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18/05/2017 | FRANCE | N°16/02235

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 18 mai 2017, 16/02235


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 18/05/2017





***





N° de MINUTE :

N° RG : 16/02235



Jugement (N° 14/9229)

rendu le 24 février 2016 par le tribunal de grande instance de Lille







APPELANT



M. Eric [K]

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 2]



représenté par Me Benjamin Millot, avocat au barreau de Lille





INT

IMÉE



EURL [L]

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 3]

[Adresse 4]



représentée par Me Eric Laforce, membre de la SELARL Eric Laforce, avocat au barreau de Douai

ayant pour conseil Me Claude...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 18/05/2017

***

N° de MINUTE :

N° RG : 16/02235

Jugement (N° 14/9229)

rendu le 24 février 2016 par le tribunal de grande instance de Lille

APPELANT

M. Eric [K]

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 2]

représenté par Me Benjamin Millot, avocat au barreau de Lille

INTIMÉE

EURL [L]

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 3]

[Adresse 4]

représentée par Me Eric Laforce, membre de la SELARL Eric Laforce, avocat au barreau de Douai

ayant pour conseil Me Claude Mortelecque, avocat au barreau de Lille

DÉBATS à l'audience publique du 20 mars 2017 tenue par Caroline Pachter-Wald magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine Popek

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Etienne Bech, président de chambre

Christian Paul-Loubière, président de chambre

Caroline Pachter-Wald, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 18 mai 2017 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Etienne Bech, président et Claudine Popek, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 17 février 2017

***

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant devis en date du 14 juin 2010 pour un montant de 8 693,20 euros TTC, M. et Mme [K] ont commandé à l'EURL [L] la fourniture et la pose de carrelage sur 50 m², la dépose de la cloison entre cuisine et séjour, avec reprise des plâtres, la dépose de la cheminée avec reprise des plâtres, la reprise de l'électricité pour l'implantation d'une nouvelle cuisine sur réseaux existants, ainsi que la dépose du radiateur existant et la pose d'un radiateur dans la cuisine.

Les travaux ont été réalisés en septembre 2011 à partir de carrelages choisi par les maitres de l'ouvrage. L'intégralité du coût des travaux, soit une somme totale de 12 632,57 euros TTC (dont 6 146 euros concernant la pose du carrelage), a été réglé, à la suite d'une facture émise par l'EURL [L] le 27 septembre 2011.

Se plaignant de désordres apparus sur le carrelage, les époux [K] ont obtenu en référé, le 12 mars 2013, la désignation d'un expert judiciaire.

L'expert a déposé son rapport le 31 juillet 2014.

Par acte d'huissier de justice en date du 13 octobre 2014, M. [K] a, au visa de l'article 1792 du Code civil, assigné en responsabilité I'EURL [L] afin d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 11 205 euros TTC au titre des travaux de remise en état ainsi que la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice de jouissance subi.

Dans un jugement rendu le 24 février 2016, le tribunal de grande instance de Lille a débouté M. [K] de l'ensemble de ses demandes.

Par déclaration au greffe en date du 9 avril 2016, M. [K] a interjeté appel de cette décision.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 février 2017, l'affaire étant plaidée le 20 mars suivant puis mise en délibéré.

PRÉTENTIONS

Vu les conclusions en date du 1er juillet 2016 par lesquelles M. [K] demande à la cour :

d'infirmer le jugement entrepris,

de déclarer l'EURL [L] intégralement responsable des désordres affectant son immeuble,

de dire que les malfaçons constatées, en portant atteinte à la solidité de l'ouvrage, relèvent de la responsabilité décennale des constructeurs et condamner l'EURL [L] à lui payer la somme de 11 205 euros au titre des travaux de remise en état estimés par l'expert judiciaire, après revalorisation selon la variation de la valeur de l'indice BT09 connu,

de condamner l'EURL [L] à lui payer la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts au titre de l'indemnisation du trouble de jouissance subi,

de condamner l'EURL [L] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens en ce compris les frais d'expertise.

Vu les conclusions en date du 15 novembre 2016, dans lesquelles l'EURL [L] sollicite :

- la confirmation du jugement entrepris,

- la condamnation de M. [K] à lui verser 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles, outre sa condamnation aux dépens.

SUR CE,

Attendu qu'au soutien de ses demandes, M. [K] invoque à titre principal les articles 1792 et 1792-2 du Code civil, qui concernent la garantie décennale des constructeurs, et à titre subsidiaire l'article 1792-3 relatif à la garantie biennale de bon fonctionnement ;

Qu'il soutient en particulier que la responsabilité de l'EURL [L] est engagée sur tous ces fondements légaux puisque la garantie décennale s'applique sur le carrelage si les désordres ont le critère de gravité requis, ce qui est le cas en l'espèce puisque l'expert conclut que les désordres n'apparaissent pas purement esthétiques mais bien de nature à rendre l'ouvrage concerné impropre à sa destination en faisant notamment porter un risque d'atteinte à sa solidité et à la sécurité des personnes ; qu'il précise avoir sollicité une expertise judiciaire dans les deux ans de la réception tacite de l'ouvrage, qu'il date de la facture du 27 septembre 2011, et affirme ainsi que son action sur le fondement de la garantie biennale de bon fonctionnement est recevable ;

Attendu que pour sa part, l'EURL [L] estime que sa responsabilité ne peut être retenue car, au vu des désordres constatés par l'expert, M. [K] ne rapporte pas la preuve de la réunion des conditions d'application des articles 1792 et 1792-2 du code civil ; qu'il souligne qu'il résulte de l'expertise que les désordres n'étaient que d'ordre purement esthétique ; qu'il précise que les dallages et carrelages ne bénéficient pas de la garantie de bon fonctionnement ; qu'il affirme en outre que les travaux ont été réalisés conformément aux demandes des clients ;

Attendu que l'article 1792 du Code civil dispose que «tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère» ;

Attendu que les premiers juges ont rejeté la demande sur ce fondement, estimant d'une part que les désordres doivent être qualifiés de purement esthétiques, et ne portent pas atteinte à la solidité de l'ouvrage, et d'autre part que le carrelage en l'espèce ne peut en aucun cas constituer un ouvrage, mais s'analyse comme un élément d'équipement dissociable, dès lors qu'il a été posé sur une chape ;

Or, attendu que la partie appelante maintient néanmoins, à titre principal, le fondement choisi en première instance ; que M. [K] fonde son action sur l'article 1792 du code civil, en soulignant les malfaçons affectant le carrelage, et à ce titre, en développant une argumentation portant sur le défaut de calepinage, le désaffleurement et leurs conséquences ;

Attendu qu'il convient de relever que les parties, qui ne produisent pas de procès-verbal de réception, n'évoquent pas la réception des travaux, et qui ne précisent à ce titre aucune date pouvant être retenue dans le cadre d'une réception tacite ou judiciaire, ne demandent pas à la cour de se prononcer sur la réception des travaux ;

Attendu que l'expert judiciaire indique dans son rapport que «(') Des désaffleurements de 2 mm ont été constatés régulièrement sur les rives des carreaux dans tous les locaux et impliquent donc une mise en 'uvre non conforme pour l'ensemble du rez de chaussée concerné par les travaux. (') Nous constatons : respect du calepinage en cuisine, séjour et couloir. Non respect du calepinage en WC et bureau (...)» ; qu'il précise que la tolérance pour le désaffleurement est de 0,8 mm ;

Qu'il qualifie le défaut de calepinage relevé de purement esthétique, et mentionne que le désaffleurement présente un défaut esthétique, mais engendre également un risque de chute pour les personnes ;

Qu'il précise cependant que la pose du carrelage a été réalisée par collage sur le carrelage existant sur l'ensemble de la surface concernée, à l'exception de la cuisine, dans laquelle il a été collé sur une chape de ciment non solidarisée à la dalle existante ; que, sans préciser la superficie de la chape ainsi réalisée dans la cuisine (qui est donc au maximum celle de la cuisine), il retient que le désaffleurement relevé provient d'une mauvaise réalisation de celle-ci avant la pose du carrelage ; que l'expert, qui ne conclut pas à un élément non dissociable de la dalle existante, indique que cette chape a été réalisée en supplément des travaux initialement prévus dans le devis du 14 juin 2010, en raison d'une dénivellation importante apparue lors de l'abattage de la cloison entre le séjour et la cuisine ; qu'il est à noter que cette chape, d'une superficie peu importante et non solidaire de la dalle existante, et qui n'était donc pas prévue dans le devis sur lequel se base M. [K] pour solliciter la condamnation de l'entrepreneur, ne fait l'objet d'aucune observation par les parties ;

Et attendu que l'expert ne conclut pas à un désordre subi par les existants du fait de ces travaux de rénovation ;

Attendu qu'il s'ensuit que les travaux litigieux de pose du carrelage sur un ouvrage existant, ne constituent pas en eux-mêmes un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil, mais portent sur un élément d'équipement ;

Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que les désordres invoqués par M. [K] ne relèvent pas de la garantie légale de l'article 1792 du Code civil ;

Attendu que la partie appelante souligne que la garantie décennale s'étend cependant, en vertu des dispositions de l'article 1792-2 du Code civil, aux «dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un ouvrage mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert» ;

Mais attendu que c'est en vain que la partie appelante invoque cet article, qui précise en son alinéa 2 qu'«un élément d'équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l'un des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage », ce qui n'est pas le cas en l'espèce pour le carrelage, dont le remplacement n'est pas de nature à entraîner la détérioration de l'ouvrage sur lequel il repose ;

Attendu qu'il s'ensuit que M. [K] ne peut valablement fonder ses demandes sur la garantie décennale des constructeurs ;

Attendu que, s'agissant de la garantie de bon fonctionnement qu'il invoque à titre subsidiaire, l'article 1792-3 du code civil dispose que les autres éléments d'équipement de l'ouvrage font l'objet d'une garantie de bon fonctionnement d'une durée minimale de deux ans à compter de sa réception ;

Que les désordres qui affectent un carrelage concernent un élément dissociable de l'immeuble non destiné à fonctionner ; qu'ils ne relèvent pas de la garantie de bon fonctionnement ;

Que M. [K] ne peut donc plus valablement invoquer la garantie de bon fonctionnement au soutien de ses demandes ;

Attendu que par conséquent, il y a lieu de confirmer la décision entreprise ;

Attendu que le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Que M. [K], partie perdante, doit être condamné aux dépens d'appel ;

Que l'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, et de rejeter en conséquence les demandes formées de ce chef.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement entrepris ;

Et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Rejette la demande présentée en cause d'appel par M. [K] et l'EURL [L] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [K] aux dépens d'appel.

Le greffier,Le président,

Claudine Popek.Etienne Bech.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 16/02235
Date de la décision : 18/05/2017

Références :

Cour d'appel de Douai 1B, arrêt n°16/02235 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-18;16.02235 ?
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