La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/03/2015 | FRANCE | N°14/04371

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 12 mars 2015, 14/04371


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 12/03/2015

***

N° MINUTE :

N° RG : 14/04371

Jugement (N° 13/000192)

rendu le 17 Avril 2014

par le Tribunal d'Instance de Cambrai

REF : BP/VC

APPELANTE



SARL H2R ENERGIES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social : [Adresse 1]

Représentée par Me Virginie VAN CEUNEBROEKE, avocat au barreau de DOUAIr>
Assistée de Me Joseph SUISSA, avocat au barreau de PARIS



INTIMÉS



Monsieur [L] [T]

né le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 1] - de nationalité Française

de...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 12/03/2015

***

N° MINUTE :

N° RG : 14/04371

Jugement (N° 13/000192)

rendu le 17 Avril 2014

par le Tribunal d'Instance de Cambrai

REF : BP/VC

APPELANTE

SARL H2R ENERGIES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social : [Adresse 1]

Représentée par Me Virginie VAN CEUNEBROEKE, avocat au barreau de DOUAI

Assistée de Me Joseph SUISSA, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS

Monsieur [L] [T]

né le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 1] - de nationalité Française

demeurant : [Adresse 2]

Représenté par Me Jean-Pascal DUFFROY, avocat au barreau de CAMBRAI

Mademoiselle [X] [U]

née le [Date naissance 2] 1985 à [Localité 2] - de nationalité Française

demeurant : [Adresse 2]

Représentée par Me Jean-Pascal DUFFROY, avocat au barreau de CAMBRAI

SA FRANFINANCE

ayant son siège social : [Adresse 3]

Représentée par Me Christophe DOUTRIAUX, avocat au barreau de VALENCIENNES

DÉBATS à l'audience publique du 03 Février 2015 tenue par Benoît PETY magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pierre CHARBONNIER, Président de chambre

Benoît PETY, Conseiller

Hélène BILLIERES, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 Mars 2015 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Annie DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

*****

Exposé du litige, de la procédure et des prétentions des parties 

Monsieur [L] [T] et Madame [X] [U] ont passé commande le 20 avril 2012 auprès de la S.A.R.L. H2R ENERGIES de la livraison et de l'installation d'une pompe à chaleur, d'un chauffe-eau, d'une box-3e et d'un sèche-serviettes pour salle de bains pour un montant global de 20.500 euros.

Suivant offre préalable acceptée le même jour, la S.A. FRANFINANCE leur a accordé un crédit affecté de 20.500 euros au taux de 6,69 % l'an remboursable en 180 mensualités successives.

Par exploits du 19 avril 2013, Monsieur [T] et Madame [U] ont fait assigner la S.A.R.L. H2R ENERGIES ainsi que la S.A. FRANFINANCE devant le tribunal d'instance de CAMBRAI aux fins notamment de voir annuler la vente et le contrat de crédit sur le fondement des dispositions des articles L. 121-23 et L. 311-32 du Code de la consommation, subsidiairement au visa des articles 1184 du Code civil et de l'article L. 311-32 du Code de la consommation.

Par exploit du 7 mai 2013, ils faisaient assigner la société FRANFINANCE devant le juge des référés au tribunal d'instance de CAMBRAI aux fins de voir suspendre l'exécution du contrat de crédit jusqu'à la solution du litige les opposant à la société H2R ENERGIES. Par ordonnance du 29 août 2013, il a été fait droit à leur demande de suspension.

Par jugement du 17 avril 2014, le tribunal d'instance de CAMBRAI a notamment :

annulé le contrat de vente conclu le 24 avril 2012 entre Monsieur [T], Madame [U] et la S.A.R.L. H2R ENERGIES,

annulé en conséquence le contrat de crédit affecté conclu le même jour entre Monsieur [T], Madame [U] et la S.A. FRANFINANCE,

débouté la société FRANFINANCE de sa demande de remboursement des sommes versées en exécution du contrat de crédit du 20 avril 2012,

condamné la S.A. FRANFINANCE à payer à Monsieur [T] et à Madame [U] la somme de 580,04 euros outre les intérêts au taux légal à compter du jugement,

condamné la S.A.R.L. H2R ENERGIES à payer à Monsieur [T] et à Madame [U] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts outre les intérêts au taux légal à compter du jugement,

condamné in solidum la S.A.R.L. H2R ENERGIES et la S.A. FRANFINANCE à verser à Monsieur [T] et à Madame [U] une indemnité de procédure de 1.500 euros,

rejeté les prétentions des deux personnes morales sur le fondement de

l'article 700 du Code de procédure civile.

La S.A.R.L. H2R ENERGIES a interjeté appel de ce jugement. Elle demande à la cour de débouter Monsieur [T] et Madame [U] de toutes leurs demandes, de dire la vente valable, de rejeter les conclusions du constat d'huissier de Maître [Y] comme non contradictoires, de dire que si une expertise venait à être réalisée, elle serait intégralement mise à la charge de Monsieur [T] et de Madame [U], enfin de condamner ces derniers à lui verser une indemnité de procédure de 1.500 euros.

La personne morale venderesse expose que le matériel commandé par Monsieur [T] et Madame [U] a été livré comme convenu le 20 mai 2012 et installé courant juin 2012. Mais ces derniers allèguent de graves malfaçons.

La société appelante réfute dans un premier temps les manquements aux dispositions des articles L. 121-23 et suivants du Code de la consommation en ce que le bon de commande est en tout conforme aux exigences légales, celui-ci mentionnant notamment le prix d'acquisition et la désignation des biens acquis. Quant au formulaire de rétractation, il n'est obligatoire que depuis l'entrée en vigueur de la loi du 17 mars 2014 (dite « loi HAMON »). Les acquéreurs ne peuvent donc se prévaloir de l'absence de bordereau de rétractation pour un contrat conclu le 20 avril 2012.

Par ailleurs, la société H2R ENERGIES rappelle que la livraison et l'installation du matériel ont donné lieu à l'émission d'un procès-verbal de réception signé sans aucune réserve par Monsieur [T] et Madame [U], ce document faisant état d'une livraison le 20 mai 2012 et d'une installation le lendemain, ce qui en soit n'est pas impossible comme ils l'affirment à tort et de mauvaise foi.

Si ces derniers produisent le procès-verbal dressé le 13 juillet 2013 par Maître [Y], huissier de justice, la société H2R ENERGIES rétorque qu'elle n'a pas été conviée aux constatations de cet officier ministériel dont le procès-verbal n'est pas contradictoire. L'huissier n'a donc pris en compte que les observations des acquéreurs, lesquels avaient pris soin d'écrire au vendeur pour lui soumettre une réclamation, ce qui avait suggéré dès le 8 octobre 2012 l'intervention d'un technicien. Après cette intervention, la société H2R ENERGIES a écrit à Monsieur [T] et à Madame [U] pour leur confirmer une liste de travaux mineurs à effectuer, travaux n'affectant ni la solidité ni l'usage du matériel installé. Le vendeur a donc toujours pris soin d'informer ses clients en temps et heure de l'évolution de l'exécution du contrat.

Pour ce qui relève de la demande subsidiaire des consorts [T]-[U] aux fins de résolution du contrat, la S.A.R.L. H2R ENERGIES répond sur le crédit d'impôt que l'administration fiscale est ici souveraine pour l'accorder ou non de sorte qu'aucun grief ne peut être fait au vendeur si les acquéreurs n'ont finalement pas pu en bénéficier. La société venderesse ajoute qu'il ne résulte d'aucun document contractuel qu'elle doive prendre à sa charge douze mensualités du crédit affecté. En outre, c'est dans le cadre des travaux restant à réaliser qu'elle a prévu d'installer un sèche-serviettes et une box électrique. Enfin, les malfaçons alléguées par les acquéreurs ne sont pas recevables dans la mesure où elles n'ont pas été l'objet d'une expertise contradictoire.

A titre infiniment subsidiaire, la société H2R ENERGIES n'entend pas s'opposer à la demande d'expertise des consorts [T]-[U] à la condition cependant que les frais afférents à cette mesure soient mis à leur charge.

***

La S.A. FRANFINANCE, par des écritures signifiées le 24 novembre 2014, sollicite de la juridiction du second degré qu'elle déboute Monsieur [L] [T] et Madame [X] [U] de l'ensemble de leurs demandes, les condamne au remboursement des fonds prêtés ainsi qu'au versement d'une indemnité de procédure de 2.000 euros. A titre très subsidiaire, elle demande à la cour de condamner la S.A.R.L. H2R ENERGIES au remboursement des sommes prêtées et à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre, sans préjudice d'une indemnité de procédure de 2.000 euros.

La société de crédit expose qu'elle n'entend pas participer au débat relatif à la résolution éventuelle de la vente, son propos se concentrant donc sur la nullité du contrat principal et celle du crédit. Elle rappelle qu'il ne lui est reproché aucune faute en l'occurrence au titre de la remise des fonds au vendeur de sorte qu'en cas d'annulation de la vente et du crédit, les deux emprunteurs doivent être condamnés à lui rembourser les fonds prêtés, ce qui revient à poursuivre le remboursement des mensualités d'emprunt alors même qu'ils n'ont pas reçu la marchandise livrée. La banque s'est engagée en l'espèce au vu d'un bon de commande en bonne et due forme signé le 20 avril 2012. Ce bon précisait que la livraison du bien financé était prévue le 7 mai 2012. Le 21 mai 2012, elle s'est vu remettre une attestation de livraison conforme au bon de commande, signée par l'emprunteur, la déterminant à débloquer les fonds au profit du vendeur. Aucune anomalie ne pouvait dans ces conditions être détectée. Ce n'est qu'en cours de procédure qu'elle a appris que l'installation du matériel livré le 20 mai 2012 (et non 2014 comme indiqué dans les écritures du prêteur) n'avait été effective qu'en juin2012. Le déblocage prématuré des fonds n'est donc pas de son fait. Quant à la question de l'endettement excessif des emprunteurs, il n'y a pas de corrélation entre cette circonstance et le déblocage prétendument fautif des fonds si bien que la banque ne peut être privée de son droit à être remboursée du capital prêté. En toute hypothèse, les emprunteurs ont déclaré percevoir 2.833 euros par mois, précisant que Madame [U] était en arrêt-maladie, de sorte qu'en l'état de leurs charges déclarées, ils avaient une capacité d'endettement certaine. Si une faute devait par impossible être retenue contre la banque, le vendeur devrait alors être condamné à lui rembourser les sommes prêtées, les errements de ce dernier étant à l'origine du déblocage prématuré des fonds.

La S.A. FRANFINANCE a signifié de nouvelles conclusions le 19 janvier 2015, c'est-à-dire postérieurement à l'ordonnance de clôture rendue le 15 janvier 2015, la société H2R ENERGIES en ayant sollicité le rejet.

***

Monsieur [L] [T] et Madame [X] [U] concluent à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf à fixer à 10.000 euros le montant des dommages et intérêts que la société H2R ENERGIES devra leurs régler. A titre subsidiaire, ils demandent à la cour de prononcer la résolution de la vente au visa de l'article 1184 du Code civil et en conséquence celle du contrat de crédit affecté, de condamner la société FRANFINANCE à leur rembourser les sommes qu'ils lui ont réglées pour 590,04 euros, le prêteur devant être débouté de sa propre demande de remboursement des fonds mis à disposition. A titre infiniment subsidiaire, ils sollicitent l'organisation d'une mesure d'expertise aux frais avancés de la société H2R ENERGIES. Ils forment en toute hypothèse une demande d'indemnisation de leurs frais irrépétibles exposés en cause d'appel à concurrence de 2.000 euros.

Les consorts [T]-[U] énoncent qu'un bon de commande a été signé le 20 avril 2012 après l'établissement le même jour de deux devis, ce bon ne faisant pas référence au prix unitaire des différents matériels, la box électrique n'étant plus offerte, un financement par FRANFINANCE étant prévu à raison de 180 mensualités de 207,88 euros chacune au TAEG de

6,90 % avec une date de livraison prévue au 7 mai 2012. Il est encore précisé que ce bon de commande n'a pas été remis à Monsieur [T] qui ne le recevra que plus tard. Le 20 avril 2012, lui-même et Madame [U] signaient avec FRANFINANCE un contrat de crédit affecté à la vente d'une pompe à chaleur air/air et d'un ballon thermodynamique pour un montant de 20.500 euros remboursable en six mensualités à 0 euro, 12 mensualités de 42 euros chacune puis 162 mensualités de 207,88 euros chacune. Ils précisent que les 12 mensualités à 42 euros avec assurance étaient censées être prises en charge par H2R ENERGIES. Elles ont toutefois été prélevées sur le compte des emprunteurs dès décembre 2012. Le matériel a été livré le 20 mai 2012 mais installé courant juin 2012. La société H2R ENERGIES a émis une première facture le 21 mai 2012 pour un montant de 20.500 euros en faisant apparaître le ballon d'eau chaude pour 5.620 euros. En présence de désordres importants, les acquéreurs adressaient une réclamation au vendeur qui leur annonçait le 8 octobre 2012 son intervention. La société H2R ENERGIES reconnaissait par courrier du 22 octobre 2012 que des travaux restaient à réaliser, un avoir annulant la précédente facture devant être joint à ce pli mais Monsieur [T] et Madame [U] disent ne l'avoir jamais reçu. La nouvelle facture du 17 octobre 2012 faisait apparaître le chauffe-eau pour un prix de 11.000 euros au lieu de 5.620. Il était précisé que le crédit d'impôt pour la pompe à chaleur était supprimé. En l'état de graves malfaçons, les acquéreurs requéraient Maître [Y], huissier de justice, pour les faire constater le 15 janvier 2013. Le procès-verbal de constat est à cet égard explicite, avec pour résultat d'un travail bâclé, une consommation d'électricité et d'eau importante et une chaleur réduite, ce qui est le contraire du résultat recherché.

Les consorts [T]-[U] maintiennent d'un point de vue juridique que le bon de commande n'est pas conforme aux exigences de l'article L. 121-23 du Code de la consommation, ce document ne faisant pas référence au prix de chaque élément vendu. Il ne comprend pas non plus de bordereau de rétractation. Les conditions de l'annulation de ce bon sont ainsi réunies. Ils ajoutent à titre subsidiaire que les conditions de la résolution sont aussi réunies : le vendeur savait pertinemment que le crédit d'impôt avait été supprimé dès 2009 et il avait été convenu qu'il prendrait à sa charge les 12 premières mensualités. Il y a ici manifestement tromperie de la part de la société H2R ENERGIES. Ils ajoutent que le sèche-serviettes et la box électrique n'ont pas été livrés alors qu'ils étaient offerts. Quant aux malfaçons constatées par l'huissier de justice, il ne s'agit pas de vices mineurs. Le soit disant procès-verbal de livraison produit en première instance par le vendeur ne mentionne même pas la pompe à chaleur. Le montage ne pouvait être achevé le 21 mai 2012, lendemain de la livraison. Leur préjudice s'est encore aggravé car ils ont dû faire l'acquisition d'un poêle à granulés pour l'hiver. Leur consommation électrique a fortement augmenté. Tout justifie des dommages et intérêts à concurrence de 10.000 euros, ce qui indemnisera autant leur préjudice moral.

***

Motifs de la décision 

Sur le sort des écritures signifiées le 19 janvier 2015 par la S.A. FRANFINANCE 

Attendu qu'il résulte des pièces de procédure que la société FRANFINANCE a signifié des écritures le 19 janvier 2015, soit quatre jours après l'ordonnance de clôture, alors qu'il résulte de la consultation du R.P.V.A. que chaque conseil constitué en la cause a été rendu destinataire de l'information relative à la clôture de l'instruction du dossier à la date du 15 janvier 2015 ;

Que la société FRANFINANCE ne sollicitant pas par ailleurs la révocation de l'ordonnance de clôture, ses écritures du 19 janvier 2015 sont forcément tardives et doivent être écartées des débats ;

Sur la nullité du contrat de vente et celle subséquente du contrat de crédit 

Attendu que le premier juge a annulé le contrat de vente au motif que le formalisme de cet acte établi dans le cadre d'un démarchage à domicile n'était pas conforme aux dispositions des articles L. 121-23 et L. 121-24 du Code de la consommation ;

Que la lecture de la pièce n°3 transmise par les consorts [T]-[U], pièce qui s'apparente au seul bon de commande en bonne et due forme communiqué par les acquéreurs en date du 20 avril 2012 enseigne que si le préposé de la société H2R ENERGIES a bien détaillé les équipements objet de la transaction, la pose et la mise en fonctionnement étant incluses dans cette livraison, force est d'observer que ne figure sur ce document qu'un prix global T.T.C. de 20.500 euros ;

Que si l'article L. 121-23 du Code de la consommation vise effectivement « le prix global à payer », cela s'entend forcément des équipements associés à une même opération comme il en va de l'installation d'une pompe à chaleur, ce qui ne pouvait dispenser le vendeur d'indiquer de manière distincte le coût du ballon thermodynamique, de la Box-3e, qui plus est du sèche-serviettes pour la salle de bains ;

Qu'en omettant en outre de spécifier le prix unitaire de ces appareils, la société H2R ENERGIES n'a pas permis aux acquéreurs de procéder utilement à des comparaisons tarifaires dans le délai légal de rétractation ;

Qu'en outre, en imprimant de manière non détachable directement au pied du verso du bon de commande la formule de rétractation, la société venderesse a neutralisé toute faculté pour les acquéreurs d'user de leur faculté de se rétracter sauf à amputer par voie de découpage le corps du contrat de vente, la date, le lieu de conclusion du contrat ainsi que la signature de l'acheteur apparaissant au recto et à hauteur de la formule de rétractation ;

Que, dans ces conditions, étant précisé que le contrat doit à peine de nullité comprendre un formulaire de rétractation conformément à la législation en vigueur avant même la loi dite « HAMON », c'est à raison que le premier juge a fait droit à la demande des acquéreurs aux fins d'annulation de la vente, ce qui, de fait, engendre l'annulation de plein droit du crédit affecté au visa des dispositions de l'article L. 311-32 alinéa 2 du Code de la consommation ;

Que la décision entreprise doit donc être confirmée de ces chefs ;

Sur les conséquences de l'annulation de la vente et du crédit affecté 

Attendu que la conséquence essentielle de l'annulation d'un contrat consiste à rétablir rétroactivement chaque partie contractante dans la situation qui était la sienne avant même la conclusion de l'acte sanctionné ;

Que, relativement au contrat de vente conclu entre les consorts [T]-[U] et la S.A.R.L. H2R ENERGIES, cette dernière est en droit d'exiger la restitution des équipements vendus, ce qu'elle ne fait pas aux termes de ses écritures de sorte qu'il suffira de mentionner dans le dispositif de la présente décision que les parties feront leur affaire personnelle de cet aspect des conséquences de l'annulation du contrat;

Qu'en ce qui concerne le contrat de crédit, le prêteur est fondé à réclamer la restitution des fonds aux emprunteurs, c'est-à-dire le capital de 20.500 euros, les emprunteurs pouvant pour leur part réclamer la restitution des sommes versées au titre du remboursement du crédit ;

Qu'il faut en effet constater, en l'état des documents versés aux débats, que la société FRANFINANCE a versé directement les fonds empruntés entre les mains de la S.A.R.L. H2R ENERGIES au vu d'une attestation de réception sans réserve des équipements signée par Monsieur [L] [T] lui-même ;

Que si ce dernier et Madame [X] [U] affirment que les prestations dues par la société H2R ENERGIES n'étaient aucunement achevées le 21 mai 2012, date de ladite attestation, cette circonstance n'est pas de nature à caractériser de la part du prêteur une quelconque faute au titre des conditions du versement des fonds empruntés ;

Qu'outre l'interrogation qu'engendre le document querellé quant aux raisons pour lesquelles Monsieur [T] a cru utile de signer cette attestation si l'installation n'était effectivement pas complètement achevée, il ne peut être exigé de l'établissement prêteur un contrôle in situ des équipements livrés ;

Que le contrôle auquel l'établissement de crédit ou la banque doit se prêter s'entend forcément d'un contrôle sur pièces, plus spécifiquement de l'attestation de livraison ou de la demande de financement qui doit être signée de l'emprunteur, ce qui est bien l'occurrence en l'espèce ;

Que la circonstance que les équipements commandés aient été livrés le 20 mai 2012 et que l'installation ait été montée pour le lendemain n'est pas en soi objectivement réputée impossible puisqu'il n'est pas précisé le nombre de techniciens chargés d'assurer l'opération de montage ni justifié que les travaux auraient en leur intégralité été réalisés sur une seule journée, ce qui pouvait être entamé le même jour que la livraison ;

Qu'en conséquence, aucune faute ne peut à ce titre être opposée à la société FRANFINANCE, pas plus qu'elle serait fautive d'avoir accordé le financement aux consorts [T]-[U] dans des proportions disproportionnées à leurs revenus et charges, la fiche de dialogue faisant apparaître un revenu disponible de Monsieur [T] de 1.340 euros (le revenu de Madame [U] n'est pas pris en considération compte tenu de son arrêt de travail), soit pour une mensualité de 231,44 euros un taux d'endettement de 17,27 %, ce qui demeure bien inférieur au seuil critique communément arrêté à 33 % ;

Que le jugement dont appel sera en conséquence réformé en ce qu'il a débouté la société FRANFINANCE de sa demande de remboursement des sommes prêtées mais confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande des emprunteurs aux fins de restitution des mensualités réglées ;

Sur les dommages et intérêts sollicités par les consorts [T]-[U] 

Attendu, sur la demande de dommages et intérêts dirigée par Monsieur [T] et Madame [U] contre la société venderesse, qu'il faut faire le constat à la lecture du courrier du 22 octobre 2012 adressé par la société H2R ENERGIES aux consorts [T]-[U] que le vendeur entendait par cette lettre confirmer « la liste des travaux restant à réaliser à leur domicile », la société prestataire mentionnant même en jonction à son pli un avoir annulant la précédente facture d'achat, ce qui caractérise l'aveu par cette personne morale du caractère inachevé de l'installation ;

Qu'il est donc fautif pour la société H2R ENERGIES d'avoir soumis dans ces conditions en mai 2012 à Monsieur [T] un procès-verbal de livraison des équipements, ce qui ne peut par définition être le cas mais lui a permis d'obtenir le financement de la société FRANFINANCE ;

Que le préjudice ainsi subi par Monsieur [T] et Madame [U] est ainsi d'abord de nature financière puisqu'il leur faut aujourd'hui rembourser l'établissement prêteur sans pouvoir disposer d'un équipement conforme et surtout efficace, équipement qui est voué à être restitué au vendeur ;

Qu'il s'ensuit une perte d'économies d'énergie que l'installation était réputée leur procurer, sans compter les moyens temporaires que les consorts [T]-[U] ont dû acquérir pour se chauffer et les tracasseries de tous ordres engendrées par les multiples démarches aux fins d'être dotés d'un système performant ;

Que le non-respect du formalisme du contrat de vente par la société H2R ENERGIES a également privé les consorts [T]-[U] de toute possibilité de comparaison utile des prestations du vendeur avec celles d'autres concurrents en vue d'une satisfaction effective ;

Qu'en conséquence, la somme indemnitaire de 5.000 euros arrêtée par le premier juge constitue une réparation à sa juste mesure des préjudices éprouvés par les acquéreurs, le jugement déféré étant sur cette question confirmé ;

Sur les frais irrépétibles 

Attendu que si l'équité justifie l'indemnité de procédure arrêtée en faveur des consorts [T]-[U] à l'encontre de la société H2R ENERGIES, il ne peut en aller de même de la condamnation solidaire au paiement de cette même indemnité prononcée contre la société FRANFINANCE, les demandeurs étant ainsi déboutés de leur prétention dirigée contre l'établissement financier et la décision querellée réformée de ce chef ;

Que cette considération ne commande en cause d'appel de faire droit qu'aux prétentions indemnitaires de la S.A. FRANFINANCE, les consorts [T]-[U] étant solidairement condamnés à lui verser une somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, les autres parties étant déboutées de leurs prétentions à cette fin ;

***

PAR CES MOTIFS ;

Statuant publiquement et contradictoirement ;

Ecarte des débats comme postérieures à l'ordonnance de clôture les écritures signifiées le 19 janvier 2015 par la S.A. FRANFINANCE ;

Infirme le jugement déféré en ses dispositions relatives à la demande de remboursement de la société FRANFINANCE, aux frais irrépétibles et aux dépens ;

Prononçant à nouveau de ces chefs,

Condamne solidairement Monsieur [L] [T] et Madame [X] [U] à rembourser à la S.A. FRANFINANCE la somme 20.500 euros au titre du capital du crédit annulé ;

Condamne la S.A.R.L. H2R ENERGIES à verser en première instance à Monsieur [T] et à Madame [U] une indemnité de procédure de 1.500 euros, ces derniers étant déboutés de leur demande indemnitaire à l'encontre de la S.A. FRANFINANCE ;

Condamne la société H2R ENERGIES aux entiers dépens de première instance ;

Pour le surplus,

Confirme en ses plus amples dispositions la décision entreprise ;

Y ajoutant,

Dit que les consorts [T]-[U] et la S.A.R.L. H2R ENERGIES feront leur affaire personnelle du sort des équipements livrées ;

Condamne solidairement Monsieur [L] [T] ainsi que Madame [X] [U] à verser en cause d'appel à la S.A. FRANFINANCE une indemnité de procédure de 800 euros, les débiteurs de cette somme ainsi que la société H2R ENERGIES étant déboutées de leurs propres prétentions indemnitaires à cette même fin ;

Condamne solidairement la société H2R ENERGIES ainsi que Monsieur [T] et Madame [U] aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

A. DESBUISSONSP. CHARBONNIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 1
Numéro d'arrêt : 14/04371
Date de la décision : 12/03/2015

Références :

Cour d'appel de Douai 81, arrêt n°14/04371 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-03-12;14.04371 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award