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29/06/2017 | FRANCE | N°16/03255

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 29 juin 2017, 16/03255


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 29/06/2017





***





N° de MINUTE :

N° RG : 16/03255



Jugement (N° 14/01422)

rendu le 10 mai 2016 par le tribunal de grande instance de Boulogne sur Mer







APPELANTE



Société Service Technique de Bétons STB

prise en la personne de son gérant M. [L] [Q]

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse

2]



représentée et assistée de Me Sylvain Caille, membre de la SCP Caille & Associés, avocat au barreau de Lille, substitué à l'audience par Me Julien Houyez, avocat





INTIMÉS



Me [B] [D], notaire

demeurant [Adres...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 29/06/2017

***

N° de MINUTE :

N° RG : 16/03255

Jugement (N° 14/01422)

rendu le 10 mai 2016 par le tribunal de grande instance de Boulogne sur Mer

APPELANTE

Société Service Technique de Bétons STB

prise en la personne de son gérant M. [L] [Q]

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 2]

représentée et assistée de Me Sylvain Caille, membre de la SCP Caille & Associés, avocat au barreau de Lille, substitué à l'audience par Me Julien Houyez, avocat

INTIMÉS

Me [B] [D], notaire

demeurant [Adresse 3]

[Adresse 4]

représenté et assisté de Me Lynda Peirenboom, membre de la SELARL Herbaux-Peirenboom-Debert, avocat au barreau de Béthune

SA Natixis Bail

prise en ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 5]

[Adresse 6]

représentée par Me Loïc Le Roy, membre de la SELARL Lexavoue Amiens Douai avocat au barreau de Douai

Assistée de Me Jacques Toriel, avocat au barreau de Paris, membre du cabinet Toriel - Johannsen - Rouillon - Bonin, substitué à l'audience par Me Stéphanie Lemarchand, avocat

DÉBATS à l'audience publique du 23 mai 2017 tenue par Christian Paul-Loubière magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine Popek

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Christian Paul-Loubière, président de chambre

Isabelle Roques, conseiller

Caroline Pachter-Wald, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 juin 2017 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Christian Paul-Loubière, président et Claudine Popek, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 28 avril 2017

***

FAITS ET PROCÉDURE

Selon acte authentique du 8 novembre 2002, les sociétés Natixis bail, Sogefimur, Ucabail immobilier, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société Finamur, ont conclu avec la société Continentale de Nutrition un contrat de crédit-bail d'une durée de 12 ans, afin de financer à hauteur de 11 800 000 euros HT, la construction d'entrepôts commerciaux à [Localité 1], Zone de la Trésorerie.

Lors des travaux sont apparues des fissures et des détériorations au niveau de la dalle de béton des entrepôts contraignant le preneur à établir, le 26 Avril 2004, une déclaration de sinistre auprès de l'assureur, AXA (aux droits duquel vient Covea Risks), lequel a refusé sa garantie.

Selon ordonnance de référé du 27 octobre 2004, un expert judiciaire, M. [S], a été missionné aux fins de donner son avis sur les causes du sinistre.

A la suite du dépôt du rapport de l'expert, le 14 décembre 2006, un protocole transactionnel a été conclu entre le groupe des financeurs, Continentale de Nutrition et Covea Risks le 10 janvier 2011, chiffrant l'ensemble des dommages : travaux de reprises et indemnisation du préjudice d'exploitation, à 2 000 000 euros qui seraient versés par Covea risks à Natixis bail.

Un second protocole d'accord était conclu le 11 janvier 2011, entre le crédits-bailleurs et le crédit-preneur, Continentale Nutrition, sur la répartition de l'indemnité versée par la compagnie Covea Risks et son utilisation.

Les parties au protocole, en son article 2, convenaient du versement au profit de la société Continentale de Nutrition de la somme de 1 384 477,40 euros, en réparation de ses préjudices personnels, notamment la gêne et la réorganisation engendrée par les réparations à réaliser, et le préjudice subi du fait du caractère inesthétique de la dalle après réparation.

Quant au solde de 615 522,60 euros hors taxe, correspondant aux travaux de réparation à entreprendre sur l'immeuble, le protocole prévoyait son versement au profit de la société Natixis Bail, pour le compte des crédits bailleurs : Natixis bail, Sogefimur et Finamur, propriétaires de l'ouvrage.

L'ultime paragraphe de l'article 2 dudit protocole prévoit que «les crédits-bailleurs régleront les entreprises en charge de la réalisation des travaux sur justification de ladite réalisation dûment transmise par la société Continentale de Nutrition à Natixis Bail».

La société Continentale de Nutrition a, le 10 février 2011, signé avec la Société Services Techniques des bétons (STB) un contrat aux d'exécution des travaux de reprises de désordres, tels que définis par M. [S] dans son rapport d'expertise, pour un coût de 615 500 euros HT payables à 80 %, par situations mensuelles validées par le maître de l'ouvrage et à 20 %, lors de la levée des réserves.

Un avenant à ce marché a été formalisé le 21 décembre 2011 entre Natixis Bail, Continentale de Nutrition et STB, prévoyant que les situations de travaux, émises par STB, seraient payées par Natixis Bail sur les fonds versés par l'assureur, après aval de Continentale de Nutrition.

Les premières factures émises par la société STB étaient réglées sur ces modalités.

Par acte notarié du 30 mai 2012, Continentale de Nutrition a levé, par anticipation, l'option d'achat prévue à la convention de crédit-bail, lui transférant ainsi la propriété sur l'immeuble, objet dudit crédit-bail.

Le notaire, Me [D], en a avisé la STB, par courrier recommandé du 1er juin 2012, en ces termes :

«Aux termes du marché sus énoncé, il avait été indiqué sous l'article 7 que le paiement du prix serait effectué par les sociétés Natixis Bail, Sogefimur et Finamur en qualité de crédits bailleurs.

L'acte de levée d'option transfère la propriété du site de [Localité 1] à la société Continentale Nutrition. Il transfert également la qualité de maître d'ouvrage à cette même société.

C'est donc la société Continentale de Nutrition qui aura vocation, à l'avenir, de vous régler directement le solde des travaux, conformément aux termes du marché n° 2011-10-02 du 10 janvier 2011.»

Suivant les termes de ce courrier du notaire, STB a adressé ses situations et ses factures à la société Continentale le Nutrition qui les a réglées, jusqu'au 28 mai 2013, date du dépôt de bilan de cette société.

Selon jugements des 28 mai 2013 et 25 mars 2014, la société Continentale de Nutrition a été placée en redressement judiciaire ; elle a fait l'objet d'un plan de redressement.

La société STB a déclaré sa créance le 2 août 2013 pour la somme de 205 468,02 euros.

Selon lettres du 22 janvier 2014, la STB a mis Natixis bail en demeure de lui payer la même somme au titre du solde du chantier.

Par assignation du 28 mars 2014, la société STB a fait attraire, devant le tribunal de grande instance de Boulogne sur mer, la Société Natixis bail et Me [D], notaire.

Par jugement du 10 mai 2016, ce tribunal a :

- débouté la Société Services techniques des bétons de l'ensemble de ses prétentions ;

- condamné la société STB à payer à Natixis bail la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société STB à payer à Me [D] la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- condamné la Société STB aux entiers dépens, accorde à Me Isabelle Girard, avocat un droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société STB a interjeté appel de cette décision, par déclaration reçue, par voie électronique, au greffe de la cour le 25 mai 2016.

Dans le dernier état de ses conclusions récapitulatives, déposées par voie électronique le 13 janvier 2016, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 10 mai 2016 par le tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer en toutes ses dispositions ;

- Et, en conséquence,

- condamner in solidum la société Natixis bail et Maître [D] à payer à la société STB :

* la somme de 186 975,90 euros, montant du solde du marché n° 2011/1002 restant dû après déduction des deux premiers dividendes perçus, outre les intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2014 ;

* la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts destinés à réparer le préjudice commercial et financier subi par la société STB du fait de la résistance abusive de la société Natixis bail et de Me [D] ;

* la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- donner acte à la société STB qu'en contrepartie du règlement de la somme de 186 975,90 euros par la société Natixis bail et Me [D], ces derniers seront subrogés dans ses droits et actions au passif de la société Continentale de Nutrition ;

- condamner in solidum la société Natixis bail et Me [D] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Sylvain Caille, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives, déposées par voie électronique le 8 septembre 2016, la société Natixis bail demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer en date du 10 mai 2016 ;

- débouter la société STB de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la société STB et Me [D] à payer à la société Natixis bail une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société STB et Me [D] aux entiers dépens dont distraction au profit de la Selarl Lexavoue Amiens Douai, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses écritures récapitulatives, déposées par voie électronique le 22 septembre 2016, Me [D] demande à la cour de :

- dire et juger que Me [D] n'a commis aucune faute permettant d'engager sa responsabilité,

- dire et juger qu'il n'existe aucun lien de causalité entre la faute évoquée et le préjudice revendiqué,

- dire et juger le préjudice de la société STB nul, voire incertain,

- débouter STB de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de Me [D],

- débouter la société Natixis de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de Me [D].

- condamner la société STB à payer à Me [D] une somme de 7 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner STB aux entiers frais et dépens de la présente instance avec distraction au profit de Me Lynda Peirenboom en application des dispositions des articles 696 et 699 du code de procédure civile,

A titre infiniment subsidiaire,

- dire et juger que Me [D] sera subrogé dans les droits de la société STB dans les relations de cette dernière avec la société Continentale de Nutrition.

Pour un plus ample exposé des faits et moyens développés par les parties, il est expressément renvoyé à leurs écritures ci-dessus mentionnées, dans le respect des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 28 avril 2017.

SUR CE,

* Sur la demande de STB :

La demande formée à l'encontre de la société Natixis bail :

Attendu que la société STB réclame, outre la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts du fait de leur résistance abusive, la condamnation in solidum de la société Natixis bail, crédit-bailleur, et de Me [D], notaire, à lui payer le solde du marché n° 2011/1002 restant dû, après déduction des deux premiers dividendes perçus, à hauteur de 186 975,90 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2014 ;

Qu'elle fait valoir qu'en l'absence de délégation parfaite de débiteur au sens de l'article 1275 du code civil, faute d'avoir obtenu de la société STB une décharge expresse de sa dette, tant le délégué que le délégant demeurent tenus de la dette, et que la société Natixis Bail, reste sa débitrice quand bien même la société Continentale Nutrition, aujourd'hui en liquidation judiciaire, a honoré directement certaines factures postérieurement à la levée de l'option ;

Que, toujours selon l'appelante, les premiers juges ne pouvaient donc dénier la qualité de maître d'ouvrage de la société Natixis Bail ;

Qu'enfin, dans l'hypothèse où la société Continentale de Nutrition serait seule maître d'ouvrage des travaux litigieux, la société STB se prévaut de ce que l'engagement de paiement, pris par la société Natixis Bail dans le marché du 10 février 2011 et son avenant du 21 décembre 2011, vaut, à son profit, garantie de paiement au sens de l'article 1799-1 du code civil, précisément un cautionnement solidaire des crédit-bailleurs au sens de l'alinéa 3 de ce texte ;

Qu'en conséquence, en application du marché de travaux du 10 février 2011, du protocole d'accord du 10 janvier 2011 et de l'avenant au marché de travaux du 21 décembre 2011, la société Natixis Bail ne pouvait libérer l'indemnité d'assurance qu'entre les mains de la société STB ;

Qu'en transférant le solde de l'indemnité d'assurance - certes sur les conseils erronés du notaire - à Continentale de Nutrition, la société Natixis Bail n'a pas respecté ses obligations ;

Qu'ainsi, et selon STB, le refus de paiement, opposé par la société Natixis Bail, apparaît injustifié et la condamnation, sollicitée à son encontre, fondée ;

Attendu, selon la société Natixis Bail, que les conditions et modalités de son intervention en sa qualité de crédit-bailleur, prévue à la convention conclue le 8 novembre 2002, étaient strictement financières ;

Qu'elle ne saurait supporter le règlement du solde des travaux au bénéfice de STB, alors que les dispositions du marché initial et de l'avenant ne mentionnent aucune obligation à sa charge ;

Que faute d'être débitrice, la société Natixis Bail n'a, par définition, pu organiser une quelconque substitution de débiteur, en la personne de la société Continentale de Nutrition ;

Qu'elle ne peut être tenue de garantir le paiement de ces sommes, l'article 1799-1 du code civil, invoqué par la société STB étant inapplicable en l'espèce ;

Qu'en tout état de cause, les demandes formées par STB seront écartées, alors qu'elle ne rapporte pas la preuve du respect, par ses soins, de l'avenant conclu le 21 décembre 2011 ;

Sur la qualité de maître d'ouvrage de la société Natixis bail :

Attendu que selon le contrat de crédit-bail immobilier du 8 novembre 2002, les crédits-bailleurs, les sociétés Natixis Bail, Sogefimur et Finamur, sont intervenues aux fins de financer, par voie de crédit-bail, l'acquisition d'un terrain choisi par la société crédit-preneur, Continentale de Nutrition et les travaux d'édification des locaux dont le programme de construction a été arrêté par elle et dont elle devait, in fine, devenir propriétaire ;

Que l'article A.9.1.1. du contrat du 8 novembre 2002 prévoit, en cas de sinistre partiel, que «le bailleur délégué au preneur qui l'accepte, la totalité des obligations incombant normalement au Maître de l'Ouvrage. Les conditions de la délégation par le bailleur au preneur des obligations de Maître d'Ouvrage seront précisées par acte ultérieur établi en suite du sinistre» ;

Attendu que, consécutivement aux désordres affectant la dalle de l'immeuble et le protocole d'accord conclu entre les crédit-bailleurs, la compagnie d'assurance et la société Continentale de Nutrition, cette dernière, agissant pour le compte des crédits-bailleurs comme maître d'ouvrage délégué, a, le 10 février 2011, signé avec la Société STB un contrat, en vue de l'exécution des travaux de reprises de désordres ;

Qu'un avenant à ce marché, formalisé le 21 décembre 2011 entre Natixis Bail, Continentale de Nutrition et STB, prévoyait que les situations de travaux, émises par STB, seraient payées par Natixis Bail sur les fonds versés par l'assureur, après aval de la Continentale de Nutrition ;

Attendu que l'article 7 du marché de travaux du 10 février 2011, passé entre Continentale de Nutrition et STB, prévoit que «le paiement du prix sera effectué par les sociétés Natixis Bail, Sogefimur, Finamur en leur qualité de crédits-bailleurs ainsi que cela a été défini dans le cadre du protocole d'accord régularisé entre eux.» le 10 janvier 2011 ;

Que l'avenant audit marché signé, le 21 décembre 2011, par les sociétés Natixis Bail, qualifiée de «MAÎTRE D'OUVRAGE », Continentale de Nutrition et STB, stipule que «le PRENEUR [Continentale Nutrition] assurera la maîtrise d'ouvrage déléguée conformément aux stipulations du contrat de crédit-bail immobilier ci-dessus rappelé» ;

Que ledit avenant indique précisément que «NATIXIS agira en qualité de MAÎTRE D'OUVRAGE et assurera, dans les limites convenues, le règlement par chèque ou par virement bancaire, des situations ou factures qui lui seront présentées, après visa du maître d''uvre et acceptation par le MAÎTRE D'OUVRAGE DÉLÉGUÉ», rétablissant ainsi le contrat conformément à la situation juridique, en faisant intervenir la société Natixis Bail, crédit-bailleur, en qualité de maître d'ouvrage, et la société Continentale de Nutrition, crédit-preneur, en qualité de maître d'ouvrage délégué ;

Qu'il ressort donc clairement des contrats de 2011, liant ces deux parties au litige par l'effet de l'adhésion de la société Natixis Bail au cadre contractuel, acceptée par Continentale de Nutrition et STB dans l'avenant du 21 décembre 2001, que Natixis Bail, en sa qualité de maître d'ouvrage, était tenue au paiement des factures émises par STB ;

Qu'il est tout aussi dénué d'ambiguïté, à la lecture de ces clauses, que Continentale de Nutrition, en sa qualité de maître d'ouvrage délégué, a engagé STB, exécutant ainsi le mandat accordé par la société Natixis Bail, crédit-bailleur et maître d'ouvrage au moment de l'exécution du contrat de travaux - Continentale de Nutrition n'étant devenue propriétaire de l'immeuble que, postérieurement, par acte notarié d'acquisition du 30 mai 2012 ;

Qu'ainsi la société Natixis Bail, en sa qualité de mandant, était tenue des actes de son mandataire dans les limites du mandat donné à celui-ci au travers des contrats ;

Que jusqu'à sa décision de lever l'option pour acquérir l'immeuble, la qualité de mandataire de la société Continentale de Nutrition était nécessairement connue de la société STB qui a reçu paiement des mains de la société Natixis Bail ;

Sur la délégation de paiement :

Attendu qu'à la suite de la décision de lever par anticipation l'option d'acquérir le bien prise par la société Continentale de Nutrition, selon acte notarié du 30 mai 2012, les crédits bailleurs, les sociétés Natixis Bail, Sogefimur et Finamur, lui ont vendu l'entrepôt édifié et la parcelle de terrain, pour la somme principale de 4 698 939 euros  TTC ;

Qu'avec le transfert de propriété sur l'immeuble s'est opéré un transfert de droits et d'obligations sur la tête de Continentale de Nutrition ;

Que l'acte stipule à l'article 30 intitulé «Conséquence de la présente vente» qu'eu égard à la «confusion intervenue ce jour, de la qualité de l'acquéreur, de locataire en crédit-bail et de propriétaire de l'immeuble, la convention de crédit-bail immobilier est éteinte à compter des présentes.» ;

Que s'opérait donc ici subrogation du crédit-preneur devenu propriétaire dans les droits et actions des crédit-bailleurs, en particulier pour ce qui était de l'indemnité d'assurance prévue à la suite des sinistres et de l'accord transactionnel du 10 janvier 2011 ;

Qu'ainsi, le propriétaire n'étant plus le groupe financier des crédit-bailleurs mais bien la société Continentale de Nutrition, la société Natixis Bail, représentant le groupe des financeurs d'origine, n'avait plus qualité de maître d'ouvrage afin de conserver par-devers elle les fonds reçus de la compagnie d'assurances du responsable, Covea Risks, pour la réparation de la dalle ;

Que sans qu'il soit nécessaire de répondre aux arguments de STB quant aux conditions de la délégation de débiteur et tirés des dispositions de l'article 1275 du code civil, il suffit de constater que du fait de cette vente, qui n'a pas substitué un débiteur à un autre, la société Continentale de Nutrition a exercé la pleine maîtrise d'ouvrage de l'immeuble, n'intervenant plus en qualité de mandataire de la société Natixis Bail à la suite de l'extinction du lien contractuel avec le crédit-bailleur ;

Qu'à compter de l'opposabilité de l'acte de vente aux tiers, la société Continentale de Nutrition a donc poursuivi seule, comme maître de l'ouvrage, sa relation contractuelle avec la société STB ;

Qu'en conséquence, la société STB n'est pas fondée à se prévaloir d'une substitution fautive et unilatérale imputable à la société Natixis Bail ;

Sur la garantie de l'article 1799-1 du Code civil :

Attendu que, si la société STB prétend qu'aux termes du marché initial et de l'avenant formant son contrat de 2011, elle disposait de la garantie de paiement prévu par l'article 1799 1 du Code civil, le paiement de son marché devant être assuré directement par les établissements financiers crédit-bailleurs, la cour relève que ni le marché initial, ni l'avenant ne prévoient de clause stipulant une quelconque garantie de paiement ;

Que les travaux de reprise, objet de ces contrats, n'ont pas été financés par un crédit spécifique mais au moyen d'indemnités d'assurance ;

Qu'aucun cautionnement solidaire n'a été consenti par les établissements financiers ;

Qu'enfin si ces contrat et avenant mentionnent un règlement progressif des sommes dues par la société Natixis Bail, il ne s'agit ici que de modalités de paiement du prix et non de garantie ;

Que ce moyen développé par la société STB ne saurait, en conséquence, aboutir ;

La demande formée à l'encontre de Me [D] :

Attendu que la société STB se prévaut de ce que les informations erronées, délivrées par Me [D] dans ses courriers en date des 1er et 6 juin 2012, en affirmant à la société STB que la société Continentale de Nutrition serait désormais son seul débiteur, et invitant la société Natixis Bail à libérer le solde de l'indemnité d'assurance de 406 351,08 euros à cette société, en liquidation judiciaire, au mépris des droits de la société STB, sont constitutives d'une faute à l'origine directe du préjudice subi par elle ;

Qu'elle réclame la condamnation in solidum de Me [D], avec la société Natixis Bail, à l'indemniser de l'intégralité de son préjudice ;

Mais attendu qu'adoptant les motifs pertinents du premier juge, il sera ajouté que quand bien même le notaire n'aurait pas envoyé ces courriers à la société STB, les effets du contrat de vente demeurent : les fonds indemnitaires étaient transférés de droit à la société Continentale de Nutrition laquelle avait désormais la charge des règlements des factures présentée par STB comme elle l'a fait jusqu'au dépôt de bilan ;

Qu'eu égard à la situation nouvelle à compter de juin 2012, la société STB devait réclamer et obtenir le règlement de ses travaux auprès de la nouvelle propriétaire ;

Qu'il n'y a donc, en tout état de cause, pas de lien de causalité entre l'initiative reprochée à Me [D] et le préjudice invoqué ;

Que la société STB sera, en conséquence, déboutée de toutes ses prétentions à son encontre comme à l'encontre de Natixis Bail et le jugement déféré confirmé ;

* Sur les frais irrépétibles de procédure et les dépens :

Attendu qu'il résulte des dispositions cumulées des articles 696 et 700 du code de procédure civile que, sauf dispositions contraires motivées sur l'équité, la partie perdante est condamnée aux dépens de la procédure et doit en outre supporter les frais irrépétibles, tels que les frais d'avocat, avancés par son adversaire pour les besoins de sa défense en justice ;

Attendu que compte tenu tant de l'importance du litige, de sa durée, des diligences accomplies et de l'équité, que du sens de l'arrêt, il apparaît justifié de confirmer le jugement déféré sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Qu'il apparaît inéquitable de laisser à la charge des parties intimées l'intégralité des frais non compris dans les dépens exposés, par elles, en appel ;

Qu'il y a lieu de leur allouer, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2 500 euros, pour chacune d'elles, au titre de l'instance d'appel ;

Que la demande faite, au même titre, par la société STB sera rejetée et que le sens de l'arrêt justifie de la condamner aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société STB à payer la somme de 2 500 euros à la société Natixis Bail et à Me [D], pour chacun d'eux, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel ;

Dit que les dépens pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et au profit de la Selarl Lexavoue Amiens Douai et de Me Lynda Peirenboom, avocats ;

Déboute les parties de toutes demandes, fins ou prétentions, plus amples ou contraires.

Le greffier,Le président,

Claudine Popek.Christian Paul Loubière.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 16/03255
Date de la décision : 29/06/2017

Références :

Cour d'appel de Douai 1B, arrêt n°16/03255 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-06-29;16.03255 ?
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