirigeant d'une des sociétés, la société Thélia, admette être le cousin du président de la société Olétis ne saurait jeter le discrédit sur les faits dont il atteste, et ce d'autant plus que M. [J] admet s'être rendu à l'hôtel le 8 juillet 2014.

En outre, ses propos sont corroborés par les deux autres personnes ayant rédigé des attestations.

Et, même s'il soutient s'y être rendu pour une autre motif, à savoir recevoir un chèque de règlement des loyers impayés, M. [J] ne saurait s'être mépris sur ce qui allait être entrepris par la société Hôtel des Tours dès lors que les intervenants sur le chantier, dont le chef de chantier, étaient présents ce 8 juillet et qu'il avait, au préalable, été saisi d'une demande d'autorisation de procéder à des travaux dans les locaux loués pour laquelle il avait donné son accord de principe.

De même, comme l'ont souligné les premiers juges, une campagne de publicité relative à la création des nouvelles chambres litigieuses a été confiée début septembre 2014 à la société Alltime Network, dont M. [J] détient 490 des 500 parts sociales et dont les locaux professionnels se situent au [Adresse 3].

Or, dans le cadre de cette campagne, des clichés photographiques de ces nouvelles chambres ont été pris au début du mois de septembre 2014.

Pour toutes ces raisons, il doit être considéré que M. [J] avait effectivement connaissance de la réalisation de travaux dans les lieux loués et de leur ampleur.

Néanmoins, à aucun moment, la société du Bibrou n'a manifesté son désaccord sur la réalisation de ces travaux avant la délivrance du commandement visant la clause résolutoire du 27 octobre 2014.

Par ailleurs, eu égard à l'ampleur des travaux, tel que constatés par l'huissier de justice mandaté par la société du Bibrou, et notamment aux chambres litigieuses déjà créées dans la mezzanine et à la cage d'escalier supprimée, mais aussi aux travaux de remise en état demandés par le bailleur dans son commandement visant la clause résolutoire, le délai d'un mois imparti par le bailleur pour procéder à la remise en état des lieux ne permettait pas au locataire de déférer à ce commandement et de mettre effectivement fin aux manquements invoqués, et ce nonobstant l'attestation de l'architecte, mandaté par la société du Bibrou, qui a visité les lieux avec l'huissier de justice, attestation contestée par une autre attestation produite par la société Hôtel des Tours, émanant d'un des intervenants sur le chantier.

Ainsi, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que le commandement visant la clause résolutoire était entaché de nullité et se trouvait donc privé d'effets.

Il convient donc de confirmer le jugement entrepris sur ce point.

sur la demande tendant au prononcé de la résiliation du bail commercial

L'article 1184 du code civil, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016, dispose que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.

La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.

Il appartient au juge du fond d'apprécier si le retard dans l'exécution ou l'inexécution partielle est d'une gravité suffisante pour que la résolution doive être prononcée.

Enfin, aux termes de l'article 1134 de ce même code, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Comme cela a été relevé plus haut, les travaux entrepris par la société Hôtel des Tours, et achevés depuis le début de la présente instance, étaient d'une ampleur telle qu'ils nécessitaient bien de recueillir l'autorisation préalable du bailleur, ce que ne conteste pas la société Hôtel des Tours.

Par ailleurs, comme cela a également été relevé plus haut, la société du Bibrou avait, certes, donné un accord de principe sur les travaux envisagés mais n'a pas, par la suite, réitéré son accord, avant que ces travaux ne soient entrepris.

Toutefois, comme cela a été retenu ci-avant, M. [J], gérant de la société du Bibrou, était au courant de ses travaux et ce depuis le mois de juillet 2014, à raison de ses visites dans les locaux loués pendant la période de réalisation desdits travaux.

De même, comme l'ont souligné les premiers juges, cette connaissance est aussi établie par la campagne de publicité relative à la création des nouvelles chambres litigieuses, confiée début septembre 2014 à la société Alltime Network, dont M. [J] détient 490 des 500 parts sociales.

Pour autant, à aucun moment, la société du Bibrou n'a manifesté son désaccord sur la réalisation de ces travaux avant la délivrance du commandement visant la clause résolutoire du 27 octobre 2014.

Ainsi, comme l'ont justement considéré les premiers juges, ce manquement invoqué par la société du Bibrou ne peut servir de fondement au prononcé de la résiliation du bail commercial.

S'agissant de l'absence d'autorisations administratives préalables à la réalisation de ces travaux, la société Hôtel des Tours ne conteste pas ne pas avoir obtenu les autorisations requises avant le début des travaux qu'elle a entrepris.

De même, la société du Bibrou ne conteste pas que les deux autorisations demandées ont été finalement obtenues, soit expressément, le 12 décembre 2014, soit tacitement en mars 2015.

Toutefois, comme l'ont justement relevé les premiers juges, ces infractions ont cessé avant que le tribunal de grande instance, et a fortiori la cour, ne statue.

Et, le bailleur n'argue d'aucun incident ou accident survenu, en lien avec ces infractions.

Ainsi, comme l'ont retenu les premiers juges, le simple fait qu'elles aient cessé suffit à considérer qu'elles ne peuvent servir comme fondement d'une demande de prononcé de la résiliation du bail commercial.

S'agissant des autres autorisations que la société Hôtel des Tours aurait hypothétiquement dû demander, comme l'ont indiqué les premiers juges, il n'est pas établi de quelles autorisations il s'agit.

Enfin, force est de constater que la société du Bibrou qui argue du préjudice subi par elle du fait des travaux, n'apporte pas de preuve de ce qu'ils dénatureraient les locaux, comme le soutient, tout en écrivant qu'ils 'ne sont pas des plus-values'.

En effet, se borner à énumérer les modifications opérées dans les locaux, modifications dont l'ampleur n'est pas contestée, ne peut suffire à établir qu'ils constitueraient une moins-value.

D'ailleurs, comme l'ont justement relevé les premiers juges, le fait d'avoir créé deux chambres accessibles aux personnes à mobilité réduite, et ce peu de temps avant que cela ne devienne obligatoire, ne peut constituer une 'dénaturation' des locaux.

En outre, la société Hôtel des Tours établit que diverses prescriptions avaient été émises en décembre 2012 par la commission communale de sécurité afin que les locaux soient mis en conformité avec les normes, notamment incendie (cf. Pièce 40 de son dossier).

Elle justifie également que, grâce aux travaux réalisés, beaucoup de ces prescriptions ont été suivies et que seules des réserves sur le système de désenfumage persistent (cf. Pièce 80).

Ainsi, il est établi que les travaux réalisés ont également permis de mettre aux normes les locaux loués.

Enfin, la société du Bibrou qui estime ses locaux dénaturés, n'invoque, ni ne prouve de ralentissement de l'activité économique de son locataire, depuis la réalisation des travaux litigieux.

En conséquence, il apparaît que la société du Bibrou n'excipe d'aucun motif justifiant du prononcé de la résiliation du bail commercial la liant à la société Hôtel des Tours.

Le jugement entrepris sera donc également confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande à ce titre et de toutes ses demandes subséquentes.

Sur les dépens et l'indemnité au titre des frais irrépétibles

Le sens du présent arrêt conduit à infirmer le jugement entrepris uniquement sur la condamnation aux dépens, les dispositions relatives à l'application de l'article 700 du code de procédure civile étant confirmées.

La société du Bibrou, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à verser à la société Hôtel des Tours une somme de 6 000 euros en application, en cause d'appel, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le sens du présent arrêt conduit à débouter la société du Bibrou de sa demande d'indemnité au titre de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qui concerne les dispositions relatives aux dépens de première instance ;

Et statuant à nouveau sur ce chef infirmé et y ajoutant,

CONDAMNE la société du Bibrou à verser à la société Hôtel des Tours la somme de 6 000 euros au titre de ses frais irrépétibles en cause d'appel ;

DEBOUTE la société du Bibrou de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société du Bibrou aux dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le GreffierLe Président

V. RoelofsM.L.Dallery


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 2
Numéro d'arrêt : 16/04927
Date de la décision : 14/12/2017

Références :

Cour d'appel de Douai 22, arrêt n°16/04927 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-12-14;16.04927 ?
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