République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 24/03/2016
***
N° de MINUTE : 16/
N° RG : 14/06801
Jugement (N° 2013001637)
rendu le 18 Septembre 2014
par le Tribunal de Commerce de LILLE METROPOLE
REF : PF/KH
APPELANTE
SARL HERMES INVEST
ayant son siège social [Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Guy DRAGON, avocat au barreau de DOUAI
Assistée de Me Jean-François LAFFONT, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMÉES
SARL TRIAD ASSURANCE
ayant son siège social [Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me François DELEFORGE, avocat au barreau de DOUAI
Assistée de Me Eric DELFLY, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me Geneviève FERRETTI
DÉBATS à l'audience publique du 19 Janvier 2016 tenue par Pascale FONTAINE magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maryse ZANDECKI
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Pascale FONTAINE, Président de chambre
Stéphanie ANDRE, Conseiller
Nadia CORDIER, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 24 Mars 2016 après prorogation du délibéré initialement prévu le 17 mars 2016 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pascale FONTAINE, Président et Maryse ZANDECKI, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 17 décembre 2015
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FAITS ET PROCEDURE
La société Triad exploite une activité de courtage en assurance. Par un acte du 4 juillet 2011, la S.A.R.L. Hermes invest lui a cédé la totalité des titres d'un autre courtier, la société Vegalis Assurances (Vegalis), qui commercialisait principalement des produits d'assurance des compagnies AFI Europe et Metlife. A cette occasion, la société Vegalis est devenue la S.A.R.L. Triad Assurances.
La valeur des titres de la société Vegalis a été calculée sur la valeur du portefeuille d'assurance, c'est-à-dire :
- 558 454 euros pour AFI Europe,
- trois fois le commissionnement linéaire de Metlife hors surcommissions constatées sur 2010, soit 81 382 x 3 = 244 146 euros,
- les capitaux propres arrêtés à 17 000 euros,
soit un total provisoire de 820 000 euros.
L'acte de cession de titres comportait une clause de complément de prix concernant l'éventuelle évolution sur les commissions perçues.
Dans le même temps, les parties ont conclu un contrat de garantie d'actif et de passif.
Les chiffres sur le premier semestre 2011 étant en baisse et laissant déjà prévoir une diminution du commissionnement de Metlife, alors estimée à 18 886 euros, la société Triad a consigné auprès de l'association Caisse de règlement pécuniaire des avocats de Lille (la CARPA) la somme de 56 658 euros (correspondant à 3 x18 886), montant prévisible de la réfaction du prix à verser à la société Hermes Invest.
Un chèque de banque d'un montant de 763 342 euros (820 000 euros - 56 658 euros) a été remis le jour de la cession de titres.
Le 6 juillet 2011, les nouvelles coordonnées bancaires ont été communiquées par la société Triad Assurances à la société Metlife.
À la fin de l'été 2011, le portefeuille Metlife de Vegalis a été transféré à la maison mère, la société Triad.
Les sociétés Triad et Hermes Invest ont alors été confrontées à deux problèmes, le premier étant relatif aux conséquences de la baisse du commissionnement linéaire sur la réfaction du prix de vente, le second concernant le montant des commissions effectivement versées à compter de juillet 2011 par la société Metlife aux sociétés Triad et Triad Assurances.
Les sociétés Triad et Hermes Invest ne parvenant pas à trouver un accord concernant la réfaction du prix de cession des titres, le 22 janvier 2013, la société Triad a assigné Hermes Invest en paiement de diverses sommes devant le tribunal de commerce de Lille Métropole.
Par un jugement du 18 septembre 2014, le tribunal de commerce de Lille Métropole a :
- débouté la société Hermes Invest de sa fin de non recevoir,
- constaté que la société Hermes Invest devait à la société Triad une réfaction du prix des titres à hauteur de 76 257,33 euros,
- ordonné au président de la CARPA la libération du séquestre 11/168 d'un montant de 56 658 euros au profit de la société Triad,
- condamné la société Hermes Invest à payer à la société Triad :
- la somme de 19 599, 33 euros,
- les intérêts judiciaires sur la somme de 76 257,33 euros à partir du 22 janvier 2013,
- la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamné la société Hermes Invest aux dépens, taxés et liquidés à la somme de 93,60 euros,
- ordonné l'exécution provisoire,
- débouté les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires.
Pour statuer ainsi, le tribunal a - notamment - retenu que, selon les courriers de METLIFE, 87.843, 81 euros ont été globalement versés au titre des commissions en 2011, chiffre non contesté par les parties ; que le contrat de garantie d'actif et de passif stipule que seul le commissionnement linéaire devait être pris en compte pour le calcul de la garantie ; qu'il y avait donc lieu de déduire les surcommissions, ce qui donnait (au vu des documents émis par METLIFE) un commissionnement linéaire de 55 962, 89 euros ; qu'ainsi la réfaction du prix des titres égale à trois fois la baisse s'évaluait à 76 257, 33 euros [ (81 382 euros - 55 962, 89 euros) x 3].
Par une déclaration d'appel du 10 novembre 2014, la société Hermes Invest a fait appel de ce jugement.
Le 19 décembre 2014, le greffe a adressé un avis à l'avocat de l'appelante afin de faire signifier la déclaration d'appel à la CARPA. Le 26 janvier 2015, la société Hermes Invest a été invitée à déposer cette signification au greffe.
Par une ordonnance du 18 mars 2015, le magistrat de la mise en état a constaté l'absence de signification de la déclaration d'appel à la CARPA dans le mois suivant l'avis adressé par le greffe et a prononcé la caducité de la déclaration d'appel à l'égard de cette dernière.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses conclusions récapitulatives signifiées par voie électronique le 10 février 2015, la S.A.R.L. HERMES INVEST demande à la cour de :
- dire et juger irrecevables les demandes de la société Triad en raison du non-respect de la procédure d'information des garants prévus par la convention de garantie d'actif et de passif conclue le 4 juillet 2011,
- dire et juger que la société Triad est déchue de son droit à garantie suite au non-respect des conditions de mise en oeuvre de la convention du 4 juillet 2011, faute d'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception et du respect du délai de huit jours après envoi avant toute poursuite.
- dire et juger infondée la revendication de la société Triad postulant diminution du commissionnement de Metlife,
- dire et juger que le commissionnement perçu par la société Triad en 2011 à hauteur de 87 843 euros contre 81 382 euros en 2010 correspond à une hausse du chiffre d'affaire de la société, empêchant la mise en oeuvre de la garantie de passif qui suppose un appauvrissement comptable de l'entreprise cédée,
- débouter la société Triad de toutes ses demandes,
- condamner la société Triad à lui payer la somme de 56 658 euros qui avait été séquestrée sur le compte CARPA du barreau de Lille en garantie d'une baisse de commissionnement,
- condamner la société Triad à lui payer la somme de 19 383 euros au titre de complément du prix correspondant à la différence multipliée par trois entre le commissionnement de 2010 -81 382 euros- et celui de 2011 - 87 843 euros-,
-condamner la société Triad à lui payer la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Triad aux dépens.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives signifiées par voie électronique le 9 avril 2015, la S.A.R.L. TRIAD ASSURANCES demande à la cour de :
-confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lille Métropole le 18 septembre 2014,
- condamner la société Hermes Invest à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.
La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la fin de non recevoir
¿ La société Hermes Invest soutient que, depuis un arrêt rendu par la chambre mixte de la Cour de cassation le 14 février 2003, toutes les clauses contractuelles organisant l'action en justice relèvent du régime des fins de non recevoir de l'article 122 du code de procédure civile ; que, selon l'article 3 de la convention de garantie de passif conclue entre les parties le 4 juillet 2011, toute réclamation ou demande présentée par l'acquéreur - la société Triad - ne pourra être prise en considération par les garants que si ces derniers ont été préalablement informés des causes et des charges supplémentaires et qu'ils aient eu la possibilité d'y répondre ou de s'y opposer ; que, selon le quatrième paragraphe de ce même article, les garants disposent d'un délai de huit jours à compter de la date où ils sont avisés par l'acquéreur des causes de la réclamation, par lettre recommandée avec avis de réception, pour présenter des observations ou oppositions.
L'appelante soulève l'irrecevabilité de l'action au motif que la société Triad n'a pas respecté les dispositions de cet article car elle n'a pas demandé d'explication relative à la diminution du commissionnement qu'elle invoque. Elle explique qu'aucune mise en demeure en recommandé avec accusé de réception ne lui a été adressée avant l'assignation délivrée le 22 janvier 2013 par la société Triad. Elle ajoute qu'au quatrième paragraphe du même article, il est prévu qu'en cas d'inertie des garants (la société Hermes Invest) à l'issue du délai de huit jours à compter de la réception de la lettre recommandée, l'acquéreur peut donner à la réclamation qu'il juge appropriée ; que, cependant, en l'espèce, elle n'a pu donner de réponse dans un délai de huit jours car aucune lettre recommandée portant réclamation ne lui a été adressée. Elle reproche aux premiers juges de ne pas avoir tenu compte de ces dispositions.
¿ La société Triad soutient, d'une part, que la société Hermes Invest ne peut prétendre qu'elle n'a pas été informée du contentieux relatif à la mise en oeuvre du mécanisme de réfaction du prix de vente car, malgré l'absence de lettre avec accusé de réception, l'appelant ne pouvait ignorer les difficultés depuis la clôture de l'exercice 2011 ; que les parties se sont réunies pour réaliser un calcul contradictoire des commissions générées par le portefeuille Metlife mais n'ont toutefois pas trouvé de solution favorable.
Elle souligne également que les parties avaient conscience qu'une baisse de prix était prévisible puisque la réfaction a été séquestrée sur un compte CARPA le 4 juillet 2011 et que plusieurs échanges électroniques entre les parties témoignent du fait que l'appelant a toujours été informé des calculs des commissions générées par le portefeuille Metlife.
Enfin, la société Triad invoque une interprétation erronée par l'appelant de la clause de consultation des garants (version selon laquelle l'acquéreur serait tenu d'adresser dans un délai de huit jours, une lettre recommandée pour présenter des réclamations au cédant), en soutenant que le délai de huit jours ne' concerne le vendeur qui dispose d'un délai de huit jours pour ...' à la réclamation faite par lettre recommandée par l'acheteur.
* * * * *
¿ L'article 122 du code de procédure civile prévoit que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
¿ S'il résulte des articles 122 et 124 de ce code que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées et que, licite, la clause d'un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire - et préalable à la saisine du juge - constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent, encore faut-il que la clause précise les modalités procédurales de la conciliation préalable obligatoire.
C'est ainsi que la clause contractuelle prévoyant une tentative de règlement amiable, non assortie de conditions particulières de mise en oeuvre, ne constitue pas une procédure de conciliation obligatoire, préalable à la saisine du juge, dont le non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à celui-ci.
¿ Ensuite, les clauses de réclamation ou de conciliation préalable, invitant ou obligeant les parties à rechercher une solution négociée avant de saisir un juge, en ce qu'elles comportent au moins temporairement une restriction au droit d'accès au juge, doivent être appliquées strictement.
Ainsi, comme pour toute renonciation, elles doivent manifester de manière non équivoque une volonté des parties de renoncer à l'action en justice faute de respect de la disposition contractuelle, donc de faire de cette saisine préalable une condition de recevabilité de l'action en justice.
¿ En l'espèce, l'article 3 du contrat de garantie d'actif et de passif relatif à la consultation des garants en cas de réclamation prévoit que :
' toute réclamation ou toute demande présentée par l'acquéreur en vertu de la présente garantie ne sera prise en considération par les garants qu'à la condition que ces derniers aient été préalablement informés des causes et des charges supplémentaires et qu'ils aient été mis en mesure d'y répondre ou de s'y opposer.
Pour présenter ces observations ou ces oppositions, les garants disposeront d'un délai de huit jours à compter de la date où ils auront été avisés par l'acquéreur par lettre recommandée avec avis de réception, des causes de la réclamation.
En revanche, les garants devront être assurés qu'au cas où une créance sur client serait provisionnée comme douteuse dans une situation servant de base à la détermination du prix de cession des actions (ou : des parts sociales) et apparaîtrait néanmoins aux garants comme recouvrable au moins partiellement, l'acquéreur prendrait, aux fins de recouvrement , toute mesure demandée par les garants, ces derniers supportant les frais et les conséquences desdites mesures, mais profitant des recouvrements éventuels.
En cas d'inertie des garants à l'issue de cette période de huit jours, l'acquéreur pourra donner à la réclamation la suite qu'il jugera appropriée.
En cas de vérification comptable par l'administration fiscale ou par les organismes sociaux, les garants devront être avisés de cette vérification afin de pouvoir assurer eux-mêmes leur défense ou se faire représenter, à leurs frais, par toute personne de leur choix, en ce qui concerne les opérations effectuées par la société antérieurement au jour de la cession. Il en sera de même dans les différentes phases de la procédure qui pourrait s'ensuivre'.
Retenant - notamment - que l'acquéreur avait ainsi la faculté de 'donner à la réclamation la suite qu'il jugera appropriée', et soulignant que cet article 3 était intitulé 'consultation des garants en cas de réclamation', la cour considère qu'il ne ressort pas des termes de cette clause que les parties aient entendu faire de cette phase d'information un préalable obligatoire à toute procédure judiciaire.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il écarte la fin de non-recevoir soulevée par la société Hermès Invest.
Sur la demande en paiement présentée par la société Triad
¿ La société Hermès Invest soutient que, pour dire qu'elle devait verser à la société Triad la somme de 140 804,43 euros, cette dernière a joué sur la confusion entre les noms des sociétés Triad et Triad assurances, et sur le fait que chacune s'est vu ouvrir un code courtage ; que, selon une attestation émise par la société METLIFE, deux codes courtages ont été ouverts, l'un au profit de la société Vegalis, devenue Triad assurances, l'autre au profit de la société Triad ; que c'est la raison pour laquelle, en avril 2012, la société METLIFE a adressé deux déclarations annuelles de commissions, l'une à Vegalis (devenue Triad Assurances) au titre 'du versement au cours de l'année 2011", d'un montant de 53 396,62 euros, et l'autre à la société Triad au titre de 'commissions versées au cours de l'année 2011", d'un montant de 34 447,19 euros ; que, selon la société METLIFE, après qu'elle a pris en compte le relevé d'identité bancaire au nom de la société Triad assurances, compte sur lequel la société METLIFE a dû verser, à partir du 6 juillet 2011, les commissions liées à la formation et au renouvellement des contrats d'assurance, elle a fermé le code courtier rattaché à la société Vegalis et l'a remplacé par un autre code attribué à la société Triad.
Elle précise que les deux attestations de la société METLIFE de déclaration annuelle des commissions, aux montants de 34 447,19 euros et 53 396,62 euros, faites courant avril 2012, concernent le même portefeuille qui a fait l'objet de la cession du 4 juillet 2011 et que la société Triad devait additionner le montant total des commissions, ce qui conduit à un total de commissionnement de 87 843,81 euros pour l'année 2011, et non à une baisse de 46 934,81 euros.
Elle prétend que le montant des commissions générées par le portefeuille METLIFE n'est pas en baisse, mais en hausse par rapport à ce qui avait été envisagé par les parties au moment de la cession, et que la société intimée l'aurait reconnu en cours de procédure.
La société Hermès Invest fait encore valoir que la distinction entre les commissions linéaires et les autres commissions non linéaires ou supplémentaire ne repose sur aucun usage professionnel, ni aucun texte législatif ou réglementaire, et n'a donc aucune portée juridique ; que dans le cadre de la cession d'un cabinet de courtage, c'est le versement des commissions et leur récurrence qui compte, et non leur nature linéaire ou non, et que l'acte de cession de titres du 4 juillet 2011 prévoit le versement de la totalité des commissions ; que c'est sur la base de la totalité de ces commissions que les parties à l'acte de garantie de passif 'raisonnent'.
¿ La société Triad Assurances soutient que l'acte de cession de titres du 4 juillet 2011 fixait la valeur provisoire du portefeuille METLIFE à trois fois le montant des commissions linéaires perçues en 2010, à savoir 3 x 81 382 = 244 146 euros, et qu'à défaut d'atteindre 95% de ce commissionnement en 2011, une réfaction du prix de vente serait appliquée à hauteur de trois fois la différence entre le montant des commissions linéaires de 2010 et 2011 ; que le total des commissions linéaires de METLIFE pour l'année 2011 n'atteignait que 55 962, 89 euros, et qu'elle est bien fondée à mettre en oeuvre la garantie de passif pour obtenir le paiement de la somme de 76 257, 33 euros ( correspondant à (81 382 - 55 962, 89) x 3).
Elle souligne que, pour dire que le montant des commissions générées par le portefeuille METLIFE en 2011 était de 87 843, 81 euros, l'appelant a pris en compte les commissions linéaires ainsi que les surcommissions payées au courtier, contrairement à l'acte de cession des titres qui prévoit que les titres sont cédés sur la base d'un commissionnement linéaire, hors surcommissions. Elle ajoute que le mécanisme de réfaction du prix de cession des titres de Triad Assurances doit se faire par comparaison des seules commissions linéaires générées par le portefeuille METLIFE en 2010 et en 2011, et ne doit pas inclure les surcommissions.
* * *
¿ L'article 1134 du code civil prévoit que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
¿ Le 'contrat de garantie d'actif et de passif' (GAP), signé par les parties le 4 juillet 2011, prévoit que :
- étaient désignés comme 'garants' la société Hermès invest, M. [Q] et Mme [B] ;
- 'les garants garantissent les différents postes d'actif et de passif de la société, tels qu'ils apparaissent au bilan au 30 juin 2011, ainsi que l'exactitude des déclarations de l'article 1" (article 2) ;
- 'ils garantissent l'acquéreur contre tout passif nouveau n'ayant pas été comptabilisé ou n'ayant pas été provisionné ou insuffisamment provisionné' (...), dès lors que le passif nouveau aurait une cause ou une origine imputable à des faits antérieur au jour de la cession ;
- 'dans le cas d'apparition d'un passif nouveau ou d'une diminution d'actif ayant pour effet une aggravation de la situation nette de la société (...), les garants s'engagent irrévocablement à verser un montant équivalent à l'acquéreur sous forme d'un remboursement du prix perçu sur les titres' (...) ;
- plus particulièrement, les garants confirment que le prix de cession a été arrêté suivant :
- un forfait concernant le portefeuille d'assurance AFI EUROPE (...),
-3 fois le commissionnement linéaire hors commissions constaté sur 2010 pour le portefeuille METLIFE, sous réserve d'un report effectif des commissionnements linéaires d'une année sur l'autre à hauteur de 95% ;
- (...) ;
- toute différence de report par rapport à ce taux prévu donnera lieu à une réfection de prix de vente pour insuffisance d'actif calculée à hauteur de 3 fois la différence ;
(...).'
L'ambiguïté ou l'imprécision, voire le caractère incompréhensible de la phrase concernant le portefeuille Metlife (ci-dessus soulignée), sont cependant - et heureusement - levés par l'exemple donné dans la même clause.
En effet, les alinéas suivants prévoient que 'les parties ont d'ores et déjà constaté que les chiffres prévisibles sur le report 2011 étaient de 62 496 euros soit une baisse prévisible de 18 886 euros' et que 'si cette baisse prévisible était confirmée, la réfection de prix serait de 18 886 x 3 = 56 658 euros'.
Il importe de souligner que cette somme de 62496 euros (faisant apparaître une baisse prévisible de 18 856 euros) était annoncée par Metlife elle-même, dans un courrier du 15 juin 2011 (pièce n°5 du dossier Hermès Invest), où elle précisait le chiffre d'affaires du 'portefeuille Vegalis, code courtage 52644" pour 2010, soit 81 382, 22 euros, et 'une projection pour 2011".
Il doit à cet égard être souligné que Metlife ne fait dans ses courriers aucune distinction selon la nature des commissions versées ou 'envisagées'.
En outre, il ressort des DADS adressées les 18 et 23 avril 2012 par Metlife à 'Vegalis' (code courtage 52644) et à 'Triad' (code courtage 956007) qu'en 2011 le montant des commissions versées a été de 53 396, 62 euros pour la première et de 34 447, 19 euros pour la seconde - étant rappelé, si besoin est, que le 12 septembre 2011 (pièce n°3) Metlife a accusé réception de l'information sur le transfert de portefeuille, avec effet au 1er juillet 2011, et de l'ordre de remplacement de 'l'ancien courtier' (Vegalis, code 52644) par le 'nouveau courtier', Cabinet Triad, code 956007.
La continuité de la gestion de ce portefeuille, la prise en compte par Metlife de la cession et de la succession entre Vegalis et Triad, de la 'fermeture' du code n°52644 et de son remplacement par le code 956 007, sont confirmées par la lettre adressée le 16 avril 2013 par Metlife au conseil de Hermès Invest.
Le montant total des commissions versées par Metlife fut donc de 87 843,81 euros pour l'année 2011, et, au regard de l'exemple explicatif exposé dans la clause de la GAP, c'est cette somme qu'il convient de comparer à celle de 81 382, 22 euros pour 2010.
Ainsi, force est de constater que la baisse de commissionnement alléguée est inexistante, ce qui ne permet pas de mettre en jeu la garantie sollicitée.
Le jugement sera donc réformé de ce chef.
Sur les demandes reconventionnelles
¿ La société Hermès Invest demande la condamnation de la société Triad au versement de la somme de 56 658 euros, en invoquant l'absence de baisse de commissionnement entre l'année 2010 et 2011 ; en faisant valoir que, le 4 juillet 2011, lors de la conclusion de l'acte de cession de titres, la somme de 56 658 euros a été consignée à la CARPA afin d'anticiper une baisse du commissionnement ; en indiquant que cette somme a été libérée par la CARPA suite au jugement rendu par le tribunal de commerce de Lille Métropole le 18 septembre 2014.
Il sera donc fait droit à sa demande en paiement à ce titre.
¿ En second lieu, la société Hermès Invest invoque l'augmentation du commissionnement METLIFE pour demander, en application de l'article 4 de l'acte de cession de titres, un complément de prix s'élevant à la somme de 19 383 euros - montant qu'elle obtient en multipliant par 3 la différence entre le commissionnement 2010 et le commissionnement 2011 (3 x 6 461 euros).
Or, le deuxième paragraphe de cet article 4 prévoit 'qu'un complément de prix sera calculé à hauteur des surcommissions non constatées dans la comptabilité à la clôture des comptes au 30 juin 2011, payées par les compagnies d'assurance au plus tard le 15 février 2012 et ayant un fait générateur antérieur au 30 juin 2011".
Mais la société Hermès ne justifie pas - ni même n'allègue - que cette condition tenant au fait générateur antérieur au 30 juin 2011 - soit remplie.
Elle sera donc déboutée de cette demande.
Sur les frais et dépens
Succombant en ses prétentions, la société Triad sera condamnée aux dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile, et, dès lors, déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Enfin, il est équitable de la condamner à payer à la société appelante une somme de 3 500 euros pour ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
CONFIRME le jugement en ce qu'il déboute la société Hermès Invest de sa fin de non-recevoir,
LE REFORME pour le surplus de ses dispositions,
STATUANT à nouveau et y ajoutant,
DEBOUTE la société Triad de ses demandes,
REJETTE la demande en paiement de la somme de 19 383 euros présentée par la société Hermès Invest,
CONDAMNE la société Triad à payer à la société Hermès Invest la somme de 56 658 euros, en remboursement de celle perçue sur libération des fonds séquestrés,
CONDAMNE la société Triad à payer à la société Hermès Invest la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Triad au paiement des dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT
M. ZANDECKIP. FONTAINE