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17/03/2016 | FRANCE | N°15/04693

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 17 mars 2016, 15/04693


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 17/03/2016

***

N° MINUTE :

N° RG : 15/04693

Jugement (N° 14/10286)

rendu le 07 Juillet 2015

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : BP/VC

APPELANTE



SA HSBC FRANCE

ayant son siège social : [Adresse 1]

Représentée par Me Régis DEBAVELAERE, avocat au barreau de LILLE



INTIMÉ



Monsieur [Z] [G]

né le [Date naissance 1] 1959 Ã

  [Localité 1] - de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

Représenté par Me Bernard FRANCHI, avocat au barreau de DOUAI

Assisté de Me CHRISTIAENS SELLIER, avocat au barreau de LILLE


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République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 17/03/2016

***

N° MINUTE :

N° RG : 15/04693

Jugement (N° 14/10286)

rendu le 07 Juillet 2015

par le Tribunal de Grande Instance de LILLE

REF : BP/VC

APPELANTE

SA HSBC FRANCE

ayant son siège social : [Adresse 1]

Représentée par Me Régis DEBAVELAERE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉ

Monsieur [Z] [G]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 1] - de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

Représenté par Me Bernard FRANCHI, avocat au barreau de DOUAI

Assisté de Me CHRISTIAENS SELLIER, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS à l'audience publique du 02 Février 2016

tenue par Benoît PETY magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pierre CHARBONNIER, Président de chambre

Benoît PETY, Conseiller

Hélène BILLIERES, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 17 Mars 2016 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Patricia PAUCHET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

*****

Exposé du litige, de la procédure et des prétentions des parties 

La S.A. HSBC France (agence de [Localité 2]) a ouvert en ses livres suivant convention du 15 septembre 2009 un compte au profit de la S.A.S. NORD GRANULATS. Cette dernière a aussi souscrit le 17 janvier 2013 auprès de cet établissement financier un prêt de 200.000 euros au taux de 4,33 % l'an remboursable en 48 mensualités successives de 4.511,34 euros chacune. Ce prêt faisait l'objet d'une garantie OSEO à concurrence de 35 %. Il était également garanti par le cautionnement personnel de Monsieur [Z] [G] à concurrence de 30% des sommes dues dans la limite de 60.000 euros incluant le principal, les intérêts et, le cas échéant, les pénalités et intérêts de retard pour une durée de 54 mois.

La société emprunteuse a connu des difficultés. Elle a été placée en liquidation judiciaire par décision du tribunal de commerce de [Localité 2]-MÉTROPOLE du 16 décembre 2013. La banque prêteuse a à cette occasion déclaré sa créance entre les mains de Maître [Q], mandataire-liquidateur.

La société HSBC France a, par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 février 2014, rappelé à Monsieur [G] le contenu de ses engagements en qualité de caution tout en le mettant en demeure de lui régler la somme de 48.268,25 euros avec intérêts. Cette mise en demeure a été réitérée par la banque le 21 février 2014, en vain.

Par exploit du 27 octobre 2014, la société HSBC France a fait assigner Monsieur [Z] [G] devant le tribunal de grande instance de LILLE aux fins de voir cette juridiction condamner l'assigné à lui payer la somme principale de 48.268,25 euros, outre 3.000 euros d'indemnité de procédure, la banque sollicitant en outre la capitalisation annuelle des intérêts.

Par jugement réputé contradictoire du 7 juillet 2015, le tribunal de grande instance de LILLE a rejeté toutes les prétentions de la banque poursuivante. Cette dernière a interjeté appel de cette décision. Elle demande à la cour de débouter le défendeur de toutes ses demandes et de faire droit à ses prétentions initiales.

La banque HSBC France expose dans un premier temps qu'aucun vice du consentement n'est utilement établi au préjudice de la caution au titre d'un prétendu dol. C'est la mauvaise foi qui inspire selon le prêteur un tel argument à Monsieur [G], directeur général de la S.A.S. NORD GRANULATS et représentant légal de cette personne morale. Il a signé en cette qualité le contrat de prêt mentionnant le bénéfice de la garantie OSEO à raison de 70 % conformément à la notification d'accord de cet organisme le 20 décembre 2012. Le défendeur a donc paraphé et signé les conditions générales de cette garantie et il ne peut prétendre que la banque aurait manqué à cet égard à son obligation d'information. Ladite notification de garantie OSEO limite bien les sommes réclamées à la caution à 30 % de l'encours du prêt. En outre, la garantie OSEO ne bénéficie qu'à l'établissement intervenant. Elle ne peut être invoquée par les tiers, notamment par le bénéficiaire et ses garants pour contester tout ou partie de la dette. OSEO est une garantie in fine qui ne peut intervenir qu'une fois constaté l'épuisement de toutes les poursuites. Elle règle la perte finale au prorata de sa part de risque. Monsieur [G] ne peut invoquer une quelconque tromperie et solliciter l'annulation du cautionnement.

La société créancière rappelle que la somme admise au passif de la liquidation judiciaire est de 160.894,19 euros, créance assortie de la contre-garantie OSEO à raison de 70 % et du cautionnement de Monsieur [G] à concurrence de 30 %. Monsieur [G] reste donc devoir à la banque poursuivante la somme de 48.268,25 euros (30 % de 160.894,19 euros). Ce n'est qu'après règlement par la caution de cette somme que la société HSBC France pourra se retourner vers OSEO pour lui réclamer 70 % du reliquat, c'est à-dire 78.838,15 euros, la banque supportant une perte non couverte de 33.787,78 euros.

La société HSBC France conteste en outre toute déchéance du droit aux intérêts pour défaut d'information annuelle. Le prêt a été accordé à NORD GRANULATS le 17 janvier 2013. La procédure collective a été ouverte le 16 décembre 2013. La banque a mis en demeure la caution par lettre recommandée du 6 février 2014, ce courrier valant information de la caution. Monsieur [G] a omis de signaler son changement d'adresse à la banque si bien que cette mise en demeure lui est revenue avec la mention NPAI.

La société HSBC France ajoute que sa créance est certaine, liquide et exigible, ce qui relève de tous les éléments qu'elle avait transmis au premier juge et qu'elle communique de nouveau aux débats devant la cour. Elle précise que l'admission de sa créance au passif de la procédure collective de la société débitrice principale vaut titre. Cette admission a autorité de la chose jugée à l'égard des cautions solidaires du débiteur principal. La somme de 160.894,19 euros retenue dans ce contexte n'est donc pas discutable.

***

Monsieur [Z] [G] conclut pour sa part à la confirmation pure et simple du jugement entrepris et au débouté des demandes de la société HSBC France. A titre subsidiaire, il demande à la juridiction du second degré de dire que la créance de la banque poursuivante ne peut excéder 31.374,60 euros. Il forme en outre une demande d'indemnisation de ses frais irrépétibles à raison de 2.000 euros.

Monsieur [G] demande d'abord à la cour de dire le cautionnement qu'il a souscrit nul et de nul effet dans la mesure où son consentement a à cette occasion été vicié. Il rappelle qu'il n'est pas le gérant de la société NORD GRANULATS, ce qui est le fait de la société AG UMWELT, fonds d'investissement. Il n'était donc qu'un salarié. OSEO est une association de soutien public aux entreprises, organisme d'Etat qui garantit les crédits de renforcement de la trésorerie des entreprises. Cette garantie repose sur un fonds ayant pour vocation de soutenir la structure financière d'une société. HSBC France ne lui a jamais expliqué que cette garantie OSEO ne bénéficie qu'à la banque et non à la caution personne physique. Monsieur [G] estime qu'il a été induit en erreur lorsqu'il s'est porté caution. Il a légitimement pu penser que cette garantie OSEO limiterait la somme qui pourrait lui être réclamée en qualité de caution. Il y a là une faute de la part de la banque à l'origine d'un préjudice pour la caution consistant dans la perte d'une chance. Un tel défaut d'information justifie la nullité du cautionnement pour dol.

En toute hypothèse, Monsieur [G] déclare qu'en sa qualité de caution, il n'a été l'objet d'aucune information de la part de la banque contrairement aux dispositions de l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier. La banque devait l'informer de l'évolution du montant de la créance garantie à la date anniversaire du contrat sous peine de déchéance de tous les accessoires, frais et pénalités. A titre subsidiaire, Monsieur [Z] [G] fait valoir que la banque HSBC France ne justifie toujours pas du relevé général des opérations exigé par le premier juge. Il n'est pas établi que NORD GRANULATS serait débitrice de 160.894,19 euros. HSBC France ne déduit pas la garantie OSEO qui devait pourtant la garantir à concurrence de 35 %, soit pour 56.312 euros. Ainsi, l'engagement de Monsieur [G], s'il était déclaré valide, ne serait que de 31.374,60 euros, c'est-à-dire 160.894 ' 56.312 = 104.582 euros dont 30 % à la charge de la caution.

***

Motifs de la décision 

Sur la nullité alléguée du cautionnement souscrit par Monsieur [Z] [G] 

Attendu que s'il s'évince de l'extrait Kbis de la S.A. NORD GRANULATS émis le 16 décembre 2013 et communiqué aux débats que la gestion, la direction, l'administration et le contrôle de cette personne morale relèvent de la société AG INTERNATIONAL UMWELT ayant siège social au LUXEMBOURG, il n'en demeure pas moins à la lecture de l'acte de prêt comme de la notification de garantie OSEO que ces actes ont été paraphés et signés par Monsieur [Z] [G], directeur général de la société emprunteuse et comme tel dénommé « représentant » de NORD GRANULATS ;

Que l'examen des conditions générales de la notification de garantie OSEO enseigne à l'article 2 que cette garantie ne bénéficie qu'à l'établissement intervenant, qu'elle ne peut en aucun cas être invoquée par les tiers, notamment par le bénéficiaire et ses garants pour contester tout ou partie de leur dette, l'article 10 précisant de surcroît que l'établissement intervenant exerce les diligences nécessaires en vue du recouvrement de la totalité de la créance et il tient les garants informés du déroulement de la procédure et de l'état des recouvrements ;

Qu'il est encore précisé au même article 10 que toutes les sommes recouvrées à la suite des poursuites engagées pour le recouvrement de la créance garantie viennent en déduction de cette créance ;

Qu'ainsi, le principe selon lequel OSEO n'est qu'une garantie in fine, c'est-à-dire n'ayant vocation à intervenir qu'une fois éteints tous les autres recours n'est pas discutable comme cela est suffisamment explicité par le document en question que Monsieur [G] a paraphé et dont il pouvait parfaitement, en sa qualité de directeur général, saisir le sens et toutes les nuances ;

Qu'il s'ensuit que la garantie OSEO est assurément sans incidence aucune sur la portée de l'engagement de caution de Monsieur [G] si bien que la circonstance que le cautionnement qu'il a souscrit ne fasse pas référence à cette garantie OSEO est totalement indifférente, le créancier bénéficiaire du cautionnement devant prioritairement mettre en 'uvre toutes les autres garanties avant de recourir à celle de dernier rang;

Qu'il est donc vain de la part de la caution d'opposer à la banque HSBC France le dol, ce vice du consentement n'étant en l'état absolument pas démontré ;

Que la demande d'annulation de son cautionnement par Monsieur [Z] [G] sera en conséquence rejetée ;

Sur la créance principale de la S.A. HSBC France envers la caution 

Attendu que la banque poursuivante communique aux débats notamment le contrat de prêt conclu avec la S.A. NORD GRANULATS, le cautionnement souscrit par Monsieur [G], le tableau d'amortissement du prêt, la déclaration de sa créance pour 160.894,19 euros à titre chirographaire, enfin la notification par le greffe du tribunal de commerce de LILLE-MÉTROPOLE de la décision d'admission de créance prise le 29 septembre 2014 par le juge-commissaire à concurrence de la somme sus-visée ;

Qu'il importe donc de fixer à la somme de 48.268,25 euros la créance de la société HSBC France envers Monsieur [G], outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de payer du 6 février 2014 ;

Que la discussion instaurée par Monsieur [G] sur un prétendu manquement de la banque à son devoir annuel d'information de la caution est sans objet dès lors que la créance principale ne correspond qu'à du capital et que cette créance ne produira que des intérêts au seul taux légal comme dûment sollicité par la partie poursuivante ;

Que Monsieur [Z] [G] sera condamné à payer cette somme à la banque poursuivante, le jugement déféré étant ainsi infirmé ;

Sur la capitalisation des intérêts 

Attendu que s'agissant d'une option acquise de droit dès lors qu'elle est comme en l'espèce requise, la capitalisation des intérêts sera constatée pour ceux des intérêts échus depuis au moins une année conformément à l'article 1154 du Code civil ;

Sur les frais irrépétibles :

Attendu que l'équité commande d'arrêter au profit de la société HSBC France une indemnité de procédure de 2.000 euros, ce qui justifie également de ce chef l'infirmation de la décision entreprise ;

Que cette considération ne justifie aucunement qu'il soit fait droit à la demande d'indemnité de procédure de Monsieur [G], ce dernier étant en conséquence débouté de cette prétention indemnitaire en cause d'appel ;

***

PAR CES MOTIFS ;

Statuant publiquement et contradictoirement ;

Rejette le moyen de nullité pour vice du consentement du cautionnement soulevé par Monsieur [Z] [G] ;

Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Prononçant à nouveau,

Condamne Monsieur [Z] [G] ès qualités de caution à payer à la S.A. HSBC France, au titre du prêt de 200.000 euros accordé le 17 janvier 2013 à la S.A.S. NORD GRANULATS, la somme de 48.268,25 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 6 février 2014 ;

Constate la capitalisation des intérêts échus depuis une année au

moins ;

Condamne Monsieur [Z] [G] à verser à la société HSBC France une indemnité de procédure de 2.000 euros ;

Condamne Monsieur [G] aux entiers dépens de première instance ;

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [Z] [G] de sa demande d'indemnité de procédure en cause d'appel ;

Condamne Monsieur [G] aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de la S.C.P. d'avocats DEBAVELAERE-BECUWE-TEYSSEDRE conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

P. PAUCHETP. CHARBONNIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 1
Numéro d'arrêt : 15/04693
Date de la décision : 17/03/2016

Références :

Cour d'appel de Douai 81, arrêt n°15/04693 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-17;15.04693 ?
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