République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 1
ARRÊT DU 10/03/2016
***
N° de MINUTE : 16/
N° RG : 15/01834
Jugement (N° 2013002371)
rendu le 07 Janvier 2015
par le Tribunal de Commerce de BOULOGNE-SUR-MER
REF : SD/KH
APPELANT
Monsieur [E] [B]
né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 1]
de nationalité Française
demeurant [Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Julie BOUVET, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER
INTIMÉE
Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE
ayant son siège social [Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Jean-Sébastien DELOZIERE, de la SCP DECOSTER-CORRET-DELOZIERE-LECLERCQ, avocat au barreau de SAINT-OMER
DÉBATS à l'audience publique du 13 Janvier 2016 tenue par Sandrine DELATTRE magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marguerite-Marie HAINAUT
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Marie-Annick PRIGENT, Président de chambre
Philippe BRUNEL, Conseiller
Sandrine DELATTRE, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 10 Mars 2016 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Marie-Annick PRIGENT, Président et Clara DUTILLIEUX, greffier en chef, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU :17 décembre 2015
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Vu le jugement contradictoire du 7 janvier 2015 du tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer, qui a débouté [E] [B] de ses demandes, l'a condamné à payer à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE la somme de 100 125, 04 euros avec intérêts au taux de 8, 05% à compter du 7 mai 2013, ordonné la capitalisation annuelle des intérêts, débouté la banque de ses plus amples demandes, et condamné [E] [B] aux dépens et au paiement d'une somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu l'appel interjeté le 25 mars 2015 par [E] [B];
Vu les conclusions déposées le 29 juillet 2015 pour ce dernier, aux termes desquelles il sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour de dire que les intérêts ne sont dus qu'à compter du 23 mai 2008, de débouter la société CREDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE de toute demande relative aux intérêts antérieurs à la date du 23 mai 2008, de constater que le TEG n'est ni effectif ni global et donc qu'il est erroné, en conséquence, de dire que la créance ne peut produire intérêt qu'au taux légal, et à compter du 23 mai 2008, d'enjoindre à la société CREDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE de produire un calcul du taux d'intérêt au taux légal à compter du 23 mai 2008, de constater que les sommes demandées à titre d'intérêts de retard pour la période antérieure à la date du 23 mai 2008 est atteinte par la prescription, en conséquence, de débouter la société CREDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE de toute demande relative à des intérêts de retard pour la période antérieure au 23 mai 2008, de constater que le taux d'intérêt de retard est calculé sur le taux conventionnel et dire qu'en conséquence de la déchéance du droit aux intérêts, le taux d'intérêt de retard doit être calculé sur le taux d'intérêt légal, à compter du 23 mai 2008, d'enjoindre à la société CREDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE de produire un calcul des intérêts de retard à compter du 23 mai 2008 et sur la base du taux d'intérêt légal, de réduire l'indemnité conventionnelle à 1 euro, de constater que la société CREDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE a manqué à son devoir de mise en garde et à son obligation de s'assurer de la viabilité du projet, de condamner en conséquence la société CREDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE à lui payer la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts, de débouter la société CREDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive, de débouter la société CREDIT AGRICOLE NORD DE FRANCE de sa demande d'article 700 du code de procédure civile, de dire que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens ;
Vu les conclusions déposées le 11 décembre 2015 pour la société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE, aux termes desquelles elle demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné [E] [B] à payer au CREDIT AGRICOLE la somme principale de 100 125.04 euros avec intérêts conventionnels au taux de 4,05 % majoré de 4 points à compter du 7 mai 2013, prononcé la capitalisation annuelle des intérêts, par année entière et successive, à compter de la présente demande, et sollicite en outre la condamnation de [E] [B] à payer la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;
Vu l'ordonnance de clôture du 17 décembre 2015 ;
Référence étant faite au jugement entrepris pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, il suffit de rappeler que [E] [B] est poursuivi en qualité de co emprunteur, avec son épouse, d'un prêt professionnel du 7 juillet 2003 à eux accordé par la CAISSE REGIONALE DE CREDIT MUTUEL NORD DE FRANCE à hauteur de 120 000 euros aux taux de 4, 05% remboursable en 83 mensualités de 1643, 04 euros, pour l'acquisition d'un fonds de commerce, que par jugements des 10 septembre 2004 puis 6 janvier 2006, madame [B] était placée en liquidation judiciaire, que la banque a déclaré sa créance, que la procédure a été clôturée le 4 mai 2007 pour insuffisance d'actif, que la banque recevait un règlement de 49 279, 24 euros dans le cadre des opérations de liquidation judiciaire, que les échéances du prêt étant impayées depuis mai 2004 et les tentatives de solution amiable ayant échoué, la banque prononçait la déchéance du terme par courrier recommandé avec accusé de réception du 14 novembre 2011, puis faisait assigner [E] [B] par acte d'huissier de justice du 23 mai 2013 afin d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 121.557, 65 euros avec intérêts au taux de 4, 05% majoré de 4%, 2500 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive, et 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, procédure qui donnait lieu au jugement déféré.
Au soutien de son appel, [E] [B] prétend que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE n'a pas pris en compte le règlement adressé par le mandataire judiciaire d'un montant de 49 279, 24 euros, que les actions en paiement des intérêts, de retard ou non, se prescrivant par 5 ans, la banque doit être déboutée de toute demande à ce titre antérieure au 23 mai 2008, qu'il doit être enjoint à la banque de produire un calcul précis des intérêts dus pour cette période, que le TEG mentionné est erroné ne comprenant ni le coût des garanties prises, ni celui de l'acquisition de parts sociales de la banque, que la clause pénale est manifestement excessive et doit être réduite à un euro, que la banque a manqué à son devoir de mise en garde en sa qualité d'emprunteur non averti, étant employé de libre service dans un magasin AUCHAN ayant quitté ses fonctions pour travailler dans le commerce de son épouse, que la banque ne s'est pas renseignée sur la viabilité du projet, que les premiers impayés datent de moins d'un an après la conclusion du prêt, qu'elle aurait dû les avertir sur les risques, et qu'aucun abus de sa part n'est avéré car il convenait d'attendre le règlement de la liquidation judiciaire.
En réponse, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE expose qu'elle ne sollicite le paiement des intérêts qu'à compter du 23 mai 2008, que le TEG est défini et détaillé en page 16 de l'acte de cession, que [E] [B] ne démonte nullement avoir payé de frais supplémentaires que ce soit au titre des garanties ou des parts sociales, que les dispositions et jurisprudence citées par ce dernier sont relatives au droit de la consommation qui n'est pas applicable en l'espèce, que le taux d'intérêt contractuel de retard est applicable, qu'à tout le moins il ne peut être réduit en deçà de 3, 29%, que l'indemnité conventionnelle réclamée n'est pas excessive, que [E] [B] s'est présenté comme commerçant et était un emprunteur averti, qu'en sa qualité de dispensateur de crédit elle ne pouvait s'immiscer dans le projet de ses clients, qu'elle a effectué une étude approfondie, que si l'exercice partiel est déficitaire c'est parce que les charges relatives à la constitution n'ont pas été amorties alors qu'elles pouvaient l'être sur 5 ans, que le premier résultat de madame [B] était bénéficiaire, et qu'elle a passé de nombreuses heures pour tenter de régler ce dossier, en vain ce qui caractérise l'abus de la part de [E] [B].
SUR CE
Sur le montant du capital restant dû
Le prêt professionnel octroyé à [E] [B] et à son épouse par le CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE le 7 juillet 2003 porte sur un montant de 120 000 euros à payer en 84 mensualités, au taux d'intérêt annuel initial révisable de 4, 050% ;
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 28 octobre 2004 la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE a déclaré sa créance au passif de la procédure de redressement judiciaire de [V] [B] [O] exerçant sous l'enseigne LE RELAIS BEAUMONTOIS, au titre du prêt dont s'agit à hauteur de 110 729, 76 euros, dont 108 706, 21 euros en capital, un décompte étant produit indiquant que les échéances n'étaient plus payées depuis le 1er mai 2004 inclus ;
A la suite du prononcé de la liquidation judiciaire de [V] [B] [O], la banque déclarait au passif de cette dernière, par courrier du 18 janvier 2006, au titre du prêt dont s'agit, la somme de 117 227, 89 euros dont 27 477, 55 euros au titre du capital échu et impayé et 80 983, 26 euros au titre du capital restant à échoir au 6 janvier 2006 ;
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 23 août 2007 adressé à [E] [B], la banque lui a indiqué que maître [V] ès qualités de liquidateur judiciaire de [V] [B] lui avait adressé un règlement de 49 279, 24 euros le 9 juillet 2007, que le tribunal de grande instance de Béthune avait par jugement du 4 mai 2007 clôturé la procédure pour insuffisance d'actif, qu'au titre du prêt dont s'agit, les échéances en capital en retard étaient de 19 997, 68 euros et le capital non échu exigible de 54 153, 11 euros, soit 74 150, 79 euros au titre de l'encours en capital ;
La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE communique aux débats un historique des remboursements au 31 octobre 2013 qui prend en compte le versement de 49 279, 24 euros et fait apparaître qu'à cette date et après prise en compte de ce règlement, la somme restant due en capital est de 45 849, 21 euros ;
Il en résulte que la banque a bien pris en compte le règlement de 49 279, 24 euros dans le calcul des sommes restant dues au titre du prêt ;
Sur les intérêts
Aux termes de ses écritures, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE ne conteste pas qu'elle ne peut réclamer les intérêts qu'à compter du 23 mai 2008, compte tenu de la prescription de 5 ans, dès lors qu'elle n'a fait délivrer son assignation que le 23 mai 2013 ;
Elle produit un décompte au 6 mai 2013, qui ne prend en compte que les intérêts dus à compter du 23 mai 2008 ce qui représente une somme de 29 074, 11 euros arrêtée au 6 mai 2013, le taux d'intérêt appliqué étant de 8, 05%, soit le taux d'intérêt annuel de 4, 050% l'an majoré de 4, 0 points, le contrat de prêt prévoyant cette majoration en cas de retard ;
Ce document étant suffisamment précis s'agissant du calcul des intérêts et de la période concernée, [E] [B] sera débouté de sa demande visant à enjoindre à la banque de produire un calcul précis des intérêts dus pour cette période ;
Sur le taux effectif global (TEG)
Selon l'art. L. 313-2 du code de la consommation, le TEG doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt, de sorte que l'acte constatant un prêt à finalité professionnelle est soumis à cette obligation légale ;
Il résulte de l'acte de cession de fonds de commerce et de prêt du 7 juillet 2003 que le taux effectif global est stipulé à l'article 'conditions financières et particulières du prêt', qu'il est fixé à 4, 8284% l'an compte tenu du taux d'intérêts annuel de 4, 050%, de l'assurance décès invalidité de 0, 42% l'an, des frais de dossier de 100 euros, et de l'assurance décès invalidité facultative au taux de 0, 42% l'an ;
[E] [B] prétend que ce TEG ne comprend pas les frais de subrogation dans le privilège du vendeur et de nantissement de premier rang du fonds de commerce ;
La banque affirme que ces frais sont inclus dans les frais de dossier ;
[E] [B] n'établit pas avoir payé de sommes supplémentaires relatives à ces garanties qui n'auraient pas été prises en compte dans le calcul du TEG ;
En outre, il convient de préciser que l'article L313-1 du code de la consommation dispose que les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d'officiers ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus, lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat ;
Il ne résulte pas des pièces de la procédure que ces éléments pouvaient être connus avant la conclusion définitive du contrat de prêt, de sorte que la banque a pu appliquer un montant forfaitaire de 100 euros de frais de dossier accepté par les prêteurs et inclus dans le calcul du TEG ;
Dans ces conditions, [E] [B] n'établit pas que le TEG serait erroné ;
En conséquence, ce moyen sera rejeté, ainsi que la demande de [E] [B] en lien visant à dire que la créance ne peut porter intérêts qu'au taux légal en vigueur, le jugement déféré devant être confirmé de ce chef ;
Sur l'indemnité conventionnelle
Il résulte des décomptes établi par la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE qu'elle réclame une somme de 9102, 28 euros au titre de l'indemnité de recouvrement de 10% ;
Le contrat de prêt conclu entre les parties stipule à l'article 'clause pénale-indemnité de recouvrement' que dans le cas où pour parvenir au recouvrement de sa créance en capital, intérêts, commissions, frais et accessoires, le prêteur se trouverait obligé d'avoir recours à un mandataire de justice, ou d'exercer des poursuites ou de produire un ordre, l'emprunteur s'oblige à payer outre les dépens mis à sa charge, une indemnité forfaitaire de dix pour cent (10%) calculée sur le montant du prêt ou de ce qui resterait dû, pour le couvrir des pertes et dommages de toute sorte occasionnés par ce fait ;
Le montant réclamé par la banque au titre du prêt étant de 91 022, 28 euros, le montant de l'indemnité conventionnelle de 9 102, 28 euros ne peut être considéré comme étant manifestement excessif ;
En conséquence, [E] [B] sera débouté de sa demande visant à la réduction de l'indemnité conventionnelle réclamée par la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE, le jugement déféré devant être confirmé de ce chef ;
Sur le moyen tiré du manquement au devoir de mise en garde par la banque
Contrairement à ce qui est indiqué dans le jugement déféré [E] [B] n'est pas poursuivi en qualité de caution mais en qualité de co emprunteur du prêt du 9 juillet 2003 destiné à l'acquisition du fonds de commerce de débits de boisson exploité par son épouse ;
Le devoir de mise en garde n'est due par la banque qu'à l'égard de l'emprunteur profane, compte tenu du degré de complexité du montage financier, et s'il est établi qu'à la date de sa conclusion, le prêt était inadapté aux capacités financières de l'emprunteur ou s'il résultait un risque d'endettement important né de l'octroi du prêt ;
En l'espèce, [E] [B] a déclaré qu'il était commerçant lorsqu'il a ouvert, avec son épouse, le 13 juin 2003, un compte dans les livres la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE ;
Néanmoins, cette ouverture de compte s'est faite à la même époque que la souscription du prêt professionnel dont s'agit, en vu de l'acquisition du fonds de commerce, qui n'a commencé à être exploité que le 16 juillet 2003, tandis qu'il ne résulte pas des éléments du dossier qu'avant cette date, [E] [B] avait une expérience du monde de l'entreprise, des affaires, de la comptabilité et de la gestion d'un commerce ;
En effet, [E] [B] établit qu'il était employé qualifié de libre service par la société AUCHAN depuis le 1er février 1992, de sorte que même si le prêt accordé par la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE n'a aucun caractère complexe, [E] [B] doit être considéré comme un co emprunteur profane, le jugement déféré devant être infirmé de ce chef ;
[E] [B] reproche à la banque de ne pas s'être renseignée sur la viabilité du projet ;
Cependant, le banquier dispensateur de crédit a un devoir de non immixtion dans les affaires de ses clients, et il n'est pas établi en l'espèce que les époux [B] auraient demandé des conseils à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE à ce sujet, cette dernière n'étant intervenue qu'en qualité de prêteur de deniers ;
La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE était partie à l'acte de cession du fonds de commerce et de prêt du 9 juillet 2003, et il en ressort que les chiffres d'affaires et bénéfices réalisés par les précédent propriétaires étaient expressément mentionnés ;
Pour l'exercice allant du 16 mars 1999 au 31 janvier 2000 le chiffe d'affaires était de 90 895 euros et les bénéfices de 20 186 euros ;
Pour l'exercice suivant du 1er février 2000 au 31 janvier 2001, le chiffre d'affaires était de 109 925 euros et les bénéfices de 22 866 euros ;
La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE a également pris connaissance d'un état de synthèse comptable pour la période du 16 avril 2002 au 31 décembre 2002 qui révèle un chiffre d'affaires de 83 622 euros et une perte de 1995 euros, mais l'expert comptable précise que l'ensemble des charges inhérentes à la constitution n'a pas été étalé, qu'elles représentent 22151 euros et que leur amortissement sur 5 ans aurait entraîné un bénéfice sur l'exercice de 17 018 euros, avec un taux de marge commerciale sur le bar de 68, 10% ;
Les résultats dont la banque a eu connaissance prenaient en compte les charges financières et locatives ;
Le prêt de 120 000 euros était accordé aux époux [B], moyennant son remboursement en 84 mensualités de 1643, 02 euros en capital et intérêts ;
Compte tenu du caractère modeste du prêt accordé et des mensualités à rembourser, ainsi que des chiffres communiqués à la banque et dont les époux [B] avaient eux mêmes parfaitement connaissance, le crédit qui leur a été consenti ne présentait pas d'emblée un risque d'endettement et d'échec excédant celui inhérent à toute entreprise ;
Eu égard à ces éléments, il n'est pas davantage établi qu'il n'était pas adapté aux capacités financières des époux [B] ;
D'ailleurs, il ressort du premier exercice d'exploitation des époux [B] clos au 31 décembre 2003, qu'un bénéfice de 11 314 euros a pu être réalisé en cinq mois et demi d'exploitation ;
[E] [B] ne communique aux débats aucun élément sur les premiers impayés qu'il invoque, ni sur les causes de la procédure collective qui a concerné son épouse ;
En conséquence, [E] [B] n'établit pas que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE était tenue à un devoir de mise en garde, et qu'elle aurait commis une faute à son égard ;
Il s'ensuit que ce moyen sera rejeté, [E] [B] étant débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts à hauteur de 100 000 euros ;
Sur la créance de la banque
Les décomptes produits aux débats par la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE établissent que sa créance s'élève à 100 125, 04 euros, et qu'elle ne sollicite que les intérêts conventionnels à compter du 23 mai 2008, compte tenu de la prescription quinquennale qui lui est opposée ;
La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE justifie avoir déclaré sa créance, à titre privilégié, dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire ouverte le 6 janvier 2006 à l'encontre de [V] [B], à hauteur de la somme totale de 117 227, 89 euros au titre du prêt dont s'agit ;
Cette créance de 100 125, 04 euros présente ainsi un caractère certain, liquide et exigible ;
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné [E] [B] à payer à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE la somme de 100 125, 04 euros avec intérêts au taux conventionnel de 8, 05% mais réformé sur le point de départ des intérêts qui sera fixé au 23 mai 2013, date de l'assignation, la date du 7 mai 2013 ne correspondant à aucune interpellation suffisante au sens de l'article 1153 du code civil ;
Sur la demande de dommages-intérêts de la banque pour résistance abusive
La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE sollicite une somme de 2500 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive ;
Néanmoins, l'appréciation inexacte par [E] [B] de ses droits n'est pas en soi constitutive d'une faute, et la banque n'établit pas en quoi l'exercice par ce dernier de ses droits en défense aurait dégénéré en abus ;
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE de ce chef ;
[E] [B] qui succombe sera condamné aux dépens et débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE les frais exposés par elle en cause d'appel et non compris dans les dépens ; il lui sera alloué la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'indemnité allouée en première instance étant confirmée.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit que [E] [B] était une caution avertie, et statuant à nouveau de ce chef,
Dit que [E] [B] était un co emprunteur profane,
Dit que le prêt n'avait aucun caractère complexe,
Dit qu'il n'est établi ni que le prêt était inadapté aux capacités financières des co emprunteurs, ni qu'il résultait un risque d'endettement important né de l'octroi du prêt,
En conséquence,
Dit que la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE n'était tenu à l'égard de [E] [B] à aucun devoir de mise en garde,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté [E] [B] de ses demandes,
Confirme le jugement entrepris sur le principe de la condamnation de [E] [B] à payer à CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE la somme de 100 125, 04 euros avec intérêts au taux de 8, 05%,
L'infirme sur le point de départ des intérêts,
Fixe le point de départ des intérêts au 23 mai 2013, date de l'assignation,
Confirme le jugement entrepris sur la capitalisation des intérêts,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de 2500 euros pour résistance abusive, de ses plus amples demandes, sur les dépens et les dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile
Y ajoutant,
Déboute [E] [B] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne [E] [B] à payer à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD DE FRANCE la somme de 1500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne [E] [B] aux dépens d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT
C. DUTILLIEUXM.A PRIGENT