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02/04/2015 | FRANCE | N°13/04935

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 2, 02 avril 2015, 13/04935


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 2



ARRÊT DU 02/04/2015



***



N° de MINUTE :15/

N° RG : 13/04935



Jugement (N° 2011002358)

rendu le 17 Avril 2013

par le Tribunal de Commerce de DOUAI



REF : SB/KH





APPELANTE



Société QUICK CUISINE AG société de droit suisse

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]





Représentée par Me Franço

is DELEFORGE, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Maître GUERRINI Jean-Christophe, avocat au barreau de PARIS







INTIMÉE



SARL DYAD

ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 2]





Représentée par Me Guy DRAGON, avo...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 02/04/2015

***

N° de MINUTE :15/

N° RG : 13/04935

Jugement (N° 2011002358)

rendu le 17 Avril 2013

par le Tribunal de Commerce de DOUAI

REF : SB/KH

APPELANTE

Société QUICK CUISINE AG société de droit suisse

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me François DELEFORGE, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Maître GUERRINI Jean-Christophe, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

SARL DYAD

ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Guy DRAGON, avocat au barreau de DOUAI

DÉBATS à l'audience publique du 03 Février 2015 tenue par Stéphanie BARBOT magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marguerite-Marie HAINAUT

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pascale FONTAINE, Président de chambre

Stéphanie BARBOT, Conseiller

Pascale METTEAU, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 02 Avril 2015 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pascale FONTAINE, Président et Marguerite-Marie HAINAUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 20 janvier 2015

***

La société QUICK CUISINE est notamment spécialisée dans la fabrication et la vente de plats cuisinés auto-chauffants prêts à consommer. La société DYAD a pour activité le conditionnement à façon.

Le 16 août 2006, ces sociétés ont conclu une convention aux termes de laquelle DYAD s'engageait à assembler plusieurs éléments destinés à la fabrication de plats auto-chauffants, via une réaction chimique entre des composants (eau et granulés de chaux).

Au premier trimestre 2007, des dysfonctionnements sont apparus sur les produits.

Selon un courrier du 15 mai 2007, QUICK CUISINE a invoqué un non-respect des prescriptions techniques relatives à la colle pour expliquer ces problèmes, ce que DYAD a réfuté par courrier du 1er juin suivant.

Après réalisation de nouveaux tests, le 25 juin 2007, QUICK CUISINE a imputé à DYAD un manquement à son obligation de résultat.

Parallèlement, QUICK CUISINE n'a pas honoré des factures émises par DYAD.

C'est dans ces conditions que, suivant courriel du 20 juin 2007, DYAD a informé sa coconctractante de ce qu'elle mettait un terme au contrat à compter du 1er janvier 2008, en invoquant des impayés et une dégradation des relations entre les deux sociétés.

Par acte du 17 juin 2008, QUICK CUISINE a fait assigner DYAD en indemnisation de ses préjudices.

Aux termes d'un jugement rendu le 17 avril 2013, le tribunal de commerce de DOUAI a :

jugé que la responsabilité de DYAD ne pouvait être engagée,

jugé que QUICK CUISINE n'apportait pas la preuve de son préjudice,

débouté QUICK CUISINE de l'intégralité de ses demandes,

condamné QUICK CUISINE à payer à DYAD la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné QUICK CUISINE aux dépens.

QUICK CUISINE a relevé appel de ce jugement le 16 août 2013.

PRETENTIONS DES PARTIES :

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 2 octobre 2014, QUICK CUISINE demande à la cour de :

* Infirmer intégralement le jugement entrepris, et statuant à nouveau ;

* Condamner DYAD à lui payer les sommes suivantes :

- 366.189,24 euros en réparation de son préjudice commercial direct,

- 50.000 euros en réparation de son préjudice commercial « indirect »,

- 30.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* Débouter DYAD de toutes ses demandes,

* Condamner DYAD aux dépens de première instance et d'appel.

Exposant d'abord les faits, QUICK CUISINE indique en particulier que :

en sa qualité de professionnelle de l'emballage, DYAD était contractuellement tenue (en vertu du contrat et d'un cahier des charges signé le 7 mars 2006) d'une obligation principale d'assemblage conforme au cahier des charges et de fournir un produit commercialisable, ainsi que d'obligations complémentaires de conseil et d'assistance ; il s'agissait d'obligations de résultat ;

les 1ères livraisons n'ont pas rencontré d'importantes anomalies, mais au dernier semestre 2006, DYAD a changé de fournisseur pour approvisionner auprès de la société OPTIPACK qui a les mêmes associés, et à compter de février 2007, des dysfonctionnements sont apparus ;

le 20 juin 2007, DYAD a rompu unilatéralement le contrat en invoquant notamment des factures impayées, mais le montant de l'arriéré allégué est erroné ;

ce n'est que le 21 juin 2007 que DYAD l'a avertie des risques de non-conformité ou de défectuosité résultant des conditions de sa prestation.

Ensuite, sur le fond, QUICK CUISINE fait valoir, en premier lieu, que DYAD, qui est une professionnelle avertie, a manqué à son obligation de fournir un produit commercialisable conforme au cahier des charges, tel que prévu au contrat (article 11) ; qu'en particulier :

s'agissant d'une obligation de résultat, la seule constatation des dysfonctionnements engage la responsabilité de DYAD qui ne peut s'exonérer qu'en démontrant qu'elle a été dans l'impossibilité d'exécuter sa prestation que par suite d'une cause étrangère relevant de la force majeure ' ce qu'elle ne parvient pas à établir et que le tribunal n'a pas caractérisé ;

le cahier des charges existait et DYAD en a bien été destinataire ; si celle-ci estimait qu'il était incomplet pour lui permettre de réaliser sa mission, elle aurait dû le signaler au plus tard lors de la signature du contrat ;

en outre, aux termes du contrat (article 4.1 alinéa 2), DYAD devait veiller scrupuleusement à la bonne conformité des produits à livrer ;

les moyens retenus par le tribunal pour exonérer DYAD sont « purement artificiels », puisqu'il a tenu pour acquises des hypothèses non démontrées, alors qu'il résulte d'un procès-verbal de constat du 30 novembre 2010 que le procédé décrit dans le cahier des charges permet d'obtenir un produit en état de fonctionner (cf sa pièce n°42) ;

dans ses conclusions, DYAD reconnaît tacitement l'absence de problème avant l'intervention de son nouveau fournisseur, OPTIPACK ;

le constat d'huissier opposé par DYAD (sa pièce n°56), non fiable, n'est pas probant ;

subsidiairement, DYAD, qui admet implicitement que la simple modification de la poche d'eau suffit à obtenir un produit opérationnel, a engagé sa responsabilité en vertu de l'article 4.6 du contrat qui l'obligeait à apporter des améliorations au produit.

En second lieu, QUICK CUISINE soutient que DYAD a manqué à son obligation contractuelle de conseil et d'assistance (article 4.2, 4.3 et 4.6), alors que, selon l'article 8 du contrat, il s'agit d'une obligation de résultat ; qu'en effet, elle n'a pas attiré l'attention de sa coconctractante sur les risques de non-conformité ou de défectuosité susceptibles de découler de l'exécution de sa prestation, ni n'a entrepris de diligences pour tenter d'apporter une amélioration aux produits, malgré le non-fonctionnement de ceux-ci.

En troisième lieu, QUICK CUISINE affirme que le contrat a été rompu abusivement ; qu'en effet, en l'absence de commission d'une faute grave, ce contrat à durée déterminée (5 ans) ne pouvait être rompu unilatéralement par DYAD ; qu'ainsi, non seulement le tribunal a pris en compte des factures non dues à la date de la rupture du contrat, mais de plus, elle-même n'a commis aucune faute en ne payant pas les factures dès lors que DYAD n'exécutait pas ses obligations ; qu'en réalité, tous les manquements graves sont imputables à DYAD.

En quatrième et dernier lieu, QUICK CUISINE explicite son préjudice, constitué :

des factures impayées de ses clients du fait de la défectuosité des produits, ainsi que des frais de transport, des éléments composant les produits et des marchandises endommagées, pour un montant total de 366 189,24 euros,

et d'un préjudice d'image évalué 50 000 euros.

***

Selon ses conclusions récapitulatives signifiées le 30 septembre 2014, DYAD demande à la cour de :

Vu les articles 1134, 1147, 1184, 1787 et suivants du code civil,

* Constater que sa responsabilité ne peut être engagée que sur la base d'une obligation de moyens et que, dans tous les cas, celle-ci n'a commis aucun manquement à ses obligations, qu'elles soient de moyens ou de résultats,

* A titre infiniment subsidiaire : constater que QUICK CUISINE n'apporte aucune preuve relative à son préjudice,

* Confirmer en conséquence en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

* Y ajoutant, condamner QUICK CUISINE à payer la somme de 15 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

DYAD fait d'abord valoir que le tribunal a parfaitement analysé les relations contractuelles en rappelant que, conformément aux dispositions de l'article 8 du contrat, elle était contractuellement tenue à une obligation de résultat « pour la part des travaux lui incombant selon les spécificités techniques définies par QUICK CUISINE » ; que l'existence du cahier des charges n'est pas démontrée, non plus que sa transmission par QUICK CUISINE avant le 15 mai 2007 ; qu'au surplus, celui communiqué est manifestement antidaté et sans valeur, ainsi que l'a justement considéré le tribunal, dès lors qu'il s'agit d'une simple liste descriptive des opérations d'assemblage et qu'il n'est pas signé des deux parties.

Ensuite, à titre principal, elle conteste avoir engagé sa responsabilité, soutenant que :

* d'une part, sa responsabilité est limitée à l'exécution de sa mission qui, dans le cadre d'un contrat de travail à façon, consiste à réaliser des emballages conformément aux instructions fournies par son donneur d'ordre, et non à garantir la fiabilité d'un procédé technique qu'elle n'a pas élaboré ;

* d'autre part, si l'existence d'une obligation de résultat dispense le demandeur d'apporter la preuve des manquements de son cocontractant, en revanche, celui-ci peut s'exonérer en démontrant qu'il n'a pas commis de faute dans l'exercice de sa prestation ; or, s'il est exact qu'une proportion importante de produits a connu des problèmes, cependant, ces défauts résultent de facteurs totalement étrangers à sa mission qu'elle a exécutée sans aucun manquement ; en effet, elle rapporte la preuve de ce que :

- compte tenu des manquements graves de QUICK CUISINE à ses obligations contractuelles, elle n'était tenue qu'à une obligation de moyens ; en effet, selon une jurisprudence constante, « un contractant tenu à une obligation de résultat ne peut se voir opposer qu'une obligation de moyens si l'autre partie a elle-même commis des manquements graves à ses obligations contractuelles » ; le contrat en cause étant synallagmatique, les obligations réciproques des parties sont interdépendantes, de sorte que les obstacles rencontrés par le débiteur peuvent être conventionnellement assimilés à la force majeure (article 1148 du code civil) ; en l'espèce, QUICK CUISINE, qui devait contractuellement fournir les composants (notamment le système de production) a commis un manquement grave et se trouve donc mal venue à invoquer des problèmes liés à la colle ou au système de collage ;

- c'est l'absence de fiabilité du procédé technique développé par QUICK CUISINE qui est à l'origine des dysfonctionnements ; elle-même ne saurait donc en être tenue pour responsable, d'autant qu'elle a régulièrement avisé sa cocontractante des dysfonctionnements ; de nombreuses causes peuvent expliquer ceux-ci, montrant que le procédé, non breveté, n'était pas finalisé et abouti ; ces causes sont indépendantes de la qualité de la fabrication des emballages, ainsi que le démontrent, d'une part, les propres aveux de QUICK CUISINE (cf notamment son courrier du 19 janvier 2007, pièce n°41), d'autre part, le fait que le fournisseur précédent (BOCAGE) et son propre successeur (CONDITECH) ont rencontré des problèmes identiques ; de surcroît, en cours de contrat, QUICK CUISINE n'a cessé de modifier son procédé sans analyse technique préalable, aggravant ainsi les risques de non-fonctionnement ; peu importe qu'aucune difficulté ne soit survenue avec le nouveau prestataire de QUICK CUISINE (VALDIS), dès lors que celle-là a modifié son procédé de fabrication ;

- elle a respecté les consignes de fabrication communiquées par QUICK CUISINE ; non seulement aucun cahier des charges contenant les spécifications techniques ne lui a été transmis, mais en outre ce n'est manifestement pas la colle qui est responsable des dysfonctionnements mais le procédé lui-même ;

- elle n'a pas failli à son obligation accessoire de conseil ; ainsi, elle a régulièrement alerté QUICK CUISINE du non-fonctionnement de ses produits et attiré son attention sur des imprécisions ou des difficultés, mais QUICK CUISINE n'en a tenu aucun compte ;

- la rupture du contrat est légitime puisque motivée par une faute grave de QUICK CUISINE ; ce contrat, à durée indéterminée, pouvait être rompu en cas de faute grave, ce qui est manifestement le cas en l'espèce compte tenu de l'importance des factures impayées et de la disparition du lien de confiance entre les parties.

A titre subsidiaire, DYAD conteste le préjudice invoqué, objectant notamment que :

si la cour retenait la rupture abusive du contrat, celle-ci ne saurait justifier la réparation du préjudice commercial allégué qui, lié aux factures impayées, n'est pas en lien avec cette rupture  ;

il n'est pas établi que les factures de vente produites par QUICK CUISINE seraient restées impayées ;

le préjudice d'image n'est pas démontré et, au surplus ne lui est pas imputable.

Enfin, en réplique aux dernières conclusions adverses, DYAD indique en particulier que :

le cahier des charges n'a pas été signé à la date indiquée par QUICK CUISINE ;

elle n'a jamais eu en sa possession la colle dont parle QUICK CUISINE ;

QUICK CUISINE avoue elle-même ignorer la cause du dysfonctionnement ;

dès l'origine (juin 2006), les éléments à assembler ont été fournis par l'intermédiaire d'OPTIPACK laquelle n'est donc pas intervenue seulement à compter du dernier trimestre 2006 ;

non seulement QUICK CUISINE ne rapporte pas la preuve d'une non-conformité entre le produit livré et l'étalon, mais en outre, l'existence de ce dernier reste à démontrer.

SUR CE,

1°/ Sur les fautes alléguées à l'encontre de DYAD

Attendu qu'à titre liminaire, la cour observe que parmi les trois griefs formulés par QUICK CUISINE à l'encontre de DYAD, celui tenant à une prétendue rupture abusive du contrat est dépourvu de tout lien de causalité entre les préjudices allégués et la faute invoquée à ce titre ; qu'en effet, les préjudices dont excipe QUICK CUISINE tiennent :

premièrement, à des factures impayées à raison du caractère défectueux des produits assemblés par DYAD, à des frais de transport de composants et à des produits détériorés,

et deuxièmement, à un préjudice d'image résultant, d'une part, d'une perte de clientèle à raison des dysfonctionnements allégués, d'autre part, de ce que ces anomalies l'auraient empêchée de conquérir une nouvelle clientèle (cf pages 12, 13 et 14 de ses écritures) ;

Qu'en conséquence, il n'y a pas lieu d'examiner le bien-fondé de la faute alléguée au titre de la rupture unilatérale du contrat par DYAD ;

a) Sur le contenu du contrat :

Attendu que le contrat régularisé en l'espèce, intitulé Conditions générales d'achat de prestation de conditionnement à façon : « Copacking », avait pour objet d'organiser les relations des parties concernant le montage complet de l'ensemble des plats auto-chauffants commercialisés par QUICK CUISINE, précisant que DYAD s'engageait à réaliser ses prestations dans les règles de l'art ;

Qu'aux termes de l'article 1er :

Le conditionnement à façon se définit comme l'activité qui consiste à assembler sous un même emballage un ou plusieurs produits sur mesure et conformément aux spécificités techniques et aux modalités de réception convenues entre les parties.

Que l'article 4 relatif aux obligations de DYAD stipulait en particulier :

4.1 - DYAD est tenue :

(')

-$gt; de veiller scrupuleusement à la bonne conformité des produits à livrer avec l'étalon (proto) approuvé par QUICK CUISINE et des spécificités techniques.

4.2 ' DYAD a l'obligation, en apportant son concours à QUICK CUISINE de porter à sa connaissance les risques de non-conformité ou de défectuosité susceptibles de découler des conditions de la prestation qui lui sont imposées par QUICK CUISINE et plus généralement en sa qualité de professionnel.

(')

4.6 DYAD s'engage à tout mettre en 'uvre pour « porter » (sic) des améliorations sur le produit. Recherche de nouveaux matériaux, conception'

Que l'article 8 intitulé « responsabilité » précisait que :

DYAD exécutera ses prestations selon les règles de l'art et est soumis à une obligation de résultat dans l'exécution de sa mission.

Attendu qu'aux termes de son offre de prix du 22 novembre 2005, DYAD a précisément listé les travaux de conditionnement mis à sa charge (cf sa pièce n°24) :

- insertion d'une barquette en aluminium dans une barquette de type polystyrène,

- positionnement d'une « griffe » plastique,

- pose de colle du fond de la barquette aluminium « par le biais de votre système automatique »,

- positionnement sur ces points de colle d'une poche d'eau (position sur la tranche),

- dosage automatique « par votre système » des granulés de chaux,

- pose de colle en automatique « par votre système », sur le pourtour intérieur de la barquette,

- pose de colle par nos soins sur le pourtour du plat,

- assemblage de la barquette et du plat,

- mise sous étui à fond automatique de l'ensemble ainsi constitué,

- marquage jet d'encre de la DLUO et du N° de lot sur l'étui,

- reconditionnement en caisse américaine de 6 étuis,

- étuis, caisses américaines, chaux fournis par vos soins ;

Que par courriel du 27 février 2006, QUICK CUISINE a donné à DYAD la liste des pièces détachées et le nom de fournisseurs (cf pièce n°32 de DYAD) ;

Attendu que s'il est exact qu'en cas d'obligation de résultat, il suffit au créancier de prouver l'inexécution du fait matériel mis à la charge du débiteur, toutefois cela suppose, d'abord, que cette inexécution soit en lien avec la prestation contractuellement promise ; qu'ensuite, dans le cadre d'un contrat tel que celui en cause, l'obligation de résultat n'est pas absolue en ce qu'elle ne pose pas une présomption irréfragable de responsabilité, le débiteur étant fondé à prouver que la défaillance reprochée est imputable à une cause étrangère ;

Attendu qu'au présent cas, la cour relève que le contrat ne met à la charge de DYAD - qui n'est qu'une professionnelle de l'emballage, et non un bureau d'études ni le concepteur du produit ' aucune obligation de recherches, de développement ou de conception du produit en cause ; que la cour en déduit que l'obligation de résultat qui pesait sur DYAD en vertu de l'article 8 visait uniquement sa mission d'assemblage des différents composants précités, et non l'obligation de conseil de l'article 4.6 qui, par nature, ne peut jamais être que de moyens et ne peut en tout état de cause porter que dans un domaine ressortissant à la compétence du cocontractant ' en l'occurrence, l'emballage ;

Attendu que, si l'article 4.3 du contrat fait incidemment référence à un cahier des charges, toutefois, cette pièce n'a pas été annexée au contrat ; que par ailleurs, QUICK CUISINE affirme (page 3 de ses écritures) sans aucunement l'établir, d'une part, que ce cahier des charges aurait été signé par DYAD le 7 mars 2006, d'autre part, que ce document aurait été adressé à sa cocontractante le 16 juin 2006 ;

Que dans ces conditions, il ne saurait être fait référence à ce document pour apprécier les éventuels manquements de DYAD à ses obligations contractuelles ;

b) Sur le déroulement de la relation contractuelle :

Attendu, en premier lieu, qu'il ressort des propres écritures de QUICK CUISINE que les dysfonctionnements sur les produits sont apparus en février 2007 seulement, après plusieurs productions satisfaisantes ;

Que dès à présent, il importe de souligner que QUICK CUISINE procède par allégations nullement étayées lorsqu'elle affirme que ces dysfonctionnements se sont révélés à la suite du changement de fournisseur de DYAD (OPTIPACK) ;

Qu'ensuite, eu égard à la date d'apparition des difficultés, il s'en déduit que DYAD disposait, dès la conclusion du contrat, des éléments techniques propres à lui permettre de remplir pleinement sa mission, et ce en dépit de l'absence de cahier des charges ; qu'en conséquence :

d'une part, on ne saurait reprocher à DYAD d'avoir accepté la mission sans exiger la remise préalable d'un cahier des charges ;

d'autre part, c'est en vain que QUICK CUISINE affirme que le problème aurait pour origine le type de colle utilisée par DYAD ou les modalités d'utilisation de cette colle, alors qu'il n'est pas établi que ce prestataire aurait changé de colle ou les modalités de pose de cette colle entre le début du contrat et la date d'apparition des premières difficultés ;

Attendu, en second lieu, qu'en informant DYAD de dysfonctionnements affectant des produits expédiés en Suède dans un courriel du 20 février 2007 (cf pièce 24 de l'appelante), QUICK CUISINE a elle-même évoqué la possibilité que cela soit lié à l'humidité et au froid auxquels les produits ont été soumis durant leur transport ;

Qu'à cet égard, il importe de souligner que, selon les pièces fournies par DYAD, QUICK CUISINE avait parfaitement conscience de la sensibilité du produit aux conditions de transport, et ce non seulement avant l'apparition des dysfonctionnements mais dès l'origine du contrat, dès lors que :

dans un courriel du 30 juin 2006, elle évoquait des plats « déjà activés » pendant le transport ou les opérations de chargement/déchargement, dans le cadre de ses relations avec son précédent prestataire BOCAGE (cf pièce n°68 de DYAD),

et aux termes d'un second courriel du 19 janvier 2007, elle indiquait : « (') Comme vous le savez, les produits qui sont fabriqués aujourd'hui sont parfaits mais ça peut arriver qu'ils soient mal traités pendant le voyage et que leur bon fonctionnement soit affecté. » (cf pièce n° 40 de DYAD) ;

Qu'en outre, dans un courrier du 21 mai 2007, QUICK CUISINE a indiqué : « nous savons que la poche d'eau se gèle par des températures en dessous de zéro. Il serait par conséquent très utile d'intégrer un peu d'antigel pour prévenir cette réaction. D'ailleurs même, pourquoi attendre l'hiver ' (') » (cf pièce n° 37 de DYAD) ;

Que dans son rapport de visite du 5 juin 2007, QUICK CUISINE a d'ailleurs conclu en ces termes (cf pièce n°21 de DYAD) : « la conclusion est que le lancement d'un nouveau produit sur tous les marchés prend toujours plus de temps qu'anticipé, surtout dans le cas de QUICK CUISINE où nous avons dû repartir de la case en dessous de zéro tenant compte des produits défectueux qui ont été fabriqués et livrés par BOCAGE », prestataire qui a précédé DYAD ;

Attendu que sur ce point précis, DYAD verse aux débats un document émanant de BOCAGE (cf sa pièce n°23, courriel du 27 juin 2007) dont il résulte en particulier que :

les systèmes auto-chauffants fonctionnaient correctement au sortir de l'usine, ce qu'un représentant de QUICK CUISINE avait pu constater,

les modèles de pièces du système avaient été fournis par QUICK CUISINE,

il avait été réclamé en vain un cahier des charges à QUICK CUISINE,

il avait été suggéré à QUICK CUISINE d'améliorer le système en confiant cela à un organisme technique, type bureau d'études,

QUICK CUISINE avait mis en cause BOCAGE dans le non-fonctionnement du produit auprès des clients, sans pour autant reconnaître la responsabilité de cette dernière au plan technique,

le changement de prestataire effectué au profit de DYAD coïncidait avec un changement de fournisseur de la barquette intérieure en aluminium, l'ancienne rendant le système moins étanche,

enfin, à l'époque où ce prestataire a collaboré avec QUICK CUISINE, des incertitudes existaient sur le concept proprement dit ' concernant le système de perçage et la colle ;

Que de surcroît, DYAD produit des courriels de son successeur, CONDITECH, établissant que de nouveaux dysfonctionnements sont survenus sur des produits une fois livrés, QUICK CUISINE ayant même indiqué à l'occasion de certaines livraisons problématiques : « Je ne doute pas que le problème est probablement dû au transport », puis, aux termes d'un courriel du 5 novembre 2008 : « Nul doute que ce problème provient des boudins d'eau » (cf pièces n° 16, 47 et 48 de DYAD) ;

Attendu, en troisième lieu, que s'agissant de la fiabilité du concept, la cour relève d'abord que c'est sans aucune preuve à l'appui qu'aux termes de son courrier du 23 mai 2007 (cf pièce n° 59 de DYAD) QUICK CUISINE ' qui remettait en cause DYAD sur ce point - affirmait péremptoirement qu'une fois apportée la modification qu'elle sollicitait (concernant la colle) : « je suis formel que le produit fonctionne parfaitement bien » ;

Qu'en effet, il est essentiel de souligner, d'une part, que le concept que QUICK CUISINE a choisi de commercialiser ' dont l'inventeur demeure inconnu - ne fait l'objet d'aucun brevet (cf pièce N° 34 de DYAD), et, surtout, que QUICK CUISINE n'a jamais offert de communiquer le moindre test préalable à la conclusion du contrat attestant la fiabilité de ce concept, ou spécifiant les précautions à prendre dans le cadre de sa fabrication ou de sa commercialisation ;

Que bien évidemment, le procès-verbal de constat établi à sa demande le 30 novembre 2009 (cf sa pièce n° 42) ne saurait faire la preuve de cette fiabilité « à rebours », cette pièce ayant été établie près de deux années après la cessation des relations contractuelles entre elle et DYAD, de surcroît sur la base de composants utilisés avec son nouveau prestataire dont il n'est aucunement établi qu'ils seraient rigoureusement identiques à ceux préconisés par QUICK CUISINE auprès de DYAD ; qu'au contraire, non seulement cette pièce mentionne l'emploi d'une colle (TERMELT 875 polyamide) qui ne correspond pas à celle que QUICK CUISINE s'est ingéniée à imposer à DYAD au début de l'année 2007, mais en outre, un constat d'huissier produit par DYAD elle-même tend à démontrer que la poche de liquide ' dont on ignore s'il s'agit également d'eau - est différente (cf sa pièce n°56) ;

Qu'à ce stade, la cour ne peut que relever que, bien que QUICK CUISINE soit censée avoir contracté de bonne foi, celle-ci n'allègue ni ne démontre avoir jamais avisé sa cocontractante DYAD, avant la conclusion du contrat, des incertitudes ou difficultés survenues lors de ses relations avec son précédent prestataire (BOCAGE), alors qu'elle lui a fait souscrire une obligation de résultat ;

Attendu, en quatrième lieu, que la cour relève que l'ensemble des dysfonctionnements reprochés par QUICK CUISINE, qui n'ont jamais porté que sur une partie des produits (30% selon son courriel du 15 juin 2007, pièce n°21 de DYAD), ont été constatés sur des produits ayant fait l'objet d'un transport, soit par camion, soit dans des containers par la voie maritime ;

Que de plus, QUICK CUISINE a reconnu que, lors d'un test aléatoire pratiqué dans l'usine de DYAD le 5 juin 2007, soit avant même leur transport, 100% des 60 produits testés avaient fonctionné correctement, ce qui corrobore les résultats positifs des tests réalisés quelques jours plus tard par l'huissier mandaté par DYAD au sein de ses locaux, le 26 juin 2007 (cf sa pièce n° 38) ;

Attendu, enfin, qu'il ressort de l'ensemble des pièces communiquées, essentiellement des courriels, qu'à chaque fois que DYAD a rencontré des difficultés, et dès que QUICK CUISINE lui a signalé les dysfonctionnements, DYAD a tenté d'y remédier ; qu'en particulier :

en mai 2006, QUICK CUISINE a reconnu que DYAD lui avait très justement recommandé un changement d'inscription de date sur les produits à destination des Etas-Unis (cf pièce n° 10 de DYAD) ; en juin 2006, DYAD a interrogé QUICK CUISINE sur les étiquettes reçues, les références à inscrire (cf pièces n° 11, 15, 16, 17 de DYAD), a fini par demander un tableau de correspondance Code-Pays compte tenu des imprécisions des commandes reçues (pièce n°18), a demandé ses instructions sur l'identification des caisses contenant les plats (cf pièce n° 12 de DYAD) ; en février 2007, elle était encore contraire de requérir des renseignements sur les GENCOD (cf pièce n°13 de DYAD) ;

ne recevant pas le doseur de chaux contractuellement promis par QUICK CUISINE, DYAD a fait diligence, à la demande de cette dernière, pour trouver un fabricant, sollicitant des devis, en attendant que sa cocontractante se décide à financer ce matériel (cf pièces n° 26, 27, 28, 29) ; il n'est au demeurant pas établi que QUICK CUISINE ait donné suite à ce projet ;

en février 2007, alors qu'elle venait d'être informée des dysfonctionnements, DYAD a tenté d'apporter des éléments de réponse (cf sa pièce n° 39), s'interrogeant notamment sur les berlingots et la nécessité d'établir un cahier des charges par pays et de les livrer par camion en température dirigée ' QUICK CUISINE ne justifie d'ailleurs pas avoir pris en considération ces suggestions ; DYAD indiquait également travailler « sur des solutions de collage » - alors que, ainsi qu'il a été précisé en préambule, les produits avaient donné satisfaction à sa cocontractante jusqu'à cette date ;

en mars 2007, après une visite d'un représentant de QUICK CUISINE sur les lieux, celui-ci a mis en cause le système de collage des éléments, et DYAD s'est soumis à ses exigences, alors qu'après une visite ultérieure du 5 juin 2007, un représentant de QUICK CUISINE revenait en partie sur les préconisations du mois de mars (cf pièces 2, 21 et 59 de DYAD) ;

compte tenu des accusations de QUICQ CUISINE, DYAD a, aux termes de son courriel du 1er juin 2007 (sa pièce n°2), rappelé que les problèmes existaient déjà du temps de son prédécesseur, et malgré tout tenté de trouver des explications aux dysfonctionnements (la chaux, la poche d'eau, la manipulation subie par le produit après sa sortie d'usine, la façon de déclencher le procédé de chauffage, notamment) ;

en juillet 2007, DYAD, qui avait entrepris de tester la production avec de nouvelles barquettes en feutre ainsi que QUICK CUISINE le lui demandait, informait sa cocontractante de l'insuccès de cette tentative ; par courriel du 3 août 2007, elle mettait en garde contre l'utilisation de cette barquette sans validation par une étude préalable (cf pièces n° 49 et 50 de DYAD) ;

Que ceci révèle le sérieux et la diligence dont a fait montre DYAD dans l'exécution du contrat et le suivi de la production afin de répondre aux attentes de QUICK CUISINE, allant, pour satisfaire cette dernière, jusqu'à tenter de trouver des causes et solutions techniques ne relevant manifestement pas de sa sphère de compétence, alors qu'elle n'y était contractuellement pas tenue ' l'obligation de conseil se limitant à son domaine professionnel qui est l'emballage, tel qu'indiqué précédemment ' et qu'elle n'était pas le concepteur du produit dont QUICK CUISINE a toujours affirmé la fiabilité ;

c) Sur les conséquences de ces constatations au regard des manquements contractuels invoqués :

Attendu, en premier lieu, que, s'agissant du manquement à l'obligation de résultat invoqué par QUICK CUISINE, la cour estime qu'il résulte des éléments ci-dessus exposés que :

- il n'est pas établi par QUICK CUISINE que les dysfonctionnements constatés soient en lien avec la prestation d'assemblage confiée à DYAD, dès lors qu'ils se sont révélés après le transport des marchandises ;

- surabondamment, il est démontré qu'à la date de la conclusion du contrat, le produit dont QUICK CUISINE a confié la fabrication à DYAD n'était pas finalisé, ne présentait pas un degré de fiabilité suffisant pour en garantir une commercialisation sans risque, et était soumis à un aléa sérieux lié au transport - ce que QUICK CUISINE savait pertinemment et a au demeurant admis au terme de son compte rendu de la visite du 5 juin 2007 en écrivant « Le risque zéro n'existe pas » (cf pièce n° 21 de DYAD) ; dès lors, DYAD rapporte la preuve de ce que les dysfonctionnements étaient manifestement inhérents au concept lui-même et donc la preuve d'une cause étrangère exonératoire de responsabilité ;

Attendu, en second lieu, qu'en considération des constatations ci-dessus et du contexte, QUICK CUISINE ne saurait reprocher à DYAD d'avoir manqué à son obligation contractuelle de conseil et d'assistance en n'attirant pas son l'attention sur des risques de non-conformité ou des défectuosités, ou encore en n'entreprenant aucune diligence pour améliorer un produit, alors que:

d'une part, elle a choisi de commercialiser ce produit sans s'assurer préalablement de sa fiabilité - faisant ainsi l'économie de coûts de recherches et développement,

d'autre part, elle avait parfaitement connaissance, dès l'origine du contrat, des dysfonctionnements ;

Que QUICK CUISINE ne saurait donc reporter sur son cocontractant le risque lié à sa politique délibérée, sous couvert de l' obligation de résultat insérée au contrat - et dont les contours ont été délimités en préambule (cf § a) ;

Attendu qu'en conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté QUICK CUISINE de l'intégralité de ses demandes ;

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Attendu que, succombant en son recours, QUICK CUISINE sera condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à DYAD une indemnité procédurale complémentaire, en application de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'elle sera à l'inverse déboutée de sa propre demande à ce titre ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

- CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Y ajoutant,

- CONDAMNE QUICK CUISINE AG à payer à la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- DEBOUTE QUICK CUISINE AG de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE QUICK CUISINE AG aux dépens d'appel et AUTORISE la S.C.P. DRAGON et BIERNACKI à recouvrer directement ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

M.M. HAINAUTP. FONTAINE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 2
Numéro d'arrêt : 13/04935
Date de la décision : 02/04/2015

Références :

Cour d'appel de Douai 22, arrêt n°13/04935 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-04-02;13.04935 ?
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