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22/06/2017 | FRANCE | N°16/01224

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 22 juin 2017, 16/01224


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 22/06/2017

***

N° de MINUTE :

N° RG : 16/01224

Jugement (N° 13/06431)

rendu le 29 Janvier 2016

par le tribunal de grande instance de Lille



APPELANT



Monsieur [H] [J]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1] ([Localité 1]) - de nationalité française

demeurant : [Adresse 1]s

Représenté par Me Caroline Chambaert, avocat au barreau de Lille



INTIMÉE



Scop Banque Populaire Lorraine Champagne

ayant son siège social : [Adresse 2]

Représentée par Me Philippe Vynckier, avocat au barreau de Lille



DÉBATS à l'audience p...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 22/06/2017

***

N° de MINUTE :

N° RG : 16/01224

Jugement (N° 13/06431)

rendu le 29 Janvier 2016

par le tribunal de grande instance de Lille

APPELANT

Monsieur [H] [J]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1] ([Localité 1]) - de nationalité française

demeurant : [Adresse 1]s

Représenté par Me Caroline Chambaert, avocat au barreau de Lille

INTIMÉE

Scop Banque Populaire Lorraine Champagne

ayant son siège social : [Adresse 2]

Représentée par Me Philippe Vynckier, avocat au barreau de Lille

DÉBATS à l'audience publique du 11 Janvier 2017 tenue par Hélène Billieres magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maryline Burgeat

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Martine Battais, président de chambre

Catherine Convain, conseiller

Hélène Billieres, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 Juin 2017 après prorogation du délibéré du 27 avril 2017 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Martine Battais, président et Maryline Burgeat, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 15 septembre 2016

***

LA COUR,

Attendu que Monsieur [H] [J] a interjeté appel d'un jugement du tribunal de grande instance de Lille du 29 janvier 2016 qui l'a débouté de ses demandes tendant à voir déclarer la société Banque populaire Lorraine Champagne déchue de son droit aux intérêts contractuels au titre de deux contrats de prêts immobiliers qu'il a souscrits, avec Madame [X] [D], son épouse, auprès de cet établissement bancaire selon deux offres préalables acceptées les 14 et 15 juillet 2008, réitérées par actes authentiques des 30 septembre et 6 octobre 2008 et condamner en conséquence la banque à lui rembourser les intérêts indûment perçus ; et qui l'a condamné à payer à la banque une somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu qu'il ressort des éléments du dossier que selon une offre préalable acceptée le 14 juillet 2008 et réitéré par acte notarié le 30 septembre suivant, la Banque populaire Lorraine Champagne a consenti à Monsieur [J] et Madame [D] un prêt immobilier d'un montant de 320 000 euros au taux nominal de 5,20 % l'an et d'une durée de cent-quatre-vingt-mois, remboursable par cent-soixante-huit mensualités, destiné à financer l'acquisition d'un logement, situé [Adresse 3] ;

Que ce prêt, qui prévoyait une franchise totale pendant une durée de douze mois, était notamment garanti par un privilège de prêteur de deniers de premier rang à hauteur de 290 000 euros sur le bien financé ainsi que par une hypothèque de second rang à hauteur de 30 000 euros sur le même bien ;

Qu'il était en outre convenu que Monsieur et Madame [J] adhèrent, chacun, à l'assurance de groupe souscrite par la banque en couverture des risques de décès et perte totale et irréversible d'autonomie à hauteur de 50 % du capital emprunté ;

Que selon une offre préalable acceptée le 15 juillet 2008 et réitérée par acte notarié le 6 octobre suivant, la Banque populaire Lorraine Champagne leur a en outre consenti un second prêt immobilier d'un montant de 292 500 euros au taux nominal de 5,20 % l'an, remboursable par cent-soixante-huit mensualités, destiné à financer des travaux de rénovation dans le logement précité ;

Que ce prêt, qui prévoyait également une franchise totale pendant une durée de douze mois, était quant à lui garanti par une hypothèque de troisième rang à hauteur de 285 000 euros sur le bien financé, Monsieur et Madame [J] adhérant par ailleurs, chacun, à l'assurance de groupe souscrite par la banque en couverture des risques de décès et perte totale et irréversible d'autonomie à hauteur de 50 % du capital emprunté ;

Qu'arguant du non-respect du formalisme des articles L. 311-8, L. 311-13 et L. 312-8 ancien du code de la consommation ainsi que d'une inexactitude du taux effectif global mentionné dans chacun des contrats de prêt, Monsieur [J] a assigné la Banque populaire Lorraine Champagne en déchéance de son droit aux intérêts contractuels et, les prêts en cause ayant été remboursés par anticipation en octobre 2013, en remboursement des intérêts perçus suite à cette déchéance devant le tribunal de grande instance de Lille qui a rendu le jugement déféré ;

Attendu que dans ses conclusions du 6 septembre 2016, Monsieur [J], réitérant en cause d'appel les prétentions qu'il avait initialement soumises au premier juge, se prévaut du non-respect du formalisme des offres de prêts des 14 et 15 juillet 2008 ainsi que du non-respect des dispositions de l'article L. 312-8 du code de la consommation en ce qui concerne le coût de chacun des crédits et, pour le prêt de 292 500 euros seulement, le montant du crédit, pour prétendre à la déchéance de la Banque populaire Lorraine Champagne de son droit aux intérêts « pour le passé » et réclamer en conséquence sa condamnation à lui restituer, à ce titre, une somme de 160 029,52 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2013 ;

Que subsidiairement à la déchéance de la banque de son droit aux intérêts, il demande à la cour de constater la nullité des stipulations d'intérêts conventionnels de chacun des deux prêts en cause, en sanction des erreurs affectant le taux effectif global et, partant, de « prononcer la déchéance des intérêts conventionnels pour le passé et l'avenir » et dire que les contrats de prêts devront être soumis « à un taux légal » ; qu'il demande en conséquence qu'il soit enjoint à la Banque populaire Lorraine Champagne de « recalculer les prêts consentis au taux légal » et qu'elle soit condamnée à lui payer :

le trop-perçu en raison du taux contractuel pratiqué sur chacun des prêts jusqu'au remboursement par anticipation ;

le trop-perçu au moment du remboursement au titre des échéances impayées, du capital restant dû et de l'indemnité de résiliation tel qu'il ressortira d'un tableau d'amortissement établi sur la base du taux légal ;

Qu'il réclame enfin l'allocation, à la charge de la Banque populaire Lorraine Champagne, d'une somme de 5 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que dans ses conclusions en réponse du 14 septembre 2016, la Banque populaire Lorraine Champagne conclut au rejet des demandes adverses et à la confirmation du jugement entrepris ; qu'elle sollicite en outre la condamnation de Monsieur [J] à lui verser une somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que pour prétendre à la déchéance de la Banque populaire Lorraine Champagne de son droit aux intérêts, Monsieur [J] se prévaut en premier lieu de la présence, dans les offres de prêt, de clauses abusives en ce qu'elles prévoient, à la seule initiative du prêteur, une résiliation du crédit pour des motifs étrangers au contrat de crédit, clauses qui rendraient les offres de crédit non conformes aux dispositions des articles L. 311-8 et L. 311-13 du code de la consommation ;

Mais attendu que les opérations de crédit en cause étant liées, pour la première, à l'acquisition d'un immeuble en propriété et, pour la seconde, à des travaux à réaliser dans ledit immeuble d'un montant supérieur à 21 500 euros, elles sont exclues du champ d'application des articles L. 311-1 et suivants anciens du code de la consommation relatifs au crédit à la consommation, et ne sont donc pas soumises aux dispositions des articles L. 311-8 et L. 311-13 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable en la cause, issue de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993, qui prévoient que les opérations de crédit visées à l'article L. 311-2 sont conclues dans les termes d'une offre préalable, remise en double exemplaire à l'emprunteur, établie en application des conditions prévues aux articles précédents selon l'un des modèles types fixés par le comité de réglementation bancaire, après consultation du Conseil national de la consommation ;

Qu'il suit que si une offre préalable de crédit à la consommation, en ce qu'elle contient des clauses permettant au prêteur d'exiger un remboursement anticipé hors l'hypothèse de la défaillance de l'emprunteur et donc des clauses de résiliation anticipées de l'offre, non prévues par les modèles types, et qui peuvent ainsi constituer des clauses abusives, ne satisfait dès lors pas aux dispositions de l'article L. 311-13 ancien du code de la consommation et doit en conséquence être sanctionnée par la déchéance du prêteur de son droit aux intérêts conventionnels prévue par l'article L. 311-33 ancien du code de la consommation, il ne saurait, s'agissant d'offres de crédit immobilier, en être de même en l'absence, pour celles-ci, de référence comparable aux modèles types existants, sous l'empire des textes antérieurs à la réforme du 1er juillet 2010, pour les offres de crédit à la consommation pour dire qu'une offre est ou non conforme ;

Que dès lors, sous réserve que les informations légales et réglementaires figurent bien dans le contrat de crédit immobilier proposé à l'emprunteur ou signé par lui, la remise en cause de clauses, dans l'offre préalable de crédit immobilier, permettant au prêteur d'exiger un remboursement anticipé hors l'hypothèse de la défaillance de l'emprunteur ne peut se faire que sur le fondement de l'article L. 132-1 du code de la consommation devenu L. 212-1 du même code en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, de sorte que ces clauses, à les supposer abusives, ne sont pas sanctionnées par la déchéance du droit aux intérêts, mais, étant réputées non écrites, par la privation du prêteur de la possibilité de frapper l'emprunteur de la déchéance du terme ;

Que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de déchéance du droit aux intérêts du prêteur pour ce motif ;

Attendu ensuite que Monsieur [J] fait valoir d'une part que les offres de crédit immobilier acceptées par lui les 14 et 15 juillet 2008 contreviendraient aux dispositions de l'article L. 312-8 du code de la consommation en ce qu'elles ne rappelleraient pas intégralement les dispositions de l'article L. 312-10 qui prévoient que l'envoi de l'offre oblige le prêteur à maintenir les conditions qu'elle indique pendant une durée minimale de trente jours à compter de sa réception par l'emprunteur et que le prêteur, d'autre part, en mentionnant dans ces offres de crédit qu'elles étaient « valable(s) 30 jours à compter du 1er juillet 2008 » quand ce délai de trente jours ne pouvait courir qu'à compter de leur réception le 2 juillet 2008 s'agissant du prêt du 14 juillet 2008 et le 3 juillet 2008 s'agissant de celui du 15 juillet suivant, n'aurait pas satisfait aux dispositions de l'article L. 312-10 précité du code de la consommation qui lui imposaient de maintenir son offre pendant trente jours de sorte que la Banque populaire Lorraine Champagne devrait pareillement être déchue de son droit aux intérêts ;

Mais attendu que contrairement à ce que soutient Monsieur [J], les offres préalables devaient seulement rappeler, et non pas reproduire, les dispositions de l'article L. 312-10 ancien du code de la consommation de sorte qu'en mentionnant, au premier paragraphe des conditions générales de chacune des offres de crédit en cause, « La présente offre est faite pour une durée de 30 jours francs à compter de sa réception par l'Emprunteur », la Banque populaire Lorraine Champagne a satisfait à l'obligation qui s'imposait à elle de rappeler les dispositions issues du premier alinéa de l'article 312-10 ancien du code de la consommation relatives à la validité de l'offre pour une durée de trente jours à compter de sa réception ;

Que le moyen que Monsieur [J] tire de la règle qu'énonce l'article L. 312-8, 6°, ancien du code de la consommation doit en conséquence être rejeté ;

Attendu ensuite que si Monsieur [J] déduit de la mention portée en-tête de chacune des offres « valable 30 jours à compter du 01/07/2008 » que la Banque populaire Lorraine Champagne n'aurait pas maintenu ses offres pendant trente jours à compter de leur réception, outre que la cour observe qu'il n'est pas prétendu que la banque aurait rétracté ses offres avant l'expiration du délai de leur validité et que ces offres ont été acceptées dès le 14 juillet 2008 pour la première et le 15 juillet suivant pour la seconde, soit durant la période de leur validité, l'inobservation de la règle édictée par le premier alinéa de l'article L. 312-10 ancien du code de la consommation qui oblige l'offrant à maintenir son offre durant une durée minimale de trente jours à compter de sa réception par l'emprunteur n'est en tout état de cause pas sanctionnée par la déchéance du prêteur de son droit aux intérêts prévue par l'article L. 312-33 ancien du code de la consommation, cette sanction n'étant encourue qu'en cas d'inobservation des obligations prévues aux articles L. 312-7, L. 312-8, L. 312-14 alinéa 2 et L. 312-26 anciens du code de la consommation ou lorsque l'offre de prêt ne comporte pas de date ou contient une date fausse de nature à faire croire qu'elle a été donnée après expiration du délai de dix jours prescrit à l'alinéa 2 de l'article L. 312-10 de ce même code ;

Que le moyen tiré du défaut de respect du délai de trente jours prévu par le premier alinéa de l'article L. 312-10 ancien du code de la consommation doit donc pareillement être écarté ;

Attendu encore que Monsieur [J] sollicite, s'agissant du crédit immobilier de 320 000 euros du 14 juillet 2008, la déchéance du droit aux intérêts de la banque pour mention, dans l'offre préalable, d'un coût total du crédit erroné pour avoir été calculé, d'une part, sur la somme de 154 613,44 euros correspondant au montant des intérêts mentionné dans l'offre de crédit alors que le montant total des intérêts s'élève, d'après le tableau d'amortissement du contrat, à la somme de 156 958,72 euros, d'autre part, sur la somme de 1 875,40 euros correspondant à l'estimation des frais de garantie et de notaire contenue dans l'offre de crédit, alors que le coût réel de ces frais s'élevait à la somme de 2 099,78 euros et, enfin, sur la somme de 14 400 euros correspondant au coût de l'assurance mentionné dans l'offre de prêt alors que ce coût s'élève, d'après le tableau d'amortissement du prêt, à la somme de 14 496 euros de sorte que le coût total du crédit n'était pas de 492 388,84 euros comme indiqué à tort dans l'offre qu'il a acceptée le 14 juillet 2008 mais de 495 055,04 euros ; qu'il fait valoir subsidiairement que ce « surcoût » a faussé à la baisse le montant du taux effectif global mentionné dans l'offre de crédit acceptée le 14 juillet 2008, lequel est en tout état de cause erroné en ce qu'est exclu de son assiette de calcul le coût de l'assurance décès-invalidité, imposé aux emprunteurs comme une condition d'octroi du prêt, ce que conteste la banque qui prétend de son côté que la souscription de cette assurance étant facultative, son coût n'avait pas à être pris en considération dans le calcul du taux effectif global ;

Mais attendu que si l'examen comparé de l'offre préalable acceptée le 14 juillet 2008 et du tableau d'amortissement produit aux débats par Monsieur [J] fait apparaître une discordance entre le montant total des intérêts et le coût de l'assurance figurant sur l'offre de prêt et ceux indiqués sur le tableau d'amortissement produit aux débats par lui, elle trouve sa justification dans le fait que, comme indiqué dans l'offre de crédit, le tableau d'amortissement annexé à cette offre, dès lors d'une part que les dates effectives des échéances dépendaient de la mise en place du prêt et n'étaient, à la date de son émission, pas connues, et que le prêt en question était d'autre part assorti d'une franchise d'amortissement d'une durée d'un an, a été établi à titre d'information, un tableau définitif complété des dates d'échéances devant être remis à l'emprunteur lors de la réalisation du prêt ;

Que dès lors que les fonds empruntés n'ont été débloqués que le 26 septembre 2008 et que le remboursement du prêt n'a débuté que le 1er décembre 2009, soit au terme du quatorzième mois, et non du treizième mois, comme indiqué dans le tableau d'amortissement provisoire annexé à l'offre de crédit, le montant des échéances de remboursement et, partant, le montant total des intérêts dus, s'en sont trouvés nécessairement modifiés ; que l'écart entre la date de mise à disposition des fonds et la date de première échéance a en outre également nécessairement eu une incidence sur le montant de la première cotisation d'assurance ;

Que ces éléments ne pouvant, par définition, être connus ni même déterminables aux dates d'émission et d'acceptation de l'offre, Monsieur [J] n'est pas fondé à opposer à la Banque populaire Lorraine Champagne les coûts totaux des intérêts et cotisations d'assurance repris dans le tableau d'amortissement définitif qui lui a été remis lors de la réalisation effective du prêt pour prétendre que le coût total du crédit et, partant le taux effectif global, mentionnés dans l'offre, seraient, à ces titres, erronés ;

Attendu en revanche qu'il résulte de la combinaison des articles L. 312-8 4° et

L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable à la cause, que la déchéance du droit aux intérêts est encourue par le prêteur qui omet d'énoncer dans l'offre de prêt immobilier le coût des sûretés réelles ou personnelles exigées, et qui conditionnent la conclusion du prêt, sauf lorsque le montant de ces charges ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la signature du contrat ; que la déchéance du droit aux intérêts est de même encourue dans les termes de l'article L. 312-33 ancien du code de la consommation lorsque le taux effectif global mentionné dans l'offre de prêt est erroné en raison du défaut d'inclusion dans son assiette de calcul du montant des frais notariés et des frais liés aux garanties comme celui du coût d'une assurance dont la souscription est imposée par le prêteur comme condition d'octroi du prêt ;

Attendu à cet égard que si l'offre préalable acceptée le 14 juillet 2008 énonce que le prêt en cause sera garanti par un privilège de prêteur de deniers à hauteur de 289 500 euros en premier rang sur l'immeuble, objet dudit prêt, pour un coût approximatif de

1 699,58 euros, ainsi que par une hypothèque de second rang à hauteur de 30 500 euros sur ce même immeuble pour un coût approximatif de 175,82 euros, Monsieur [J] rapporte la preuve que le coût des deux sûretés réelles ainsi consenties, incluant des taxes diverses et les émoluments du notaire, s'est en réalité élevé à la somme de 2 099,78 euros, ainsi qu'il en résulte du relevé de compte dressé par le notaire le 11 juillet 2016 ;

Que la Banque populaire Lorraine Champagne ne démontre pas, comme elle en a la charge, que le montant exact desdits frais ne pouvait être connu antérieurement à la conclusion définitive du contrat ;

Qu'il suit que la mention, dans l'offre de prêt, de l'évaluation du coût des sûretés réelles exigées comme condition d'octroi du prêt, comme celle du taux effectif global, qui dès lors qu'il n'est pas prouvé que le montant de ces frais ne pouvait être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat, devait être intégré dans son assiette de calcul, doivent être considérées comme erronées ;

Attendu en outre que l'offre préalable de crédit acceptée le 14 juillet 2008 prévoit, dans le paragraphe de ses conditions générales consacré aux conditions affectant le contrat que « la banque subordonne la conclusion du contrat à la réalisation de toutes les conditions assurances et garanties prévues aux conditions particulières » ; que l'alinéa 2 du paragraphe consacré, dans ces mêmes conditions générales, à l'assurance décès, perte totale et irréversible d'autonomie ou incapacité temporaire, précise en outre que « si les conditions d'octroi du prêt figurant au paragraphe « assurances » le prévoient, l'emprunteur sollicitera son adhésion pour un capital égal au présent prêt et pour la durée de celui-ci à l'assurance groupe décès-perte totale et irréversible d'autonomie ou incapacité temporaire contractée par la banque » ;

Que les conditions particulières prévoient précisément, dans leur paragraphe intitulé « assurances », l'adhésion, par chacun des époux [J], à l'assurance de groupe souscrite par la banque pour garantir les risques de décès et perte totale et irréversible d'autonomie à hauteur de 50 % du capital emprunté en couverture du prêt de 320 000 euros sur cent-quatre-vingt mois, moyennant un taux de cotisation de 0,30 % sur le capital initial ;

Que contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, il s'en déduit que l'adhésion des emprunteurs à l'assurance de groupe souscrite par la banque pour garantir les risques de décès et perte totale et irréversible d'autonomie constituait bien une condition d'octroi du prêt de sorte que son coût devait également être intégré dans le calcul du taux effectif global ;

Qu'il n'est pas prétendu par la banque, qui se borne dans ses écritures à soutenir que cette assurance étant facultative, son coût n'avait pas à être intégré dans l'assiette de calcul du taux effectif global, que ces frais auraient néanmoins été pris en considération pour la détermination du taux effectif global de sorte que le taux effectif global mentionné dans l'offre doit être considéré comme erroné à ce second titre ;

Attendu, s'agissant du prêt de 292 500 euros du 15 juillet 2008, que pour prétendre pareillement à la déchéance du prêteur de son droit aux intérêts, Monsieur [J], observant que seule une somme de 284 875 euros ayant été utilisée au titre de ce prêt, fait valoir tout d'abord que la Banque populaire Lorraine Champagne aurait contrevenu aux dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 312-8 ancien du code de la consommation en ne lui soumettant pas une nouvelle offre préalable lui permettant de connaître l'étendue de son engagement et le coût total du crédit qui lui a été finalement consenti ;

Mais attendu que si toute modification des conditions d'obtention d'un prêt dont le taux d'intérêt est fixe, notamment le montant ou le taux du crédit, donne lieu, conformément à l'alinéa 2 de l'article L. 312-8 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à ce contrat, modifiée par la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008, à la remise à l'emprunteur d'une nouvelle offre préalable, cette disposition, s'agissant d'un contrat prévoyant un déblocage de son montant au fur et à mesure des besoins de l'emprunteur sur présentation de justificatifs avec perception, au profit de la banque, d'intérêts calculés sur le seul montant utilisé, au taux indiqué dans les conditions particulières d'une part et les emprunteurs étant informés du coût total du crédit correspondant à une utilisation totale du montant du crédit, et donc de son coût maximum à cet égard d'autre part, n'a pas vocation à s'appliquer en cas de déblocage partiel du montant initialement convenu, lequel n'entraîne, pour l'emprunteur, aucun alourdissement de ses obligations contractuelles ;

Attendu ensuite que Monsieur [J] se prévaut de la mention, dans l'offre préalable acceptée le 15 juillet 2008, d'un coût total du crédit erroné pour avoir été calculé, d'une part, sur la somme de 4 106,30 euros correspondant à l'estimation des frais notariés contenue dans l'offre de crédit, quand le coût réel de ces frais s'élevait à la somme de 4 119,20 euros et, d'autre part, sur la somme de 13 161,60 euros correspondant au coût de l'assurance mentionné dans l'offre de prêt, calculé par rapport au montant initial du prêt de 292 500 euros, alors que ce coût aurait dû s'élever, dès lors que la somme réellement empruntée n'était que de 284 875 euros, à seulement 12 819,38 euros ; que la minoration des frais notariés a en outre faussé le calcul du taux effectif global mentionné dans l'offre, également erroné en ce que la banque a exclu de son assiette de calcul le coût de l'assurance décès-invalidité, imposé aux emprunteurs comme une condition d'octroi du prêt ;

Mais attendu, s'agissant de l'incidence du coût de l'assurance dans la détermination du coût total du crédit, que s'il est indiqué dans l'offre du 15 juillet 2008 que chacun des emprunteurs a adhéré à l'assurance de groupe souscrite par la banque pour garantir les risques de décès et perte totale et irréversible d'autonomie à hauteur de 50 % moyennant un taux de cotisation de 0,30 % sur le capital initial, de sorte que le coût de l'assurance s'élevait, s'agissant d'un prêt d'un montant initial de 292 500 euros, à 13 161,60 euros, montant effectivement repris dans les éléments de calcul du coût du crédit, il était expressément mentionné dans les conditions générales de l'offre relatives à l'exécution du contrat et ses modalités de remboursement, que la prime d'assurance serait calculée sur le montant nominal du prêt, quel que soit le montant des sommes effectivement décaissées ;

Que surtout, il est expressément indiqué dans l'offre que le coût du crédit indiqué « correspond à une utilisation totale et en une seule fois du montant du crédit » ; qu'il est donc seulement et nécessairement indicatif, le prêteur ne pouvant, par définition, connaître, à la date d'émission et d'acceptation de l'offre, le montant qui sera effectivement utilisé par les emprunteurs s'agissant d'un prêt à déblocages successifs ; que partant, Monsieur [J] n'est pas fondé à opposer à la Banque populaire Lorraine Champagne le coût prétendument erroné des cotisations d'assurance pour prétendre que le coût total du crédit et, partant le taux effectif global, mentionnés dans l'offre, seraient, à ces titres, erronés ;

Attendu en revanche que si l'offre préalable acceptée le 15 juillet 2008 évalue le coût des frais hypothécaires à la somme de 4 106,30 euros, Monsieur [J] rapporte la preuve que le coût de cette sûreté, incluant des taxes diverses et les émoluments du notaire, s'est en réalité élevé à la somme de 4 119,20 euros selon le relevé de compte dressé par le notaire le 11 juillet 2016, sans que le Banque populaire Lorraine Champagne ne rapporte la preuve, dont la charge lui incombe, que le montant exact desdits frais ne pouvait être connu antérieurement à la conclusion définitive du contrat

Qu'il suit que la mention, dans l'offre de prêt du 15 juillet 2008, de l'évaluation du coût des sûretés réelles exigées comme condition d'octroi du prêt, comme celle du taux effectif global dont l'assiette de calcul devait inclure, dès lors qu'il n'est pas prouvé que le montant de ces frais ne pouvait être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat, le coût de prise de cette garantie, doivent être considérées comme erronées ;

Attendu en outre que dès lors que, comme celle du 14 juillet 2008, l'offre préalable de crédit du 15 juillet prévoit, dans le paragraphe de ses conditions générales consacré aux conditions affectant le contrat que « la banque subordonne la conclusion du contrat à la réalisation de toutes les conditions assurances et garanties prévues aux conditions particulières », que l'alinéa 2 du paragraphe consacré à l'assurance précise en outre que « si les conditions d'octroi du prêt figurant au paragraphe « assurances » le prévoient, l'emprunteur sollicitera son adhésion pour un capital égal au présent prêt et pour la durée de celui-ci à l'assurance groupe décès-perte totale et irréversible d'autonomie ou incapacité temporaire contractée par la banque », et que les conditions particulières prévoient précisément, dans leur paragraphe intitulé « assurances », l'adhésion, par chacun des époux [J], à l'assurance de groupe souscrite par la banque pour garantir les risques de décès et perte totale et irréversible d'autonomie à hauteur de 50 % du capital emprunté, il s'en déduit, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, que l'adhésion des emprunteurs à l'assurance de groupe souscrite par la banque pour garantir les risques de décès et perte totale et irréversible d'autonomie constituait bien une condition d'octroi du prêt de sorte que son coût devait également être intégré dans le calcul du taux effectif global ;

Qu'il n'est pas prétendu par la banque, qui se borne dans ses écritures à prétendre que cette assurance étant facultative, son coût n'avait pas à être intégré dans l'assiette de calcul du taux effectif global, que tel aurait été néanmoins le cas ;

Qu'il suit que, comme pour le prêt de 320 000 euros du 14 juillet 2008, la sanction de la déchéance du prêteur de son droit aux intérêts contractuels du prêt est encourue dans les termes de l'article L. 312-33 ancien du code de la consommation pour mention, dans l'offre de prêt, d'une évaluation erronée du coût de la sûreté réelle exigée comme condition d'octroi du prêt et stipulation d'un taux effectif global erroné ;

Attendu toutefois que si la mention, dans une offre de crédit immobilier, d'une évaluation erronée du coût des sûretés réelles qui conditionnent l'octroi du prêt et la stipulation d'un taux effectif global erroné peut entraîner la déchéance du droit aux intérêts du prêteur, l'article L. 312-33 ancien du même code laisse à la discrétion du juge tant l'application que la détermination de l'étendue de cette sanction civile ;

Qu'en l'espèce, Monsieur [J] n'établit pas que l'inexactitude affectant l'évaluation du coût des sûretés réelles consenties et le taux effectif global mentionné dans chacune des offres de prêt lui aurait causé un préjudice en le trompant sur le coût réel de ces opérations de crédit et en l'empêchant, par suite de cette erreur, de faire face à ses engagements d'emprunteur ; qu'il en est d'autant plus ainsi que les frais de prise de garantie, évalués forfaitairement à une somme de 1 875,40 euros pour le premier prêt et de 4 106,30 euros pour le second, incluse par l'organisme prêteur dans les éléments de calcul du taux effectif global, sont, comme procédant d'une simple estimation, distants du coût véritable de l'inscription des sûretés de seulement 224,38 euros pour le premier prêt et de 12,90 euros pour le second, frais que les époux [J] auraient en outre en tout état de cause également dû supporter s'ils avaient contracté avec un autre établissement bancaire ;

Que le coût de l'adhésion à l'assurance de groupe souscrite par la banque, d'un montant de 14 400 euros pour le premier prêt et de 13 161 euros pour le second, figurait en outre clairement parmi les postes retenus par la banque pour établir le coût total indiqué dans l'acte de chacun des crédits ;

Que Monsieur [J], qui a bénéficié d'un financement immobilier à un taux relativement avantageux, n'établit pas avoir dû renoncer à des propositions plus intéressantes ;

Que la cour observe enfin que les emprunteurs, qui ont intégralement remboursé les prêts en question au mois d'octobre 2013, les ont exécutés sans jamais élever la moindre contestation jusqu'à la délivrance de l'acte introductif de la première instance le 11 juillet 2013, soit près de cinq ans après l'acceptation de l'offre de crédit ;

Qu'il n'y a donc pas lieu, en dépit des irrégularités commises, de prononcer contre la Banque populaire Lorraine Champagne la déchéance de son droit aux intérêts que réclame Monsieur [J] ;

Attendu en revanche que dès lors qu'il résulte de la combinaison des articles 1907 du code civil et L. 313-2 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, applicable aux contrats en cause, que la mention dans l'écrit constatant un prêt d'argent du taux effectif global est une condition de la validité de la stipulation d'intérêts et que l'inexactitude de cette mention équivaut à une absence de mention, Monsieur [J] est bien fondé à se prévaloir, subsidiairement à la déchéance de la banque de son droit aux intérêts, en sanction des erreurs affectant le taux effectif global mentionné dans chacun des prêts en cause, de la nullité des stipulations d'intérêts conventionnels de chacun de ces actes, laquelle appelle la substitution du taux légal au taux conventionnel à compter de la date de souscription de chacun d'eux et selon le taux légal en vigueur à leurs dates respectives, dans sa variabilité année par année, les discussions de la banque sur l'existence ou non d'un préjudice en résultant pour les emprunteurs et sur une perte de chance éventuelle étant parfaitement inopérantes à cet égard ;

Que les prêts en cause ayant fait l'objet, le 11 octobre 2013, d'un remboursement anticipé des sommes restant dues s'élevant, selon un décompte arrêté à la date du 30 septembre 2013, à la somme de 276 801,81 euros incluant une indemnité de résiliation de 6 982,95 euros correspondant, conformément au contrat, à six mois d'intérêts sur le montant du capital remboursé par anticipation au taux moyen du prêt, pour le prêt de

320 000 euros du 14 juillet 2008 et à la somme de 240 568,15 euros, incluant une indemnité de résiliation de 6 068,78 euros correspondant également à six mois d'intérêts sur le montant du capital remboursé par anticipation au taux moyen du prêt, pour celui de 292 500 euros du 15 juillet 2008, il convient en conséquence d'infirmer le jugement déféré et d'ordonner la restitution par la banque, pour la période comprise entre la date de conclusion de chacun des prêts, le 14 juillet 2008 pour le premier et le 15 juillet suivant pour le second, et la date de leur remboursement anticipé le 11 octobre 2013, des sommes indûment perçues au titre des intérêts conventionnels non stipulés régulièrement à l'acte de prêt, excédant le taux légal en vigueur, année par année depuis la date de souscription de chacun des prêts en cause, ainsi qu'au titre de la part des indemnités de résiliation excédant six mois d'intérêts sur le montant du capital restant alors réellement dû au taux légal en vigueur à cette date, les parties étant en conséquence renvoyées à établir leurs comptes sur ces principes selon les modalités précisées au dispositif du présent arrêt ;

Attendu enfin qu'eu égard aux circonstances de la cause, il n'apparaît inéquitable de laisser à Monsieur [J] la charge des frais exposés par lui tant en première instance qu'en cause d'appel et non compris dans les dépens, la banque, partie succombante, étant également déboutée de sa demande formée à ce même titre ;

PAR CES MOTIFS 

Infirme le jugement entrepris ;

Prononce la nullité des stipulations d'intérêts des prêts consentis par la Banque populaire Lorraine Champagne à Monsieur [H] [J] les 14 et 15 juillet 2008 ;

Dit que le taux de l'intérêt légal est substitué au taux conventionnel annulé à compter de leurs dates de souscription respectives ;

Dit qu'il est celui fixé par la loi en vigueur au moment où il est acquis et qu'il doit en conséquence, subir les modifications successives que la loi lui apporte ;

En conséquence,

Condamne la société Banque populaire Lorraine Champagne à restituer à Monsieur [H] [J] :

- la différence entre les intérêts conventionnels perçus et ceux calculés au taux légal applicable ;

- la différence entre le montant des indemnités de résiliation perçu et celui correspondant à six mois d'intérêts calculés au taux légal en vigueur à la date du remboursement anticipé sur le montant du capital restant alors réellement dû ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne la société Banque populaire Lorraine Champagne aux dépens de première instance et d'appel ;

Dit que ces derniers seront recouvrés par la S.C.P. Lestoille & Chambaert, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile

La greffière,Le président,

M. BurgeatM. Battais


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 1
Numéro d'arrêt : 16/01224
Date de la décision : 22/06/2017

Références :

Cour d'appel de Douai 81, arrêt n°16/01224 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-06-22;16.01224 ?
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