La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/12/2015 | FRANCE | N°14/03631

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 17 décembre 2015, 14/03631


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 17/12/2015



***





N° MINUTE :

N° RG : 14/03631



Jugement (N° )

rendu le 20 Mai 2014

par le Tribunal de Grande Instance de BOULOGNE SUR MER

REF : CPL/VC



APPELANT

Monsieur [V] [N]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 1]

Demeurant

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté par Me Eric LAFORCE, membr

e de la SELARL ERIC LAROFCE, avocat au barreau de DOUAI

Assisté de Me Michel QUIMBERT, avocat au barreau de NANTES, substitué à l'audience par Me Isabelle JARRY, avocat au barreau de NANTES





INTIMÉES

SAS SOCIÉTÉ DE ...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 17/12/2015

***

N° MINUTE :

N° RG : 14/03631

Jugement (N° )

rendu le 20 Mai 2014

par le Tribunal de Grande Instance de BOULOGNE SUR MER

REF : CPL/VC

APPELANT

Monsieur [V] [N]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 1]

Demeurant

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Eric LAFORCE, membre de la SELARL ERIC LAROFCE, avocat au barreau de DOUAI

Assisté de Me Michel QUIMBERT, avocat au barreau de NANTES, substitué à l'audience par Me Isabelle JARRY, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉES

SAS SOCIÉTÉ DE CONSTRUCTIONS DE RÉPARATIONS NAVALES ET DE MÉCANIQUE prise en la personne de ses représentants légaux

Ayant son siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Marie-Hélène LAURENT, membre de la SELARL ADEKWA, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me Etienne BOYER, avocat au barreau de PARIS, substitué à l'audience par Me Alexandre GADOT, avocat au barreau de PARIS

SA ALLIANZ, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Ayant son siège social

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Stanislas DUHAMEL, membre de la SELARL OPAL'JURIS, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

DÉBATS à l'audience publique du 02 Novembre 2015, tenue par Christian PAUL-LOUBIERE magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Claudine POPEK

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Christian PAUL-LOUBIERE, Président de chambre

Myriam CHAPEAUX, Conseiller

Sara LAMOTTE, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 17 Décembre 2015 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Monsieur Christian PAUL-LOUBIERE, Président et Claudine POPEK, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 17 avril 2015

***

FAITS ET PROCÉDURE

Par contrat en date du 15 avril 2004, M. [V] [N] a confié à la SA Société de Constructions de réparations navales et de mécaniques (la SA SOCARENAM) la construction d'un chalutier de pêche pour un prix de 915.000 € HT, étant précisé que le moteur, la propulsion et la ligne d'arbre étaient fournis par l'armateur.

La livraison de ce navire, appelé « Quentin-Grégoire », était prévue au 20 novembre 2005.

Le navire a été classé en deuxième catégorie de navigation.

Le Bureau Veritas a délivré le certificat national de franc-bord à la suite de la visite initiale du 22 mai 2006 et le navire a été livré à M. [V] [N].

A cette date, le permis de navigation a également été délivré.

Après livraison, M. [N] a signalé à la SA SOCARENAM différents dysfonctionnements.

Certains postes ont été acceptés et pris en charge par la société, tandis que d'autres ont été refusés.

Le 11 février 2009, la commission régionale de sécurité des navires des Pays de la Loire a notifié le retrait du permis de navigation du navire « Quentin-Grégoire » à compter du 11 février 2009.

Le 8 avril 2009, le juge des référés du tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer a ordonné une mesure d'expertise judiciaire, à la demande de M. [N] et au contradictoire des sociétés SOCARENAM et Compagnie d'assurances A.G.F.-M.A.T.

Cette mesure a été confiée à M. [C] [K], lequel a déposé son rapport le 10 mai 2012.

Par actes d'huissier en date des 27 et 30 juillet 2012, M. [V] [N] a respectivement assigné la Compagnie A.G.F.-M.A.T., aux droits de laquelle vient la SA ALLIANZ France, et la SA SOCARENAM devant le Tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer, aux fins d'obtenir la condamnation de la SA SOCARENAM à l'indemniser de différents préjudices.

Par jugement du 20 mai 2014, ce tribunal :

Déclare irrecevables les demandes de M. [V] [N] au titre du préjudice matériel et au titre du préjudice d'exploitation ;

Déclare recevable la demande de M. [V] [N] au titre du retard de livraison du navire « Quentin-Grégoire » ;

Condamne la S.A. Société de Constructions de réparations navales et de mécaniques (SOCARENAM) à payer à M. [V] [N] la somme de 24.150 € au titre de ce retard de livraison avec intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2012 ;

Ordonne la capitalisation des intérêts au taux légal dus sur cette somme au moins pour une année entière ;

Condamne la SA Société de Constructions de réparations navales et de mécaniques (SOCARENAM) aux dépens, à l'exception des dépens de T instance en référé et des frais d'expertise ;

Laisse à la charge de M. [V] [N] les dépens de l'instance en référé et les frais et honoraires liés à l'expertise judiciaire ;

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne l'exécution provisoire de la condamnation au titre du retard de livraison du navire à hauteur de la moitié de son montant.

M. [N] a interjeté appel de cette décision, par déclaration reçue, par voie électronique, au greffe de la cour le 11 juin 2014.

Dans le dernier état de leurs écritures récapitulatives, déposées par voie électronique le 29 décembre 2015, il demande à la cour de :

Réformer le jugement rendu par le tribunal de Grande instance de BOULOGNE SUR MER le 22 mai 2014, sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'action en responsabilité contractuelle contre SOCARENAM pour le retard à la livraison.

Déclarer l'action de M. [N] sur le fondement de l'obligation de délivrance conforme recevable et bien fondée, pour les désordres liés à l'incapacité de l'installation frigorifique à respecter les engagements contractuels, et pour les désordres liés à la stabilité du navire,

Déclarer l'action de M. [N] sur le fondement de l'obligation de garantie contractuelle recevable et bien fondée, pour les autres désordres retenus par l'expert judiciaire,

Dire y avoir lieu à majoration des pénalités contractuelles pour le retard de livraison pour la période postérieure à la revente de l'ancien navire de M. [N].

Par conséquent,

Condamner le chantier naval SOCARENAM à payer à M. [N] la somme de 26.866,78 € (Vingt-six mille huit cent soixante-six Euros et soixante-dix-huit centimes), au titre du préjudice matériel.

Condamner le chantier naval SOCARENAM à payer à M. [N] la somme de 82.309 € (Quatre-vingt-deux mille trois cent neuf Euros), au titre du retard de livraison du navire.

Condamner le chantier naval SOCARENAM à payer à M. [N] la somme de 490.364,18 € (Quatre cent quatre-vingt-dix mille trois cent soixante-quatre Euros et dix-huit centimes), au titre du préjudice d'exploitation,

Condamner le chantier naval SOCARENAM à payer à M. [N] la somme de 15.000,00 € (Quinze mille Euros), sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure civile.

Dire que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance,

Dire que ces intérêts seront capitalisés en application des dispositions de l'article 1154 du Code Civil,

Dire et juger que, dans l'hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement à intervenir, l'exécution forcée devrait être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier de justice, le montant des sommes retenues par l'huissier en application des articles 10 à 12 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996 relatif aux tarifs des huissiers, devront être supportés solidairement par les défendeurs en plus de l'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Débouter la SOCARENAM de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Condamner le chantier naval SOCARENAM aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives, déposées par voie électronique le 31 octobre 2014, la SA ALLIANZ France demande à la cour de :

DÉCLARER irrecevable l'appel de [V] [N] contre la société ALLIANZ,

Pour le surplus,

- débouter [V] [N] et la société SOCARENAM de toutes demandes qui pourraient être dirigées contre la SA ALLIANZ,

- Condamner [V] [N] à régler à la SA ALLIANZ la somme de 2.500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- Condamner [V] [N] aux entiers dépens au visa des articles 696 et 699 du Code de Procédure Civile.

Aux termes de ses écritures récapitulatives, déposées par voie électronique le 3 novembre 2014, la SOCARENAM demande à la cour de :

CONFIRMER le jugement rendu au titre du « préjudice matériel et au titre du préjudice d'exploitation ».

INFIRMER le jugement au titre du « préjudice du retard de livraison du navire ».

Subsidiairement, si la Cour devait déclarer l'appelant recevable :

DÉBOUTER M. [N] de l'ensemble de ses demandes fins et Conclusions dirigées à rencontre du chantier SOCARENAM.

Plus Subsidiairement :

ENTÉRINER le rapport [K] en ce qu'il estime que la responsabilité du chantier ne peut excéder trois mois d'immobilisation soit la somme total de 115.652C comprenant en sus le montant des frais de remise en état du navire, et pour le surplus débouter le demandeur de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions dirigées à l'encontre du chantier SOCARENAM.

Voir débouter le demandeur de sa demande d'article 700 du code de procédure civile.

Voir condamner le même à la somme de 5000€ au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 17 avril 2015.

SUR CE,

'Sur la qualification du contrat litigieux et ses effets sur la demande de M. [N] :

Attendu que M. [N] soutient, en appel, que les premiers juges ont, à tort, qualifié le contrat de vente du navire litigieux comme une vente à l'unité et à livrer ou contrat d'entreprise et décidé que le défaut de conformité constituait un vice caché, puis refusé de faire la distinction entre les désordres affectant la qualité de la chose et constituant des vices cachés, soumis à la prescription d'un an à compter de la découverte du vice et les désordres affectant la conformité de la chose avec la commande, soumis à la prescription des actions en responsabilité civile contractuelle ;

Que selon lui, le constructeur étant dans les deux cas, débiteur d'une obligation de garantie et d'une obligation de conformité, le tribunal aurait dû examiner, pour chaque désordre, si le chantier constructeur avait satisfait à l'une ou l'autre des obligations et si l'armateur avait agi dans le délai approprié ;

Attendu que la qualification du contrat influe sur le régime applicable aux relations entre les parties, notamment sur la recevabilité de l'action, au regard de la prescription, et sur le fondement juridique des demandes ;

Qu'ainsi la vente d'un navire de série relève du régime de la vente au sens des articles 1602 et suivants du Code civil et de la garantie des vices cachés, prévue par les dispositions de l'article 1648 du même code, soumise à la prescription de deux ans ;

Que par ailleurs, la vente d'un navire à l'unité en est exclue, relevant de la qualification du contrat d'entreprise, soumise aux dispositions des articles L 5113-4 et L 5113-5 du code des Transports et à la prescription d'un an ;

Que dans les deux cas les textes précisent que le délai de prescription court à compter de la découverte du vice ;

Que la qualification du contrat ne peut s'analyser qu'au regard du contenu des obligations de chaque partie, qui en définissent le contenu dans sa globalité, et non élément par élément ;

Attendu en l'espèce, qu'il ressort des éléments versés aux débats que par contrat du 15 avril 2004, M. [N] a confié à la SA SOCARENAM la construction d'un chalutier de pêche pour un prix de 915.000 € H.T ;

Que ce contrat s'intitule : « contrat de construction d'un chalutier pêche arrière de 18,50 mètres suivant plan d'ensemble n° 175 A V-1 », sans référence à un catalogue ;

Que selon l'expert judiciaire, la SA SOCARENAM a construit deux navires identiques, pour deux armateurs différents du Croisic, sans qu'il soit indiqué ni prétendu que d'autres navires auraient été construits selon ce même plan ;

Que l'existence d'une prestation sur-mesure apparaît dans une clause du contrat prévoyant la possibilité pour l'acheteur « de demander des modifications ou additions du bateau, à condition qu'il donne ses instructions par écrit » ;

Que le contrat mentionne que l'armateur fournit l'équipement électronique, l'ensemble propulsif complet, l'équipement hydraulique treuil-enrouleur et l'appareil à gouverner, à charge pour la SA SOCARENAM d'installer ces deux derniers éléments ;

Que le rapport d'expertise judiciaire fait état d'un avenant entre les parties, ayant pour objet de modifier le plan du navire afin de permettre l'installation de deux viviers provenant de l'ancien navire de M. [N] pour le stockage de langoustines ;

Que ces éléments, relevant des motifs pertinents du jugement déféré que la cour adopte, établissent la spécificité de la commande confiée à un chantier naval et le caractère unique de son objet : le navire ''QUENTIN GREGOIRE'', qui n'est en rien issu d'un catalogue obéissant à une logique de production en série ;

Qu'ainsi, compte tenu de la spécificité de la commande, la qualification de contrat de vente doit être écartée et celle de contrat de construction d'un navire à livrer retenue ;

Qu'il conviendra de faire application du régime propre au contrat de construction navale prévu par le dispositions susvisées du code des transports et d'exclure les dispositions relatives au contrat de vente des articles 1604 et suivants et 1641 et suivants du code civil ;

Attendu, par ailleurs, qu'il résulte du rapport d'expertise judiciaire que du fait des problèmes de tirant d'eau et de stabilité qui l'affectaient et qui ont impliqué le retrait du permis de navigation par l'administration maritime, le navire était impropre à sa destination ;

Qu'ainsi ces défauts qui le rendaient inapte à l'usage auquel il était destiné constituaient des vices cachés excluant toute action sur le fondement des articles 1604 et suivants du Code civil au titre du simple défaut de conformité de la chose livrée et du délai de prescription attaché à une action fondée sur la responsabilité contractuelle de droit commun ;

Attendu en conséquence que le délai de prescription pour vices cachés est régi par l'article L 5113-5 du code des transports, relatif au contrat de construction navale, en ces termes : « l'action en garantie contre le constructeur se prescrit par un an. Ce délai ne commence à courir, en ce qui concerne le vice caché, que de sa découverte. » ;

Que la découverte du vice doit s'apprécier ''in concreto'', au regard de la nature du défaut et de la compétence de celui qui le constate, pour en fixer la date ;

Qu'en l'espèce, la livraison du navire est intervenue le 22 mai 2006 et l'assignation en référé ayant été délivrée le 13 mars 2009, il convient de préciser, pour chaque désordre, la date de découverte du vice afin de dire recevable ou non la demande de M. [N] ;

Qu'il sera ajouté que la cour, comme les premiers juges, tiendra compte, afin de déterminer le point de départ du délai de prescription, de ce que ce dernier, armateur professionnel de navires de pêche, était susceptible de relever chacun des défauts sans dépendre des investigations poussées de l'expert judiciaire, les dispositions de l'article 2239 du Code civil, sur la suspension du délai de prescription consécutive à la mesure d'expertise, n'ayant pas alors à s'appliquer ;

'Sur les demandes présentées par M. [N] au titre des désordres affectant le navire :

Sur le défaut de stabilité du navire :

Attendu qu'il apparaît, au vu des pièces versées aux débats, essentiellement une lettre du Centre de sécurité des navires des Pays de la Loire, de la Direction Régionale des Affaires Maritimes des Pays de la Loire, en date du 18 mai 2007, que M [N] était informé du fait que d'une part le certificat initial défini par la chantier comportait des erreurs, et surtout que l'armateur devait rapidement régulariser la situation vis à vis du service de sécurité des navires, le permis de navigation en dépendant ;

Qu'il résulte de ce courrier, dont M. [N] ne conteste pas avoir eu lecture à sa date de réception, que ce dernier a eu une parfaite connaissance du vice lié au poids du navire, entraînant un défaut de stabilité, dès le mois de mai 2007 ;

Qu'adoptant les motifs du jugement déféré, il y a lieu de le confirmer en ce qu'il a dite, irrecevable, la demande formée par M. [N] au titre du défaut de stabilité, puisque prescrite depuis le mois de mai 2008 ;

Sur les autres désordres :

Attendu que les motifs pertinents des premiers juges que la cour adopte une fois confrontés aux éléments du dossier produits contradictoirement, permettent de retenir que le désordre lié aux alarmes intempestives, qui a été signalé dès le rapport de mer du 29 mai 2006, découvert à cette date, alors que l'expert judiciaire, intervenu des années plus tard, n'a rien pu constater, aurait dû faire l'objet d'une action bien avant l'assignation en référé du 13 mars 2009, le délai d'un an étant expiré depuis le mois de mai 2006 ;

Qu'il en sera tout autant des désordres liés aux alarmes intempestives, signalées dès le rapport de mer du 29 mai 2006 ;

Que ces demandes faites au titre de ces vices cachés seront aussi déclarées irrecevables par la cour

Attendu qu'il en est de même du défaut affectant la pompe d'injection, révélé sans équivoque par un rapport de mer du 9 octobre 2006, alors que, selon le rapport d'expertise judiciaire, ladite pompe a été changée dans le mois, prouvant ainsi la parfaite connaissance du désordre à cette date ;

Que sa découverte qui aurait permis une action bien avant le 13 mars 2009, rend la demande de M. [N], aux fins de remboursement de la franchise de 2.000 € restée à sa charge, irrecevable ;

Attendu que la prétention portant sur le défaut de fonctionnement de l'installation froide de la cale à poissons et le fonctionnement défectueux des viviers, apparaît tout aussi irrecevable, alors que, selon le rapport d'expertise judiciaire, il était causé par l'existence d'un compresseur frigorifique ne permettant pas une descente en température assez rapide et que, selon la lettre versé aux débats par M. [N] et adressée par la SA IMEF à la SA SOCARENAM le 16 juin 2006, ce compresseur a été remplacé dès l'été 2006 ;

Attendu que concernant la demande relative à la pompe d'assèchement, il ressort toujours des pièces du litige que la SA SOCARENAM est intervenue en mars 2007 pour remplacer cette pompe et que, sur demande de M. [N], la nouvelle pompe a été en janvier 2008

Que cette demande présentée en référé seulement le 13 mars 2009 est irrecevable ;

Attendu que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il déclaré irrecevable l'ensemble des demandes de dommages et intérêts relatives aux vices cachés, au titre du préjudice matériel et au titre du préjudice d'exploitation ;

'La demande au titre du retard de livraison.

Sur sa recevabilité :

Attendu que la SA SOCARENAM prétend que la demande de M. [N] à lui payer, une somme complémentaire de 114.183,75 € au titre du retard dans la livraison du navire, formée, pour la première fois le 30 juillet 2012 par assignation au fond, sera déclarée irrecevable et le jugement de première instance réformé

Que selon lui, le navire ayant été livré le 23 mai 2006 et M. [N] n'ayant assigné sur le problème du retard de livraison que le 30 juillet 2012, soit plus de 6 ans après la livraison du navire, l'action est prescrite faute d'interruption de la prescription dans le délai de 5 ans, imparti par l'article L 110-4 du code de commerce applicable dès le 17 juin 2008 ;

Mais attendu que l'article 26 de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 précise les modalités de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle :

« I. Les dispositions de la présente loi qui allongent la durée d'une prescription s'appliquent lorsque le délai de prescription n'était pas expiré à la date de son entrée en vigueur. Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé.

Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.(') »

Qu'ainsi, dans l'hypothèse où l'application de la loi nouvelle conduit à une réduction de la prescription en cours, la loi nouvelle s'applique aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ;

Attendu en l'espèce, qu'au moment de la livraison du navire, intervenue le 22 mai 2006, une prescription de dix ans était applicable aux obligations entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants ;

Que la loi du 17 juin 2008, modifiant l'article L 110-4 précité, qui a réduit à cinq ans ce délai de prescription, prévoit, à l'article 26 II, que ses dispositions s'appliquent aux prescriptions mais sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, ce, afin de ne pas pénaliser le bénéficiaire de la prescription plus longue, toujours en cours sous l'empire de la loi ancienne.

Qu'en application de ces principes à l'espèce, si l'assignation des 27 et 30 juillet 2012 délivrée par M. [N] évoquait pour la première fois une demande au titre du retard de livraison, le délai de prescription de l'article L 110-4 du Code de commerce, initialement de dix ans, n'avait pas expiré ;

Qu'il s'ensuit que cette demande sera déclarée recevable et le jugement confirmé ;

Sur le fond de la demande :

Attendu qu'il ressort des pièces versées aux débats et des motifs des premiers juges que la cour adopte, que le contrat du 15 avril 2004, stipule une livraison du navire au 20 novembre 2005 et une pénalité de 150 € par jour de retard, passé un délai de plus de 21 jours, plafonnée à 5% du prix du navire ;

Que la livraison effective n'est intervenue que le 22 mai 2006 ;

Que si la SA SOCARENAM soutient, sans toutefois rapporter la preuve de son allégation, que ce retard de livraison serait imputable à l'armateur qui aurait tardé à lui déposer le moteur, la propulsion, la ligne d'arbre et les équipements hydrauliques et électroniques qu'il devait fournir, aucun délai n'était prévu au contrat pour leur fourniture par M. [N] ;

Que se fondant sur les clauses liant les parties au titre du retard de livraison, pour la période courant à compter du 12 décembre 2005, jusqu'au 21 mai 2006, soit pendant 161 jours, l'indemnité contractuelle est due à hauteur de : 150 € x 161 jours = 24.150 €, dont la SA SOCARENAM est redevable ;

Attendu que M. [N], se fondant sur les dispositions de l'article 1152 du code civil, qui autorisent le juge, même d'office, à augmenter la peine convenue, si elle est manifestement dérisoire, fait valoir que l'indemnité contractuelle est plus de onze fois inférieure au préjudice réellement subi par lui ;

Qu'il sollicite - outre la somme de 150 € par jour de retard du 12 décembre 2005 au 15 avril 2006, date de la vente de son ancien navire, soit pendant 125 jours de pénalité contractuelle -, une indemnisation sur la base de 2 120,75 €, par jour de mer perdu, du 15 avril 2006 au 31 mai 2006 (en tenant compte des huit jours nécessaires pour la reprise d'exploitation avec le nouveau navire) ;

Qu'il produit au soutien de cette demande une estimation de son cabinet de comptabilité, en date du 20 juillet 2012, soit :

- du 11 décembre 2005 au 15 avril 2006 :150 x 125 =18 750 €

- du 16 avril 2006 au 31 mai 2006 : 2 120,75 x [(20/30) x 45 =63 559 €

pour un total de pénalités au titre du retard de livraison du navire de82 309 €

Mais attendu qu'adoptant les motifs du jugement qui relèvent notamment que M. [N] est mal fondé à invoquer une perte d'exploitation, alors que son navire n'avait pas encore été livré, de sorte qu'il n'en résultait qu'une perte de chance de réaliser un certain chiffre d'affaire, il sera retenu que le montant, contractuellement prévu et accepté par M. [N] et la SA SOCARENAM au titre de la clause pénale, n'apparaît pas manifestement dérisoire au regard du préjudice réellement subi par M. [N] ;

Que la condamnation de la SA SOCARENAM à payer la somme de 24.150 € à M. [N] sera confirmée ;

'Sur les frais irrépétibles de procédure et les dépens :

Attendu que ni l'équité ou la situation économique des parties ni sens de l'arrêt ne commandent de faire droit aux demandes, formées par les trois parties, aux fins d'entendre condamnation à payer une somme quelconque sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que la SA SOCARENAM, partie perdante, sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Condamne la SA SOCARENAM aux dépens d'appel ;

Déboute les parties de toutes demandes, fins ou prétentions, plus amples ou contraires.

Le GreffierLe Président,

C. POPEKC. PAUL-LOUBIERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 14/03631
Date de la décision : 17/12/2015

Références :

Cour d'appel de Douai 1B, arrêt n°14/03631 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-12-17;14.03631 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award