République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 2
ARRÊT DU 12/05/2016
***
- SUR RENVOI DE CASSATION -
N° MINUTE :
N° RG : 14/04531
Jugement (N° 08/00434)
rendu le 14 Février 2011 par le Tribunal d'Instance de BEAUVAIS
Arrêt (N° 11/01380) rendu le 27 Novembre 2012 par la Cour d'Appel d'AMIENS
Arrêt (N° 212) rendu le 19 Février 2014 par la Cour de Cassation
REF : MC/VC
DEMANDEURS A LA DÉCLARATION DE SAISINE
Monsieur [U] [R]
né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 1]
et
Madame [N] [J]
née le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 2]
Demeurant ensemble
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentés et assistés par Me Roger CONGOS, membre de la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avocat au barreau de DOUAI
DÉFENDEURS A LA DÉCLARATION DE SAISINE
Monsieur [G] [L]
né le [Date naissance 3] 1977 à [Localité 2]
et
Madame [L] [Q] épouse [L]
née le [Date naissance 4] 1974 à [Localité 3]
Demeurant ensemble
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentés par Me Bernard FRANCHI, membre de la SCP FRANÇOIS DELEFORGE-BERNARD FRANCHI, avocat au barreau de DOUAI
Assistés de Me Véronique BOMSEL DI MEGLIO, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Jean-Loup CARRIERE, Président de chambre
Christian PAUL-LOUBIERE, Président
Myriam CHAPEAUX, Conseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine POPEK
DÉBATS à l'audience publique du 14 Mars 2016
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2016 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Monsieur Jean-Loup CARRIERE, Président, et Claudine POPEK, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 4 décembre 2015
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FAITS & PROCÉDURE
M. [U] [R] et Mme [N] [J], ont par acte notarié passé devant Maître [N] notaire à [Localité 4], le 21 décembre 1996, acquis un immeuble d'habitation sis lieu-dit [Localité 5] à [Localité 6], correspondant à une parcelle cadastrée section [Cadastre 1] pour 650 m².
M. [G] [L] et Mme [L] [Q], son épouse, sont également propriétaires à [Localité 6] depuis le 23 août 2004 d'une maison à usage d'habitation située [Adresse 2], mitoyenne de celle de M. [R] et Mme [J] et figurant au cadastre section [Cadastre 2] lieu-dit [Adresse 2] pour une surface de 321 m² et section [Cadastre 3] lieu-dit [Localité 5] pour une surface de 47 m².
Cette dernière parcelle est issue de la division en deux parcelles de la parcelle plus grande cadastrée section [Cadastre 4] appartenant à M. [R] et à Mme [J] et dont le surplus forme la parcelle cadastré section [Cadastre 5] restant appartenir à ces derniers. Cette division résulte d'un document d'arpentage dressé par M. [E] [S], géomètre-expert à [Localité 1], le 14 février 1997, vérifié et numéroté au service du cadastre de [Localité 1] le 19 février 1997.
La parcelle [Cadastre 3] avait été acquise par M. [X] le 15 septembre 1997 de M. [R] et Mme [J].
Un mur en limite séparative a été construit par M. [R] et M. [X].
Le portail de M. et Mme [L] est fixé sur un pilier se situant au bout de ce mur.
M. [R] et à Mme [J] ont informé par une lettre en date du 3 septembre 2008 les époux [L] de leur intention de faire des travaux sur le pilier situé au bout de leur jardin et ont demandé à ces derniers de déposer leur portail.
M. et Mme [L], au motif que tant le mur que le pilier leur appartenaient, ont refusé.
Par acte du 8 octobre 2008, M. et Mme [L] ont fait assigner M. [R] et Mme [J] en vue du bornage de leurs propriétés.
Par jugement du 19 février 2009, le tribunal d'instance de Clermont de l'Oise a ordonné le bornage judiciaire des propriétés respectives des parties, situées sur la commune de [Localité 6], et à cette fin, a ordonné une expertise préalable et commis M. [M] [O].
L'expert a déposé son rapport le 29 janvier 2010. Il concluait que la borne censée matérialiser la limite de propriété a été déplacée de 31 cm ; que la limite de propriété, déjà définie lors de la division de la propriété [R]-[J] et ne pouvant être définie une seconde fois, correspond à la droite formée par des points J à F sur le plan de division ; que la clôture séparative en plaques ciment a été édifiée sur la limite de propriété et doit être considérée comme mitoyenne ; que le pilier, réalisé par M. [R], empiète de 19 cm sur la propriété de M. et Mme [L], ce qui n'est pas autorisé. Il proposait deux solutions : la cession de la partie du pilier empiétant sur le terrain de M. et Mme [L] ou la dépose du pilier, ce qui dans la pratique nécessitait le déplacement du portail de M. et Mme [L] dont l'origine est un non respect des limites de propriété par M. [R] et Mme [J].
Suite au dépôt du rapport d'expertise judiciaire, M. et Mme [L] ont déposé leurs conclusions devant le tribunal d'instance de Beauvais.
Par jugement (RG 11-08-000434) du 14 février 2011, le tribunal d'instance de Beauvais a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par M. [R] et Mme [J], homologué le rapport d'expertise de M. [M] [O], dit que M. et Mme [L], ont un droit absolu à racheter pour moitié les frais de construction du pilier élevé en 1997 par M. [R], dit qu'ils devront verser la somme de 76,49 € pour prix de ce rachat, condamné M. [R] et Mme [J] à payer à M. et Mme [L], une somme totale de 1.249,79 € au titre des frais d'expertise et une somme de 800 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, condamné les mêmes aux dépens avec distraction au profit de Maître Véronique Bomsel di Meglio.
M. [R] a relevé appel total de la décision par déclaration du 31 mars 2011.
Mme [J], intimée, s'est jointe à l'appelant aux termes de leurs conclusions communes.
Ils demandaient à la cour d'infirmer le jugement du tribunal d'instance et statuant à nouveau, in limíne litis, avant toute défense au fond, de constater que l'action introduite par M. et Mme [L] s'analyse en une action portant sur l'appréciation de droit réel immobilier des deux parties et en conséquence, constater que le tribunal d'instance aurait dû se déclarer incompétent au profit du tribunal de grande instance de Beauvais, de débouter M. et Mme [L], de leurs demandes ; subsidiairement, de constater l'existence d'un mur mitoyen implanté depuis 1997 sur une ligne divisoire séparant le fonds des époux [L] du leur, de les autoriser à déposer le pilier litigieux afin de respecter les limites de propriété, d'ordonner aux époux [L] le déplacement de leur portail sous astreinte de 500 € par jour de retard à. compter du 8ème jour suivant la signification de l'arrêt à. intervenir, de condamner M. et Mme [L] à leur verser la somme de 3.000 € à titre de dommages intérêts pour préjudice moral, de dire et juger abusive la procédure diligentée par M. et Mme [L] et de les condamner à leur verser la somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ; à titre infiniment subsidiaire, de les condamner à leur payer la somme de 3.374 € pour prix du rachat de la mitoyenneté du pilier ; en tout état de cause, de condamner M. et Mme [L] a leur payer la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP Millon Plateau en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, en ceux compris les frais d'expertise.
M. et Mme [L] demandaient à la cour de confirmer entièrement le jugement rendu par le tribunal d'instance de Beauvais le 12 février 2011, de débouter de l'ensemble de leurs demandes M. [R] et Mme [J], au visa de l'article 661 du code civil, de confirmer qu'ils ont un droit absolu à racheter à hauteur de 50 % les frais de construction du pilier effectuée en 1997 par M. [R] pour une somme de 76,49 € qu'ils tiennent à la disposition des défendeurs, de confirmer qu'en cas de refus des consorts [R] [J] de vendre la mitoyenneté du pilier le présent jugement vaudra vente ; subsidiairement, de condamner M. [R] et Mme [J]. au visa de l'article 1382 du code civil, à supporter les frais de déplacement du portail engendré du fait de la démolition du pilier et de la reconstruction du pilier, à hauteur de 6.923,75 € TTC ; en tout état de cause, de condamner M. [R] et Mme [J] à supporter la moitié des frais d'expertise, avancés par les eux-mêmes et, en conséquence, les condamner à leur rembourser la somme de 1.294,79 €, de condamner M. [R] et Mme [J] à leur payer au titre de la procédure d'appel la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SELARL Le Roy en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Par arrêt (RG 11/01380) du 27 novembre 2012, la cour d'appel d'Amiens, 1ère chambre, 2ème section, a confirmé le jugement du tribunal d'instance en toutes ses dispositions, y ajoutant, a débouté M. [R] et Mme [J] de leurs demandes de dommages et intérêts pour préjudice moral et pour procédure abusive, a condamné M. [R] et Mme [J] aux dépens d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile ainsi qu'à payer à M. et Mme [L] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [R] et Mme [J] ont formé un pourvoi en cassation contre la décision rendue, à laquelle ils reprochaient d'avoir rejeté l'exception d'incompétence qu'ils avaient soulevée, d'avoir dit que M. et Mme [L] avaient un droit absolu à racheter pour moitié les frais de construction du pilier élevé en 1997 par M. [R] et que M. et Mme [L] devraient verser une somme de 76,49 € pour prix de ce rachat, et enfin, d'avoir confirmé le jugement du tribunal d'instance de Beauvais ayant dit que M. [R] et Mme [J] devraient payer à M. et Mme [L] la somme totale de 1.249,79 € au titre des frais d'expertise.
Par arrêt (pourvoi n° D 13-12.107) rendu le 19 février 2014, la Cour de cassation, 3ème chambre civile, jugeant au visa des articles 545 et 661 du code civil qu'un empiétement, quel qu'en soit l'auteur, fait obstacle à l'acquisition de la mitoyenneté, a cassé et annulé pour violation des textes susvisés, sauf en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence, l'arrêt rendu le 27 novembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; a remis, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d'appel de Douai ; a laissé à chaque partie la charge des dépens par elle exposés ; a rejeté les demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; a dit que sur les diligences du procureur général prés la Cour de cassation, l'arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé.
Par déclaration du 16 juillet 2014, M. [R] et Mme [J] ont saisi la cour d'appel de Douai sur renvoi après cassation de la décision du tribunal d'instance de Beauvais en date du 14 février 2011.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 décembre 2015.
MOYENS & PRÉTENTIONS
Par conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 2 octobre 2015, M. [R] et Mme [J] demandent à la cour, au visa des articles 545, 646, 661 du code civil, d'infirmer le jugement rendu par le tribunal d'instance de Beauvais le 14 février 2011 en ce qu'il a notamment dit que M. et Mme [L] ont un droit absolu à racheter pour moitié les frais de construction du pilier élevé en 1997 par [U] [R], dit qu'ils devront verser la somme de 76,49 € pour prix de ce rachat et condamné M. [R] et Mme [J] à payer à M. et Mme [L] une somme totale de 1.249,79 € au titre des frais d'expertise ainsi qu'à des frais irrépétibles et aux dépens ; de constater l'existence d'un mur mitoyen implanté depuis 1997 sur une ligne divisoire séparant leur fonds de celui des époux [L] ; de les autoriser à déposer le pilier litigieux afin de respecter les limites de propriété et ordonner aux époux [L] le déplacement de leur portail sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de l'arrêt à intervenir ; de débouter les époux [L] de toutes autres demandes fins et conclusions contraires ; de les condamner à leur verser une somme de 3.000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral au visa de l'article 1382 du code civil ; de les condamner à leur verser une somme de 2.000 € à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile, les condamner aux dépens de cassation, de première instance et d'appel ainsi qu' à leur verser une somme de 15.000 € pour frais irrépétibles au visa de l'article la 700 du code de procédure civile.
Au soutien de leurs prétentions, ils font valoir que rien ne permet de retenir que la borne a été déplacé par M. [R] et qu'au contraire, le pilier et le mur ont été réalisés d'un commun accord avec M. et Mme [X], auteurs de M. et Mme [L] ; qu'en application de l'article 545 du code civil, il y a lieu d'ordonner la dépose du pilier et du portail afin que les limites séparatives de la propriété soient respectées, et, aucune faute ne pouvant être retenue à leur encontre sur le fondement de l'article 1382 du code civil compte tenu de l'accord intervenu entre les voisins de l'époque de la construction, les frais de déplacement du portail devront être mis à la charge de M. et Mme [L]. Ils soutiennent qu'il n'y a pas lieu de mettre à leur charge la moitié des frais d'expertise, celle-ci étant une demande exclusive de M. et Mme [L] alors même qu'un précédent bornage existait et que le contenu de l'acte de vente, auquel un plan d'arpentage réalisé par un géomètre-expert avait été annexé, était non équivoque. Ils demandent à ce que leur préjudice moral résultant de l'attitude de M. et Mme [L] et des diverses procédures soit indemnisé à hauteur de 3.000 €. Ils maintiennent également leur demande au titre de la procédure abusive, estimant injustifiée la procédure diligentée initialement aux fins de bornage judiciaire.
Par conclusions récapitulatives déposées et notifiées par voie électronique le 1er décembre 2015, M. et Mme [L] demandent à la cour, au visa des 545, 661 et 1382 du Code civil, de débouter de l'ensemble de leurs demandes M. [R] et Mme [J] ; à titre principal, de constater l'empiétement sur la propriété de M. et Mme [L], d'ordonner la destruction du pilier source de l'empiétement, de condamner M. [R] et Mme [J] au paiement de la somme de 6.923,75 euros à M. et Mme [L], au titre des frais de déplacement du portail résultant de la dépose du pilier litigieux ; à titre subsidiaire, de confirmer que M. et Mme [L] ont un droit absolu à racheter à hauteur de 50 % les frais de construction du pilier effectuée en 1997 par M. [R] pour une somme de 76,49 euros qu'ils tiennent à la disposition des défendeurs, de confirmer qu'en cas de refus des consorts [R] [J] de vendre la mitoyenneté du pilier le présent jugement vaudra vente ; en tout état de cause, de confirmer que M. [R] et Mme [J] doivent supporter la moitié des frais d'expertise, avancés par les époux [L], à hauteur de 1.294,79 euros, de les condamner à leur payer au titre de la procédure d'appel la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu' aux entiers dépens.
Ils soutiennent que lors des travaux de construction du mur par M. [X] et M. [R] et Mme [J] en 1997, ce dernier a déplacé la borne de 31 cm et a construit un pilier en bout de mur dont il revendique la propriété et que dès lors, il était légitime qu'un nouveau contrôle soit fait par un géomètre-expert. Ils ne contestent pas la dépose du pilier mais indique que l'accord verbal de leur auteur pour l'empiétement de propriété ne leur est pas opposable n'ayant pas été publié ni mentionné dans l'acte de vente et qu'en conséquence, M. [R] et Mme [J] doivent être condamnés sur le fondement de l'article1382 du code civil à supporter les frais de déplacement dudit portail. Ils rappellent que sous réserve de l'accord de la mairie, ils sont d'accord pour prendre une entreprise moins disante le cas échéant. A titre subsidiaire, ils demandent l'acquisition forcée de la mitoyenneté pour un montant de 76,49 €. Ils font valoir que l'expertise avait un intérêt pour les deux parties puisqu'elle a démontré que le pilier avait été construit en partie sur la propriété de M. et Mme [L] et que la borne avait été déplacée de 31 cm. Ils estiment les demandes de dommages et intérêts de M. [R] et Mme [J] tant pour préjudice moral que pour procédure abusive infondées compte tenu des agissements de ceux-ci..
SUR CE,
Il n'y a pas lieu de reprendre ni d'écarter dans le dispositif du présent arrêt les demandes tendant à « constater que... », telles que figurant dans le dispositif des conclusions des parties, lorsqu'elles portent sur des moyens ou éléments de fait relevant des motifs et ne constituent pas des chefs de décision devant figurer dans la partie exécutoire de l'arrêt.
Sur la dépose du pilier
L'article 545 du code civil énonce que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité
En conséquence, il y a lieu d'ordonner la destruction du pilier construit par M. [R] et lui appartenant, empiétant sur la propriété de M. et Mme [L], solution qui, suite à l'arrêt en date du 19 février 2014, recueille l'accord des parties.
Le jugement sera infirmé.
Sur le déplacement du portail et la demande de dommages et intérêts
Sur le déplacement du portail sous astreinte
Selon les conclusions de l'expert judiciaire, la dépose du pilier va nécessairement entraîner le déplacement du portail appartenant à M. et Mme [L].
Il y a lieu d'ordonner à M. et Mme [L] de déposer leur portail afin de permettre la destruction du pilier litigieux, sous astreinte de 50 € par jour de retard passé un délai de 90 jours à compter de la signification de la présente décision, et ce pendant trois mois.
Sur la demande de dommages et intérêts
L'article 1382 du code civil prévoit que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.
L'empiétement résultant de la construction du pilier par M. [R] sur la propriété de M. et Mme [L] est suffisant à caractériser leur faute, sans qu'un accord avec l'auteur de ces derniers, non repris dans l'acte de vente, ne puisse l'en exonérer.
Il y a également lieu de noter que l'acte authentique de vente en date du 23 août 2004 par lequel M. et Mme [L] ont acquis leur propriété mentionne le fait que le mur en béton séparant l'immeuble de la propriété de M. [R] et Mme [J] est mitoyen. Il n'y a pas de mention spécifique concernant le pilier et celui-ci se trouvant dans le prolongement du mur, il pouvait de bonne foi être considéré qu'il suivait le même régime.
La nécessaire dépose du portail est la conséquence de cette faute.
Dès lors, il y a lieu de faire droit à la demande d'indemnisation de M. et Mme [L].
Ceux-ci produisent un devis n° D1003/1532 de la société Visiofen en date du 28 mars 2010 correspondant à la dépose du portail existant, la démolition des poteaux de soutien, la refabrication des poteaux avec un déport de 18 cm par rapport à l'existant et la refixation du portail pour un montant total de 6.923,75 € TTC.
Ce devis correspondant aux travaux nécessaires, M. [R] et Mme [J] seront condamnés à payer à M. et Mme [L] la somme de 6.923,75 € en indemnisation du préjudice subi du fait de leur faute.
Sur les frais d'expertise
La mission d'expertise confiée par le tribunal d'instance de Clermont de l'Oise par jugement du 19 février 2009 consistait notamment, outre les opérations de bornage, à rechercher tous indices permettant d'établir les caractères et la durée des possessions éventuellement invoquées, de déterminer si le mur séparatif était construit sur le terrain de M. et Mme [L], de déterminer si le pilier édifié en bout de mur sur lequel est fixé le portail de M. et Mme [L] se situe sur une partie privative ou une partie mitoyenne.
Il doit être rappelé que l'une des bornes qui matérialisait la séparation des deux propriétés a été déplacée.
Dès lors, l'expertise apparaissait nécessaire à la solution du litige et ses coûts devront être supportés par moitié par chaque partie.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur les dommages et intérêts pour préjudice moral et procédure abusive formulées par M. [R] et Mme [J]
M. [R] et Mme [J] demandent que M. et Mme [L] soient condamnés à leur verser une somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral qu'ils ont subi du fait de l'attitude de M. et Mme [L] et de leurs diverses procédures.
Cependant, ils ne démontrent pas la faute de M. et Mme [L] ni n'apporte la preuve d'un préjudice en lien avec celle-ci.
Dès lors, leur demande sera rejetée.
Concernant le préjudice résultant des diverses procédures, par application des dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile, l'exercice d'une action en justice ne dégénère en abus que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi, ou s'il s'agit d'une erreur grave équipollente au dol. L'appréciation inexacte qu'une partie se fait de ses droits n'est pas constitutive en soi d'une faute.
M. [R] et Mme [J] ne rapportent pas la preuve de ce que l'action de M. et Mme [L] aurait dégénéré en abus. Leur demande doit être rejetée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
La Cour de cassation, dans sa décision du 19 février 2014 a laissé à chaque partie la charge de ses dépens et a rejeté les demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande formulée au titre des dépens de la procédure devant la Cour de cassation par M. [R] et Mme [J] est en conséquence sans objet.
Le sens du présent arrêt conduit à infirmer le jugement sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Chaque partie, gagnante et perdante à la fois, gardera à sa charge les dépens par elle exposés tant pour la procédure de première instance que pour les procédures d'appel. Il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Infirme le jugement (RG 11-08-000434) rendu le 14 février 2011 par le tribunal d'instance de Beauvais en ce qu'il a dit que M. et Mme [L] ont un droit absolu à racheter pour moitié les frais de construction du pilier élevé en 1997 par M. [R] et en conséquence dit que M. et Mme [L] devront verser la somme de 76,49 € au titre de ce rachat ;
Statuant à nouveau,
Autorise M. [R] et Mme [J] a déposé le pilier leur appartenant empiétant sur la propriété de M. et Mme [L] ;
Y ajoutant,
Dit que M. et Mme [L] devront déposer leur portail dans la mesure de ce qui est nécessaire à la dépose du pilier au plus tard 90 jours après la signification du présent arrêt sous peine d'une astreinte provisoire de 50 € par jour de retard, et ce, pendant une durée de 3 mois (durée à l'issue de laquelle il sera le cas échéant à nouveau statué) ;
Condamne M. [R] et Mme [J] à payer à M. et Mme [L] une somme de 6.923,75 € en indemnisation du préjudice subi du fait de l'empiétement ;
Rejette les demandes de dommages et intérêts de M. [R] et Mme [J] pour préjudice moral et procédure abusive ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens tant de première instance que d'appel ;
Rejette les demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toute autre demande.
Le GreffierLe Président,
C. POPEKJ.L. CARRIERE